Pour commencer, qu'est-ce que le iFi Zen Dac exactement ? Ce que l'on appelle communément un Dac/ampli USB de salon, ou pour faire plus clair : une carte son externe en USB incluant un amplificateur casque et, dans le cas présent, une sortie préamplifiée.
Qu'est ce qu'un Dac ?
Initiales de Digital-to-Analogic Converter, ou dans la langue de Molière Convertisseur Numérique-vers-Analogique. Le terme est assez parlant, son but est de transformer un signal de type numérique en un signal de type analogique. Si le terme DAC ne veut pas nécessairement dire que nous parlons du décodage d'un signal audio, le grand public (si ce terme peut être qualifié de grand public) l'associe plutôt à "Dac audio".Un Dac audio aura donc la tache de convertir un type de signal numérique modulé de telle ou telle façon (PCM ou DSD) vers un signal analogique, qui n'aura plus besoin que d'être légèrement adapté et amplifié (le rôle de l'amplificateur) pour être exploitable sur un casque ou sur des enceintes.
Si la tache est assez simple et maitrisée par n'importe quel Dac, le passage d'un signal numérique à analogique est une étape cruciale, pour laquelle il n'existe pas vraiment de notion de perfection. Un Dac simple, comme ce que l'on retrouve sur smartphones ou sur un casque Bluetooth, est avant tout pensé pour consommer peu, optimiser la batterie. Son but est de créer un compromis entre qualité et consommation.
Un Dac plus qualitatif, comme ce que l'on retrouve sur les cartes de salon, ne possède pas les mêmes contraintes. Les puces peuvent être plus énergivores, optimisées pour un meilleur rapport signal/bruit, une meilleure diaphonie, etc. De même, le schéma général peut se permettre d'être plus complexe et de se baser sur des composants de meilleure qualité. Des notions pouvant être considérées comme une perte d'énergie et d'espace sur un modèle classique peuvent devenir intéressantes si l'audiophilie est au bout. Même problématique concernant sa puissance de sortie.
Précisons que le terme Dac peut signifier 2 choses. La première est le convertisseur en lui-même, presque toujours sous forme de puce intégrée. Mais il peut également désigner, par extension et par léger abus de langage, une carte son. Parler de "Dac externe" fait bien évidemment référence à une carte son. À l'inverse, parler d'un "Dac AKM ou ESS (deux fabricants de puces)" fait référence au convertisseur en lui-même.
Des entrailles cachant la simplicité
Le iFi Audio Zen Dac est un donc petit Dac/ampli au format bureau. Ses dimensions de 117x200x30 mm et son poids plutôt léger de 491 g en font un modèle facilement déplaçable et peu encombrant sur un bureau, une sorte de petit objet à tout faire. Le produit se construit autour d'un châssis en aluminium anodisé en forme de galet, lequel abrite le PCB, lui-même enserré entre deux plaques d'aluminium brossé. Sa bouille est assez sympathique et change des produits anguleux, un côté "galet" sans doute à l'origine de sa dénomination "Zen".
Sa fonction est purement Dac USB, il n'est donc pas possible d'utiliser d'autres entrées numériques (optique ou coaxiale) ni même de l'utiliser en simple amplificateur (pas d'entrée jack ou RCA). 4 sorties cohabitent : 1 prise casque Jack 6.35mm asymétrique (format classique), une prise Jack 4.4mm symétrique (l'une des deux prises symétriques standardisées avec le jack 2.5mm), une sortie préamplifiée en RCA, et une sortie préamplifiée en jack 4.4mm, qui'l sera nécessaire de raccorder en double XLR 3 broches pour un branchement sur amplificateur de puissance symétrique. Ces deux dernières prises, utilisables en tension fixe ou variable (le potentiomètre peut alors servir de réglage), permettent de raccorder le produit à un amplificateur de puissance ou à des enceintes actives.
Enfin, deux options sont activables via des boutons en façade : Truebass et Power Match. La première est un bass boost, la seconde permet d'adapter la sensibilité de l'amplificateur au casque branché. Il est conseillé de laisser cette fonction désactivée pour les écouteurs intra et les casques peu énergivores, et de l'activer pour les modèles moins sensibles type casque de salon. Une sorte de réglage du gain qui ne dit pas son nom.
L'un de ses avantages est sa puissance de sortie, sachant qu'il annonce entre 280 mW ( pour un casque de 32 Ohms en asymétrique) et 70 mW (300 Ohms en symétrique). Cette puissance est potentiellement suffisante pour l'essentiel des modèles du marché, de l'écouteur intra-auriculaire jusqu'aux casques hifi. Seuls quelques rares modèles planaires très peu sensibles risquent de taper dans sa limite, et encore.
Le produit est un simple Dac, c'est-à-dire qu'il se sert d'un seul convertisseur pour décoder les signaux audio gauche et droite. Si la marque ne précise pas la référence de la puce, un petit démontage fait apparaitre une puce DSD1793 de Burr Brown (une filiale de Texas Instrument), modèle de qualité même si pas de dernière génération. La marque iFi Audio l'utilisait déjà sur certains modèles comme le iDSD Nano. La puce permettant de gérer jusqu'à 4 canaux en sortie, elle peut donc assurer les signaux gauche + et -, et droite + et -. Cette disposition est appelée "symétrique", elle sépare ainsi totalement la gauche et la droite (plus de masse commune). Si certains clament sa supériorité, elle est avant tout une façon différente de concevoir un couple Dac/amplificateur que pour une approche symétrique. Son origine est avant tout professionnel et destinée aux transports du signal sur de plus longues distances. Qualité pure mise à part, elle permet de facilement doubler la tension de sortie, ce qui est avantage précieux pour alimenter des casques de haute impédance.
Le iFi Audio Zen Dac permet d'assurer la lecture de fichiers type PCM jusqu'en 24 bits / 384 kHz, mais également le DSD256 ainsi que le controversé format MQA (qui n'est rien d'autre qu'un PCM). Je me suis limité dans mon écoute aux formats PCM classique, le DSD n'ayant pour moi pas grand intérêt de par sa nature, et le MQA juste une proposition ultra-propriétaire très bien marketée.
Son amplification est assurée par un ampli op OPA1679, là aussi produit par Texas Instrument, un modèle pouvant gérer 4 canaux. Dans le cas d'une utilisation en symétrique, tous les signaux sont donc gérés sur cette même puce (+ et - des deux côtés).
Sur le papier le produit va plus loin qu'un simple smartphone ou baladeur, mais reste dans des références classiques de salon, pas d'une ambition démesurée. Le prix reste une limite logique, ce qui ne veut pas dire qu'il ne fera pas de miracles.
Enfin, terminons sur ses possibilités de branchement USB. La prise USB est de type B, ce qui est plutôt archaïque, mais encore répandu sur les DAC/Ampli, mais peut potentiellement se raccorder à un smartphone ou autre (en trouvant le bon câble). Rien ne dit en revanche que l'alimentation sera suffisante. Pour ce dernier cas de figure, il est possible de raccorder le iFi Audio Zen Dac sur secteur via un adaptateur dédié, malheureusement en option et assez dispendieux.
On ne peut plus simple d'emploi
En pratique, le modèle est aussi clés en main qu'il prétend être. Un simple branchement en USB-A le fait reconnaître immédiatement comme un périphérique audio, quelle que soit la plateforme (testé sur Windows 10 et Mac OsX Mojave). Si en théorie il n'y a pas de réglage de gain, en pratique c'est exactement le principe du Power Match, plus un terme commercial déguisé qu'autre chose.La fabrication n'est pas incroyable en soi, mais le modèle fait très bien illusion grâce à son bon assemblage et sa construction tout métal. Pas de petits détails faits à la va-vite ou de véritables défauts formels.
Ses patins en caoutchouc font qu'il s'intègre très bien dans un environnement bureau. Seul regret pour l'utilisateur PC : l'absence d'entrée micro. Le iFi Audio Zen Dac aurait clairement gagné à intégrer cette prise. Deux de ses concurrents directs, les Schiit Audio Hel et Fulla 3 (190$ et 100$, mais non importés) ne font pas l'impasse dessus, devenant plus intéressants pour le gamer.
Une écoute douce et technique
Difficile de ne pas sentir le gain par rapport à une sortie casque standard d'ordinateur. Bien que la puce et l'ampli ne soient pas les plus haut de gamme du monde, leurs qualités les font rentrer de plain-pied dans l'univers de salon. Le iFi Audio Zen Dac réussit alors son niveau d'équilibriste entre puissance et maitrise, mais également entre sonorité détaillée et signature agréable. Les puces Burr Brown sont réputées plus difficiles à gérer que les références ESS Sabre ou AKM, et le Zen Dac s'en tire parfaitement.Comparé à des équivalents Schiit audio de ces ordres de prix, le modèle parait moins sec et un peu moins analytique, mais pas moins technique pour autant. Il plaira facilement aux adeptes d'un son très détaillé et passe-partout, suffisamment profond et large pour se marier avec de bons casques hifi. Les Schiit Audio restent plus détaillés à l'oreille, mais un peu moins musicaux, plus froids, la puce du Zen Dac manie parfaitement l'équilibre douceur/neutralité, il n'est pas une caricature du modèle coupant les aigus à la truelle.
Testé avec les casques Grado Sr80e, Audeze LCD-GX, Audeze-LCD3i, Sennheiser HD800 ainsi que quelques références nomades et intra-auriculaires, il m'a été difficile de lui reprocher quelque chose pour son tarif. De là à voir un tueur "faisant aussi bien que des modèles valant 5 fois plus cher", ce serait plus qu'exagéré.
Il y a plus détaillé, plus large, mais difficile à trouver dans sa gamme de prix. Pour un peu plus de "gras" dans l'écoute, l'option TrueBass gère intelligemment sa fonction de booster de basses. L'envol est progressif et permet de simplement donner plus de corps à l'écoute.
En l'état, son concurrent le plus proche sur le marché français risque d'être le Fiio K5Pro, un peu plus cher, plus épais, mais doté de composants plus récents et plus complets sur sa connectique.