Saisi par Bouygues Telecom, le Conseil de la concurrence a prononcé mercredi la fin de l'exclusivité négociée entre Orange et Apple au sujet de l'iPhone, estimant qu'un accord de ce type nuisait à la concurrence et rendait plus difficile le changement d'opérateur pour le consommateur final. Bien que cette décision fera l'objet d'un recours en appel, Bouygues Telecom se félicite d'ores et déjà de cette décision, et « espère pouvoir le commercialiser dans les meilleurs délais ».
Dans sa décision, le Conseil de la concurrence estime que la distribution exclusive d'un terminal par un opérateur est susceptible d'avoir « pour effet de réduire encore la concurrence sur les prix, sur la qualité des réseaux, des infrastructures et des services clients », puisqu'au lieu d'améliorer leurs services pour séduire de nouveaux clients, les acteurs de la téléphonie mobile risquent de se concentrer sur l'obtention d'exclusivités portant sur des terminaux attendus. En outre, ces exclusivités se feraient au détriment des opérateurs mineurs, puisque les fabricants auraient logiquement tendance à favoriser ceux qui disposent de la plus importante force de frappe.
« L'injonction prononcée vise à ce que les produits iPhone ne soient plus exclusivement commercialisés par Orange mais puissent l'être par tout autre opérateur souhaitant bâtir une offre avec ce terminal », précise le Conseil, qui remet en cause aussi bien l'accord d'exclusivité dont bénéficie Orange en tant qu'opérateur de réseau mais également celle qui fait de la firme l'unique grossiste habilité à distribuer l'iPhone en France.
Bien que l'iPhone puisse être acheté nu, sans abonnement, et immédiatement désimlocké - opération facturée 100 euros, qui s'ajoutent au prix de l'appareil, « ce contournement de l'exclusivité ne peut rester que marginal et ne peut modérer l'atteinte portée au marché et aux consommateurs », estime le Conseil.
D'autres accords d'exclusivité sont actuellement en vigueur sur le marché français de la téléphonie mobile - SFR est seul à pouvoir commercialiser le Blackberry Storm de RIM. A ce point, que n'ont pas manqué de soulever Apple et Orange dans leur défense, le Conseil répond qu'un tel accord confirmerait, si sa durée était supérieure à quelques mois, « le risque d'effet cumulatif du type de partenariat mis en cause ».
Mise à jour : Orange a annoncé vouloir faire appel de cette décision censée prendre effet dès sa notification, devant la Cour d'Appel de Paris. « Orange rappelle que le lancement de l'iPhone en France repose sur un partenariat industriel pour lequel Orange a particulièrement investi. Il est d'ailleurs paradoxal que l'opérateur ayant le plus de retard dans le déploiement de son réseau 3G soit à l'initiative de cette plainte. On notera également qu'il lui a fallu attendre plus d'une année après le lancement de l'iPhone pour demander ces mesures conservatoires supposées urgentes et qui interviennent en pleine période commerciale de fin d'année. La décision de ce jour est grave. Elle remet profondément en cause l'économie du marché et notamment les partenariats entre opérateurs mobiles et constructeurs au service des consommateurs et de l'innovation », précise France Télécom.
Les dessous de l'affaire
Cette affaire a permis de porter au grand jour un certain nombre des conditions régissant les accords passés entre Orange, Apple et les distributeurs autorisés à commercialiser l'iPhone 3G. On apprendra notamment, via les dessous de l'affaire Orange / Apple résumés par Mobinaute, comment la Fnac doit écouler des baladeurs iPod pour justifier son droit à vendre l'iPhone, ou le montant de l'investissement consenti par Orange pour le lancement de ce terminal.