En tête des ventes allemandes depuis un moment, Anno 1503 est maintenant disponible un peu partout dans le monde et plus particulièrement en France. Les équipes de Max Design et Sunflowers ont travaillé sur le projet pendant plusieurs années afin de donner une suite digne de ce nom à Anno 1602. Une suite qui donne aux anciens l'envie de replonger mais qui incite également les petits nouveaux à tâter de la colonisation.
Anno 1602 avait créé une petite surprise en remportant un énorme succès alors que personne ne l'attendait vraiment... En tout cas pas aussi haut dans le classement. Anno 1503 se devait donc d'offrir au moins le même niveau de profondeur pour ne pas décevoir les amateurs tout en restant accessibles à tous afin d'espérer des ventes encore plus importantes que celles de son prédécesseur. Pari réussi pour Sunflowers ?
Bis repetita ?
Anno 1503 ne fait pas vraiment dans l'originalité et son concept est exactement identique à celui de son prédécesseur. De la même manière qu'Anno 1602, il propose en effet aux joueurs de découvrir les joies de la colonisation. Convaincu par un vieux loup de mer, vous débarquez en Amérique avec un petit bateau et des rêves plein les yeux. Des rêves de trésors et de richesses bien sûr, mais comme nous ne sommes pas de simples barbares pilleurs de tombes, des rêves de modernité et de civilisation également ! Gardons toutefois les pieds sur terre car avant de rêver il faudra parvenir à comprendre exactement ce qu'il faut faire et comment le faire. Un didacticiel très complet a heureusement été intégré et si les habitués de Anno 1602 pourront sans doute s'en passer, pour tous les autres joueurs il s'agira d'un passage obligé tant le jeu est touffu !En quelques "leçons", le didacticiel permet de tout savoir ou presque sur les moyens de coloniser une nouvelle île, d'apprendre les bases du commerce ou de maîtriser le difficile art de la guerre. Cette formalité accomplie, il est possible de véritablement se lancer à l'assaut du nouveau continent pour établir ses premières colonies avec les moyens forts modestes dont vous disposez. Un fringuant navire, quelques pièces d'or, une poignée d'homme et diverses marchandises constituent en effet votre maigre capital de départ. Mais plutôt que de s'apitoyer sur son triste sort, il faut se mettre en quête d'un lieu propice à votre installation.
Le didacticiel est le passage obligé des nouveaux joueurs
Un personnage particulier vous aide d'ailleurs dans cette tâche : l'éclaireur. Il permet de sonder le nouveau continent, de vérifier la présence des indispensables gisements de minerai ou de sel et enfin de se renseigner sur d'éventuels voisins. Le site de départ est évidemment primordial pour la survie de la colonie et il est donc important de prendre son temps pour se décider. Une fois le choix effectué, on peut lancer la construction de notre entrepôt côtier qui sert de centre vital à la colonie mais qui fait également office de porte vers le reste du monde...
Ca se complique rapidement !
Centre de stockage de votre colonie, l'entrepôt en délimite aussi l'extension maximale par sa surface "d'action". Au-delà d'un certain cercle, il sera nécessaire de mettre en place des "marchés couverts" qui permettront de construire plus loin encore les bâtiments les plus variés. En plus des classiques maisons d'habitation, nous trouvons en effet dans Anno 1503 une multitude de structures aux fonctions diverses. Au début de la partie, le choix est évidemment assez restreint : bûcherons, pêcheurs, fermiers, éleveurs de moutons ou bien encore tisserands sont les principales activités offertes à vos pionniers.Bien vite cependant, la colonie va prospérer et les habitants devenir plus exigeants. On peut définir cinq stades d'évolution de la population : pionniers, côlons, citoyens, marchands et aristocrates. A chacun de ces stades, les besoins de la population sont plus nombreux, plus précis et plus difficile à satisfaire. Exception faite du mode campagne (12 missions plus ou moins liées les unes aux autres) qui propose des défis très clairement explicités, Anno 1503 ne donne pas de véritables objectifs aux joueurs et n'offre pas non plus de mode multijoueurs. Le but de ce titre solo est donc "simplement" de s'enrichir et de faire prospérer sa colonie à la manière, en quelque sorte, d'un SimCity historique. Pour parvenir à ses fins, il est nécessaire de satisfaire les besoins toujours plus complexes de ses habitants et de leur fournir tout ce qu'ils jugent nécessaire.
Pour changer leur quotidien alimentaire, vous aurez alors à mettre en place des élevages de boeufs ou des fermes céréalières. Grâce à l'exploitation des carrières, il sera ensuite possible de se procurer des pierres et de ce fait d'entamer la construction de bâtiments plus complexes comme des écoles ou des manufactures de tabacs. Votre population demande en effet des biens de plus en plus particuliers et aux tissus ou alcools du début de partie succèdent bien vite le tabac, la soie ou même les bijoux. Une véritable industrie doit être mise sur pied afin d'être capable de tout produire, alors que l'extraction des matières premières et leur acheminement vers les centres de transformation nécessite une organisation sans faille des routes et chemins.
Expansion et combats
Les besoins de votre colonie, sans cesse grandissant, ne pourront vraisemblablement être assouvis grâce à votre seule île de départ. L'agriculture nécessite par exemple certaines soles que votre terre d'adoption ne peut fournir : tabac, pomme de terre, coton ou indigotiers ne poussent pas vraiment aux mêmes endroits. De la même manière et à moins d'avoir vraiment eu le nez creux, les ressources minières de votre première île ne permettent pas de tout produire. Il est donc nécessaire d'aller voir ailleurs et cela se traduit dans les faits par la colonisation d'autres îles présentes sur la carte. Un petit tour de bateau et une petite reconnaissance par l'éclaireur permet de trouver l'île dont vous aviez exactement besoin !Quelques jolies séquences vidéos agrémentent les parties
L'établissement de la nouvelle colonie est évidemment très proche de la première et un astucieux système de routes commerciales permettra de les rendre interdépendantes sans s'user la santé. Même deux colonies ne seront toutefois pas suffisantes pour assurer le bien-être de vos concitoyens, pensez donc qu'au total, c'est tout de même la bagatelle de 19 matières premières (chanvre, or, houblon...), 15 produits de consommation (outils, huile de lampe, herbes médicinales...) et 4 matériaux de construction (bois, pierre, marbre...) qui sont disponibles dans le jeu ! Des voisins sympas pourraient éventuellement accepter de vendre quelques unes de leurs productions mais, en règle générale, il sera préférable de tout faire soi-même : le commerce c'est joli mais ça revient très cher !
Vivre à l'écart du monde n'est toutefois pas possible très longtemps dans Anno 1503. Les autres peuples ne sont pas loin et il est indispensable de faire attention à leur progrès. Diplomatie et jeux vidéos ne faisant pas vraiment bon ménage, "faire attention" se transforme bien souvent en "leur péter la gu...." au moindre mouvement. Il faut dire que depuis Anno 1602 les progrès sont en ce domaine tangibles. On reste encore assez loin d'un véritable jeu de stratégie temps réel mais il est impressionnant de voir que les développeurs on réussit à faire simultanément un jeu de gestion extrêmement complet et un jeu de stratégie tout à fait correct !
Les troupes sont produites selon les matières premières disponibles mais se gèrent ensuite comme dans n'importe quel autre jeu du genre : il est par exemple possible de créer des groupes et de leur imposer des formations. Du fait des nombreuses structures défensives disponibles, les combats sont généralement très tactiques et il faudra évidemment parvenir à bien équilibrer ses troupes en fonctions de l'adversaire et des objectifs poursuivis. Malgré la nouvelle dimension qu'apporte cette partie militaire en net progrès depuis Anno 1602, on regrettera tout de même que les combats soient rapidement "fouillis". Nous l'avons dit, des formations existent et les groupes se gèrent comme dans n'importe quel autre jeu, mais malgré cela, les combats se résument un peu trop souvent à un "j'envoie toute la sauce et je regarde le résultat", bien sommaire.
Une réalisation un peu décevante
Le jeu est très riche, c'est un fait. Il est prenant et possède plusieurs nouveautés intéressantes sur son ancêtre, c'est un autre fait. Hélas, s'il est un point sur lequel les progrès sont nettement plus discutables, c'est bien celui de la réalisation. Je suis le premier à dire qu'un beau jeu n'est pas forcément un bon jeu, et inversement, mais je dois reconnaître qu'Anno 1503 m'a déçu sur ce point et ce, même si les nombreuses captures d'écrans publiées tout au long du développement nous avaient mis la puce à l'oreille.Ce genre de jeux se contente très bien d'une réalisation schématique mais là c'est surtout la faiblesse des progrès depuis Anno 1602 qui frappe. Les décors sont plutôt joli mais manquent parfois cruellement de détails et si de nombreuses résolutions sont disponibles, elles ne changent pas grand chose à l'affaire. Le dessin des bâtiments est sans doute ce qu'il y a de plus réussi et les villes de grande taille sont assez belles. On ne peut en revanche pas en dire autant des animations qui constituent la plus grosse déception. En dehors de notre population, il n'y a pas grand chose à voir sur la carte, les vagues ne sont pas très réussies et les mouvements des unités sont tout à fait sommaires (les virages à 45° des bateaux sont assez caractéristiques).
Ce n'est pas cet aspect qui rebute les amateurs purs et durs mais nous savons tous que de nombreux joueurs sont hélas très influencés par la réalisation graphique d'un jeu. Heureusement cette relative "laideur" s'accompagne d'une légèreté qui permet de faire tourner Anno 1503 sur pratiquement n'importe quelle machine. Le simple Pentium III 500 MHz mentionné par la boîte du jeu est même envisageable, c'est dire ! Un processeur à 800 MHz et 192 Mo de mémoire (256 Mo sous Windows XP) seront tout de même préférables pour jouer dans de parfaites conditions. Enfin, précisons que l'ambiance sonore n'est pas vraiment mieux lotie : les voix sont très moyennes et la musique, comme souvent face à ce type de jeux, exaspère après quelques petites heures.
Le jeu est globalement joli mais particulièrement daté
Le Seigneur des Anno ?
Désolé de conclure sur un jeu de mots aussi lamentable mais ça me démangeait depuis le début du test et à vrai dire il résume plutôt bien le problème posé par Anno 1503. Alors que cette "suite" devait être supérieure en tout points à Anno 1602, ce n'est pas tout à fait le cas. Le jeu est très riche, très complet et les parties qu'il génère passionneront à n'en pas douter les amateurs de gestion. Hélas, certains défauts du premier volet sont toujours présents : l'interface n'est pas des plus claire, certains aspects restent confus et la profondeur du jeu n'est de ce fait pas simple à appréhender.Ces quelques défauts ajoutés à une réalisation que l'on qualifiera de classique pour un jeu du genre mais de rebutante pour le grand public, ne permettront sans doute pas à Anno 1503 de toucher un public plus large que son prédécesseur et c'est un peu dommage lorsque l'on pense à la longueur du développement. Le titre de Sunflowers accuse sans doute le poids des années mais il n'en demeure pas moins l'un des meilleurs de sa catégorie et ceci pour différentes raisons qui échapperont hélas sans aucun doute à ceux qui ne jurent que par l'aspect technique. Le jeu est encore plus riche et plus prenant qu'Anno 1602. L'intégration d'un côté stratégique même s'il est encore largement perfectible apporte beaucoup aux parties. Enfin la variété des décors et la taille des cartes permettent des parties encore plus intéressantes qu'auparavant.
Un coup d'oeil sur la démo est indispensable pour se décider mais alors que certains joueurs ne parviendront pas à se prendre au jeu, d'autres seront littéralement absorbés. Malgré ces défauts, Anno 1503 fait en effet partie de ces titres qui font oublier le monde extérieur pendant toute la nuit jusqu'à ce que le réveil ne s'épuise à vous rappeler l'heure de l'embauche ou que la copine balance l'ordinateur par la fenêtre...