L'attente fut longue, presque interminable avant de voir débarquer ce nouvel opus. Il faut dire qu'Electronic Arts connaît bien la chanson et le marketing n'a aucun secret pour l'éditeur américain. Bien peu de joueurs ont de ce fait échappé au rouleau compresseur publicitaire qui a précédé la sortie du jeu. Les images, très impressionnantes, et les vidéos, splendides, ont mis l'eau à la bouche du plus réfractaire des joueurs de Warcraft III... Il est temps de juger sur pièces : C&C Generals est là !
Exit NOD et GDI, vive la guerre moderne !
Qu'on se le dise, Command & Conquer (C&C donc pour les intimes) a définitivement coupé les ponts avec les adversaires originels de la série : le NOD et le GDI c'est de l'histoire ancienne ! D'ailleurs ce n'est même pas le développeur emblématique de la série qui est aux commandes ici puisque Electronic Arts a confié le bébé à EA Pacific venant donc remplacer Westwood Studios (en fait EA Pacific est en partie issu de Westwood). Avec Generals on inaugure donc un nouveau développeur et de nouveaux adversaires !Hélas on ne peut pas dire que la première impression soit très positive. L'introduction déjà fait carrément l'apologie de la guerre à moins que ce ne soit du second degré pas vraiment drôle (enfin pas à mon goût en tout cas). Mais c'est ensuite que les choses empirent et que l'on se demande si le lobby militaro-industriel américain n'a pas carrément pris des parts dans le capital d'Electronic Arts, jugez plutôt (mais non pas le chien de Mickey, ce qui suit !). Trois camps sont en présence et chacun d'eux se caractérise par ses armes et sa technologie, jusque là rien d'étonnant.
L'introduction, tout en finesse, laisse beaucoup de place à l'humour !
Les Chinois constituent un peuple violent qui ne se soucie ni des victimes, ni des dommages collatéraux et encore moins de l'environnement. Ils n'hésitent pas à faire tourner leurs vilaines centrales nucléaires au-delà de leurs limites pour compenser leurs faiblesses et risquent à tout moment le désastre. Ils sont passés maîtres dans l'usage de la propagande et "produisent" leurs soldats à un rythme effrayant ne rechignant pas à en faire de la chair à canon. Enfin, leur arme suprême, le missile nucléaire, est la preuve de leur manque totale de discernement... En gros ce sont les remplaçant des Soviétiques !
La seconde faction en présence est la GLA pour Global Liberation Army mais comprenez plutôt Guerriers Lobotomisés et Arabes ! Avec la GLA, EA Pacific sombre dans la plus complète stupidité. Il s'agit d'un énorme groupement terroriste très vilain qui ne recule devant rien pour mettre à mal les intérêts de tout ce qui ne leur ressemble pas. Armes bactériologiques, terroristes, obus chimique ou anthrax constituent une partie des joyeusetés qu'ils offrent aux joueurs. Ils vivent dans des grottes et leur joker est constitué par une arme qui a et fait toujours la une de l'actualité : le missile SCUD. Heureusement, ils seront vaillamment stoppés par la troisième faction...
Si on jouait ?
Laissons de côté le triste tableau de la géopolitique internationale que nous offre C&C Generals pour nous concentrer sur ce qui nous préoccupe finalement : le jeu. Pour les joueurs qui ne connaîtraient pas la série (il en existe encore ?), il s'agit donc, nous l'avons dit précédemment, d'un jeu de stratégie temps réel et ce faisant il intègre la plupart des canons (terme judicieux pour un soft guerrier) du genre. Les trois camps que nous avons énumérés conduisent à trois campagnes distinctes. Chacune d'entre elles se composent de quelques missions vous permettant de toutes les maîtriser en vue, ensuite, de prolonger le plaisir en réseau.Avant d'attaquer ces campagnes, un petit didacticiel permet de se faire la main et seuls les habitués de C&C devraient pouvoir s'en passer. Command & Conquer dispose en effet de quelques particularités qui l'ont toujours mis à l'écart des autres productions. C'est par exemple l'un des rares jeux à permettre la vente de ses structures pour récupérer quelques ressources rapidement. C'est aussi un des rares à utiliser le clic gauche de la souris pour les déplacements rapides des troupes. Ces quelques originalités nécessitent un petit temps d'adaptation et le didacticiel est parfait pour ça.
Trois niveaux de zoom, mais seul le plus large est réellement jouable.
Cette étape passée, on peut choisir l'une des trois campagnes : Chine, GLA et Etats-Unis. La première est sans doute la plus classique mais aussi la plus réussie du lot. Les Chinois doivent faire face à une attaque d'envergure sur leur propre sol. Une attaque menée par les forces de la GLA commencée alors que les troupes du peuple (l'armée chinoise) étaient en pleine parade... Les fourbes ! Les présentations de missions se font toujours de la même manière et sont agrémentées de cinématiques réalisées avec le moteur graphique du jeu. Les séquences vidéos (Ah... KARI Wuhrer en Tanya) ont donc disparues et avec elles ce sont quelques éléments les plus caractéristiques de la série qui sont passés à la trappe. Le jeu en est devenu un peu plus classique, plus proche de la concurrence. L'interface utilisateur illustre d'ailleurs parfaitement cela avec son déplacement à l'horizontal vers le bas de l'écran. De la même manière, le brouillard de guerre est plus proche de ce que l'on est habitué à voir chez Ensemble Studios ou Blizzard et les bâtiments n'ont plus besoin d'être collés les uns aux autres pour être construits.
Et en réseau ?
La campagne chinoise est, nous l'avons dit, la plus réussie. Elle se rapproche en effet beaucoup de ce que l'on a l'habitude de voir en simple joueur. Les deux autres et en particulier celle de la GLA ne sont hélas pas du même niveau. L'organisation terroriste ne fait en effet que massacrer des populations civiles pour assurer sa survie et les missions y sont tout ce qu'il y a de plus répétitives et ennuyeuses ! La campagne américaine, enfin, vient rattraper un peu les choses même si l'idéologie stupide mise en avant par les développeurs énervera certains joueurs : les gentils américains au secours des peuples opprimés, oui, les mêmes Américains qui avant de venir libérer l'Europe avaient tout de même déclaré leur neutralité le 5 septembre 1939... Ces trois campagnes laissent malgré tout un arrière goût d'inachevé. C'était déjà le point faible des derniers mastodontes du jeu de stratégie temps réel mais là c'est encore plus net. Les vétérans devront impérativement mettre la difficulté assez haut s'ils ne veulent pas risquer de terminer les 21 missions (sept par campagne) que comporte la partie solo en moins de 15 heures !Heureusement, il existe ensuite les joies du réseau pour prolonger cette durée de vie relativement déficiente. C'est également cette partie réseau qui permet de passer outre le message idéologique débilitant puisqu'on peut alors voir les peuples en opposition de la manière que l'on veut. Les différences entre les trois camps deviennent d'ailleurs la source d'affrontements hauts en couleurs : l'armée américaine usera de sa suprématie aérienne alors que c'est l'armement lourd qui caractérisera les attaques chinoises et leur fameux tank Empereur. Enfin, la GLA est la faction la plus originale à manipuler grâce à ses unités tout à fait particulières. Elle "joue" évidemment beaucoup plus sur sa grande mobilité (les bâtiments sont auto-suffisants en énergie) et sur les assauts surprise pour faire la différence.
Les compétences de général offrent une personnalisation intéressante des troupes.
Les amateurs de gestion de ressources savent bien que les C&C ne sont pas les jeux les plus intéressants de ce point de vue là et Generals ne va pas changer la donne. Le Tiberium n'est évidemment plus d'actualité et il est maintenant remplacé par ce que l'on appelle parfois "nerf de la guerre" : le pognon quoi ! Selon votre faction ce sont des camions (Chinois), des chinook (Américains) ou de simples ouvriers (GLA) qui iront chercher les précieux containers dans les entrepôts pour augmenter votre pécule. Si cette limitation des ressources n'est pas vraiment gênante, il en va autrement, et surtout en réseau, du pathfinding. Il n'est clairement pas à la hauteur de la réalisation générale ! Le multijoueurs reste malgré tout et malgré l'absence de formations, l'élément le plus intéressant du fait des nombreuses stratégies qu'il permet et du fait d'un rythme certain !
Le plus beau RTS du moment ?
Terminons ce test si vous le voulez bien (même si vous ne voulez pas d'ailleurs, je n'ai rien d'autre à raconter maintenant de toute façon !), par une petite description de ce qui nous a le plus impressionné tout au long du développement du jeu : la réalisation technique. Mon opinion, très tranchée mais qui n'engage que moi, est finalement assez simple : Command & Conquer Generals est tout bonnement le plus beau jeu de stratégie temps réel du moment ! Warcraft III était coloré, Age Of Mythology très fin, mais aucun de ces deux mastodontes ne peut rivaliser avec la débauche d'effets présente dans Generals.Les jeux de lumière sont toujours très présents, les unités finement dessinées et les possibilités de zoom ne font que renforcer cette première impression. C'est toutefois au niveau des animations que Generals fait le plus fort. Les unités d'infanterie s'envolent comme des pantins désarticulés à la moindre explosion et le recul à chaque tir des tanks est nettement visible. Tout ce petit monde bouge d'ailleurs assez bien même s'il faudra penser à muscler votre configuration pour en profiter pleinement. La configuration préconisée par l'éditeur sera une nouvelle fois complètement dépassée par la gourmandise du soft et c'est plutôt vers un XP1800+ ou un Pentium4 1.8 GHz qu'il faudra vous tourner. Pensez à l'accompagner d'au moins 256 Mo de mémoire (512 Mo est un plus non-négligeable) et d'une carte graphique Radeon 8500 ou GeForce3 minimum pour jouer correctement en 1024x768 avec un niveau de détails "moyen".
Sachez également que le jeu semble tout simplement incompatible avec les Cartes Graphiques à base de puces SiS (les Xabre) ou Matrox, étonnant ! Enfin, un dernier commentaire pour vous dire qu'Electronic Arts ne s'est pas moqué des français en proposant une traduction globalement très satisfaisante du jeu. Certes les voix en cours de jeu peuvent énerver, mais celles d'introduction et de présentation des missions sont réussies et la localisation générale du programme est efficace.
La destruction du barrage est si réussie que les développeurs l'ont utilisée plusieurs fois !
Vive l'Amérique !
Que dire d'autre en conclusion ? C&C Generals propose une idéologie nauséabonde où la propagande se fait aussi minable que stupide (lapalissade ?). L'opposition NOD / GDI était certes aussi manichéenne mais au moins elle ne nous infligeait pas ces leçons de morales à trois francs six sous. les Chinois sont des brutes que seuls les terroristes (Arabes bien sûr) surpassent mais heureusement que les gentils GIs sont là pour remettre le monde dans le droit chemin !Une fois ce triste constat dépassé, et ce n'est pas toujours évident, nous nous trouvons face à un jeu de stratégie temps réel doté d'une réalisation tout simplement magnifique. Les animations et les effets pyrotechniques sont vraiment de toute beauté et cela fait plutôt bien passer la gourmandise du soft. Hélas, une excellente réalisation ne fait pas un excellent jeu et C&C Generals ne parvient pas à retrouver le rythme de ses ancêtres. En effet, les campagnes simple joueur sont fades, un peu trop simples et il faudra se tourner vers le jeu multijoueurs pour trouver un véritable défi !
C&C Generals reste un bon jeu de stratégie temps réel mais il ne peut vraiment soutenir la comparaison face aux ténors du genre et ne pourra intéresser un public aussi large. Les fanatiques de la série ne doivent toutefois avoir aucun doute : ils retrouveront avec plaisir leur terrain de jeu favori.