Bonne surprise pour le monde nippon de l'édition musicale, les ventes de CD au Japon ont en effet augmenté cette année, pour la première fois en 14 ans, grâce au fétichisme de fans de vedettes nippones pour qui un disque a plus de valeur qu'un fichier téléchargé sur internet.
D'après les données publiées cette semaine par l'association des maisons de diques, quelque 196,62 millions de CD musicaux (60,61 millions de single et 136,01 millions d'albums) ont été vendus au cours des mois de janvier à novembre 2012, soit déjà plus que durant toute l'année 2011. Au rythme actuel, l'augmentation ne sera pas seulement vraie en volume mais également en valeur. Ces chiffres, qui correspondent à l'achat de plus de 1,5 CD par habitant du Japon dans l'année, englobent les CD d'artistes nippons et étrangers, les premiers représentant plus de 80% du total.
Cette remontée des ventes de musique sur support physique (disque optique compact) découle des achats effectués par des inconditionnels de groupes de jeunes starlettes, comme les nymphettes d'AKB48. Ces CD sont parfois vendus avec des habillages particuliers, des affiches, des chansons exclusives ou autres fioritures qui en font presque des objets de collection. Mieux: dans le cas d'AKB48, un pur produit commercial (mais fort bien conçu), un CD acheté donne le droit de participer à l'élection de la star du groupe. Du coup, les fans les plus invétérés claquent des fortunes pour s'acheter des piles de bulletins de vote afin que leur idole soit consacrée. 2012 a aussi été l'année de la sortie de nombreuses compilations de titres de chanteurs au long cours qui ont cultivé des générations d'admirateurs.
Reste que toutes meilleures qu'elles soient par rapport à leur niveau de l'an passé, les ventes de CD auront du mal à recouvrer leur niveau d'il y a dix ans, en 2002, lors que leur montant atteignait la bagatelle de 432 milliards de yens (plus de 4 milliards d'euros au cours actuel). En 2011, elles plafonnaient à moins de moitié moins, 208 milliards de yens. La part manquante a heureusement en partie été comblée par les ventes de musique en ligne dont le montant s'est établi à 72 milliards de yens (un peu plus de 700 millions d'euros) en 2011 pour 368 millions de téléchargements (singles et albums). En 2012, les chiffres pour le moment disponibles s'arrêtent en septembre, mais à cette date on constatait hélas une nette baisse de l'ordre de 25% par rapport aux résultats de l'an passé pour les mêmes 9 premiers mois.
Autres statistiques en demi-teintes, celles des achats d'appareils électroniques (hors mobiles et smartphones). Autant dire que 2012 n'a pas été un grand cru, selon l'Association des industriels de l'électronique grand public (Jeita). Les données ne sont pas encore disponibles pour novembre et décembre mais sur les dix premiers mois de l'année, le recul sur un an des ventes de TV était de 70% (avec environ 5 millions d'exemplaires écoulés), et de 55% pour les ventes de lecteurs et enregistreurs Blu-Ray. Il faut dire que 2011 avait été sur ce plan une année exceptionnelle à cause de la ruée des acheteurs sur les téléviseurs numériques juste avant l'extinction en juillet 2011 du signal analogique. Il n'empêche, les fabricants nippons de TV, à commencer par Sharp, Sony et Panasonic, accusent sérieusement le coup.
La tendance est aussi à la baisse sur la plupart des autres produits électroniques grand public, mais il est intéressant de noter que quelque 545 000 lecteurs de CD de salon ou portables et près de 3 millions de modèles de voitures ont encore trouvé preneurs au Japon entre janvier et octobre de cette année, un volume qui n'est pas très inférieur à celui constaté un an plus tôt. Si l'on cherche une vraie bonne nouvelle dans les tableaux de chiffres de la Jeita, on la trouve dans les statistiques de vente des systèmes de radionavigation automobile, en nette progression, tout comme les dictaphones à puce-mémoire ou encore les caméscopes, un grand classique pour les familles.
Reste qu'un seul produit électronique peut se targuer de faire un véritable carton cette année au Japon : le smartphone, même si les industriels Japonais n'ont pas réussi à conserver le monopole dont ils jouissaient de facto auparavant sur les mobiles traditionnels.
Selon l'institut nippon MM, entre avril et septembre, quelque 14 millions de smartphones ont été achetés au Japon, soit 70% du total des téléphones mobiles écoulés durant la même période. Cela représente une augmentation d'environ 42% par rapport à la quantité vendue durant les mêmes six mois de 2011. Sur ce total, 4,6 millions sont des iPhone d'Apple, groupe américain qui se taille donc une part de marché de 22% au Japon, en nette augmentation depuis qu'un deuxième opérateur nippon, KDDI, propose aussi l'iPhone. Jusqu'à fin 2010, Softbank était le seul. Fujitsu arrive tout juste derrière Apple avec une part de 18%, suivi par Sharp, puis Sony à peu près ex aequo avec Samsung. MM estime que quelque 31 millions de smartphones seront vendus au Japon entre avril 2012 et fin mars 2013 (période de référence souvent prise au Japon), sur un total de 42,4 millions de mobiles, le tout pour une population de 127 millions d'habitants. Dans les années suivantes, le total restera équivalent, mais la part des smartphones va progressivement augmenter pour atteindre 85% en 2015/2016.
C'est justement du fait de cette envolée durable des ventes de smartphones que les emplois dans le secteur du développement d'applications se multiplient. Selon la société Recruit, en octobre, quelque 18 137 emplois pour des personnes en milieu de carrière étaient proposés dans des postes en lien avec des prestations pour smartphones.
C'est aussi pour les smartphones que sont en train d'être mises en place au Japon de nouvelles infrastructures, en l'occurence des antennes-relais dans les tunnels des métros de Tokyo (et autres grandes villes par la suite), ainsi que des bornes de recharge sans contact. Jusqu'à présent, les ondes cellulaires ne pénétraient pas dans ces sous-terrains, mais l'on peut constater que l'accès au réseau est désormais souvent maintenu entre deux stations. Cela n'autorisera pas pour autant à téléphoner (car c'est interdit depuis belle lurette, par politesse vis-à-vis des autres passagers), mais cela permettra d'augmenter encore l'utilisation des services en ligne.
Par ailleurs, NTT Docomo et Panasonic sont en train de mettre en place en divers lieux publics des tapis de recharge sans connecteur, à la norme Qi. Il suffit de poser son smartphone compatible dessus pour qu'il se recharge. 3 500 espaces comportant des « spots Qi » devraient être actifs d'ici à fin mars prochain, contre 500 actuellement, notamment des cafés ou des salles de karaoké. Le standard Qi peut être utilisé pour divers types d'équipements (téléphones, tablettes, appareils photo, baladeurs) et est reconnu par des entreprises de diverses nationalités, mais les firmes japonaises sont les plus promptes à le généraliser, selon la presse nippone.
J.P Nishi et moi-même vous souhaitons à tous de très bonnes fêtes de Noël.