Live Japon : musique en flux, la bataille commence

Karyn Poupée
Publié le 04 juillet 2015 à 19h41
Trois millions de chansons téléchargées en 12 jours, 160 millions de morceaux joués en streaming dans le même laps de temps: Line Music, le nouveau service de musique en flux de Line, connue pour son application de réseau social, a démarré sur les chapeaux de roues. Au Japon, l'empire du CD, la musique sur internet ne fait pourtant que débuter, la partie n'est pas gagnée, mais Line pourrait casser la baraque !
Des chiffres : 80 % des quelque 2,3 milliards d'euros de recettes issues des ventes de musique au Japon proviennent des supports physiques (CD, DVD audio, etc.). Les achats de fichiers numériques pèsent moins de 20 %.
Pourtant, l'auteur de ces lignes se souvient d'avoir écrit ici-même à plusieurs reprises que les téléchargements de musique depuis les mobiles étaient en croissance vertigineuse... Mais c'était il y a plusieurs années et depuis, eh bien cela a chuté ! 

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« Le montant tiré des téléchargements a régressé de moitié entre 2010 et 2014 », confirme Akira Nomoto, un vétéran du secteur.
Pourquoi? « Il fut un temps où les Japonais téléchargeaient des musiques qui servaient de sonneries pour leur mobiles multimédias (leurs fameux "garake", portables existant uniquement au Japon). Mais cette fonctionnalité a disparu avec la transition vers les smartphones », précise ce responsable des licences et relations avec les labels chez Spotify Japan, service suédois qui, au Japon, n'a toujours pas démarré.
Les Japonais n'écoutent pas de musique en ligne ?

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Si, mais sur Youtube de préférence pour les jeunes, gratuitement. « Du coup ils ne paient pas pour cette pratique », et cela n'entre donc pas dans les calculs de recettes, explique Yoshinori Hirayama, promoteur du festival de rock Summer Sonic.
Résultat : quand on regarde les statistiques, les ventes de CD dominent.
Si les CD se vendent (et pas qu'un peu), c'est que les Japonais sont des matérialistes, des fétichistes qui collectionnent.

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Les maisons de disques le savent, et rivalisent d'ingéniosité pour amplifier cette manie. Certaines offrent des cadeaux (photos, posters, etc.) avec les CD, et des chansons inédites, ou autre petit présent.
Le très malin producteur de la bande de nymphettes AKB48 a même eu l'idée de mettre dans les Single CD un bulletin pour élire la « meilleure chanteuse » de la bande. Les légions d'admirateurs ont acheté chacun des dizaines, centaines voire milliers de CD pour les plus fous afin de voter autant de fois et plébisciter leur idole.
Le tout dope spectaculairement les ventes de CD.

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Il existe aussi au Japon un commerce inconnu ailleurs : la location de CD, une activité, légalement encadrée, des chaînes Tsutaya et Geo, qui fait la joie des jeunes. Ils louent le CD, le copient en fichiers numériques et le rendent au magasin.
Malgré ce contexte un peu défavorable, Line, le fournisseur de contenus en ligne Cyberagent (offre appelée AWA), le géant américain de l'informatique Apple ou encore le N°1 mondial du streaming Spotify s'apprêtent à se livrer une bataille sans merci pour retourner la situation. 
Line Music vient donc d'inaugurer son service géré par une société constituée par Line (filiale japonaise d'un groupe sud-coréen) et les principales maisons de disques (Sony Music Entertainment, Avex Digital et Universal Music).
Line Music a l'avantage de s'appuyer sur une base d'abonnés à sa messagerie éponyme (équivalent de Whatsapp) et c'est un socle de jeunes clients très solide. Il existe déjà à travers Line des liens entre les artistes et leurs fans, tous ayant leur compte sur ce tentaculaire réseau social.

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Line se targue de 13 millions d'utilisateurs actifs par jour, rien qu'au Japon, soit plus de 10 % de la population de l'Archipel.
Tous ne deviendront pas forcément des clients de Line Music, qui propose un accès illimité pour 1 000 yens (7,5 euros) , de 20 heures pour 500 yens ou encore de 300 yens pour 10 heures, mais aucun autre rival ne peut aujourd'hui prétendre faire jeu égal. Pour le moment, le service est gratuit, mais cela n'est valable que deux mois.
Apple, lui, compte en gros 1,5 million d'acheteurs par mois via son magasin iTunes au Japon, et tous ne paieront pas d'emblée pour bénéficier de son service de streaming.
Si bien que les professionnels du secteur jugent que Line, qui a déjà créé des services annexes comme Line Manga, Line Game ou Line News, a clairement une longueur d'avance et une connaissance parfaite des attentes des Japonais. Ce réseau social va pouvoir s'appuyer sur un dispositif très rodé.

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Spotify, de son côté, ambitionne de lancer le service cette année, mais les négociations avec les maisons de disques sont plus difficiles ici que partout ailleurs. Pandora et Tidal ne sont pas non plus disponibles au Japon.
Les artistes étrangers auraient sans doute tout à gagner au succès de plateformes de streaming au Japon car le moins que l'on puisse dire pour le moment c'est qu'ils ont très peu de canaux de promotion dans l'archipel où 87% des recettes de musique sont le fait d'artistes japonais. Des playlists thématiques (par genres, par pays, par activités) pourraient constituer de nouvelles portes d'entrée sur un marché hermétique.
Karyn Poupée
Par Karyn Poupée

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