Simple test ou vrai changement de stratégie ? En abandonnant Marvell, dont l'un des contrôleurs équipe pourtant le récent MX200, Crucial interpelle. Particulièrement lorsqu'on croit savoir que l'entreprise s'est mise en quête d'acquérir une société capable de lui apporter son expertise en matière de contrôleur.
Le but : fabriquer ses propres puces afin de disposer de l'ensemble de la chaîne de production, du contrôleur aux puces mémoire, à la manière d'Intel, Samsung, Toshiba ou Hynix. L'objectif étant de réduire les coûts de production, ce qui pourrait s'avérer presque vital dans un domaine où la concurrence est rude et où la bataille tarifaire est désormais véritablement engagée.
Il ne reste que peu de sociétés dont Crucial pourrait se montrer acquéreur : LAMD est sous le giron de Hynix depuis 2012, SandForce appartient à Seagate. Il ne reste, pour résumer, que trois entreprises de renom : JMicron, Phison et Silicon Motion.
Le premier, après avoir été omniprésent à l'aube du SSD, est aujourd'hui nettement moins plébiscité. À notre connaissance, seul le récent SSD sobrement nommé « Gamer » du nouveau venu Galaxy intègre le dernier contrôleur JMicron, l'Héraclès.
Phison avait été, un temps, désigné comme candidat idéal au rachat, d'autant que la société a déjà œuvré aux côtés de Crucial il y a trois ans environ, au moment de la sortie du v4, une version plus abordable du m4.
Mais c'est vers Silicon Motion qu'a préféré cette fois se tourner Crucial, inaugurant un nouveau partenariat. Un choix partagé par PNY, Transcend ou Corsair sur sa série Force LX. ADATA a aussi fait récemment usage d'un contrôleur de la marque sur son SP610.
Après ces rappels et ces considérations très stratégiques, intéressons-nous maintenant à ce que propose Crucial avec ce BX100, tant en matière de composants que de performances.
Crucial tire les prix au maximum...
Au sein de ce BX100, un contrôleur Silicon Motion, vous l'avez lu. En l'occurrence, le SM2246EN. Une puce présentée à l'été 2013, celle-là même qui équipe le SP610 de ADATA. Elle est dotée d'un seul cœur et fonctionne sur quatre canaux. Compatible SATA 6 Gbps, elle gère les commandes TRIM, NCQ et SMART. Elle utilise un cache de type DDR3 fonctionnant à 1 600 MHz (512 Mo sur notre modèle de test).Bien que ce contrôleur prenne théoriquement en charge le chiffrement AES-256 et le TCG Opal, ces fonctionnalités ne sont pas disponibles sur le BX100 de Crucial, qui n'a sans doute pas voulu payer à Silicon Motion la licence pour son firmware le plus évolué.
Toujours dans l'optique de réaliser des économies, le BX100 est pourvu de NAND de 16 Go gravées en 16 nm. Soit la densité la plus importante que l'on peut trouver sur les puces « planes » (en opposition aux NAND 3D). Crucial peut ainsi, en une opération, produire davantage de modules de mémoire, réduisant le coût de production. Nous verrons que cela n'est pas anodin du point de vue des performances.
Le passage de 20 à 16 nm n'a, en revanche, pas d'influence sur l'endurance des puces. À en croire Crucial, son SSD peut assumer un total de 72 To d'écriture, soit un flux de 40 Go par jour durant 5 ans.
Dernier point, enfin, sur lequel Crucial économise ses investissements : le logiciel livré avec ses SSD. Son Storage Executive est un outil qui permet de mettre à jour le firmware, informer sur le statut du disque, son modèle, sa capacité, la version de son firmware, sa température et son état de santé global. Il autorise également secure erase.
Mais en l'absence de gestion de l'overprovisioning, de modules de tests ou d'un accès à quelques fonctions d'optimisations, ce logiciel tardivement mis à disposition par Crucial ne fait pas le poids face à la dernière Toolbox d'Intel, au SSD Guru d'OCZ ou encore au Magician de Samsung.
... et les performances s'en ressentent
Nous l'expliquions plus haut, Crucial a fait le choix de dies de 16 Go, ce qui n'est pas sans conséquences sur les performances de son BX100. Car un SSD fonctionne comme un RAID de NAND flash. Dans une certaine limite (principalement celle du contrôleur), plus vous disposez de puces, plus vos débits en écriture sont élevés. Le contrôleur étant capable de paralléliser une écriture, cette dernière sera d'autant plus rapide que les supports sont nombreux.En choisissant des NAND de taille importante, Crucial réduit mécaniquement le nombre de puces dans son BX100. Et sacrifie par conséquent le débit en écriture de ses modèles qui disposent des capacités les plus faibles, c'est-à-dire la version 120 Go et, dans une moindre mesure, la déclinaison 240 Go. Seuls les modèles de 500 Go et 1 To revendiquent les performances en écriture les plus élevées, à savoir 450 Mo/s. Un chiffre qui reste inférieur à ce dont sont capables bien d'autres modèles.
De même, le nombre d'opérations d'entrées / sorties par seconde en écriture varie significativement d'un modèle à l'autre. La version 120 Go gère ainsi 43 000 IOPS, contre 70 000 pour les déclinaisons 250 et 500 Go.
En lecture, pas ou peu de différence : les trois BX100 affichent sur le papier 535 Mo/s et 87 000 IOPS (90 000 pour la version 500 Go).
Les performances du BX100
IOmeter est un outil qu'il faut manipuler avec précaution lorsqu'il s'agit de tests de SSD. Ici, nous avons travaillé sur des secteurs et des fichiers de 4 Ko, avec des accès aléatoires à 100% (ce sont ceux qui sollicitent le plus le contrôleur), et selon deux scénarios différents :- une activité comprenant 25% de lecture, 75% d'écriture ;
- un protocole qui comprend 75% de lecture et seulement 25% d'écriture.
Sur ces tests menés sur une profondeur de queue égale à 1, le BX100 s'en sort plutôt bien, quel que soit le scénario. Face à la concurrence, ce SSD n'a pas à rougir, et affiche même des latences qui sont parmi les meilleures.
ATTO se charge quant à lui de tester le SSD sur des lectures et écritures séquentielles. Là, les limites en écriture du BX100 apparaissent, sur les très petits comme sur les plus gros. En lecture cependant, il rivalise avec le 850 Evo, même si ses performances tardent un peu plus à décoller que sur le SSD de Samsung.
CrystalDiskMark combine pour sa part une partie de tests séquentiels (sur un fichier de 1 Go) et une partie de tests aléatoires, avec différents scénarios (lecture et écriture d'un fichier de 512, puis 4 Ko, et de plusieurs fichiers de 4 Ko simultanément).
Sur la partie séquentielle, les performances en lecture sont tout à fait satisfaisantes, et très correctes en écriture. En revanche, pour une profondeur de queue de 32, le contrôleur peine davantage et fait moins bien que le 850 Evo, ou même que le MX100, son prédécesseur.
Nous avons également effectué quelques tests pratiques, comme la décompression d'un fichier WinRAR de 1,85 Go contenant des fichiers de tailles diverses comprises entre quelques Ko et plusieurs Mo.
Un tel test met en lumière le rôle assez faible du SSD par rapport à celui de la quantité de mémoire, de sa vitesse, ou encore de celle du processeur. Tous nos modèles sont donc assez proches, et le BX100 prend bien place parmi le peloton formé par tous les SSD.
Des tests de transfert sont évidemment de la partie : un fichier de 3,9 Go pour voir comment se comportent nos SSD sur les données de taille importante, et 1 Go de petits fichiers compris entre 12 et 34 Ko pour observer leurs performances sur les données de petite taille. Ces tests sont effectués à l'aide d'un RAMDisk de 4 Go fonctionnant sur de la mémoire cadencée à 1 866 MHz.
Comme le suggéraient les précédents tests, le BX100 se débrouille très bien en lecture, prenant même une place de choix dans notre classement. Quant à l'écriture, s'il ne figure pas parmi les meilleurs, il offre des performances qui restent tout à fait honorables.
Enfin, la copie proche, qui consiste à lire et écrire le même fichier, est une opération sollicitant beaucoup le contrôleur : il convient de voir comment nos concurrents s'en sortent.
Ici, le contrôleur Silicon Motion ne fait pas de miracles et les performances du BX100 sont plutôt à ranger du côté de celles du MX100 plutôt que de celles du Samsung 850 Pro. Notez toutefois que le récent Vector 180, plus haut de gamme, ne fait guère mieux que le SSD d'entrée de gamme de Crucial.
Notre avis
En observant que le contrôleur choisi par Crucial était identique à celui du SP610 de ADATA, nous avons craint au niveau des performances. Force est de constater que malgré son positionnement tarifaire plutôt bas, le BX100 propose des performances décentes. Du moins pour le modèle que nous avons testé, à savoir la version 500 Go.
Car pour la déclinaison 120 Go et, dans une moindre mesure, la version 240 Go, la donne n'est pas vraiment la même, du fait des choix de Crucial. Le constructeur a tout fait pour réduire les coûts, et finalement, il faudra choisir le modèle 500 Go ou celui de 1 To pour profiter de performances équivalentes à celles proposées chez la concurrence.
C'est souvent le cas dans le domaine des SSD, particulièrement dans l'entrée de gamme, mais les autres constructeurs pallient les insuffisances des SSD de faibles capacités par des dispositifs dont ne profite pas le BX100.
Ces éléments mis en perspective nous amènent à ne considérer, pour un éventuel achat, que les BX100 500 Go ou 1 To. Ces derniers se trouvent actuellement à 195 et 390 euros, respectivement, là où le Samsung 850 Evo est vendu 199 et 399 euros.
Le tarif parle donc légèrement pour Crucial, mais les performances, le logiciel de gestion et surtout la garantie (5 ans pour Samsung, contre 3 pour Crucial) font pencher la balance du côté du 850 Evo, qui garde notre préférence sur ce créneau.