Véritable institution du monde de la Hifi, Kef est surtout une marque dynamique qui s'est lancé le pari de se démarquer dans le secteur très concurrentiel de l'écouteur True Wireless. Pour ce faire, ses Mu3 mettent le paquet, nous rappelant au souvenir d'anciennes gloires très haut de gamme du monde des enceintes. Un haut de gamme (230 euros) parmi les hauts de gamme donc. L'expérience audiophile de la marque pourra-t-elle faire la différence ?
Mu pour Muon
Derrière cette forme patatoïde en robe grise, on retrouve le designer britannique Ross Lovergrove. Ce nom n'est certainement pas inconnu pour les amoureux de Kef, puisqu'il est déjà responsable du design des enceintes High-End Kef Muon (le « sans-limite de prix »), des monstres métalliques de deux mètres de haut pour 115 kg sur la balance, et 150 000 euros sur le portefeuille.
Un autre univers donc, mais que Kef ne s'est pas empêché d'invoquer ici, peut-être pour se porter chance.
Il faut certes accrocher à ce design des plus particuliers, qui a divisé dès son annonce. La forme, tout en courbe des Kef Mu3, n'est pas forcément
très actuelle, mais se démarque vraiment sur le marché du True-Wireless. Surtout, le produit est beaucoup plus agréable une fois en main qu'il ne l'est en photo.
La fabrication, elle, n'a rien de premium, puisque l'on reste sur une base en plastique uniquement, mais Kef connait bien son affaire. Les Mu3 sont suffisamment denses, bien assemblés, et très peu salissants. La certification est IPX5, soit un brin au-dessus du IPX4, qui est presque devenue la norme pour les écouteurs ANC. Quelques produits concurrents font tout de même mieux, comme les Samsung Galaxy Buds Pro, certifiés l'IP67 (résistance aux immersions).
La boite est tout aussi étrange, ou originale (selon le point de vue), et tout aussi agréable une fois en main. Dommage de ne pas avoir opté pour une enveloppe en métal (à l'instar des Klipsch T5 II), ce qui aurait été parfaitement en accord avec la philosophie des Muon. Ce point aurait été
d'autant plus logique que les Kef Mu3 ne sont pas compatibles avec la recharge à induction. Le premier défaut d'une petite série de simplifications ergonomiques.
Si ce boitier de charge est sérieux on relève tout de même quelques petits grincements, dont le plateau pour reposer les écouteurs. La charnière est assez fine, mais plutôt solide. Le seul vrai reproche est à apporter à l'encombrement, plus important que la moyenne, qui ne permettra pas à ce boîtier de rentrer dans toutes les poches.
Sans être les écouteurs les plus confortables du marché, les Kef Mu3 ne sont pas trop intrusifs (canule courte même si assez large), et conservent une excellente tenue si tant est que l'on appose les embouts adéquats. Le port se fait en insérant les écouteurs et en effectuant un quart de tour, à la manière des Jabra 75T ou des Sennheiser Momentum TW2.
Difficile d'envisager un usage sportif, puisqu'aucune sécurité n'est présente, mais la forme des écouteurs est assez bien optimisée. À moins d'avoir de très petites oreilles (le volume des Mu3 n'est en effet pas négligeable), les écouteurs seront assez agréables, même pour de longues sessions d'utilisation.
Ergonomie basique, un peu limitante
À l'image d'une autre marque audiophile, comme Earsonics avec ses Aero, Kef a fait le choix d'un produit immédiatement fonctionnel et déjà
très au point, et ce sans avoir à passer par une application. Un choix qui se respecte, mais qui entrave tout de même assez sérieusement les possibilités d'un tel produit. Ainsi, il ne faut pas espérer régler la puissance de la réduction de bruit, ou du retour sonore, ni égaliser facilement la signature sonore, ou modifier les commandes liées à certaines actions…
Un dépouillement fonctionnel qui n'est peut-être pas définitif, Kef connaissant assez bien son affaire en matière d'application (comme l'ont montré les LS50 Wireless II). Affaire à suivre donc.
En l'état, tout repose sur le principe de boutons des Mu3, placés dans un creux à l'arrière de chaque écouteur. Les commandes sont asymétriques,
ce qui permet d’étendre légèrement les possibilités des actions. En mode lecture, il est possible de faire un simple clic, un double clic, oui un appui long.
- 1 clic : Pause/lecture avec l'écouteur droit ; changement du mode de réduction de bruit avec l'écouteur gauche
- 2 clics : piste suivante avec l'écouteur droit ; appel à l'assistant vocal sur l'écouteur gauche
- Appui prolongé : augmentation (droit) ou diminution (gauche) du volume
Des fonctions épurées donc, mais nous avons vu bien pire, l'essentiel étant sauvegardé et le tout étant assez simple et intuitif. Néanmoins, quelques petits manques restent, comme l'absence de retour à la piste précédente. Nous pouvons également souligner une certaine latence entre l'appui et le déclenchement de l'action, mais ce point reste assez aléatoire et tout autant imputable au téléphone.
Décidément pas des monstres d'ergonomie, les Kef Mu3 n'intègrent pas non plus de capteur optique, qui permettraient de déclencher la pause ou la lecture une fois les écouteurs retirés et replacés dans l'oreille.
Connexion simple, mais irréprochable
À l'image de l'ergonomie, la connectivité reste simple et efficace. Pas de multipoints (connexion à plusieurs appareils en profil audio), mais une qualité de connexion presque parfaite. Que ce soit la portée ou la stabilité du signal, nous n'avons absolument aucun reproche à faire aux Mu3. De plus, les écouteurs peuvent fonctionner tous les deux en mode mono.
Seule étrangeté, l'absence de support du codec AptX, probablement pour garder une autonomie optimale. Que ce codec soit plus efficace que le SBC ou le AAC (ce point est déjà discutable), il reste un argument marketing assez évident. Beaucoup pourront donc reprocher son absence.
Isolation ok, micros à revoir
Kef monte d'un cran sur le plan de l'isolation. Très dépendante de la position de l'écouteur et de l'embout utilisé, celle-ci peut déjà atteindre un bon niveau en mode passif (ANC désactivé). Les aigus sont très atténués, de même qu'une petite partie des médiums.
Avec l'ANC, le silence gagne un niveau supplémentaire. Sans être aussi fabuleuse que celle des Airpods Pro, la réduction de bruit active peut être efficace, mais surtout parfaitement propre. Il n'y a aucun effet de bourdonnement (lié à un très léger déphasage) ni de soupçon de bruit parasite ou de sifflement. Les fréquences très ronronnantes sont atténués de 10 – 15 dB, et l'isolation dans les médiums peu atteindre les 20 dB dans le meilleur des cas (sur des fenêtres assez courtes). Kef ne risque pas de perturber les champions du genre, mais sa performance générale est largement acceptable - sans plus.
La qualité du mode « Ambiant » (retour sonore) est déjà bien moins convaincante, en partie à cause de l'isolation passive très importante. Ici,
les micros tentent de rattraper les aigus fortement atténués, sans y parvenir. Sans être catastrophique, la sonorité est très étouffée, et les fréquences médiums sont largement amplifiées, ce qui ne permet pas au système d'être vraiment efficace. Un mode utile pour rester un minimum en alerte, mais assez perturbant.
Le mode main-libre, lui, est… utilisable, mais vraiment pas plus. Pour un produit haut de gamme, le résultat est dans la lignée de ce que propose Sony sur ces WF-1000Xm3, c’est-à-dire assez médiocre. Même en environnement calme, la voix est un peu hachée et légèrement métallique. En environnement bruyant, il est parfois difficile de faire surnager un simple dialogue. Une fonction à utiliser avec parcimonie donc.
L'autonomie du haut du panier
Annoncée à 9 heures avec ANC, l'autonomie est, sur le papier, assez fabuleuse. En pratique, nous ne sommes pas toujours parvenus à une telle performance, mais les 8 heures – 8 heures 30 sont tout de même atteintes (en AAC), ce qui place les écouteurs au-dessus de la moyenne.
Sans ANC, la performance semble osciller encore un peu plus, mais il est largement possible d'atteindre les 10 heures d'utilisation. Le boitier, quant à lui, permet d'ajouter un peu moins de deux recharges supplémentaires.
Un son technique et très aéré, au niveau des meilleurs modèles
Les Kef Mu3 sont armés d'un transducteur dynamique de 8,2 mm « réglé de manière experte par Kef » selon les mots du constructeur. La marque n'a donc probablement pas développé elle-même ce haut-parleur, mais a sans doute travaillé sur un cahier des charges en collaboration avec un constructeur.
Rien de surprenant, puisque cela est le cas de presque toutes les marques, mis à part quelques géants ou quelques acteurs historiques, comme Sony ou Sennheiser.
Kef réalise ainsi un excellent travail, puisqu'à l'oreille, un certain équilibre s'installe, le tout en accentuant suffisamment les basses et les aigus pour devenir assez « fun ».
Les Mu3 ne sont pas des tueurs de haut de gamme, mais Kef a réglé très intelligemment les transducteurs. Les basses sont bien mises en avant, sur une pente régulière, n'envahissant pas les médiums. Plusieurs pointes dans les aigus permettent de garder de la clarté sans que le son ne devienne agressif, et un petit pic vers les 1 kHz – 2 kHz permet de gagner en séparation des détails, en aération de la scène sonore (ce boost est une méthode assez connue pour amplifier l'aération). Cette dernière est parmi les plus convaincantes du genre, sans devenir trop artificielle. Les écouteurs n'ont pas la richesse technique des Galaxy Buds de Samsung, vendus au même prix (230 euros), mais compensent ce côté moins précis en étant plus reposants.
Pas aussi dynamique qu'un Sennheiser CX 400BT/Momentum TW 2 ou que les Sony WF1000Xm3, les Kef font montre d'une très grande polyvalence, et réussissent à rester énergiques sans jamais être agressifs, le tout avec un excellent niveau de détails. Celles et ceux qui n'accrochent pas à la relative acidité des Sony, mais trouvent les Sennheiser un peu voilés, trouveront largement leur compte ici. Les Mu3 peuvent être perçus comme des Klipsch T5 II, mais avec des basses un peu plus rondes et avec plus de clarté. Il y a un certain équilibre ici, tout en conservant beaucoup patate.
Les Kef Mu3 sont extrêmement polyvalents et restent agréables quel que soit le mixage. Leur signature sonore très bien pensée leur permet de largement trouver leur place dans le paysage, au côté des quelques meilleurs du genre.
Kef Mu3 : l'avis de Clubic
Efficace sur la plupart des points, bien conçus, très endurants, les Kef Mu3 cèdent malheureusement du terrain sur l'ergonomie. L'absence d'application dédiée et de fonction avancée limite de fait légèrement l'expérience.