Alleluia ! Elle est parmi nous, la fameuse tablette iPad, après des mois de spéculation sur des dispositifs suivant le regard, sur des webcams intégrées à l'écran, sur des tablettes qui s'enfichent dans un iMac (beurk, c'est dégoutant), sur un appareil révolutionnaire qui va complètement chambouler le monde de l'édition, révéler le sens de la vie, changer complètement la manière dont nous utilisons un ordinateur. Hier, Steve Jobs a dévoilé « la tablette la plus attendue depuis les Dix Commandements » (une plaisanterie du Wall Street Journal prise peut être un poil trop à la lettre ?) et... c'est un gros iPod Touch. Hein ? Comment ? Pas possible, il doit y avoir un dispositif de téléportation caché quelque part ! Non, non les gars, c'est juste un iPhone avec un écran de 1024x768, une interface revue et corrigée pour cette résolution, quelques nouvelles fonctionnalités comme la lecture de livres, et des versions « tablette » de Mobile Safari, Mail ou iCal.
Et... sérieusement, vous vous attendiez à quoi ? On commence à savoir comment ça marche. En janvier, tout le monde se met à spéculer sur le produit révolutionnaire qu'Apple va bien pouvoir sortir, et s'imaginer que la firme de Cupertino va nous décrocher la mâchoire, et nous faire baver d'impatience en attendant sa disponibilité. Et quand arrive le moment, le monde pousse un « c'est tout ? » de dépit, souvent suivi de ses petits frères « c'est trop cher » et « ça ne marchera jamais » (la logique de la dernière affirmation étant souvent démolie dès la mise en vente de l'iBidule). Et il est vrai qu'Apple a précédemment placé la barre très haut : en janvier 2007, on a bien mis quelques semaines à se remettre de la démonstration de l'iPhone. Parce qu'on a beau dire, un téléphone comme celui là, on n'en avait jamais vu. OK. Mais voilà, maintenant, il va falloir s'y habituer : la révolution, c'était l'iPhone. Et Apple n'est plus dans le business de décrocher les mâchoires en sortant des produits révolutionnaires d'un chapeau, juste comme ça, pour la beauté du geste. Avec des revenus records, et en ayant réussi à imposer son téléphone et son système d'exploitation mobile comme une plate-forme qui compte, il s'agit de bâtir. Et l'iPad n'est donc qu'une déclinaison de cette technologie. C'est décevant. Mais c'est réaliste. Comme le disait John Siracusa sur Ars Technica, il ne fallait pas s'attendre à plus : on allait bailler devant la mythique tablette, qui ne serait qu'un nouvel appareil basé sur l'iPhone OS, l'App Store et les partenaires media d'Apple.
Magique et révolutionnaire ?
Alors vu comme ça, ça n'est pas très sexy, n'est ce pas ? Apple ne va pas présenter les choses de la sorte, non, non ! Il faut du rêve, du glamour. Alors Steve Jobs l'annonce en substance et le designer Jonathan Ive enfonce le clou (Jon, si tu nous écoute : ON VEUT LE MEME DOS EN ALU POUR L'IPHONE 4 !). L'iPad, mesdames et messieurs, est Magique et Révolutionnaire. Si, si c'est écrit dessus ! Et... c'est peut être là le problème : l'auto persuasion. En regardant la présentation, on ne peut pas s'empêcher de s'imaginer que Steve Jobs va s'assoupir dans son canapé à force de montrer à son auditoire des applications révolutionnaires et magiques... que l'on connaît déjà depuis 2007, dans une résolution plus grande certes, et avec moult panneaux latéraux absents de l'iPhone : surfer le web du bout du doigt, visionner ses photos (d'accord, l'appli a l'air sympathique), utiliser Google Maps, consulter et rédiger ses mails, écouter sa musique... Toutes ces applications bénéficient d'interfaces adaptées à l'écran de l'appareil, et comme d'habitude, elles ont l'air tout à fait élégantes et sobres, avec cette petite « Apple touch » qui fait pousser des « wow » mais pour tous les « great », « amazing », « awesome » lâchés par Steve Jobs, on a du mal à partager son enthousiasme. Ou en tous cas à y entrevoir la révolution et la magie. Peut être en l'ayant entre les mains ?
Bien sûr, l'iPad a l'air très agréable à utiliser, et propose de nouvelles opportunités : l'application du New York Times et le lecteur de livres électroniques ont l'air très séduisants. La résolution de 1024x768 permet un gain de place évident dans les jeux présentés, notamment en ce qui concerne les interfaces virtuelles. Mais sérieusement : pas de multitâche, alors que le processeur semble suffisamment puissant pour le permettre ? Pas de webcam ? Un écran d'accueil à peine retouché ? Pas de port USB ni de slot pour carte SD ? Et quid de la 3G ? Il faudra visiblement s'acquitter d'un abonnement, un de plus, sans compter que les modèles compatibles 3G seront facturés avec une différence de 130 dollars ! Bon point en revanche : l'abonnement sera pré-payé et l'appareil débloqué. Au final, on retiendra surtout deux points. Le premier : Apple lance une suite bureautique mobile avec la version iPad de sa suite iWork. L'application semble assez ambitieuse et complète, ce qui donne au moins un avantage à sa tablette : l'édition de documents, chose impossible sur iPhone ou iPod Touch. Pour le coup, on est plus proche d'une application « desktop » que d'une mini application mobile. Le second : l'iPad est animée par un processeur signé Apple (suite au rachat de la société PA Semi) et au vu des premières impressions laissées par des bloggeurs qui ont pu prendre la tablette en main, celui ci semble très véloce. Et au passage, l'iPad n'utilise pas la version 4.0 de l'iPhone OS, que certaines sources avaient placé parmi les annonces d'hier soir. De quoi relancer la machine à spéculations en attendant le prochain événement consacré à l'iPhone...