Après moult problèmes, Freelancer est enfin parvenu à son terme. Ceux qui en ont suivi le développement pour le moins chaotique savent de quoi je veux parler lorsque justement j'emploie le terme "chaotique". Initié en 1997, le projet connu de nombreux retards et fut même privé de son instigateur lorsque Chris Roberts quitta le navire suite à des différents à propos du contenu. Nous voici maintenant quelques six années après les premières annonces et Freelancer n'aura jamais été aussi près de nous... Cela valait-il la peine d'attendre ?
My name is Trent, Edison Trent !
Freelancer a régulièrement été présenté comme le successeur du célèbre Privateer lui-même très inspiré du mythique Elite. Jeux relativement variés, ces différents titres axaient leur action sur les combats spatiaux mais en laissant une liberté plus (dans Elite) ou moins (dans Privateer) importante aux joueurs. Ces derniers pouvaient se lancer à corps perdu dans des affrontements sans fin ou au contraire exploiter d'autres voies comme le commerce. Le but étant de toute façon de s'enrichir afin d'être en mesure d'essayer différents vaisseaux et de découvrir l'univers proposé par les développeurs.La séquence de "pré-introduction" n'a finalement rien à voir avec le jeu !
Privateer se distinguait d'Elite par un scénario très présent qui guidait bien davantage le joueur. En ce sens, Freelancer se rapproche d'ailleurs de Privateer puisque le joueur y incarne le petit Edison Trent alors que ce dernier fait partie des miraculés ayant survécus à l'explosion d'une station spatiale. Cet événement est raconté au cours d'une introduction qui dépeint également la venu de l'espèce humaine dans ce coin reculé de l'univers. Ce que l'on pourrait qualifier de "première partie" de Freelancer consiste en fait à mener à bien l'aventure du gars Trent. Contacté puis carrément guidé par une certaine Juni, il va se trouver mêlé à une sombre histoire d'artefact très puissant, de complots interplanétaires sur fond de menace extra-terrestre. Dans le même temps, il devra acquérir de l'expérience, aura la possibilité de visiter bon nombre de systèmes qui lui sont totalement inconnus et surtout il sera à même d'acheter de nouveaux vaisseaux (un à la fois) ou de nouveaux équipements.
Découvrez l'espace à bord de votre poubelle volante !
Afin de guider au mieux les nouveaux venus, cette campagne solo va crescendo. Les premières missions sont vraiment l'enfance de l'art et servent en fait à prendre en main l'appareil, à se familiariser avec l'interface et à se faire aux contrôles : la souris ce n'est pas évident pour tout le monde. Précisons d'ailleurs tout de suite et malgré les nombreuses critiques, que ce mode de contrôle n'est pas une mauvaise idée. Il offre une direction très précise du vaisseau tout en permettant de manipuler les icônes de l'interface de contrôle. On aurait bien sûr aimé que Digital Anvil permettent aux possesseurs de joystick de l'utiliser mais ce choix n'est à mon sens pas aussi critiquable que certains le pensent. Revenons-en au jeu et à la trame scénaristique. Après quelques toutes petites missions de mise en jambes, Trent rencontre la charmante Juni et se trouve mêlée à une sombre histoire. Poursuivis par les mêmes personnes qu'ils servaient jusqu'alors, nos héros devront contracter des alliances surprenantes et participer à des combats de grande envergure.Au fil des missions, le scénario prend une tournure évidemment surprenante afin de brouiller quelques peu les pistes et même si l'originalité n'est pas franchement au rendez-vous, on peut dire que globalement ça marche. On regrettera par contre le parti pris par les développeurs pour faire avancer l'intrigue. Parti pris tour à tour déroutant, longuet, voire carrément exaspérant. Entre chaque mission, le joueur est en effet poussé à découvrir l'univers qui l'entoure par lui-même. Je m'explique. Une mission se termine par l'arrivée de Trent et de Juni sur la planète Leeds où il est alors possible de réparer le vaisseau, acheter de nouvelles armes... Mais il faut savoir qu'il ne sera pas possible de repartir immédiatement afin de poursuivre l'aventure. Juni doit en effet aller faire quelques petites choses de son côté et vous annonce que vous n'avez qu'à vous occuper un peu et récolter quelques "crédits" (la monnaie qui a cours dans le jeu). Il ne sera alors pas possible de reprendre le scénario principal avant d'avoir accumuler une certaine somme d'argent. Dès que ce sera fait, Juni contactera Trent pour lui fixer un rendez-vous et repartir en mission...
Les premières missions permettent d'apprendre à jouer à Freelancer !
Ce "découpage" du jeu est plutôt surprenant, et même s'il va de paire avec la notion de "niveau" dont nous parlerons très bientôt, il ne parvient en fait qu'à rendre le tout assez incohérent. Sans compter qu'il ne permet pas aux joueurs d'évoluer à leur guise dans le jeu. Il faut en effet savoir que la progression au travers est définie par le système de "niveau". A chaque fois que Trent accompli une mission du scénario principal, il progresse d'un niveau. Ensuite, il lui faut accumuler une certaine somme d'argent pour que, comme nous l'avons dit, Juni le contacte mais surtout pour qu'il passe un nouveau niveau. C'est ainsi que se déroule tout "l'apprentissage" de Trent et tant qu'il n'atteint pas un certain niveau, il ne lui sera pas possible de piloter tel ou tel engin. Il ne lui sera pas non plus possible d'utiliser toutes les armes disponibles avant d'avoir acquis suffisamment d'expérience. Ce système qui dans l'absolu aurait pu être intéressant, s'avère ici essentiellement frustrant ! D'autant qu'il s'accompagne d'incohérences impressionnantes dans la gestion même de l'univers qui entoure le joueur.
Point de salut en dehors de la campagne ?
Entre les missions principales, il est possible de s'enrichir en faisant du commerce ou en remplissant des missions dites secondaires. Si cela donne une relative liberté au joueur, on regrettera évidemment de ne pouvoir en profiter totalement. Une fois le seuil d'argent nécessaire atteint, il ne sera en effet plus possible de progresser en "niveau" et il ne sera donc pas possible d'acquérir de meilleur équipement : même si Trent devient riche comme Crésus ! Pire encore, une fois le scénario principal terminé, le joueur devient alors libre de faire exactement ce qu'il veut, sauf que l'univers n'ayant pas évolué, le secteur Liberty par exemple (point de départ du jeu) propose toujours les mêmes appareils techniquement obsolètes ! Les armements ne sont pas du tout au niveau et c'est finalement une large partie de l'univers disponible qui n'a plus le moindre intérêt pour le pilote très puissant que nous incarnons alors. En définitive et une fois les 13 missions de la campagnes solo achevées, Freelancer perd énormément de son intérêt.Les zones du début, nous venons de le dire, sont techniquement dépassées et les combats n'y sont que formalités mais même à Kusari ou Bretonia, le jeu manque cruellement d'objectifs. L'univers proposé par les développeurs est divisés en grandes zones (Liberty, Rhénanie, Kusari et Bretonia), elles-mêmes partagées entre diverses factions (une cinquantaine parmi lesquelles les "Corsaires", la Police Rhénanienne, la "compagnie" Denrées Artificielles ou bien encore les "Zoneurs") évidemment en lutte perpétuelle. Les actions du joueur tout au long de la campagne solo et du reste de la partie influencent évidemment l'attitude de ces factions à votre égard. Elles pourront alors vous prêter main forte lors de certains combats ou au contraire tirer à vue sur votre appareil et vous refuser l'accès à leurs stations. Ce sont ces factions qui vous donneront également les nombreuses missions qu'il est possible de remplir afin de pouvoir retourner à la campagne principale ou bien une fois celle-ci achevée. Hélas, l'originalité n'est pas leur point fort. On se retrouve systématique à devoir se rendre à un point précis du système, y faire le ménage et revenir toucher une paye. C'est bien trop répétitif pour être vraiment intéressant et ce n'est pas les possibilités de commerce qui viendront rattraper le coup.
L'univers, malgré sa taille, n'est pas assez riche pour être captivant
Les systèmes produisent tous différentes denrées auxquelles ils n'attachent évidemment pas la même valeur. Le rôle de Trent pour gagner rapidement sa vie, sera donc de trouver les routes commerciales les plus rentables. Hélas, il faudra pour se faire utiliser les trop nombreuses "routes commerciales" qui servent à relier les différentes stations / planètes. Ces "routes" sont en fait des portails sur lesquels il faut s'arrimer et qui propulsent alors notre vaisseau à grande vitesse. Malgré cette grande vitesse, il faut compter de nombreuses minutes pour traverser plusieurs systèmes et le parcours du marchand devient rapidement un parcours du combattant. Les interruptions par différents pirates sont nombreuses mais les combats pas réellement passionnants. Alors que la campagne solo parvient à maintenir le joueur en haleine à l'aide d'une histoire assez bien ficelée, celle-ci terminée, la tension retombe complètement et l'ambiance n'y est tout simplement plus. Freelancer ne présente plus guère d'intérêt et seul les forcenés trouveront plaisir à découvrir tous les vaisseaux disponibles, à visiter tous les systèmes et à fouiller quelques épaves perdues ça et là... Rien à voir avec la richesse d'un Elite !
Multijoueurs et aspects techniques
Si le jeu solo n'est plus très intéressant une fois la campagne terminée, il est encore possible de jouer avec Freelancer grâce au mode multijoueurs... Enfin, c'est du moins ce que nous espérions au vue des spécificités du jeu. Il n'est bien sûr pas question d'univers persistant et en guise de parties réseaux, il s'agira surtout d'affrontements ou de coopération entre joueurs humains pour finalement errer dans un univers strictement identique à celui du mode solo. Alors bien sûr, il y a toujours le plaisir de jouer entre amis ou bien de se montrer des petites choses que l'autre ne connaissait pas forcément, mais il faut tout de même reconnaître que ce multijoueurs, malgré le maximum de 128 participants qu'il autorise, ne restera pas dans les annales du jeu vidéo... Dommage il y avait moyen de faire mieux, c'est certain !Pour le moment, Freelancer ne doit pas vous apparaître comme un titre bien folichon et on se demanderait presque où se trouve son intérêt. Même si cela ne demande pas beaucoup de lignes pour le dire, il faut être clair : la campagne solo est vraiment intéressante à jouer. Elle vaut le détour et est tout de même nettement plus intéressante que celle d'un Starlancer par exemple. J'avoue lui préférer l'ancien I-War 2 mais étant donné l'absence quasi-totale de jeux de ce genre, Freelancer fait bien plaisir. D'autant qu'il a pour lui une réalisation tout à fait satisfaisante même si le doublage français a tendance à gâcher un peu les choses. Les "acteurs" n'y croient visiblement pas et déjà que le texte qu'on leur à donné n'est pas folichon mais en plus, ils mettent vraiment tout leur coeur à le massacrer... N'ayez crainte, ils y parviennent largement et on se prend à regretter le doublage américain pourtant déjà pas bien génial.
Heureusement, le reste de la réalisation est d'une autre trempe, en particulier dans l'espace. La représentation n'est sans doute pas très réaliste, mais le moins que l'on puisse dire est que c'est bien joli. Les planètes semblent toute petites, mais les effets de lumière sont splendides, les textures plutôt réussies et l'animation est simplement parfaite. Même avec une configuration très moyenne, vous devriez pouvoir profiter de ce jeu tant le moteur est léger. Le processeur à 600 MHz recommandé sur la boîte du jeu est évidemment un peu limite mais sur un Pentium III 1 GHz avec 256 Mo de mémoire et une GeForce 2 GTS, le jeu tournait à la perfection en 800x600. Une telle sobriété est bien agréable et apporte évidemment beaucoup de crédits aux développeurs même si dans l'ensemble on regrettera qu'ils aient été si timorés dans la conception du jeu alors qu'ils tenaient un sujet véritablement en or !
La campagne solo est heureusement là pour faire passer une vingtaine d'heures de jeu bien agréable
Conclusion
Il m'est bien difficile de cacher la déception que j'ai pu ressentir en jouant à Freelancer. Le titre de Digital Anvil n'est certes pas un mauvais jeu et nous reviendrons sur ses qualités très rapidement, mais il faut surtout reconnaître que ce n'est pas du tout le jeu auquel les amateurs pouvaient s'attendre. Malgré les apparences plus que trompeuses, nous sommes très loin de la liberté offerte par un titre comme Privateer et bien sûr Elite. Dans Freelancer, tout est trop étriqué, trop orienté et le libre-arbitre du joueur ne lui sert finalement pas à grand chose car quand bien même il peut aller où bon lui semble, il se retrouve bien vite limité par cet univers sans vie où il n'y a pas grand chose à faire et personne à rencontrer !Le scénario principal est plutôt une bonne idée afin de guider les joueurs qui ne sont pas familiers au genre, mais il reste trop directif pour les habitués. Ces derniers sont d'ailleurs absolument obligé d'avancer dans cette histoire qui ne les passionnera pas forcément pour être autorisé à utiliser de nouveaux vaisseaux et équipements... Un comble ! Mais le pire reste à venir une fois cette campagne principale achevée. Le jeu n'a pas évolué et les planètes du départ sont toujours aussi peu développées : les vaisseaux n'ont plus rien à dévoiler et finalement le joueur s'ennuie bien vite dans ces systèmes qui n'ont plus rien à lui offrir.
Aussi décevant soit-il, Freelancer reste un bon "shoot" de l'espace, mais il ne peut prétendre à quoi que ce soit d'autre. La réalisation est de bonne facture, se contente d'une machine relativement modeste et offre donc quelques bonnes montées d'adrénalines. Les combats quoique répétitifs restent plutôt sympas et comme nous le disions précédemment, la "campagne" principale devrait intéresser les nouveaux venus. Mais que les vieux routards soient prévenus : Freelancer n'est pas le nouveau Elite et pas même le nouveau Privateer. Il s'agit d'une sorte de Starlancer plus ouvert, plus riche et plus complexe.