Après bien des péripéties, Dailymotion est finalement tombé dans le giron de Vivendi en avril 2015. Le groupe média en détient aujourd'hui 90%. A l'époque, Orange n'était pas mécontent de se débarrasser de sa plateforme vidéo. En 2011, l'opérateur avait été appelé à la rescousse pour renflouer un des symboles du Net français, avant de tenter d'en revendre une part à Yahoo en 2013 puis au groupe chinois PCCW en 2015. A chaque fois, il s'était vu opposer une fin de non-recevoir de l'Etat, préférant une « solution européenne ». Ce fut donc chose faite avec Vivendi.
Orange avait au total investi 160 millions d'euros dans Dailymotion, sans réussir à lui faire réellement prendre de l'ampleur. Il faut dire que l'expansion internationale, cruciale pour Dailymotion (80% de son chiffre d'affaires est réalisé à l'étranger), n'était pas la priorité d'Orange, plutôt focalisé sur le marché français.
A l'inverse, Vivendi a immédiatement vu dans la jeune pousse un moyen de réussir la fameuse « convergence » entre le contenu et le canal de diffusion. Objectif : diffuser sur Dailymotion des vidéos exclusives en provenance de Canal+ et des clips des artistes de ses différents labels, dont Universal Music.
Quelques mois après, en juillet, Canal Plus ouvrait effectivement sa chaîne Dailymotion et depuis la rentrée 2015, les Guignols de l'Info ont débarqué en exclusivité (en clair). Finalement, en janvier 2016, Maxime Saada, directeur général du groupe Canal+, a été nommé également président de la plateforme de vidéo. « Dailymotion a vocation à devenir la vitrine numérique des contenus musicaux et audiovisuels du groupe », répète en boucle Vivendi.
Exclusivité contre exhaustivité
Clairement, Dailymotion sert les intérêts de Vivendi. Mais l'inverse est-il vrai ? Certes, quelques améliorations techniques ont été apportées à la plateforme, comme un nouveau player plus rapide et adapté au mobile ou Repost, qui permet aux internautes de publier des extraits de leurs vidéos favorites comme sur les réseaux sociaux. Mais en termes de contenus, le développement est plus laborieux. D'autant plus que Vivendi ne peut pas se risquer à cloisonner Dailymotion dans des contenus uniquement estampillés maison, au risque de l'affaiblir. On y trouve ainsi des vidéos BFMTV, grande concurrente d'iTélé, la petite sœur de Canal Plus.Aujourd'hui, 3,5 milliards de vidéos sont visionnées chaque mois dans le monde sur Dailymotion, qui compte 300 millions d'utilisateurs. La plateforme est déclinée dans 38 pays. A comparer au milliard d'utilisateurs de YouTube et à ses 70 pays. Si le chiffre d'affaires est en progression (70,8 millions en 2015, soit +18%), les pertes se sont creusées à 24,7 millions (+81%).
« On ne veut pas faire le petit frère de YouTube », expliquait Stéphane Roussel, le directeur du développement de Vivendi, lors du rachat. Le petit français a pourtant du mal à être autre chose aux yeux des internautes. Il pourra toujours se consoler d'avoir échappé aux griffes de Yahoo, menacé aujourd'hui de démantèlement.
Samsung conserve-t-il la tête des ventes de smartphones ? Le cloud à la française est-il un désastre ? Des questions posées par la rédaction de Clubic Pro dans notre nouvelle série « Un an après ». Rendez-vous la semaine prochaine pour un nouveau numéro.