Le libraire américain Barnes & Noble a récemment commencé à dévoiler des statistiques concernant les habitudes de lecture des utilisateurs de ses liseuses numériques Nook, tandis qu'Amazon le fait depuis déjà quelques temps pour le Kindle. Une situation qui met en lumière le potentiel de ces terminaux mobiles pour donner de précieuses informations non seulement aux vendeurs, mais également aux éditeurs d'ouvrage.
En moyenne, les lecteurs du troisième volet de a trilogie The Hunger Games lisent en moyenne 57 pages à l'heure, et l'un des premiers réflexes des personnes qui terminent la lecture du premier tome sur un Nook consiste à acheter le second. Côté Kindle, Amazon a relevé que 18 000 lecteurs avaient surligné la même phrase dans le tome 2. Des informations qui peuvent paraître anecdotiques, mais qui mettent néanmoins en avant la possibilité de glaner des informations intéressantes permettant de dresser le profil des lecteurs d'ouvrages au format numérique.
Le Wall Street Journal met aujourd'hui ce constat en avant dans un article qui explique les enjeux de telles analyses, jusque-là inédite : après avoir vendu un ouvrage papier, ni l'éditeur, ni le vendeur ne peut avoir d'infos sur la façon dont le lecteur se l'approprie. Une barrière qui tombe avec la liseuse électronique, sur laquelle le lecteur est identifié et connecté à Internet.
On apprend ainsi que Barnes & Noble, libraire américain qui dispose de 25 à 30% de part de marché du livre électronique aux USA, étudie depuis peu le comportement des utilisateurs de ses liseuses Nook. Le WSJ explique que l'entreprise « est en train de partager ses découvertes avec les éditeurs, pour les aider à créer et améliorer les livres pour mieux capter l'attention des gens. »
De son côté, Amazon publie fréquemment des informations concernant les habitudes de lecture des adeptes du Kindle, notamment dans ses communiqués de presse. On peut y découvrir, par exemple, les auteurs et ouvrages les plus « empruntés » numériquement par les lecteurs, ainsi que le pourcentage de ces derniers qui achètent ensuite l'ouvrage. Pour Amazon, ces informations sont d'autant plus importantes depuis que l'entreprise est non seulement un commerçant, mais aussi un éditeur. Et avec la plus grosse part de marché du secteur aux USA - entre 55 et 60% - la firme de Jeff Bezos a de quoi décortiquer en matière de statistiques.
Du côté des éditeurs, on voit forcément la chose d'un très bon œil. « Nous avons très rarement un aperçu de l'esprit du lecteur » explique David Levithan, éditeur chez Scholastic. « Avec un livre imprimé, vous ne pouvez rien analyser. Vous ne pouvez pas voir quelles pages sont cornées. » Pour le lecteur, « le suivi » est a priori transparent, ce qui n'est pas forcément rassurant : et même si l'on peut se dire que de telles informations pourront servir d'une façon ou d'une autre aux éditeurs pour développer l'expérience de lecture numérique, la démarche solitaire de se plonger dans un ouvrage semble se faire, dans la version digitale, avec des regards par-dessus l'épaule. Lisez, vous êtes analysé.