Web Summit - Interview avec A.Chennapragada, directrice de Google Now

Guillaume Belfiore
Par Guillaume Belfiore, Rédacteur en chef adjoint.
Publié le 06 novembre 2015 à 10h10
Avec Android 6.0, Google a levé le voile sur un certain nombre de nouveautés, notamment la fonctionnalité Now on Tap, présentée en mai dernier par Aparna Chennapragada, directrice produit et de l'ingénierie chez Google. A l'occasion du Web Summit, elle a accepté de répondre à quelques-unes de nos questions.

Pour l'heure réservée aux Etats-Unis, la fonctionnalité Now on Tap d'Android 6.0 propose d'effectuer un appui prolongé sur le bouton d'accueil du smartphone afin d'obtenir des informations contextuelles relatives à l'application ou au site Web en consultation. Dans un SMS qui contient le nom d'un restaurant, Now on Tap proposera par exemple des critiques extraites de Yelp ou d'effectuer d'emblée une réservation via OpenTable.

Aparna Chennapragada est responsable de ce développement et c'est d'ailleurs elle qui a présenté ces travaux lors de la conférence Google I/O au printemps dernier. A l'occasion du Web Summit, elle a de nouveau pris la parole en expliquant qu'un quart des applications installées sur un smartphone ne sont tout simplement jamais utilisées. D'une part ces dernières manquent de visibilité, d'autre part, leur ergonomie ne répond pas aux attentes de l'utilisateur. Pour Google, l'enjeu est donc d'indexer les liens internes à chaque application pour les mettre en avant de manière contextuelle.

A l'heure actuelle la firme californienne dispose ainsi d'une base de 100 milliards de liens encapsulés dans les applications, le but étant non pas simplement d'ouvrir cette dernière mais de présenter la bonne information, telle que la fiche d'un restaurant spécifique. Aparna Chennapragada revient ainsi sur quelques travaux qui ont été effectués sur Android.

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Combien de développeurs travaillent aujourd'hui sur les interfaces de programmations de Google Now ?

Aparna Chennapragada : Pour afficher du contenu enfoui au sein des applications, nous voulons nous assurer que l'expérience utilisateur est bonne et ne renvoie pas d'informations inutiles au mobinaute. Pour l'heure, nous sommes donc dans une phase pilote et nous travaillons avec environ une centaine de développeurs. Nous cherchons à savoir si le contenu est pertinent et si nous avons bien identifié les besoins.

Si Google.fr est relativement pertinent, en revanche, en France, Google Now est bien moins fonctionnel qu'aux Etats-Unis. Quels sont vos défis dans ce domaine ?

A.C : Je pense qu'il existe deux problèmes principaux, qui ne sont pas forcément spécifiques au marché français mais peuvent varier d'un endroit à un autre. Le premier vise à s'assurer qu'il y a le bon contenu, pertinent, dans un marché en particulier.

Un exemple qui me vient à l'esprit c'est en Inde où peu de gens conduisent, notamment dans les grandes villes comme Mumbai. Pendant longtemps, nous n'avions pas les horaires de train. En revanche, aux Etats-Unis et dans différents endroits d'Europe, nous avons accès à ces contenus. Le manque de données affecte certainement le produit.

Par ailleurs, Google Now anticipe mieux au fur et à mesure que vous l'utilisez, comme les autres produits de Google. Par exemple aux Etats-Unis, on lit beaucoup d'articles de sport : Google Now affiche les scores de vos équipes favorites. Dans certains marchés, et ce n'est pas qu'en France, ce type d'usage n'est pas très répandu.

Quand serais-je en mesure d'utiliser Now on Tap en France et sur d'autres smartphones que les Nexus ?

A.C : Ah, je m'attendais à cette question ! Nous souhaitons activer le produit dans d'autres langues avant la fin de l'année. Il y a plusieurs difficultés : il ne s'agit pas simplement d'internationaliser le contenu, il faut également analyser l'activité dans une autre langue et migrer le moteur d'extraction pour les recommandations.

Par ailleurs, nous devons être capables de déterminer quelles recommandations font le plus sens dans cette nouvelle langue. En Inde, par exemple, nos besoins sont très différents de ceux que l'on aurait aux Etats-Unis.

Enfin, il y a la reconnaissance vocale. C'est difficile de transposer dans toutes les langues, une situation où l'on demande par exemple le nom de la chanson en cours de lecture de manière contextuelle.

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En plus des liens d'applications et des informations contextuelles, verrais-je un jour des contenus sponsorisés de Google Adwords apparaître via Now on Tap ?

A.C : Nous travaillons sur cette fonctionnalité comme sur nos autres produits populaires. C'est-à-dire que nous nous concentrons sur l'expérience organique et travaillons très dur pour qu'elle fonctionne bien. Parfois ça prend des années, comme pour le moteur de recherche de Google par exemple. C'est comme pour tous nos produits, Gmail, YouTube etc...

La monétisation vient après la mise en place d'une expérience organique maîtrisée. Pour nous, c'est vraiment la priorité.

Plusieurs éditeurs proposent des launchers pour Android capables d'analyser le comportement et l'endroit géographique de l'utilisateur pour leur afficher les bonnes applications. Est-ce un domaine qui vous intéresse ?

A.C : Nous avons fait des tests en analysant à la fois les comportements spécifiques et globaux. Les usages spécifiques vont par exemple déterminer quelles applications vous utilisez en général le matin au réveil. Les comportements globaux passent en revue les applications les plus utilisées globalement sur un événement, par exemple.

Mais nous avons estimé que nous devions offrir aux utilisateurs une valeur ajoutée plus importante et pas simplement leur afficher des applications. C'est ce qui nous a conduit aux interfaces de programmation de Google Now. Plutôt qu'une simple icône, nous préférons afficher un endroit précis au sein d'une application pour effectuer par exemple une action directe.

Quid d'un dispositif capable d'agir sur les paramètres de mon téléphone en fonction de l'heure ou de ma position géographique ?

A.C : Nous avons également expérimenté cela. Il y a non seulement des informations que l'on peut remonter mais aussi des actions que l'on peut effectuer pour l'utilisateur. Nous devons nous assurer que cela répondra à plusieurs cas de figure, pas seulement quelques-uns, et les classer en catégories. Mais oui, nous commençons à nous y intéresser.

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Vous avez récemment retiré la commande « OK Google » de Chrome parce qu'elle était peu utilisée, mais l'intégration de « Hey Cortana » sur Windows 10 n'est-elle pas l'occasion de démocratiser ce type d'usage ?

A.C : D'un côté, nous avons observé un usage plus important de la commande vocale sur iOS et Android, nous voulions donc nous concentrer sur le mobile et nous assurer que cela fonctionne correctement. Mais il est vrai qu'il y a un problème de mise en avant sur le fonctionnement de ces assistants. La première fois que j'ai montré « OK Google » à mon fils, il n'était pas très emballé. Il a changé d'avis lorsqu'il a commencé à chercher des vidéos de YouTube.

Donc nous devons trouver les expériences les plus utiles pour chacun des utilisateurs.

Enfin, vous-mêmes, utilisez-vous Gmail ou Google Inbox ?

A.C : J'utilise les deux. En fait, j'ai plusieurs comptes. J'utilise Gmail sur un compte privé et, bien sûr, à Google j'utilise Inbox pour remonter les bugs que je rencontre.

Je vous remercie.
Guillaume Belfiore
Rédacteur en chef adjoint
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