Un opérateur a-t-il l'obligation contractuelle d'assurer à ses abonnés les débits maximum théoriques correspondant aux normes techniques dont il se réclame dans sa communication ? La question pourrait paraitre anodine, mais elle se pose pourtant clairement aujourd'hui, du moins pour Orange, qui doit depuis quelques jours faire face à un scandale en passe de faire le tour du Web français : d'après de nombreux internautes, l'opérateur restreindrait volontairement les débits de son réseau mobile de troisième génération. L'affaire est d'autant plus gênante qu'Orange a reconnu les faits, et s'est même engagé à porter la bande passante accessible aux appareils de type iPhone 3G grand public à 1 Mb/s d'ici au 15 septembre.
De la 3G vendue pour de la 3G+
Telle que déployée par Orange, la technologie HSDPA, ou 3G+, offre un débit descendant théorique de 7,2 Mb/s. Les forfaits mobiles qu'il commercialise comporte la mention explicite de cette technologie, indiquant toutefois que les débits permis par la 3G+ sont réservés aux détenteurs de terminaux compatibles situés dans les zones de couverture ad hoc. L'iPhone 3G, autour duquel se focalise une bonne partie de la grogne des clients d'Orange, fait justement partie de la liste des appareils 3G+, comme Orange le précise d'ailleurs dans la fiche technique présentant l'appareil sur son site Web.
En pratique, de nombreux utilisateurs grand public constatent que les débits autorisés par leur iPhone 3G plafonnent aux alentours de 300 Kb/s. « Un abonné Orange disposant d'un forfait et d'un terminal compatible 3G+ devrait théoriquement avoir accès au 3G+. Cependant, ce n'est pas le cas : de façon incompréhensible, Orange "bride" les vitesses de connexion de ses abonnés », s'interrogent les mécontents dans une pétition qui compte pour l'instant quelque 2200 signatures.
On pourrait rétorquer que 300 Kb/s permettent largement de profiter des joies de l'Internet mobile... mais d'aucuns s'estiment - à juste titre - lésés dans la mesure où l'opérateur leur fait miroiter une technologie à laquelle ils n'ont tout bonnement pas accès. Aux Etats-Unis, une situation similaire a d'ailleurs valu à Apple et à son partenaire AT&T l'ouverture d'une action collective, à l'initiative d'une consommatrice mécontente. La situation devient d'autant plus problématique que certains internautes affirment être parvenu, à force de persuasion auprès du service client, à obtenir des débits nettement supérieurs à ces 300 Kb/s, qui correspondent peu ou prou aux débits permis par la 3G (max 384 Kb/s théorique), technologie dont la 3G+ est une évolution.
1 Mb : bien, mais pas assez ?
La restriction constatée serait donc du fait de l'opérateur, et ne saurait être imputable à une éventuelle défaillance du réseau. Contacté par la presse, Orange fait la sourde oreille, jusqu'à ce qu'un de ses porte-paroles reconnaisse, auprès de la radio France Info, qu'une limitation a volontairement été introduite. Il explique, au micro de Jérôme Colombain, que les débits sont volontairement limités à 384 Kb/s. Sans doute en réponse à l'ampleur médiatique prise par l'affaire, il ajoute qu'à l'issue d'une réunion, la direction de l'opérateur a pris la décision de porter ce débit maximal théorique à 1 Mb/s à partir du 15 septembre prochain. Aucune intervention ne serait nécessaire du côté du terminal, ce qui confirme que les brides interviennent bien au niveau de l'infrastructure d'Orange.
1 Mb, c'est mieux que 384 Kb, mais l'on est encore loin des 3,6 Mb ou 7,2 Mb que promettent les implémentations de la technologie HSDPA en France. D'autant que les utilisateurs de cartes PCMCIA associés à des forfaits professionnels exploitent effectivement la totalité de la bande passante disponible... Certains risquent donc de ne pas se contenter de cette demi-mesure et veulent en appeler qui à la DGCCRF, qui aux associations de consommateurs.
Orange, qui a vraisemblablement restreint les débits de son réseau de façon préventive, afin d'éviter d'éventuels engorgements ou de compenser certaines faiblesses architecturales, devra maintenant gérer avec attention cette crise, tant en termes de relation client que d'image. Selon nos informations, aucune communication sur le sujet n'a pour l'instant été prévue.