© Assemblée nationale
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L'encyclopédie participative devient, au gré des événements et des changements de législature, un champ de bataille de communication pour des personnalités publiques et politiques qui souhaitent apparaître sous un meilleur jour.

Pour fonctionner convenablement, la plateforme exige une transparence totale de la part de ses contributeurs bénévoles. Dans le cas d'ajouts effectués par des individus plus directement impliqués, ceux-ci ont l'obligation d'en informer la communauté. Ce qu'a manqué de faire une collaboratrice de l'actuel ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu, en apportant des modifications sur la page de ce dernier.

Une trentaine de retouches effectuées

Alors qu'il vérifiait les ajouts récents sur celle-ci, un « patrouilleur » bénévole a constaté qu'un nouveau compte récemment enregistré s'évertuait à supprimer ou altérer des passages défavorables au ministre. Après l'annulation de ces retouches injustifiées, une surveillance des activités du compte a été mise en place. Ce dernier, sous le pseudonyme « AminataDkt », cessa alors toute contribution après en avoir effectué une trentaine en deux ans.

Il n'aura pas été trop difficile de trouver l'identité de la personne à l'origine de ces actions, puisqu'il s'agit d'Aminata Diakité, conseillère en communication numérique du ministre quand il était maire d'Angers. Auprès de Mediapart, elle se justifie : « Quand j'ai pris mes fonctions à l'été 2020, je me suis rendu compte qu'il y avait des informations erronées, il manquait des informations, les dates étaient fausses. J'ai donc décidé de la reprendre ».

Travaillant toujours au sein de cette mairie, la conseillère ne fait pas partie du cabinet actuel du ministre. Mais, un autre compte, moins nominatif, reste actif sur la page, avec une adresse IP située à Angers, et agissant pendant les heures de bureau de la maire. Parmi des ajouts plutôt factuels, on trouve aussi la suppression des paragraphes peu flatteurs pour M. Béchu. Telles des références à un rapport de la Cour des comptes portant sur la gestion de certains projets par l'ancien maire, ou bien sur le retrait par la municipalité, en 2016, d'affiches sur la prévention du VIH.

Un cas non-isolé

Si Christophe Béchu dit ne pas être au courant des agissements de son ancienne collaboratrice, la position de contributrice de celle-ci est problématique, surtout lorsque l'on voit la nature de certaines modifications apportées. Avec une page visitée par des dizaines de milliers de personnes rien qu'au jour de sa nomination, en juillet 2022, le ministre est une personnalité politique importante. Une telle volonté de lisser son passif ne peut pas passer inaperçue.

Une enquête du Monde, réalisée en juin 2022, a révélé que plus de 50 % des membres de la législature sortante avaient, au moins une fois, apporté des modifications à leur page. Les administrateurs de Wikipédia regrettent que leurs plateformes puissent servir de « vitrine promotionnelle ». Par exemple, des informations à propos de personnalités du gouvernement et de l'Assemblée nationale de l'époque, concernant entre autres Marlène Schiappa et Patricia Mirallès, ont pu faire l'objet de retouches favorables alors qu'elles étaient encore en fonction.

S'il est possible de mettre en doute l'intégrité et la sincérité des individus concernés, on ne peut que redouter qu'une telle tendance puisse se démocratiser un peu plus. La société Avisa Partners, par exemple, avait déjà proposé ses services au milliardaire français Bernard Arnault pour « améliorer » sa page Wikipédia.

Source : Mediapart