Freelancer ne parvenait en effet à convaincre vraiment aucun des deux clans sus-nommés. Certains lui reprochaient un manque de profondeur dans la simulation alors que les autres pestaient contre un maniement à la souris bien incapable de leur faire ressentir la moindre tension même au plus fort de la bataille. Alors que cet essai moyennement convaincant des frères Roberts avait déjà eu toutes les peines du monde à voir le jour, les éditeurs semblent tout simplement bouder le genre de la simulation spatiale et c'est donc d'une petite équipe allemande que la surprise est venue avec ce X2, sur le papier particulièrement ambitieux.
C'est l'histoire d'un mec
Contrairement à ce que l'on pourrait croire en France, X2 : The Threat n'est pas tout à fait un coup d'essai pour les petits gars d'EgoSoft qui ont déjà signé il y a quelques années un certain X : Beyond The Frontier. Plutôt bien apprécié en Allemagne et au Royaume-Uni, le jeu s'était d'ailleurs vendu à quelques 150.000 exemplaires, de quoi pousser les développeurs à se remettre au travail. X2 : The Threat ne doit cependant pas être considéré comme une vraie suite à X : Beyond The Frontier. Les scénarios ne sont absolument pas liés l'un à l'autre et le joueur y incarne un personnage complètement différent du nom de Julian Garda. Alors que celui-ci vient d'être condamné à une peine de cinq ans de prison, il est conduit au près d'un dénommé Ban Danna, cadre de la puissante firme TerraCorp. Ce dernier connaît bien le parcours de Garda et en dehors de ses "états de service" en contradiction avec la loi, il a surtout repéré les excellentes aptitudes de pilote du jeune homme. En lieu et place d'un séjour au fond d'un cachot, il propose donc à notre Julian un petit marché : si ce dernier accepte de voler pour lui et remplir quelques petites missions, il pourra rester libre.Julian accepte évidemment sans hésiter la proposition et peut alors prendre place dans le premier vaisseau du jeu : un Argon Discoverer, appareil de classe M5 peu puissant mais très maniable et plutôt rapide. Cet embarquement s'accompagne d'un objectif tout à fait basique qui constitue en réalité la première place d'un scénario de longue haleine mais hélas pas particulièrement passionnant. On reste très loin de ce que pouvait proposer un bon vieux Privateer mais et c'est un changement particulièrement appréciable après la pénible linéarité de Freelancer, le scénario est en réalité parfaitement facultatif. Il faut en effet savoir qu'à aucun moment le jeu ne vous oblige à remplir telle ou telle mission pour avoir le droit d'aller plus loin. A la manière de ce que l'on trouvait avec Fontier : First Encounters (Elite 3), le joueur est libre de suivre la voie qui lui convient même si de temps à autres les développeurs ont intégré de petits commentaires destinés à guider les moins aguerris d'entre nous : le scénario principal ne vous intéresse pas ? Qu'à cela ne tienne, les carrières de marchand, de pirates, de chasseur prime ou bien encore d'entrepreneur s'offrent à vous !
Politesse élémentaire en société : faire les présentations avant d'aborder les choses sérieuses
Vers l'Infini et au-delà
Durant les premières heures de jeu, nous avons malgré tout tendance à suivre la trame scénaristique qui d'ailleurs joue le rôle de didacticiel. Il faut en effet se faire la main et découvrir petit à petit les différentes fonctions du jeu : du contrôle basique du vaisseau, à la navigation spatiale en passant par l'utilisation des cartes galactiques ou l'amarrage aux très nombreuses stations spatiales, on ne manque pas d'occupations. Les deux ou trois premières missions s'achèvent très rapidement et permettent d'avoir une petite idée de la richesse de X2 : The Threat. Au hasard de ces premiers voyages, le joueur s'est amarré à plusieurs bases et a déjà pu découvrir la grande quantité d'améliorations disponibles pour des vaisseaux au moins aussi nombreux : ce n'est pas avec le ridicule pécule en votre possession que vous allez pouvoir vous offrir tout ces joujoux. Tandis que Ban Danna et une certaine Elena Kho vous proposent d'autres missions, vous avez la possibilité d'explorer l'univers qui vous entoure afin, entre autres choses, de dénicher des méthodes de financement plus "directes".L'univers de X2 repose sur un modèle économique à mille lieues de ce que proposait Freelancer. Dès lors que vous aurez essayé les deux titres, vous serez d'ailleurs d'accord pour dire que la comparaison n'a même pas lieu d'être. Dans X2, chaque système possède différentes zones de production de matières premières ou de produits manufacturés et les prix sont régis par la sacro-sainte loi de l'offre et de la demande : à moins de dénicher une route commerciale particulièrement juteuse, personne n'est donc à l'abri des fluctuations du marché. Au début la seule méthode est de retenir des ordres de grandeurs et de relier différents systèmes entre eux afin de se faire une certaine marge et tirer quelques bénéfices des millions de kilomètres parcourus. Rapidement, vous aurez assez d'argent pour vous procurer différents outils destinés à simplifier la vie du commerçant au long cours comme un "système commercial distant", un "analyseur de prix d'achat" ou bien encore les plus classiques "ordinateur d'amarrage" ou "moteur de saut".
Après quelques promenades entre les différents systèmes contrôlés par les Argoniens, le joueur a tout à fait logiquement envie d'aller plus loin. Le scénario principal est alors assez bien fait car il permet justement de découvrir les abords des premiers systèmes en allant faire un tour du côté de l'espace Paranid ou bien encore de s'aventurer dans des zones contrôlées par les Pirates. Les missions proposées sont relativement variées et permettent une nouvelle fois de se faire la main sur des fonctions supplémentaires comme l'utilisation du moteur de saut par exemple. Ce sont également ces missions qui permettent de tester les prérilleuses sorties dans l'espace à l'aide du scaphandre ou bien encore de vérifier ses aptitudes de guerrier avec les premiers combats. Au bout de quelques heures de jeu, Ban Danna invite le joueur à tenter la carrière d'entrepreneur afin de récolter plus d'argent. Ce n'est absolument pas obligatoire mais dans la mesure où le scénario va devenir rapidement plus difficile, il n'est pas inutile de se préparer.
Très facile et sans réelle opposition, les premières missions sont surtout l'occasion d'apprendre les commandes de base
Ma petite entreprise
Jouer les coursiers intergalactiques ou bien transporter des grand-mères dans les systèmes argoniens n'est en effet pas la meilleure méthode pour envisager l'achat d'un vaisseau de combat comme le Paranid Nemesis. On peut évidemment se transformer en chasseur de primes en achetant des licences de "tueur" et casser du pirates pour se faire de l'argent, mais c'est tout de même un métier très risqué surtout en ce début de partie alors que vous avez tout juste de quoi acheter quelques missiles. On peut également envisager la contrebande de drogues ou d'esclaves pour dégager des bénéfices nettement plus conséquents qu'avec des composants informatiques, mais là encore c'est assez risqué et particulièrement mal vu auprès d'autorités souvent peu conciliantes. Pour se la jouer "petit père tranquille", il ne reste alors plus que la création d'une véritable entreprise. Fermes de soja, mines de silice, industries de transformation ou simples transports de marchandises sont autant de voies qui s'offrent à vous et qui peuvent être mixées comme bon vous semble.Il faut bien sûr commencer petit afin d'assimiler un à un les différents mécanismes... De toute façon tout coûte tellement cher que le joueur n'a pas trop le choix. On débute donc avec, par exemple, une ou deux installations pour extraire le minerai d'astéroïdes assez proches. On s'offre ensuite l'indispensable centrale solaire afin d'être moins dépendant des autres pour les besoins primaires et une usine pour transformer la production et en tirer un maximum de crédits. Là où les choses se compliquent, c'est qu'il faut également acquérir une véritable petite flotte de vaisseaux de transports pour acheminer les marchandises d'une structure à une autre. Il faut également quelques vaisseaux pour revendre le produit fini et plus tard dans le jeu, il ne faudra pas oublier quelques vaisseaux d'escorte afin d'éviter que des pirates ne pulvérisent vos possessions. La gestion de tout ce petit monde peut évidemment s'effectuer à distance à condition d'avoir investi dans les nombreux "systèmes de commande" et de simple coursier, on devient alors un véritable chef d'entreprise aux responsabilités multiples.
En règle générale, les premières installations sont placées dans les systèmes argoniens de base histoire de limiter les risques. Installer des structures chez les autres races nécessite en effet d'avoir de bonnes relations avec elles et ce n'est pas toujours évident en particulier avec ces paranoïaques de Paranids ou les dangereux Splits. En tout, le jeu permet ainsi de découvrir neuf races aux comportements biens différents. Ces neuf races ne disposent pas forcément de technologies ou de structures identiques et, de la même manière, elles produisent des vaisseaux sensiblement différents de ce que proposent les chantiers argoniens. L'abondance de peuples est à l'image de la richesse générale du jeu qui compte une centaine de systèmes à explorer, une bonne quinzaine de structures différentes, des armes en quantités, des marchandises très variées et plus de cinquante vaisseaux différents... allant du Pégase, un minuscule chasseur ultra-rapide, aux plus gigantesques des portes-aéronefs capables de transporter des dizaines d'appareils ! Cette richesse ravira les amateurs de simulation / gestion qui regrettaient Privateer ou Elite mais ne pourra hélas pas convaincre tout le monde du fait de défauts parfois vraiment gênants.
Licences de chasseur de primes, gestion d'usines ou acquisition de gros porteurs sont autant de moyens de diversifier ses activités
Ergonomie plus que discutable
C'est sans aucun doute possible le talon d'Achille, l'énorme point faible d'un jeu qui ne méritait pourtant pas tant de légèreté de la part de ses concepteurs. Alors qu'X2 : The Threat nous dépeint un monde futuriste où les transports spatiaux sont monnaie courante, les développeurs voudraient nous faire croire que l'essentiel des commandes passent par des menus / sous-menus uniquement gérables au clavier ?! Ils n'ont pas de souris en Allemagne pour avoir pensé à un système aussi peu pratique ?! Le fait est que ce n'est pas l'interface de X2 qui risque d'endommager votre mulot favori puisque vous pourrez tout simplement la ranger une fois le jeu lancé. Dans l'espace, les vaisseaux se contrôlent au choix au joystick, au clavier ou à la souris mais une fois amarré à une quelconque station, il n'y a d'autre possibilité que de "jouer du 105 touches" pour vendre la cargaison, communiquer avec d'autres pilotes, se ternir au courant des missions indépendantes disponibles ou bien encore faire quelques emplettes chez l'équipementier du coin : même chose lorsqu'il faut contrôler les différents vaisseaux de transport en votre possession ou bien définir les priorités d'une usine.Autre point largement critiquable : les aides de jeu. Alors que le début de partie est clair et compréhensible par le plus débutant des joueurs, les fonctions supplémentaires qui se greffent au fur et à mesure de la progression du joueur sont parfois très difficile à appréhender. Qu'il s'agisse de l'indispensable ballade en scaphandre pour changer de vaisseau porteur, de l'utilisation du système de commerce MK3 ou bien encore des mécanismes économiques gérant les mines / industries, le joueur débutant et peu au fait de ce type de jeux risque bien de trouver l'ensemble particulièrement indigeste, incompréhensible voire pénible et lassant... Moins important, mais tout de même regrettable, X2 : The Threat ne propose pas le même niveau de précision dans tous les domaines du jeu. Si l'aspect commercial est très bien rendu, on ne peut pas en dire autant du côté aventure du jeu. Les missions "indépendantes" proposées par les personnages non-joueurs (PNJ) ne sont pas nombreuses et surtout pas franchement intéressantes. De même, les interactions avec ces PNJ sont pour ainsi dire inexistantes alors que l'on aurait bien aimé disposer d'une réelle profondeur.
Ces quelques points sont évidemment gênant pour un jeu de cette envergure mais ils ne sont en réalité vraiment problématique que pendant la phase de "découverte" de X2. Cette phase d'acclimatation au jeu est largement plus longue que dans la plupart des autres titres et il faudra bien compter six à huit heures pour réellement assimiler l'œuvre d'EgoSoft. Passé ce cap que je qualifierais "d'initiatique", X2 prend sa véritable dimension et alors, on ne fait finalement plus vraiment attention à ces problèmes d'ergonomie ou à ce monde pas aussi ouvert et vivant qu'on aurait pu le souhaiter. X2 reste d'ailleurs infiniment plus riche et plus intéressant qu'un titre comme Freelancer, tout en étant finalement assez proche graphiquement parlant et en conservant une certaine légèreté. A condition de désactiver certains effets graphiques particulièrement gourmands (et particulièrement réussis d'ailleurs), il devrait tourner très correctement sur un Athlon 1 GHz doté de 256 Mo de mémoire et d'une carte 32 Mo.
Dans l'espace, il y a des machines. Dans l'espace, la guerre est sublime (c) San Ku Kaï
Conclusion
Alors que le genre semble ne pas passionner les éditeurs, EgoSoft nous offre avec X2 : The Threat un excellent "Elite-like" très éloigné en réalité du concept d'un Freelancer. Le monde proposé est beaucoup plus grand, beaucoup plus riche et beaucoup plus complexe que dans le jeu de Microsoft et le joueur n'est pas du tout contraint d'adopté telle ou telle attitude. Le scénario principal n'est d'ailleurs là qu'à titre indicatif et de très nombreux joueurs se promènent des heures durant avant de décider de poursuivre le fil conducteur de l'histoire. De multiples "carrières" peuvent être embrassées et tour à tour on pourra devenir explorateur, contrebandier, chasseur de primes, pirates, simple négociant ou carrément magnat de telle ou telle industrie.Ce concept ouvert et très varié avait fait le succès d'Elite puis de Frontier et il est sans aucun doute le meilleur atout de X2 : The Threat qui en développe encore certains aspects. Hélas le jeu d'EgoSoft n'est pas toujours du niveau de sa prestigieuse référence et risque de décevoir de nombreux joueurs du fait d'une interface pas franchement limpide et d'une prise en main délicate. Après un temps d'adaptation de cinq - six heures, on découvre un jeu tout simplement passionnant à la durée de vie pour ainsi dire illimitée mais la question est bien sûr de savoir si vous serez prêt à un investissement autrement plus important que pour un "bête" jeu d'action... A découvrir !
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