Techniquement, le DualDisc se présente comme un DVD double face, mais il se distingue surtout par un tout nouveau packaging plastique assez cossu. Ce dernier s'ouvre très facilement grâce à un bouton poussoir et les sempiternels picots censés retenir le disque (et qui cassent avant même le CD déballé) disparaissent au profit d'un système plus évolué semblable à celui que l'on trouve dans les dernières boîtes de DVD ou de Jeux Vidéo (PS2, etc). En clair, on pousse le bouton central pour extraire le disque du système de rétention.
Mais revenons-en au disque en lui-même dont le gros problème est sa compatibilité avec les platines existantes. Sont concernées uniquement les platines CD-Audio, tous les lecteurs DVD supportant le DualDisc. Le média DualDisc est légèrement plus épais que ce qui est prévu par les spécifications de l'Orange Book, ce qui peut parfois poser problème. Typiquement ce sont les lecteurs de type mange-disque (comme les Autoradios CD) qui sont le plus souvent concernés par le problème. Nous avons de notre côté procédé à plusieurs tests de compatibilité sans toutefois parvenir à mettre en défaut la face CD du DualDisc : que ce soit dans nos lecteurs PC, avec nos baladeurs CD ou bien encore avec diverses platines Hi-Fi signées Philips, Sony ou Yamaha, le DualDisc a toujours fonctionné sans le moindre hiatus. Même chose lorsque nous l'avons utilisé avec notre lecteur slot-in Pioneer, dans un iMac Intel ou encore avec un autoradio de Mégane, là aussi slot-in. Pas de problème non plus avec les consoles de jeu, qu'il s'agisse de PS2 ou de Xbox 360. À vrai dire, le seul problème que nous avons rencontré lors de la première manipulation d'un DualDisc est qu'il faut placer la face inscrite CD sur le dessus (et non l'inverse comme on pourrait être tenté de le faire). Une fois qu'on prend l'habitude de cette particularité, le DualDisc fonctionne comme un charme. Précisons enfin que contrairement à ce que certains avancent le DualDisc n'intègre pas de protection particulière visant à circonscrire le piratage. Nous avons par exemple pu extraire en MP3 les titres de la face audio d'un DualDisc du Boss, Bruce Springsteen, avec notre graveur Pioneer DVR-110.
Nous avons eu l'opportunité d'interviewer Christophe Waignier, directeur général de Sony BMG France au sujet du DualDisc. Voici un résumé de notre entretien :
Christophe Waignier : Notre principale motivation réside dans le fait que nos artistes ont besoin de s'exprimer également à travers l'image. Il est devenu nécessaire d'avoir des supports physiques qui permettent non seulement de communiquer sur leur musique, mais aussi sur le plan audiovisuel. On nous reproche également très souvent le vieillissement du CD (NDLR : qui fête au passage ses 20 ans) et notre inertie par rapport à cela. Le DualDisc est justement innovant sans être pour autant une révolution. Pouvoir réunir sur un même support une face CD et une face DVD est suffisamment innovant pour qu'on s'y intéresse. Nous avons également investi sur le packaging pour le remettre au goût du jour.
Clubic.com : Quel sera à votre avis la réaction du marché ? Quels sont les chiffres de vente du DualDisc dans les pays où il est déjà disponible ?
C. W. : La France est l'un des derniers pays où le DualDisc est commercialisé. On a donc l'avantage d'avoir assez de recul. Environ 6 millions de DualDisc ont été vendus aux États-Unis fin décembre 2005 pour 8 millions de DualDisc au niveau mondial. Nous avons pour habitude de proposer simultanément la sortie d'un nouvel album sur CD-Audio ou sur DualDisc pour laisser le choix au consommateur.
Sachant qu'en France 70 % du chiffre d'affaires de Sony BMG provient d'artistes locaux il nous fallait, pour rendre crédible l'initiative, fournir des contenus originaux. Pour cela nous avons d'abord dû convaincre les artistes afin de les faire réfléchir sur la façon dont ils allaient occuper les 30 minutes de la face DVD. L'objectif est d'éviter le remplissage avec des clips pour privilégier du contenu exclusif que l'on ne trouve nulle part ailleurs.
Clubic.com : Quel sera le tarif d'un DualDisc par rapport à un CD Audio conventionnel ? Quel est le surcoût engendré ?
C. W. : Il faut compter un supplément de deux euros par rapport au prix d'un support classique. Nous essayons de nous rapprocher le plus possible du prix habituel d'un CD. Bien sûr la fabrication est significativement plus onéreuse, mais c'est surtout la production du contenu qui coûte plus cher puisqu'il faut mobiliser des équipes vidéo. Ainsi sur le DualDisc de Patrik Bruel, il nous a fallu financer un documentaire vidéo de 30 minutes.
Clubic.com : Peut-on envisager de voir le packaging des DualDisc accompagner les classiques CD-Audio ?
C. W. : Non pas pour le moment.
Clubic.com : Où en est la compatibilité du DualDisc avec le parc de lecteurs installés ?
C. W. : Nos amis américains avaient déjà fait un certain nombre de tests. Nous avons fait pour notre part appel à des sociétés indépendantes pour tester les supports sur le plan technique et ce sont près de 250 appareils qui ont pour le moment été testés. Par ailleurs, Sony France et le laboratoire de la Fnac ont effectué divers tests. Rappelons que la face DVD est 100 % compatible avec tous les lecteurs alors que la partie audio est, selon nos chiffres, compatible avec 95 % du parc. Ce chiffre est à rapprocher de la faible compatibilité des CD-R et CD-RW qui ne dépassait pas les 60-75 % au lancement. Le fait d'arriver avec une compatibilité aussi élevée sur un nouveau support nous a convaincus de nous lancer.
Clubic.com : Quelle est la pérennité de ce support ? Risque-t-on de le voir disparaître rapidement ? Ou risque-t-il de remplacer le CD-Audio à terme ?
C. W. : Ce sera en définitive au consommateur de juger. Il n'y a aucun intérêt pour nous de développer des solutions matérielles, notre métier est avant tout la production de musique. Pour la mener à bien nous utilisons l'ensemble des formats et solutions à notre disposition. Le DualDisc nous a paru intéressant, car il permet aux artistes de s'exprimer différemment. Notre démarche est simple et transparente : si l'utilisateur est intéressé par un album il a le choix entre un CD normal ou un DualDisc. Nous n'avons pas intérêt à pousser l'un ou l'autre des formats.
Clubic.com : Le DualDisc risque-t-il de tomber dans le même travers que les DVD en édition collector où à la sortie d'un nouveau titre on ne trouve quasiment que la version collector qui est au passage la plus onéreuse ?
C. W. : Nous commercialisons le DualDisc pour l'instant en édition limitée. Le format principal reste le CD-Audio. Par exemple, nous mettons en place l'album de Patrick Bruel le 20 mars et sur un total de 290 000 pièces, les disques DualDisc représentent 40 000 unités. Pour nous ce support va intéresser avant tout les fans, mais pas la totalité du marché. Nous n'avons pas pour intention de vendre autre chose que de la musique. Nous respectons l'artiste et ce qui compte c'est sa musique et le message qu'il souhaite véhiculer auprès de son public. Clairement, Patrick Bruel n'a pas l'intention de vendre plus de plastique à son public.
Clubic.com : Comment se positionne le DualDisc par rapport aux DVD Live ou aux DVD Audio ?
C. W. : Les albums Live resteront au format DVD Live et le DualDisc ne va rien changer de ce côté. Quant aux formats de type DVD-Audio ou Super Audio CD ils restent très confidentiels. Pour notre part nous ne sortons plus de SACD depuis quelque temps, après en avoir proposé quelques-uns. Ce genre de média suppose un équipement tellement pointu qu'il n' y a pas d'intérêt de la part du consommateur.
Clubic.com : Avez-vous pris des mesures face aux risques de rayures, les DualDisc étant doublement exposés du fait de leur double face ?
C. W. : C'est une réalité qui a été retravaillée par rapport aux premières versions. Les problématiques d'épaisseur ont également été largement améliorées et le média est plus fiable que ce qu'on connaissait avant.
Clubic.com : Quel est le catalogue de DualDisc pour la France ?
C. W. : Nous démarrons avec Patrick Bruel. Suivront Garou et Patrick Fiori dont les albums DualDisc sont confirmés pour le premier semestre. Nous travaillons actuellement sur des projets d'albums pour Natasha St Pier et Pascal Obispo. On trouvera également Pink et Christina Aguilera dans les nouvelles sorties DualDisc. D'ici à la fin de l'année nous prévoyons une vingtaine de sorties. Michael Jackson proposera également un coffret single où sur une face le consommateur aura le single, sur l'autre le clip vidéo.
Clubic.com : Enfin, y-a-t-il un plan marketing pour la mise en place des DualDisc ?
C. W. : Non nous n'avons pas de plan marketing spécifique pour le DualDisc. On pense que ce sont les artistes eux-mêmes qui vont communiquer sur ce support dans le cadre du lancement de leurs albums. Les artistes les défendront au même titre qu'ils défendent leurs albums et nous voulons vraiment leur laisser la parole.