Chargée de définir le cadre réglementaire du déploiement de la fibre optique, l'Arcep a tenté de ménager la chèvre et le chou, mais risque tout de même d'avoir fait un mécontent : France Télécom. L'Autorité de régulation des télécoms a en effet estimé qu'il valait mieux que les FAI installent plusieurs fibres par immeubles, alors que l'opérateur historique défendait pour sa part l'idée d'une fibre unique.
Attendue de longue date, la fibre optique peine encore à se frayer un chemin jusqu'aux foyers français, en raison notamment de certaines divergences au niveau des choix technologiques et des contraintes liées à la mutualisation des équipements. Sur ce dernier point, la loi de modernisation de l'économie prévoyait jusqu'ici que les opérateurs soient tenus d'instaurer un point de mutualisation lors de leurs travaux, à l'extérieur de la propriété fibrée.
Ce cadre juridique est conservé, mais les prérogatives de l'Arcep lui permettent d'en modifier les limites. Dans l'avis rendu lundi, l'Autorité estime en effet que la mutualisation devra se faire à l'intérieur de l'immeuble dès que ce dernier est situé dans une zone « très dense » et abrite plus de 12 logements. 148 communes sont concernées, pour une couverture de quelque 5,16 millions de foyers.
L'Arcep ne s'arrête pas là, puisqu'elle pose les bases de la collaboration qui sera imposée aux FAI. Le premier à fibrer à un immeuble devra en effet installer une fibre dédiée supplémentaire pour chaque logement si l'un de ses concurrents en fait la demande et cofinance l'opération. Une idée jusqu'ici rejetée en bloc par France Télécom, au motif qu'elle augmente considérablement le coût de déploiement. Pour l'Arcep, le surcoût « peut être évalué à moins de 15 % du coût total de l'installation de la fibre dans l'immeuble, et à moins de 5% du coût total de déploiement de la fibre ».
Ainsi, l'Autorité estime parvenir à concilier les modèles de déploiement contradictoires mis en place par France Télécom et Free. Alors que le premier défend l'idée d'un réseau de type GPON, ou chaque fibre serait partagée entre plusieurs logements, le second milite pour la pose d'une fibre directe par foyer (modèle point à point). « L'Autorité ne cherche pas à imposer telle ou telle technologie, mais au contraire à favoriser leur coexistence, ce qui constitue un gage d'innovation et de concurrence pour le marché encore naissant du très haut débit ».
« C'est une bonne nouvelle pour le déploiement de la fibre et pour le maintien de la concurrence. C'est le bon sens qui l'emporte », a déclaré Maxime Lombardini, directeur général d'Iliad, à l'AFP suite à cette annonce.
Une consultation publique est maintenant ouverte pour un mois, jusqu'au 22 juillet. A partir de là, l'Arcep devrait faire valider sa démarche au niveau européen, avant de demander la publication du décret venant fixer les nouvelles règles, qui pourraient entrer en vigueur avant la fin de l'année. Aujourd'hui, seuls 40.000 foyers français sont aujourd'hui fibrés en FTTH (fibre jusqu'au domicile), contre 130.000 environ en FTTB (fibre jusqu'à l'immeuble), modèle défendu par Numericable.