Qui mise sur la blockchain ? Partie 2

Alain Clapaud
Publié le 17 juin 2016 à 08h44
Pour comprendre la blockchain, la rédaction de Clubic publie chaque semaine, une partie d'un dossier portant sur cette technologie. Vous pouvez retrouver la première partie de notre série, intitulée Blockchain : la France est-elle en retard ? Partie 1

La blockchain peut se définir comme une base de données décentralisée. Elle permet d'organiser des échanges entre personnes sans qu'une entité centrale ne régisse l'ensemble. Tous les nœuds du réseau (regroupant les échanges), sont exécutés de manière à ce que n'importe quel utilisateur dispose d'un accès au « code source » de la technologie. Parmi les applications de la blockchain, on retrouve le bitcoin, mais également Ethereum, une plateforme qui permet de programmer l'échange de n'importe quel type d'objet.

Il ne peut exister de véritable écosystème sans le nerf de la guerre du business, des financements. Les investisseurs français ont pris du retard sur leurs confrères américains et rares sont ceux qui ont misé sur des projets français. 2016 et 2017 pourraient voir enfin l'éveil des business angels et fonds français vis-à-vis de la blockchain.

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2015 restera comme une année record en matières d'investissements dans la blockchain aux Etats-Unis. Près de 500 millions de dollars ont été injectés dans des start-up liées à la blockchain. Une hausse significative face aux 341 millions de dollars de 2014. Face à ce décollage, les investisseurs français semblent plus timorés. Beaucoup de projets doivent encore se contenter de "love money", c'est à dire des fonds investis par des amis et la famille des fondateurs. Néanmoins, quelques fonds ont commencé à placer de l'argent sur des projets français. C'est le cas d'Avolta Partners qui a participé au premier tour de table de Paymium, une place de marché bitcoin.

« L'écosystème français bitcoin/blockchain n'est pas aussi avancé qu'outre-Atlantique et l'argent ne coule pas à flots sur les start-up » reconnait Gonzague Grandval, fondateur de Paymium. « Nous avons pris du retard puisque les premiers investissements sur bitcoin ne sont arrivés que l'année dernière alors que les investissements ont démarré il y a plus de trois ans maintenant aux Etats-Unis. Or, la technologie blockchain a fait ses preuves avec le bitcoin depuis sept, huit ans maintenant. La phase d'apprentissage de ces technologies est assez longue et l'incompréhension de ces technologies peut faire peur aux investisseurs. Ceux-ci recherchent des créateurs d'entreprise qui ont véritablement une vision et qui puissent la partager avec un investisseur. La promesse affichée autour de blockchain et qui veut tout révolutionner peut inspirer la crainte auprès des investisseurs, c'est vrai. »

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L'année 2015 a été une année record pour les start-up blockchain aux Etats-Unis en termes d'investissements.


Les investisseurs français commencent à peine à s'intéresser à la blockchain

Pour l'instant, les grands business angels tels que Xavier Niel, Marc Simoncini ou Jacques-Antoine Granjon ne sont pas encore actifs sur ce secteur naissant. « Ils agissent un peu à la manière de Warren Buffet et tendent à investir dans des dossiers qu'ils comprennent et c'est vrai que Blockchain est un domaine sur lequel il faut vraiment passer du temps pour comprendre » estime Pierre Entremont, Senior Associate chez Otium Venture. Néanmoins piqué au vif par le décollage des investissements aux Etats-Unis, les fonds d'investissement sont de plus en plus nombreux à analyser les dossiers des start-up du secteur.

« Depuis plus d'un an, les investissements ne vont plus vers les acteurs du bitcoin, mais vers les acteurs de la blockchain » estime l'associé. Otium Venture s'est fait un nom pour avoir investi dans Lafourchette, revendue à TripAdvisor.

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Ce fonds vient de participer à un premier tour de table de 600 000 euros afin de financer Stratumn, une start-up blockchain créée à Paris par l'Américain Richard Caetano et Stephan Florquin. « A ma connaissance, Stratumn est la première entreprise blockchain française à avoir été financée par des VC (pourVenture Capital). Il y avait eu quelques opérations dans le domaine du bitcoin mais pour blockchain, nous sommes les premiers. Depuis, nos confrères s'y intéressent mais c'est un domaine encore très jeune et qui reste méconnu des investisseurs parisiens, contrairement à ce qui se passe aux Etats-Unis. » ajoute l'investisseur.

Casser le modèle de l'investissement "à la papa"

Si des porteurs de projets blockchain veulent effectivement réinventer le monde, certains souhaitent aussi réinventer la façon dont on lève de l'argent. Selon eux, le modèle « Silicon Valley » qui veut que le fondateur de l'entreprise possède son entreprise puis cède à des investisseurs des parts de sa start-up à chaque tour de financement, a vécu. Blockchain est totalement décentralisé, pourquoi ne pas faire de même avec le capital et la structure de gouvernance de l'entreprise ? Cette idée, c'est la DAO (Decentralized Autonomous Organization).

L'entreprise place ses parts sur une blockchain publique et ceux qui en prennent possession disposent du droit de voter sur les décisions de gestion. Un modèle proche du crowdfunding mais qui étend l'approche sur l'organisation même de l'entreprise. Slock.it, éditeur d'applications pour Ethereum, est en effet parvenu à lever plus de 150 millions dollars en quelques semaines en émettant des parts sur Ethereum. Les porteurs de ces parts sont maintenant invités à voter sur chaque nouveau développement de l'entreprise.

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Pierre Entremont, Senior Associate chez Otium Venture, l'un des premiers à miser sur les start-up blockchain en France.


Ce concept d'entreprise de nouvelle génération est en train d'essaimer, y compris en France. « La DAO, c'est la créativité à l'articulation entre la finance et la technologie » explique Philippe Honigman, fondateur de Ftopia. « Je transforme mon entreprise en une société décentralisée. Je m'étais impliqué dans le projet Backfeed afin de comprendre, d'apprendre à manipuler la technologie Blockchain pour l'appliquer à un cas réel, Ftopia. L'idée est de passer d'une société classique, détenue par ses cofondateurs et des investisseurs, à un modèle de communauté ouverte, où la détention de la valeur créée et les décisions sont prises par les contributeurs et non plus par les actionnaires. Je veux faire une DAO non pas de financiers mais avec les collaborateurs. »

Ce projet n'est que partiellement technologique car il implique des financiers, des juristes et des conseils en organisation pour répondre aux problèmes de cette transformation face à la réglementation en place. « C'est un modèle qui pourrait être repris par les communautés Open Source ou les plateformes type Facebook ou Uber, des organisations qui s'étendent indéfiniment mais qui, dans ces deux cas posent des problèmes de gouvernance et de gestion de la valeur créée » ajoute Philippe Honigman. « Sur ces plateformes, il y a une concentration de la richesse et des pouvoirs aux mains d'un petit nombre de gens alors que ces plateformes touchent des millions de personnes. Le système Open Source a fait ses preuves mais présente des problèmes de gouvernance persistants ».

Technologie d'avenir ou simple effet de mode ? La rédaction de Clubic Pro penche pour la première assertion. C'est pourquoi elle est partenaire du Blockchain Day, le salon regroupant l'ensemble des professionnels du secteur. Pendant une journée, Novaway et la Cuisine du Web à Lyon organisent, en partenariat avec la rédaction, une série de conférences dédiées.

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