La vision ambitieuse d'une centrale nucléaire à petite échelle aux États-Unis s'est effondrée avec l'annulation du projet Carbon Free Power Project (CFPP), plombé par la question financière. De quoi remettre en cause l'avenir de l'énergie propre chez l'Oncle Sam, et même en Europe ?
Les Américains s'étaient pris à rêver du retour de l'énergie nucléaire bon marché et à petite échelle. Le rêve a été anéanti avec l'abandon du projet CFPP, pourtant porté par un concept novateur de petits réacteurs modulaires (SMR) de 2,7 mètres de diamètre. L'initiative a pris fin en raison de l'incapacité à attirer suffisamment de clients pour acheter l'électricité. Un échec lié à une histoire d'argent – comme souvent – qui soulève des questions sur la viabilité des SMR comme alternative énergétique.
Un ambition projet de petits réacteurs nucléaires, qui devait faire renouer les USA avec le nucléaire
En 2015, le projet SMR, mené par la société basée à Portland, NuScale, au nom de services publics de l'État de l'Utah, pour commencer, avait captivé les esprits. La promesse de réacteurs nucléaires miniatures capable de produire 77 mégawatts d'électricité était belle, même si la réalité a frappé cette semaine. La conception des petits réacteurs devait redynamiser l'industrie nucléaire locale, avec une mise en service prévue en 2030.
Depuis le début du siècle, les États-Unis n'ont fait sortir de terre que deux réacteurs. Abandonnés, ces SMR, au nom de code « Voygr », étaient censés diviser les coûts de production, mais les investisseurs ont perdu confiance, ce qui a précipité la mort du projet CFPP.
Les défis financiers ont hanté le projet depuis la fin de l'année dernière. Celui-ci faisait face à une lourde augmentation des coûts estimés, de l'ordre de 50 % (passant de 58 dollars par MWh à 89 dollars), ce qui a effrayé les services publics locaux. Les engagements d'achat d'électricité produite par le réacteur ne couvraient que 25 % de la production prévue, ce qui nécessitait une augmentation à 80% d'ici la fin de l'année pour garantir la viabilité. Les municipalités, initialement enthousiastes, ont alors été déçues, commençant même à perdre espoir.
Des sommes colossales gâchées, et l'avenir de l'énergie décarbonée loin d'être assuré
Dans l'État du Nouveau-Mexique, à Los Alamos, on voyait aussi le projet comme une solution de décarbonisation. C'est désormais l'incertitude qui domine. Les habitants sont pourtant inquiets de la transition vers des sources d'énergie propres en l'absence de la centrale nucléaire.
Bien que le projet CFPP ait échoué, NuScale, concepteur du réacteur Voygr, reste optimiste. Son PDG, John Hopkins, n'en démord pas et qualifie le projet d'« énorme succès », en raison des progrès réglementaires effectués. NuScale reste en avance sur ses concurrents avec son approbation de conception émise par l'autorité américaine du nucléaire. L'entreprise vise toujours à rendre opérationnelles ses usines d'ici le milieu des années 2030.
Les sceptiques, soulignant les coûts croissants (sans parler du financement de 1,4 milliard de dollars sur 10 ans qui avait été alloué par des fonds privés et fédéraux), appellent à une transition vers des sources d'énergie plus fiables. NuScale défend les SMR comme la voie à suivre pour une énergie sans carbone abordable. Mais alors que le projet CFPP a pris fin prématurément, le débat sur la viabilité des SMR persiste, mettant en lumière la nécessité de solutions énergétiques robustes pour atteindre des objectifs durables.
NuScale a aussi un projet de SMR en Europe, en Roumanie. L'entreprise ambitionne d'y bâtir 6 modules sur le site d'une centrale à charbon qui devrait être mise à la retraite. Elle vise également la Pologne, l'Ukraine et le Kazakhstan. Le Japon, la Corée du Sud et les Émirats arabes unis auraient aussi pris des engagements avec l'entreprise américaine.
Source : Wired