Live Japon : eneloop, le loupé de Panasonic

Karyn Poupée
Publié le 03 mars 2013 à 12h36
Le géant nippon de l'électronique Panasonic voulait faire parler de lui, eh bien c'est réussi. En présentant cette semaine ses nouvelles gammes de batteries bâtons rechargeables eneloop, il a électrisé les foules sur Twitter et autres sites internet. Les internautes crient au pillage, menacent de boycotter la marque...

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« Panasonic écrit en très gros, eneloop en tout petit ? Mais enfin, qu'est-ce que cela signifie ? » Pour les adeptes des batteries eneloop, le changement de design décidé par Panasonic est « horrible », « inadmissible », « d'une ringardise affligeante ». Ils sont en furie car Panasonic s'est permis de repeindre à ses couleurs les batteries eneloop initialement créées par son compatriote Sanyo, lequel est désormais fondu dans Panasonic. Si bien que ce dernier s'est approprié toutes les technologies de Sanyo, ce qui déplaît fortement à certains.

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Petit rappel: en 2005, Sanyo lançait ses premières eneloop, batteries nickel hydrure métallique rechargeables aux formats de piles bâtons. Elles commencèrent à connaître un très grand succès l'année suivante. Particularité: les eneloop sont déjà chargées lorsqu'on les achète (ce qui était chose rare à l'époque), conservent 70% de leur charge même après cinq années passées en rayon, et se rechargent ensuite plus de 1 000, 1 500 ou 2 000 fois pour les prochaines générations. Sanyo était alors le numéro un mondial des batteries rechargeables toutes catégories.

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Les eneloop, déclinées en versions « pro », « lite », « plus », en fonction des usages, ont prospéré dans le cadre de l'orientation écologique donnée à Sanyo sous le slogan « Think Gaia » par la patronne de l'époque, Tomoyo Nonaka, une ex-présentatrice de TV qui versa aussi dans la politique ensuite. Cette dernière fit de l'énergie et des technologies « bonnes pour la planète Terre » la priorité de Sanyo. Outre la marque eneloop, c'est sous sa houlette que fut aussi lancé le label Aqua pour les appareils électroménagers.

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En rachetant Sanyo, société créée par le beau-frère du fondateur de Panasonic, ce groupe (et c'était son but) a aussi mis la main sur d'autres technologies de pointe: celles des cellules photovoltaïques HIT (heterojunction with intrinsic thin layer, fine plaque de silicium monocristallin entre deux couches ultra-fines de silicium amorphe). Désormais, les panneaux solaires basés sur cette technique à haut rendement de Sanyo sont aussi vendus sous le label Panasonic.

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A l'étranger c'était peut-être différent, mais au Japon, les eneloop ont acquis une notoriété particulière, étonnante pour un produit de ce type. Certains ont intégralement remplacé l'usage de piles traditionnelles par ces batteries, certes plus coûteuses à l'achat, mais maintes fois réutilisables et très rentables à l'usage. Qui plus est, eneloop est devenu un ensemble de produits au style très sobre (les batteries elles-mêmes bien sûr, mais aussi les chargeurs, des chaufferettes, un contrôleur de charge, etc.).

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Pour les fans des eneloop, qui se sont écoulées à plus de 250 millions d'exemplaires dans le monde, la quasi-disparition de cette marque au profit de Panasonic est un outrage, la preuve d'une jalousie et la « revanche imbécile de vieux ingénieurs grincheux de Panasonic » envers ceux de Sanyo qui avaient mieux réussi qu'eux. « Panasonic aurait mieux fait de changer son nom en eneloop », s'énervent certains, « mais pourquoi ils ont fait ça, eneloop c'était pourtant si bien », « bon, ben moi, j'vais peut-être plus en acheter du coup », renchérissent d'autres. Un certain Daiichi, qui aurait voulu publier un livre sur la success-story des eneloop, n'hésite pas à écrire « la marque eneloop est morte ».

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A l'évidence, les dirigeants de Panasonic n'avaient pas imaginé ces réactions. S'ils les ont envisagées et négligées, c'est soit une erreur de jugement, soit un mépris des clients, et dans les deux cas c'est incompréhensible de la part d'une entreprise de cette envergure, à moins que cela ne cache une réelle volonté d'effacer toute trace de Sanyo, marque qui, elle-même, a déjà disparu et dont le site internet ne répond plus ni ne renvoie à Panasonic.

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Ce n'est pourtant pas le moment pour Panasonic de fâcher et perdre des clients, car si ses affaires vont certes un peu mieux que l'an passé, c'est encore loin d'être brillant. Le mastodonte a en effet subi une perte nette de 624 milliards de yens (6,1 milliards d'euros) au terme des neuf premiers mois de l'exercice 2012-2013, à cause de frais de restructuration. Même si le groupe a fait état d'un profit d'exploitation d'un milliard d'euros, son chiffre d'affaires a chuté de 9% à 52 milliards d'euros, après déjà un plongeon de 10% un an plus tôt. La dégringolade des recettes s'explique, selon les documents publiés, par des méventes de téléviseurs et enregistreurs vidéo au format Blu-Ray au Japon, non compensées par la bonne tenue des équipements électroniques pour automobiles ou encore des appareils électroménagers.

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Les marges ont cependant été grandement améliorées par des économies sur les frais fixes, notamment en termes d'approvisionnement en matériaux et composants. Cela a permis à l'activité des produits audiovisuels de cesser d'être déficitaire malgré un recul vertigineux de 23% des ventes afférentes. Les filiales d'énergie (batteries, systèmes solaires) et de composants électroniques sont quant à elles redevenues rentables, mais elles restent fragiles.

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Bilan, le résultat net de Panasonic reste ancré dans le rouge. L' écart entre le profit d'exploitation et la perte nette provient de dépréciations sur des activités ou de dévalorisations d'actifs financiers conformément aux règles comptables. Panasonic prévoit du coup de finir l'année avec un déficit net énorme de 765 milliards de yens (7,3 milliards d'euros au taux de change actuel) après déjà une perte record de 772 milliards de yens l'an passé.
Karyn Poupée
Par Karyn Poupée

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