Il est de bonne tradition au Japon et ailleurs d'entamer une nouvelle année en se la souhaitant mutuellement heureuse et en priant les kami-sama (divinités) de nous offrir d'agréables surprises, ce qui n'est hélas pas toujours le cas (lisez le manga).
En ces premiers jours du nouveau millésime, le mangaka japonais surnommé Jean-Paul Nishi et l'auteur de ces lignes vous présentent leurs meilleurs vœux, en espérant vous divertir et informer chaque semaine tout au long de 2011.
Pour débuter, comme tous les ans nous sommes allés pour vous dès le 1er janvier traîner nos guêtres dans les temples de l'électronique de Tokyo où la coutume veut, comme dans la plupart des commerces, que l'on inaugure l'année en proposant des pochettes-surprises appelées fukubukuro, où « sacs de la bonne fortune ». Il s'agit grosso-modo de brader des produits d'une façon un peu originale, en les enfermant dans des sacs dont le contenu reste plus où moins secret mais dont le petit prix est censé faire succomber le consommateur au porte-monnaie enrichi de quelques toshidama (étrennes). Cette année, la chaîne de boutiques Bic Camera, une des mieux représentées dans la capitale nippone, avait mis les petits sacs dans les grands en proposant des montagnes de fukubukuro, notamment dans ses navires amiraux des quartiers d'Ikebukuro et Yurakucho, respectivement à l'ouest et au centre de Tokyo. Il y avait particulièrement foule à l'entrée du Bic Camera Outlet et du Bic Camera Honten d'Ikebukuro, où se remarquaient notamment des jeunes couples japonais et touristes étrangers.
Généralement, les fukubukuro enferment un ou plusieurs articles pour un prix qui est inférieur d'au moins 30 % au tarif normal. Le client est informé du ou des produits contenus (une TV 32 pouces LCD, un appareil photo reflex, un enregistreur vidéo Blu-Ray, un ensemble d'appareils de soins, un ordinateur portable, etc...), mais il en ignore le plus souvent la marque et les caractéristiques précises. Seuls quelques éléments indispensables pour se faire une idée sont divulgués (taille de l'écran, nombre de pixels, volume du disque dur) de même que l'origine parfois, pour signifier le cas échéant que le produit est de marque japonaise. Cette année, il semble que les quantités de produits ainsi soldés étaient plus importantes que l'an passé, mais les catégories somme toute assez similaires.
Au total, Bic Camera présentait une bonne centaine de types de fukuburo, pour des prix allant de moins de 2 000 yens (18 euros, lot d'accessoires iPod, Ipad ou iPhone, par exemple) à 70 000 yens environ (640 euros, enregistreur à disques dur 1 teraoctet et Blu-Ray). Étaient spécialement mis en avant les téléviseurs de petites et moyennes dimensions (16 à 40 pouces), pour des tarifs de moins de 130 euros (marque non japonaise) à 600 euros (Toshiba). Des modèles de 32 pouces, dont on ignorait la marque, étaient présentés à 300 euros environ. Autres produits en tête de gondoles, les appareils photo numériques compacts, assurément de marques nippones, dotés de capteurs 10 ou 14 millions de pixels et accompagnés d'une carte mémoire de plusieurs gigaoctets pour moins de 90 euros. En bonne place aussi des modèles reflex à moins de 450 euros. Dans tous les cas, on peut faire confiance aux commerçants nippons, le rabais est conséquent, les articles neufs et garantis, même s'ils sont bradés parce que déjà remplacés en vitrine par des variantes plus récentes et performantes. Dans un des bâtiments de Bic Camera à Ikebukuro, entièrement dévolu aux ordinateurs et à leurs périphériques, les fukubukuro emballant un PC portable avec écran 15 pouces et suite Microsoft Office, pour 350 euros, sont très bien partis, de même que des disques durs externes de 1 teroctet pour 45 euros.
Les temples de l'électronique japonais étant aussi également des cavernes d'électroménager, quelques fukubukuro étaient également proposés audit rayon des produits blancs. Nous avons notamment relevé le cas d'une machine pour faire du pain à la maison à environ 170 euros ou encore, dans un registre différent, des sacs pour filles comprenant plusieurs appareils de soins esthétiques, dont par exemple un humidificateur-ioniseur de peau. Se remarquait aussi un ensemble très en vogue auprès des salariés de bureau d'une quarantaine d'années, intégrant un pèse-personne, un podomètre et un tensiomètre, le tout pour moins de 90 euros.
A vrai dire, pour qui a l'habitude de reluquer chaque année ce qu'écoulent en fukubukuro les hypermarchés de l'électronique, les types d'articles sont souvent les mêmes. Cette année cependant l'étonnement fut d'y voir figurer des téléviseurs de tailles relativement importantes et des fukubukuro, certes en nombre limité, enfermant une console PlayStation 3 de Sony, deux accessoires dont le PlaysStation Move et un jeu (pour 250 euros), ou encore d'autres comprenant un modèle portable DSi de Nintendo avec un objet complémentaire (peut-être un jeu) pour 130 euros. Évidemment, ces sacs sans grande surprise (contenu connu) ont vite trouvé preneur aux premières heures.
Au-delà des plus ou moins bonnes affaires que sont les ludiques fukubukuro, le nouvel an est aussi l'occasion de soldes montres ponctuels ou d'opérations spéciales pour doper les ventes d'une catégorie de produits. Exemple : un ensemble intégrant un téléviseur à affichage en trois dimensions (3D) de 40 pouces, un enregistreur vidéo compatible 3D avec un disque dur de 1 teraoctet, un caméscope 3D et des lunettes spéciales, le tout pour 3 500 euros environ. Ce lot, qui permet aux acheteurs de réaliser une substantielle économie par rapport au prix habituel, était proposé à seulement 10 exemplaires au Bic Camera de Yurakucho.
A noter également que les systèmes de points de fidélité très avantageux des commerces d'électronique japonais sont aussi valables sur les produits vendus en fukubukuro ou soldés d'une autre façon, de sorte que l'on bénéfice en-sus d'une ristourne sur l'achat suivant, un moyen efficace de faire revenir le client. Pour autant, tous les empires que sont Bic Camera, Yodobashi Camera, Yamada Denki (enseignes Labi) qui s'affrontent dans les quartiers de Shinjuku, Ikebukuro, Yurakucho-Shinbashi ou Shibuya, n'ont pas profité pareillement des clients errant en ce premier janvier. Les Labi, qui ont récemment fait une percée notable dans la capitale, étaient en effet fermés le jour de l'an, à la grande joie du rival Bic Camera. Toutefois, le 2, les fukuburo et autres formules de ventes spéciales de début d'année étaient au rendez-vous, avec des séries limitées chaque jour jusqu'au 4. Exemples de bonnes affaires ou prétendues telles au Labi d'Ikebukuro: un téléviseur LCD Sharp (le numéro 1 au Japon), 32 pouces, pour 350 euros, un ensemble PlayStation 3 + Gran Turismo 5 + câble HDMI pour 250 euros, un enregistreur vidéo à disque dur 1 teraoctet et DVD, de marque Toshiba, pour 250 euros, ou encore une mini-chaîne Hi-Fi Kenwood avec bloc d'accueil iPod pour un peu moins de 110 euros.
Nous ne sommes pas allés à Shinjuku ou Akihabara fouiner dans les rayons de Yodobashi Camera, mais les prospectus de ce géant vantaient le fait qu'il offrait pour ces premiers jours de 2011 un supplément de points de fidélité sur les articles achetés, et ce jusqu'au 10 janvier. Par ailleurs, comme tous ces monstres du commerce ont aussi des sites de vente sur internet, ils y proposent également des fukubukuro et autres lots spéciaux, lesquels sont généralement épuisés en quelques heures.
NB: si vous vous demandez si l'auteur de ces lignes s'est laissée tenter par un quelconque fukubukuro, eh bien la réponse est non. Idem pour l'ami Nishi. Bonne et heureuse année à tous.
