On a testé Mega, le nouveau service de Kim Dotcom

Alexandre Laurent
Publié le 19 janvier 2013 à 14h06
Kim Dotcom donnera samedi soir le coup d'envoi officiel de Mega, son service de stockage en ligne sécurisé, dont le lancement intervient un an après la fermeture de Megaupload. Mega promet un stockage sécurisé sans faille, puisque les outils de chiffrement des données sont entre les mains des utilisateurs. Fonctionnement, enjeux, promesses : Clubic fait le point en avant-première.

Si les suites de l'affaire Megaupload sont toujours en cours, son fondateur, Kim Schmitz Dotcom, prépare depuis déjà plusieurs mois son retour sur le devant de la scène avec un nouveau service, baptisé Mega. Annoncé de longue date par l'intermédiaire des réseaux sociaux, celui-ci sera lancé officiellement le 19 janvier à 6h48 du matin en Nouvelle Zélande (soit 18h48 en France), heure exacte à laquelle a débuté le raid du FBI sur la maison de Dotcom il y a un an. Quelques heures avant l'ouverture, tour d'horizon des principales promesses et fonctionnalités de ce cyberlocker qu'on nous assure être protégé comme jamais aucun service ne l'a été contre les yeux indésirables.

Mise à jour, 18h49 : le service a bel et bien été lancé.

Premier contact

A première vue, Mega se présente comme un service de stockage en ligne de type Dropbox, Google Drive et consorts. Il permet d'envoyer vers les serveurs de la société des fichiers et répertoires qui y seront sauvegardés et accessibles depuis n'importe quelle machine. Ces contenus pourront également être diffusés à d'autres : dans l'interface, l'utilisateur a la possibilité de générer un lien correspondant à un fichier, ou de créer un partage sur un répertoire. Spécificité du service : les algorithmes de chiffrement qui protègent la confidentialité des données reposent sur des clés qui ne sont pas gérées par Mega : celles-ci sont générées à la volée à partir d'une clé unique dont seul le détenteur du compte dispose. En théorie, celui-ci est donc le seul maître à bord : personne, hormis lui, n'a accès à cette clé, créée lors de l'enregistrement de son compte.

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A la première connexion, Mega s'ouvre sur une fenêtre qui propose, avant même création d'un compte, l'envoi d'un fichier, suivi de l'affichage immédiat des conditions d'utilisation. Tout se passe, pour l'instant, dans le navigateur. A noter ici : s'il est possible d'utiliser Mega avec IE ou Firefox, Mega recommande de basculer sur Chrome, seul navigateur à offrir, selon le service, le niveau de performances et de prise en charge du HTML5 nécessaire au confort de l'usager. Il n'existe pas, pour l'instant, de client logiciel ou de version mobile du site, mais des interfaces de programmation (API) sont d'ores et déjà ouvertes aux développeurs intéressés.

L'interface reprend les canons du genre, avec une vue centrée sur l'espace de stockage de l'utilisateur, où l'on pourra créer autant de répertoires que désiré. Les fichiers s'envoient d'un simple clic, ou par glisser déposer sur la fenêtre du navigateur. Les transactions (envoi et téléchargement) s'affichent sur la partie basse de l'écran, et supportent la reprise en cas d'échec. Bien que Mega soit basé en Nouvelle Zélande, les performances paraissent pour l'instant correctes, avec un envoi à 120 Ko/s et un téléchargement variant entre 600 Ko/s et 1,8 Mo/s (selon les essais) depuis une ligne Numericable 30 Mb/s située en région parisienne. Reste à voir si celles-ci ne se dégraderont pas une fois le service ouvert à tous.

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50 Go gratuits pour tous

Comme promis par son fondateur, la version gratuite de Mega offre bien 50 Go de stockage, sans indication quant à la bande passante allouée. Trois formules payantes sont ensuite proposées. La première, facturée 9,99 euros par mois (ou 99,99 euros pour un an), propose 500 Go d'espace et 1 To de bande passante allouée aux téléchargements. Un fichier de 1 Go pourra donc être téléchargé mille fois depuis mon compte dans le mois, par moi ou par des tiers, avant que le quota alloué soit dépassé. La seconde propose 2 To d'espace et 4 To de bande passante pour 19,90 euros par mois, tandis que la troisième double ces capacités pour 29,99 euros.

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Partage et chiffrement

La grande promesse de Mega réside dans le chiffrement bout en bout des échanges, par l'intermédiaire d'une clé dont seul l'utilisateur dispose. Quand j'envoie un fichier vers Mega, celui-ci est chiffré avant de quitter ma machine, ce qui signifie qu'en théorie, personne, hormis moi, n'est en mesure de le déchiffrer. Si le FBI décidait de mettre la main sur les serveurs de la société, ils ne trouveraient donc, associés à mon compte, que des fichiers indéchiffrables sans de considérables efforts.

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Il est toutefois permis de partager un fichier, via un simple clic droit depuis l'interface. On obtient alors deux éléments : un lien vers le fichier, qui seul est sans effet, puis une clé « publique » qui permettra au destinataire de déchiffrer le fichier, et donc d'accéder au contenu réellement partagé. Quelle que soit la nature de mes documents, je peux diffuser largement le lien de téléchargement : c'est le second élément, la clé de déchiffrement, qui débloquera réellement l'accès. Il est également possible de partager un répertoire, avec ouverture d'un accès en lecture, mais aussi en écriture. Pour ce faire, il suffit d'entrer l'adresse email de son contact qui, s'il n'est pas déjà abonné, recevra une invitation à se connecter à Mega. Du fait de ce chiffrement bout en bout, Mega ne propose pas, aujourd'hui, la consultation de contenus directement depuis ses serveurs (sur le mode du streaming), mais promet que cela fait partie des évolutions envisagées.

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L'ensemble combine chiffrement symétrique et asymétrique, avec comme pivot une clé unique générée lors de la création du compte utilisateur. Pour que la sécurité soit garantie, il faut donc que l'accès au compte soit protégé. Ici, la responsabilité incombe donc au seul utilisateur final. Mega, de son côté, lui promet que tant que son compte n'est pas violé, ses fichiers seront en sécurité.

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Chiffré, mais pas anonyme

La confidentialité des fichiers est théoriquement garantie, mais Mega stipule que les données de connexion sont quant à elles archivées en clair par ses soins. « Les informations pour un accès opérationnel, telles que votre adresse e-mail, l'adresse IP, la structure du dossier, les propriétés des fichiers et des informations d'identification de paiement, sont stockées et traitées en clair », indique ainsi la FAQ. Mega promet qu'il ne sera pas fait une utilisation commerciale des informations personnelles, mais stipule clairement qu'il collaborera avec les autorités en cas d'injonction ou de mandat officiel. Les puristes envisageront quant à eux d'associer Mega aux outils de type VPN ou TOR...

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Un écosystème en devenir...

Dans sa version actuelle, Mega intègre la gestion des contacts ainsi qu'un module de messagerie, qui n'était pas encore fonctionnel à l'heure de nos tests. Kim Dotcom et ses associés promettent toutefois que le service a vocation à largement s'étoffer. En vrac, ils annoncent l'arrivée prochaine d'un client dédié à Windows, suivi de déclinaisons mobiles, OS X et Linux, mais aussi l'intégration de modules collaboratifs de type agenda, traitement de texte et tableur. Sont également annoncés une messagerie instantanée, ainsi que la possibilité de déployer sa propre implémentation privée de Mega (vraisemblablement sous licence, et avec des modalités qui restent à découvrir, Mega n'ayant rien d'un projet open source).

La sphère Mega a également vocation à s'étendre par l'intermédiaire d'applications tierces, avec un kit de développement mis à disposition dès le lancement. La société ouvre par ailleurs un programme revendeurs, qui liste aujourd'hui une dizaine de partenaires issus pour l'essentiel de l'univers des prestataires de noms de domaine.

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Une nouvelle arme de diffusion massive ?

Mega n'en est sans doute qu'à ses balbutiements, et il est encore un peu tôt pour prévoir quelles seront les futures évolutions du service mais pour l'instant, le service n'a rien d'un Megaupload, conçu et pensé pour une diffusion massive des fichiers. Le fonctionnement actuel laisse toutefois entrevoir des possibilités inédites en matière de partage, licite ou illicite, la valeur ne résidant pas ici dans le lien de téléchargement proprement dit, mais dans la distribution des clés associées. Les capacités mises en oeuvre, autorisant 1 To de téléchargement par mois (soit 200 films encodés en .mkv HD) pour 9,99 euros, ne sont en tous les cas pas faites pour un simple archivage en ligne de documents...

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De son côté, Kim Dotcom semble cette fois avoir décidé de se prémunir de toute avanie judiciaire. Les conditions d'utilisation du service mentionnent ainsi que l'échange de contenus soumis au droit d'auteur est formellement interdit, et qu'un compte utilisateur pourra être suspendu en cas d'infractions répétées au copyright. Mega dispense d'ailleurs les informations nécessaires aux ayant-droits qui souhaiteraient voir supprimé un contenu, ainsi que de nombreux avertissements destinés à l'utilisateur final. En façade, Kim Dotcom s'est donc racheté une conduite... posture qui jure quelque peu avec les propos tenus par l'intéressés sur les réseaux sociaux, où il clame à qui veut l'entendre que Mega sera l'arme absolue pour faire la nique aux gouvernements, majors du disque et autres studios de cinéma.

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