Google Wave : un service en ligne nouvelle vague ?

Stéphane Ruscher
Par Stéphane Ruscher, Spécialiste informatique.
Publié le 19 novembre 2009 à 17h25
Dernier né dans une offre déjà bien fournie de services web, Google Wave promet tout simplement de révolutionner la communication et le travail collaboratif entre les utilisateurs. Alors que le service n'est pas encore déployé à grande échelle, nous avons fait le tour de Google Wave. Vraie révolution ou coup de bluff ? Voyons cela de plus près...

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On ne peut pas dire que Google ait chômé ces dernières années : Android, Chrome, le passage (enfin !) de Gmail en version finale et de nouvelles versions des améliorations apportées aux services existants comme Google Document ou Google Talk. Le dernier né des services est le fruit des développeurs de Google Maps et se nomme Google Wave. Comment le définir ? Pour résumer, on pourrait le voir comme un croisement entre Gmail, Google Talk et Google Documents : un outil qui servirait à la fois de moyen de communication différé, de communication en direct et de travail collaboratif sur des documents.

Comment fonctionne Google Wave ? Comme son nom l'indique, le service est basé sur une brique de départ, la « wave » qui peut être un document texte ou un message. Sur cette « vague », d'autres utilisateurs peuvent se greffer pour répondre, éditer, ajouter du contenu ou encore discuter en direct. Disposant d'une interface utilisant abondamment HTML5, et associée à des API d'intégration du contenu Google Wave dans d'autres services, Google Wave est promis à un bel avenir, mais s'attaque peut être à des habitudes bien établies telles que l'échange de mails ou le travail collaboratif sur des logiciels dédiés. Arrivera-t-il à fusionner tout cela de manière harmonieuse ? Nous vous proposons un tour d'horizon du service, à travers son interface, ses possibilités et les quelques extensions actuellement disponibles.

Comment accéder à Google Wave ?

Pour tester Google Wave, deux conditions sont nécessaire : disposer d'un compte Google et... être invité ! En effet, à l'heure où nous écrivons ces lignes, Google Wave n'est pas encore disponible à grande échelle. Il est possible d'envoyer une demande d'invitation à Google, mais les délais semblent être assez longs : nous avons lancé une demande il y a plus de deux semaines sans obtenir de réponse. En revanche, il vous reste toujours la possibilité de demander une invitation à des utilisateurs qui en disposent déjà. Dans ce cas, Google semble avoir accéléré la cadence et il n'est pas impossible que votre compte soit activé pour Google Wave dans la journée même.

Google Wave : tour de l'interface

L'interface de Google Wave se démarque de la plupart des services Google, dont elle conserve la sobriété, marque de fabrique de la société de Mountain View. En revanche, elle fait appel à des technologies plus poussées que des services comme Gmail ou Google Agenda, et notamment HTML5, ce qui rend Google Wave incompatible avec les versions actuelles d'Internet Explorer ou Opera. Pour utiliser Google Wave avec IE, vous pourrez néanmoins passer par le plug-in Chrome Frame, qui remplace le moteur de rendu du navigateur de Microsoft par celui de Google Chrome. Sous Firefox, pas de problème à constater mais certaines parties du service nécessiteront tout de même l'installation de l'extension Google Gears.

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Une fois démarré, Google Wave dévoile ainsi une interface à base de panneaux qui rappellent une application desktop. Ceux-ci peuvent être réduits sous forme de boutons au sommet de la fenêtre de navigation, mais restent fonctionnels : en cliquant sur la petite flèche qui accompagne les boutons, vous pouvez afficher une version réduite du panneau dans laquelle vous pouvez continuer à travailler. Le panneau d'affichage du contenu des messages peut également être maximisé.

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Le service se distingue également par ses barres de défilement qui divisent déjà les utilisateurs. La première raison est la présence même de barres de défilement personnalisées dans une application web. Mais surtout, ces ascenseurs sont d'un genre particulier : ils intègrent à leur extrémité les boutons de défilement vers le haut ou vers le bas. Le principe est ingénieux mais déroutant : en cliquant sur ces boutons, l'ascenseur reste à sa place mais un ascenseur fantôme se déplace et fait défiler le document. Relachez l'ascenseur et celui-ci vient rejoindre son « fantôme ». De même, quelle que soit la taille de la zone de défilement, l'ascenseur conserve la même taille : il est arrêté dans sa course par une sorte de « cale » virtuelle, visible à l'écran ! Original, certes, mais est-ce réellement efficace ? Google justifie ces choix par le confort que cela apporterait aux utilisateurs de netbooks, dont le trackpad réduit limite les possibilités de mouvement.

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Google Wave : entre mail et messagerie instantanée

Comment décrire Google Wave ? Comme pour Twitter, un petit retour en arrière s'impose : bien que complètement différent du service de microblogging dans ses intentions comme dans son fonctionnement, Google Wave vient en effet combler un espace vacant entre la messagerie instantanée et le courrier électronique. Les deux modes de communication n'ont rien de nouveau. Comme les développeurs de Google Wave se plaisent à le rappeler, le mail a plus de 40 ans et il n'a que peu évolué par rapport à sa forme initiale. Le principe est toujours le même : envoyer un message électronique sur un serveur qui distribue le courrier à son destinataire lorsqu'il consulte sa boite. À l'inverse, la messagerie instantanée est un mode de communication direct entre deux utilisateurs connectés au même moment.

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Mais plutôt que d'inventer une nouvelle forme de communication que se situe entre le direct et le différé, Google Wave tente de fusionner les deux modes. En quelque sorte, Google avait déjà commencé le travail avec Gmail en instaurant, par défaut, la présentation d'une conversation sous forme de fil de discussion. Les habitués du webmail le savent : une fois qu'on y a goûté, il devient très naturel de transformer un échange de mail en un vrai « chat » improvisé. Néanmoins, cette présentation reste une simple disposition visuelle des messages. Google Wave reprend l'affichage d'un échange sous forme de conversation, mais ajoute plusieurs fonctionnalités qui différencient le service d'un échange de mails classiques.

La brique de base : la Wave (vague)

À première vue, l'interface de Google Wave ressemble à s'y méprendre à celle d'un client mail. Répartis sur les différents panneaux, on trouve une liste de dossiers comprenant notamment une boite de réception, une boite de spam et une corbeille, une liste de contacts, une liste de messages et un panneau affichant le contenu du message sélectionné. A ceci près qu'il ne s'agit pas de messages mais de « vagues » (wave), le composant de base de Google Wave. Qu'est ce qu'une wave ? A priori, ça peut être n'importe quoi : il s'agit d'un bloc de texte enrichi, incluant des options de formatage, la possibilité d'intégrer des images et des liens hypertextes. Cela peut donc être un document texte, un message ou un wiki. En fait, on pourrait dire qu'une vague est un point de départ qui peut devenir ce qu'on veut en faire.

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On peut ainsi y répondre, comme on le ferait pour un message électronique classique. La réponse apparaîtra alors en dessous du texte de départ, délimité par un séparateur, l'avatar de l'interlocuteur et son nom. Aucune différence avec un fil de conversation normal. Néanmoins, il est non seulement possible d'intercaler une réponse à l'intérieur du fil de discussion, pour répondre à un des interlocuteurs par exemple, mais on peut également répondre sur un point précis à l'intérieur d'un message, pour ajouter un commentaire. Au final, on obtient un fil de discussion structuré offrant visiblement plus de souplesse qu'un échange de mails classiques.

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Quid de la dimension messagerie instantanée ? Tous les changements effectués sur une vague sont visibles en temps réel. Si plusieurs participants à une vague sont en ligne au même moment, ils peuvent se servir de celle-ci pour chatter en direct, et même voir les réponses des autres au moment où ils les saisissent. Une fonctionnalité pas si nouvelle puisqu'on pouvait déjà en bénéficier... avec ICQ ! Il est possible de désactiver cette possibilité, et également d'envoyer des messages privés qui ne seront visibles que de leur destinataire.

Google Wave : fonctionnalités collaboratives

Nous avons vu le principe de base d'une vague, venons en maintenant à son fonctionnement de manière plus détaillée. Nous avons volontairement occulté un détail : une vague se définit également par ses participants, que l'on peut ajouter librement depuis ses contacts Google. N'importe quel participant à une vague peut éditer et répondre, en direct ou en différé
Cette profusion d'éditions, de réponses et de commentaires appelle une question : sachant qu'il est possible d'ajouter en cours de route d'autres participants à une vague, comment faire en sorte que ces derniers ne se sentent pas perdus ? Google propose une manière assez originale de remédier à ce problème. Si un participant débarque dans une vague déjà créée, il dispose d'un bouton « Playback » permettant de revenir en arrière et de revoir toutes les modifications successives dans leur ordre d'apparition. C'est particulièrement utile dans le cadre d'un travail collaboratif.

Edition de documents

On l'a vu, Google Wave permet de lancer des discussions structurées, mélangeant conversation différées et en direct. Néanmoins, une vague peut également avoir pour but de collaborer sur un même document, avec un fonctionnement dans la droite lignée de ce que propose déjà Google Documents, c'est-à-dire que tous les participants d'une même vague peuvent éditer un document simultanément, et voir les changements opérés simultanément ou, là encore, en différé grâce au bouton Playback qui surligne au passage les ajouts au document d'origine.

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Que peut on éditer dans une vague ?

Le contenu d'une vague est un message texte enrichi. On dispose donc naturellement d'options de formatage (alignement, police, couleur du texte...), d'insertion d'images et de liens hypertextes. Sur ces deux derniers points, on notera plusieurs subtilités intéressantes. La première est la possibilité d'ajouter un lien hypertexte vers une autre vague part simple glisser/déposer de celle-ci, ce qui confère également à Google Wave le rôle d'une sorte de Wiki. On peut ainsi éditer divers documents et les lier à un récapitulatif.

La deuxième fonctionnalité intéressante réside dans l'insertion de liens, d'images et de vidéos puisque Google oblige, Wave inclut le moteur de recherche dans la barre d'outils d'édition. Il est ainsi possible de rechercher des liens, des images ou des vidéos et de les insérer directement dans la vague. Dernière possibilité d'insertion : les pièces jointes. Celles-ci sont également de la partie et il est possible de joindre n'importe quel type de fichier à une vague. Cette dernière possibilité nécessite toutefois l'installation préalable de Google Gears.

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En ce qui concerne les images, on notera également la possibilité de créer des diaporamas. Si vous avez installé Google Gears, vous pourrez même ajouter ces photos par glisser/déposer depuis n'importe quel dossier vers une vague. Une fois que plusieurs images ont été placées dans une vague, celle-ci laisse apparaitre un bouton Images, permettant de les télécharger, de les copier vers une nouvelle vague ou, donc, de les visualiser sous la forme d'un diaporama. Celui-ci bénéficie d'une interface rappelant Picasa ou les diaporamas MobileMe d'Apple. En revanche, cette interface est, sur nos tests, nettement plus réactive sous Safari ou Chrome que sous Firefox 3.5.

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Photos, texte, commentaires, discussions, tout ceci ne génère-t-il pas au final un document plutôt brouillon ? Sans doute, mais on trouve néanmoins la possibilité de « nettoyer » la vague de ses échanges de commentaires, et de republier le document « proprement » dans une nouvelle vague, que l'on pourra par exemple partager avec d'autres collaborateurs, qui n'ont pas forcément besoin de lire tous les échanges et modifications qui ont abouti au document fini.

Google Wave : extensions

Google a conçu Google Wave comme un service extensible. En plus des contenus « basiques » tels que des liens, des images ou des vidéos issues de services comme YouTube, Il est également possible d'insérer dans une vague des plug-ins. Ces extensions peuvent être de deux types : les gadgets et les robots. La différence entre les deux se situe essentiellement au niveau de leurs possibilités. Le gadget est une application partagée par les différents utilisateurs d'une vague, et que l'on insère dans celle-ci, dans le but de jouer ou collaborer. Le robot, à l'inverse, est une sorte de participant virtuel à une vague, qui peut influer sur le contenu de celle-ci : effectuer des opérations sur les liens d'une vague, publier la vague sur un blog... Les différences sont également techniques : un gadget est exécuté sur le poste client lui-même alors qu'un robot doit être hébergé sur un serveur.

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Concrètement, Google propose déjà quelques exemples concrets d'extension. Parmi eux on trouve évidemment un gadget Google Maps, permettant à plusieurs participants d'ajouter des marqueurs sur une carte, un Sudoku multi-joueurs, un widget météo ou encore un gadget sondage permettant de s'inscrire dans les colonnes « oui », « non » ou « peut être » (utile pour aider à la prise de décision par exemple. Évidemment en phase de bêta limitée, ces gadgets sont encore en nombre très limité pour les utilisateurs, il s'agit avant tout de fournir des exemples d'utilisation du service. Il faudra attendre le lancement public de Google Wave pour disposer d'un avis plus argumenté sur leur pertinence.

Google Wave : intégration à d'autres services

Google Wave a été conçu par les créateurs de Google Maps. Ce détail a son importance dans la mesure où comme le service de cartographie, Google compte autant sur le service lui-même que sur ses API permettant de l'intégrer à d'autres services tels que des blogs ou des réseaux sociaux. Là encore, il faudra attendre le lancement généralisé de Google Wave pour voir si la tendance prend mais les démonstrations effectuées par Google, notamment via un blog ou le réseau social Orkut, laissent apparaitre des possibilités plutôt intéressantes pour l'utilisateur qui peut ainsi disposer d'une interface centralisée pour gérer sa communication avec ses utilisateurs, collègues ou amis.

Conclusion

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Que penser au final de Google Wave ? Encore en phase de beta sur invitation, le service s'avère assez séduisant. Déroutant au premier abord, il révèle néanmoins son intérêt après avoir compris ses rouages de fonctionnement : croisement entre mail, messagerie instantanée et travail collaboratif, il laisse entrevoir des usages assez efficaces pour l'organisation d'événements ou de voyages, et permet de dynamiser la communication entre plusieurs utilisateurs, avec une plus grande souplesse dans les échanges. On apprécie également ses possibilités d'intégration, calquées sur celles de Google Maps : intégrée à un réseau social ou à un blog, une « vague » peut offrir de nouveaux moyens d'interaction avec ses lecteurs ou proches, et surtout un moyen de centraliser ces échanges au sein d'une même interface.

Au niveau du travail collaboratif, celui-ci est actuellement limité à l'édition de texte et ne remplace donc pas encore des outils plus polyvalents comme Google Documents qui permettent de travailler sur des feuilles de calcul ou des présentations. Dans leur présentation du service, les ingénieurs de Google précisaient tout de même que ces fonctionnalités pourraient être ajoutées par la suite. Toujours est-il que l'on note quelques fonctionnalités intéressantes, comme le bouton Playback qui permet de suivre le fil des différentes modifications apportées par les participants d'une vague : idéal quand on arrive en cours de route.

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Pour autant, Google Wave a-t-il les moyens de son ambition ? Certes, le service est plutôt bien pensé, et ses possibilités d'extension par des plug-ins permettent de décupler ses fonctionnalités. Pourtant, il nous paraît encore un peu prématuré de se prononcer sur l'avenir du service. L'idée est là, mais va-t-on lâcher nos clients mails et nos solutions de travail collaboratif pour jeter son dévolu sur Google Wave lorsqu'il sera disponible publiquement ? Moins sûr ! En outre, si l'interface de Google Wave est séduisante, elle fait appel à des technologies qui ne sont pas encore répandues dans tous les navigateurs. Opera est actuellement incompatible, et Internet Explorer nécessite l'ajout d'un plug-in qui pose, selon Microsoft, des problèmes de sécurité. C'est donc sur une note expectative que nous refermons ce tour d'horizon : Google Wave est indéniablement un service bien conçu et proposant de bonnes idées pour faire évoluer les communications et le travail collaboratif, mais peut être un peu trop en avance sur son temps.
Stéphane Ruscher
Spécialiste informatique
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