« Il va y avoir du sang », « de la casse », « de l'eau dans le gaz »... Les images ne semblent pas manquer aux deux experts Philippe Suchet et Jim Breyer pour caractériser les jours sombres qui planent sur la vallée du silicium. Une véritable récession du marché des start-up devrait induire une valorisation revue à la baisse des plus prometteuses, sinon leur disparition pure et simple.
L'engouement s'englue au sud de la baie de San Francisco, à force de rêves et de peut-être un peu trop d'excentricité spéculative. Il y a des start-up « évaluées à plus de 10 millions de dollars qui n'ont aucun produit » révèle le Guardian. Sur place, diverses sources ne voient pas cette évolution d'un très bon œil : « la musique est sur le point de s'arrêter, et il n'y aura pas de chaises pour tout le monde » dit Philippe Suchet, qui conseille plus de 500 start-up californiennes.
Spécialiste du capital risque, Jim Breyer est encore plus clair : « 90% des start-up vont voir leur valorisation revue à la baisse ou vont mourir et 10% vont rencontrer le succès » dira-t-il dans une interview accordée a Business Insider. D'après lui, les start-up en demandent trop aux investisseurs, courant après des valorisations monétaires démesurées. Récemment, le Wall Street Journal avait recensé pas moins de 147 start-up valorisées à plus d' 1 milliard de dollars, le milliard tout rond étant, dans cet éventail incommodant, la mise de départ.
Richard Bronson et Lucas Duplan en septembre 2013, célébrant l'investissement du fondateur de Virgin dans la start-up Clinkle, d'un montant de 30 millions de dollars.
Plus royalistes que le roi
Mais en succombant à cette folie des grandeurs, les jeunes loups de la Silicon ne sont pas sans s'attirer aussi des méfiances nouvelles. Les investisseurs excluent désormais des levées de fonds sans clauses de ratchet (mesures de protection en cas de revalorisation à la baisse), et en viennent parfois à demander que leur soit rendu leur argent, comme pour Clinckle et son jeune fondateur Lucas Duplan.Breyer pense que la Valley a bien connu un temps ou elle fut peuplée de gens originaux, mais qui ont été remplacés par « des arrogants », et se dit plutôt satisfait de voir quelques unes de ces sociétés faire faillite.
Pour Nellie Bowles du Guardian, de passage à San-Francisco, il y a bien des signes qui ne trompent pas, et les fêtes sur des toits d'immeubles « non-descriptibles », les pizzas feuilletées d'or ou la mention de parking « réservé aux investisseurs en capital-risque » annoncent bien « la fin d'un monde ».
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