© Disney
© Disney

À l'occasion du May The Fourth, aussi appelé « Star Wars Day », retour sur cette première décennie Star Wars sous l'égide du studio aux grandes oreilles, entre succès, déceptions et renouveau.

Chaque 4 mai, les fans de Star Wars célèbrent leur passion pour la saga imaginée par George Lucas. Ce May the Fourth a une saveur toute particulière cette année, puisque 2022 marque les dix ans du rachat de Lucasfilm par Disney.

C'était en effet le 30 octobre 2012 que Bob Iger, président du studio à l'époque, officialisait l'acquisition des droits de la saga Star Wars pour un montant de 4 milliards de dollars, renforçant ainsi l'hégémonie de Disney dans l'industrie du divertissement, après le rachat de Marvel trois ans plus tôt et la sortie d'Avengers, qui allait profondément marquer la pop-culture pour les années à venir.

Seulement, après une décennie qui aura vu la saga Star Wars exploitée sur tous les supports, le sentiment du grand public et des fans reste mitigé, alors que l'étoile de la saga semble avoir définitivement pâlie. Un ressenti justifié ? C'est ce que nous allons essayer de comprendre.

2012 - 2017 : « Chewie, we're home »

Si les premières semaines post-rachat ont laissé certains fans dubitatifs, notamment suite à la décision de faire table rase de l'ancien Univers étendu et des milliers de romans, BD ou jeux vidéo pour repartir de zéro, le reste du public était sacrément excité à l'idée d'enfin retrouver cette fameuse galaxie lointaine, très lointaine avec la mise en chantier d'une nouvelle trilogie.

L'embauche de J.J. Abrams, qui avait brillamment ressuscité la saga Star Trek au cinéma, à la réalisation de l'Episode VII a été applaudie par de très nombreux spectateurs et le retour de Mark Hamill, Harrison Ford et Carrie Fisher dans leurs rôles iconiques avait fini de convaincre les réticents.

© Disney - Lucasfilm
© Disney - Lucasfilm

En parallèle du tournage de ce premier nouveau film, Disney a brillamment joué son coup côté animation avec la sortie de Star Wars Rebels. Cette série supervisée par le créateur de Clone Wars Dave Filoni (retenez bien ce nom), a autant amusé le jeune public, la cible principale du programme, que ravi les spectateurs de la première heure qui retrouvaient là les contours familiers des premiers épisodes de la saga.

En 2015, l'excitation est à son comble avec la publication d'un teaser lors de la convention Star Wars Celebration qui a fait chavirer le monde entier et fait couler de nombreuses larmes sur les joues des spectateurs les plus nostalgiques. Les mois qui suivront verront l'excitation monter à son paroxysme, et la sortie du Réveil de la Force le 16 décembre 2015 a été acclamée par un public en délire, une critique très positive et a engendré plus de 2 milliards de dollars de recettes, seulement dépassé à l'époque par Avatar de James Cameron. Star Wars était de retour, plus puissant que jamais.

© Disney - Lucasfilm

En 2016, un premier spin-off, Rogue One : a Star Wars story, a confirmé ces excellentes premières impressions avec un film au ton résolument différent de celui de la saga originelle, plus guerrier et terre-à-terre, qui n'oubliait pas pour autant de distribuer des petits bonbons aux fans, toutefois avec parcimonie.

2017-2019 : « J'ai ressenti un grand trouble dans la Force… »

Le 13 décembre 2017 marque la fin de l'état de grâce avec la sortie de Star Wars, les Derniers Jedi, le huitième opus de la saga. Rian Johnson, pourtant très bien accueilli jusqu'alors par le fandom, propose avec ce nouveau volet un film clivant. Il cherchait de fait à déconstruire le mythe Star Wars pour aller de l'avant, avec des choix scénaristiques forts mais perçus comme stupides et scandaleux par une partie des spectateurs.

En plus d'une campagne de harcèlement en ligne honteuse qui obligea deux comédiennes à quitter les réseaux sociaux, la colère d'une partie de la communauté s'est retournée contre Disney, accusée d'incompétence crasse. Même Mark Hamill, Luke Skywalker en personne, ne s'est pas fait prier pour dire tout le mal qu'il pensait du résultat et de l'évolution de son personnage.

© Disney - Lucasfilm

Seulement quelques mois plus tard, et alors que la plaie n'était toujours pas refermée, Disney et Lucasfilm proposent Solo : a Star Wars story, le second spin-off consacré à la jeunesse de Han Solo. Le film a subi une production cataclysmique, avec le renvoi de ses réalisateurs, Phil Lord et Chris Miller, remplacés au pied levé par le vétéran Ron Howard (Willow, Apollo 13). Si le film n'est pas fondamentalement mauvais, son intérêt est plus que limité et le public ne s'y est pas trompé en boudant le projet, préférant retourner une nouvelle fois en salles voir Avengers : Infinity War, qui pulvérisait alors le box-office et consacrait un MCU au firmament de la pop-culture mondiale.

Avec un box-office de seulement 392 millions de dollars dans le monde, Solo : a Star Wars story est non seulement le pire score enregistré par un Star Wars au cinéma mais également le premier film de la franchise à faire perdre de l'argent à son studio.

© Disney - Lucasfilm

En 2019, Star Wars : l'Ascension de Skywalker mettait un terme à la nouvelle trilogie. Rafistolé de toutes parts, réécrit sur le tard pour « corriger » les prétendues erreurs du précédent volet, le film n'a convaincu personne, ni les fans atterrés devant un résultat piteux, ni le grand public qui semblait n'avoir que faire de ce baroud d'honneur. Le film a dépassé de peu le milliard de dollars de recettes, soit plus de deux fois moins bien que lors de la sortie du Réveil de la Force quatre ans auparavant.

Trop de Star Wars en trop peu de temps. Voilà probablement le ressenti d'une grande partie du public pour qui chaque film de la saga avait été un événement, attendu et désiré sur plusieurs années. En exploitant le filon jusqu'à plus soif, les créatifs de Lucasfilm ont donné l'impression de partir dans toutes les directions, sans véritablement se renouveler. Cette trilogie donne à voir les mêmes personnages, les mêmes environnements et a fait croître la lassitude des spectateurs.

© Disney - Lucasfilm

2019 - 2022 : « This is the Way »

En novembre 2019, Disney lançait son service de streaming vidéo Disney+ et proposait comme produit d'appel The Mandalorian, la première série en live-action Star Wars.

La réponse du public a été immédiate et les premiers épisodes ont été vus comme un retour aux sources libérateur, grâce à son personnage mutique et son ambiance tirant bien plus vers le western spatial que la grande épopée mythologique. La saga a également renoué avec son aspect innovant en proposant une nouvelle méthode de tournage sur écrans LED, à la place des fonds bleus, qui permet d'imaginer des environnements générés par le moteur de jeu vidéo Unreal Engine, et évite les incrustations numériques couteuses et parfois ratées.

© Disney - Lucasfilm

The Mandalorian est aussi la prise de pouvoir de Dave Filoni, qui s'impose à partir de ce moment comme le nouveau grand architecte de l'univers Star Wars. Le réalisateur, adoubé par George Lucas en personne, n'hésite pas dans les deux saisons de la série à multiplier les références à la prélogie des années 2000, pourtant méprisée par Disney lors du rachat, et à ses propres personnages, comme Ahsoka Tano ou Bo Katan, multipliant les parallèles entre tous les projets de la saga.

On a également apprécié la volonté de Disney d'ouvrir Star Wars à d'autres cultures avec Star Wars Visions, une anthologie réalisée par quelques uns des plus grands noms de l'animation japonaise. Les différents épisodes ont pu bousculer le public dans leurs habitudes et leurs attentes vis-à-vis de cet univers, mais ont été unanimement salués, notamment chez Clubic, pour leur qualité visuelle et leur prise de risque.

© Disney - Lucasfilm

Dans le domaine de l'édition aussi Star Wars poursuit sa mue, avec différents romans de qualité et une nouvelle série baptisée La Haute République, dont plusieurs ouvrages se concentrent sur une nouvelle période située 200 ans avant les événements de l'Episode 1 (La Menace Fantôme).

Le renouveau télévisuel de Star Wars a rencontré récemment quelques perturbations avec The Book of Boba Fett, spin-off de The Mandalorian attendu depuis belle lurette et consacré au célèbre chasseur de primes. La série n'a pas convaincu le public, hormis deux épisodes remplis à ras-bord de fan-service, tant est si bien qu'elle est déjà considérée par les experts comme l'un des pires produits Star Wars jamais réalisés, avec le film de Noël de 1978 et la chansons de Dorothée sur les Ewoks.

© Disney - Lucasfilm

2022-… : « Toujours en mouvement est l'avenir »

Le futur de Star Wars se dessine aujourd'hui plus que jamais à la télévision. Disney a d'ores et déjà annoncé près d'une dizaine de projets, plus ou moins entre-connectés, qui auront pour but à la fois d'élargir l'univers de The Mandalorian mais aussi d'explorer plus avant les moindres recoins de la galaxie et les grandes époques de la saga.

Dans quelques jours seulement débutera la mini-série Obi-Wan Kenobi, probablement le projet le plus attendu de tous et toutes, et qui verra Ewan McGregor reprendre le rôle du Chevalier Jedi, gardant un oeil sur le jeune Luke Skywalker, caché sur la planète Tatooine. Un peu plus tard cette année nous pourrons retrouver Cassian Andor, héros du film Rogue One dans une série solo encore bien mystérieuse.

© Disney - Lucasfilm

N'oublions pas non plus la saison 3 de The Mandalorian et Ahsoka, qui pourrait marquer l'apparition du Général Thrawn, l'un des plus grands vilains de l'univers Star Wars, ainsi que la seconde saison de The Bad Batch, la série animée dérivée de Clone Wars.

Disney et Lucasfilm ont également annoncé d'autres projets TV comme The Acolyte, une série située dans la Haute République et produite par Leslie Headland, la créatrice de Poupée Russe sur Netflix, ou encore un énième spin-off sur Lando Calrissian.

Le studio semble ainsi bien décidé à explorer toutes les possibilités créatives à sa disposition. Lucasfilm va à la fois s'inspirer de Marvel Studios pour concevoir un univers connecté et cohérent via le personnage du Mandalorian, mais ne s'interdit pas de faire des pas de côté, afin de ratisser large et de proposer un Star Wars à chaque public ciblé.

© Disney

Au cinéma les choses sont plus floues et Disney semble ne pas savoir quelle direction emprunter pour relancer la saga sur le grand écran. Actuellement deux projets sont en développement. Le premier, sans titre, est réalisé par Taika Waititi, le metteur en scène entre autres de Thor : Love and Thunder, et ne devrait pas entrer en production avant l'année prochaine au minimum.

Le second, Rogue Squadron, était prévu à l'origine pour la fin de l'année 2023. Ce film, centré sur les pilotes de l'Alliance Rebelle, et réalisé par Patty Jenkins (Wonder Woman) semble aujourd'hui être au point mort et sa sortie sera probablement repoussée, s'il n'est pas annulé d'ici là.

© Disney - Lucasfilm

Rian Johnson avait bien évoqué une nouvelle trilogie, mais l'accueil glacial des Derniers Jedi semble avoir eu raison de ce projet. Si l'intéressé confirme être toujours attaché à cette idée, aucune information n'a filtré et le réalisateur est actuellement au travail sur d'autres métrages, comme les deux suites d'À couteaux tirés, pour Netflix.

Dernier projet en date : un film produit par Kevin Feige, le patron de Marvel Studios, qui n'a aucune date de sortie ni embryon d'intrigue et qui pourrait attendre plusieurs années avant d'être présenté au public.

© Disney - Lucasfilm

Presque dix ans après sa prise de pouvoir, Disney semble avoir compris dans la douleur que la licence Star Wars n'est pas une simple marque comme les autres.

Forcé de composer avec un fandom parfois toxique et s'étalant sur plusieurs générations, un héritage riche et complexe mais aussi des attentes aussi diverses que contradictoires, le studio semble toutefois prêt à ouvrir une nouvelle page de cette saga, et à s'affranchir des carcans pesants de cet univers pour l'explorer en profondeur.

Star Wars a perdu de son aura, c'est une évidence, et n'a plus le même impact qu'autrefois dans l'inconscient collectif. La faute à une industrialisation à marche forcée et à un cruel manque de vision ? Assurément. Pour preuve, là où chaque annonce de projet provoquait une liesse interplanétaire, The Book of Boba Fett, dernière série en date, a été accueillie avec une indifférence polie par la majeure partie du public.

© Disney

Pourtant Star Wars continue de fasciner les plus jeunes, biberonnés dès leur plus jeune âge aux Jedi et sabres lasers par leurs fans de parents. Les pouvoirs de la Force restent un puissant stimulant pour l'imaginaire et Disney aurait tout intérêt, à notre sens à se détacher de la trilogie originale et de la saga des Skywalker pour bâtir le Star Wars d'une nouvelle génération.

Star Wars a perdu son âme ? Peut-être, mais rien n'interdit Lucasfilm de lui en créer une nouvelle, quitte à s'aliéner un public qui doit entendre que le temps est venu de passer le flambeau. Reste également au studio à s'orienter sur des projets peut-être moins attendus mais plus riches, plus déroutants aussi, et qui donneraient un regain d'air frais à ce bac à sable aux possibilités infinies. Il faudra maintenant attendre la Star Wars Celebration, qui débute le 26 mai 2022, pour savoir si la major à appris de ses erreurs et saura provoquer un nouveau réveil de la Force dans le coeur du grand public.

Et vous, que pensez-vous de l'évolution de la saga Star Wars depuis son acquisition par Disney ? N'hésitez pas à nous laisser votre avis dans les commentaires !