Carton plein pour la Model 3. La voiture électrique présentée comme « abordable » par Tesla a engrangé 276 000 précommandes en seulement trois jours, a annoncé le PDG, Elon Musk, sur Twitter. Toujours selon lui, c'est deux fois plus que prévu ! Lors de la présentation officielle le 31 mars, l'auto avait déjà atteint 115 000 réservations, alors qu'elle n'avait pas encore été dévoilée. Réserver sa Model 3 coûte 1 000 euros (ou dollars).
Un rapide calcul permet d'établir qu'avec ce système de précommande payante, Tesla vient en quelque sorte de lever 276 millions de dollars. Contrairement à un prêt, la société ne sera redevable d'aucun intérêt.
Et comparé à un investissement, elle n'a pas à céder une part de son capital, ou bien à rendre de comptes. Cette opération comporte néanmoins un risque : que des clients se rétractent, par exemple, devant la longue attente.
Victime de son succès ?
Cela n'est pas tout à fait improbable. Tesla risque en effet d'être victime de son succès, et experts et analystes commencent à se demander si le fabricant - qui a ouvert un deuxième site de production aux Pays-Bas en août 2015 - réussira à tenir la cadence. Elon Musk lui-même, en fin de présentation vendredi, a laissé entendre que la voiture, dont les premières livraisons sont prévues fin 2017 aux États-Unis, n'était pas à l'abri de retards...La Gigafactory entrera en fonction fin 2016, mais ne résout qu'une partie de l'équation - Crédit : Tesla.
Les retards, c'est l'une des bêtes noires de ce jeune fabricant. La société en avait terriblement pâti à ses débuts, avec son Roadster. La Model S, malgré un accueil positif, avait quant à elle souffert du désengagement de clients qui doutaient de sa fiabilité, ou s'impatientaient de la recevoir. Si bien qu'en 2013, Elon Musk faillit revendre l'entreprise à Google. Le dirigeant imposa finalement à plusieurs centaines de salariés - indépendamment de leur métier - de rappeler les clients et de les convaincre de l'acheter. En peu de temps, le miracle se produisit.
Dans le cas de la Model 3, on peut penser que Tesla a tout prévu : construction d'une usine géante (Gigafactory) de production de batteries lithium-ion, délai d'un an et demi entre la présentation de la voiture et les premières livraisons, ou encore doublement annoncé du nombre de Superchargeurs dans le monde, afin de lever le frein psychologique des consommateurs hésitant à acheter un véhicule 100 % électrique comme voiture principale.
Longue file d'attente
Mais en l'état actuel, la capacité de production de Tesla reste insuffisante pour répondre à la demande dans des délais raisonnables. Des analystes de Cairn Energy Research ont calculé, dans un scénario très optimiste, que le fabricant aura livré 76 860 Model 3 à la fin de 2018, dont 12 200 à la fin de 2017. Pour livrer les autos réservées ces trois derniers jours - sans préjuger du taux de transformation - Tesla mettra entre trois et quatre années.Dans un autre tweet publié au lendemain de la présentation officielle, Elon Musk reconnaissait « le besoin de revoir la planification de la production ». Nul doute que les fonds obtenus permettront à l'entreprise de faire face à ce défi. Si elle le surmonte, elle changera d'échelle, et quittera son marché de niche, devenant l'un des principaux fabricants de voitures électriques. D'ici 2020, l'américain compte vendre 500 000 voitures par an.
Mais si Tesla se prend les pieds dans des problèmes de production, il risque de se faire couper l'herbe sous le pied par d'autres constructeurs comme BMW, Mercedes ou Audi, qui ont passé la seconde sur l'électrique.
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