Da Vinci Cuolts ?
Après Rise Of Nations et l'extension Thrones And Patriots, Brian Reynolds a décidé d'explorer une autre voie. En phase avec son équipe de Big Huge Games, le bougre a donc laissé les civilisations historiques tout en restant fidèle à la stratégie temps réel qui lui a si bien réussi. Plutôt que de se lancer dans l'heroic fantasy déjà surexploitée et très à la mode depuis l'adaptation cinématographique de l'oeuvre de J.R.R. Tolkien, Brian Reynolds a donc choisi d'aller dans une direction inédite en s'inspirant d'univers originaux. Dans Rise Of Legends, le joueur a ainsi le choix entre trois peuples. Prenant leur source dans les comtes des Milles et une Nuit, les Alins se caractérisent par leurs affinités avec la magie. Plus terre-à-terre, les Vinci sont liés au génial inventeur avec lequel ils partagent un goût certain pour toutes les formes de machines. Enfin, descendus du ciel, les Cuolts font penser à un mélange d'Incas et de Mayas... avec cependant une touche fascinante de technologie.Dès l'introduction, on peut admirer le travail effectué par les développeurs en matière de design
Ces trois factions laissent présager d'un jeu radicalement différent du Rise Of Nations originel, mais fort heureusement, Big Huge Games nous rassure bien vite. La page d'accueil de Rise Of Legends ressemble ainsi comme deux gouttes d'eau à celle de son prédécesseur. On y découvre d'ailleurs les mêmes possibilités : options diverses, mode multijoueur, parties en escarmouches et campagnes solos. Au nombre de trois, ces dernières constituent comme toujours le passage obligé du joueur débutant. Il y est question de contrôler le jeune Giacomo de la faction Vinci alors qu'il se retrouve opposé au Doge, le méchant de service. Pour le joueur les choses reprennent la forme du mode conquête de Rise Of Nations, à savoir une carte stratégique « à la Risk » où le monde est découpé en plusieurs régions, toutes prétextes à des missions d'importance inégale. Certaines feront avancer le scénario alors que d'autres, accessoires, permettront de récupérer des bonus destinés à rendre la suite des événements plus aisée.
Le fonctionnement de cette carte stratégique est des plus simples. Le joueur dispose d'un pion à l'effigie de Giacomo, pion qu'il peut déplacer d'une zone par tour. Si la zone cible est déjà en sa possession, il ne se passe rien. En revanche, si cette zone est ennemie alors le mouvement donne lieu à une mission que l'on joue à la manière d'un classique affrontement de stratégie temps réel sur lequel nous aurons le temps de revenir avant la fin de cet article. Une victoire permet de faire avancer le scénario de la campagne et nous fait revenir sur la carte stratégique. À chaque tour de jeu, les zones sous le contrôle du joueur produisent quelques ressources qui permettent de démarrer la prochaine mission avec un léger avantage : selon la répartition de ces points (militaire, scientifique, expérience...), cela peut se traduire par quelques unités en plus, des améliorations supplémentaires ou des compétences améliorées pour les héros.
Si l'aspect gestion un chouia plus riche rend la carte stratégique un peu plus intéressante, cela reste malgré tout très simple, et il n'est pas question de comparer cet aspect du jeu avec ce que propose notamment Rome : Total War. Du temps de Rise Of Nations, de très nombreux joueurs y avaient cependant trouvé leur compte, il n'est donc pas surprenant de voir Big Huge Games reconduire ce système de jeu qui, à n'en pas douter, trouvera une nouvelle fois son public. Ce mode stratégique ne sert de toute façon que de prélude à la véritable action qui prend place dès lors que le joueur a choisi une mission. On se retrouve alors en présence d'un jeu de stratégie temps réel très classique dans sa forme où « la patte » Rise Of Nations est clairement identifiable. L'interface est très propre, mais, premier bon point, elle est encore plus dépouillée et minimaliste que celle de son ancêtre. Bon point pour Big Huge Games car cela permet d'avoir un champ de vision beaucoup plus important.
Les formations sont de la partie et l'interface permet de gérer de nombreuses unités : hélas, le niveau de zoom rend les choses confuses
Et j'ai crié... Alins pour qu'ils reviennent...
Dans le coin supérieur gauche, on retrouve les statistiques de notre peuple à savoir la quantité de ressources (timonium et or) en stock, le rythme de la production, le nombre d'unités actuellement possédées. Des infos importantes, mais qu'il n'est pas nécessaire d'avoir constamment sous les yeux. Le reste de l'interface est occupé par la mini-carte et les différentes options de contrôle. Inutile de revenir sur ces éléments, le plus simple étant encore de tester la démo jouable pour voir de quoi il retourne. On peut en revanche dire que même sur des cartes surpeuplées avec une faction très importante, l'interface reste toujours un modèle de lisibilité. Ce n'est hélas pas le cas du « terrain » en lui-même. La carte de la mission est effectivement intégralement en 3D, mais, afin de se démarquer de la concurrence, Big Huge Games a tenu à faire la part belle au relief : du coup, on ne voit pas toujours très bien les unités et la sélection est parfois assez pénible.Il faut dire que le style graphique adopté par les développeurs n'est pas non plus exempt de toute critique. Très réussi esthétiquement parlant, il a tendance à sombrer dans une certaine confusion dès lors que quelques dizaines d'unités en viennent aux mains. Après quelques heures de jeu, on parvient à reconnaître les siens, mais ce n'est pas toujours une mince affaire et cela devient carrément délicat lorsqu'il est question d'utiliser les capacités spéciales ou les sorts de ses héros. Cédant à la mode actuelle, Big Huge Games a effectivement opté pour un système de super unités baptisées « héros » qui ont une importance considérable durant les affrontements. Un héros est plus résistant et plus puissant que les autres unités. Il est également beaucoup plus cher, mais apporte des compétences spéciales qui peuvent facilement retourner l'issue d'un assaut (soins des troupes, décharge électrique, gros dégâts sur une cible...).
En dehors de ces héros, la partie STR repose sur les mêmes bases que celle de Rise Of Nations. Le système d'âges cher à Age Of Empires ou Empire Earth est ici remplacé par quatre « civiques » qui représentent schématiquement les progrès militaires, médicaux, commerciaux et scientifiques. Cinq niveaux sont à découvrir pour chaque « civique » et avec eux de nouvelles unités, structures et améliorations deviennent accessibles au joueur. Ce dernier ne peut toutefois pas se consacrer à ces seules « civiques » ou il se ferait balayer en deux temps trois mouvements. Il faut en fait trouver le juste milieu entre ce développement des « civiques » et les activités de base que l'on retrouve dans tous les autres STR : étendre sa base, construire des défenses, enrôler des unités et découvrir la carte pour dénicher de nouvelles zones à coloniser. Dans ce dernier cas, Rise Of Legends reprend encore une fois une caractéristique de Rise Of Nations puisqu'il n'est pas possible d'établir des bases n'importe où.
Riches et plus longues que de coutume, les trois campagnes solo permettent vraiment de profiter du jeu... même si rien ne remplace les escarmouches !
Certains sites dits de « villes » sont, en début de partie, neutres. Une fois conquis, ils permettent le développement d'une base en construisant ce que les développeurs ont appelé des districts. De quatre types (militaire, industriel...), ils définissent en quelque sorte l'orientation de la ville. À côté de ces villes, il faut bien sûr construire des mines pour extraire le timonium (sorte de métal) et différentes structures pour bâtir son armée. Selon le peuple choisi, les choses sont cependant très différentes et, sans rentrer dans des détails qui n'en finiraient pas, on peut tout de même donner quelques exemples. Alors que les Alins et les Vinci récoltent, de manière très classique, de l'or en plus du timonium, les Cuotls récupèrent eux de l'énergie. Cette énergie est au coeur de leur civilisation et oblige à complètement repenser son schéma de développement. En guise de défense, les Cuotls utilisent, par exemple, des obélisques qui, disposés assez près les uns des autres, forment une barrière d'énergie très puissante.
Un titre « cuolté »
Les différences entre les trois factions se retrouvent évidemment au niveau des héros qui sont clairement orientés ingénierie chez les Vincis, mais aussi au niveau des unités. C'est ainsi que le joueur Alin fera tout son possible pour obtenir son meilleur atout, un puissant dragon de verre. Du côté des Vinci, c'est une imposante araignée mécanique alors que les Cuotls disposent d'une énorme sphère dotée de pouvoirs terriblement destructeurs. Puisque nous en sommes à parler de ces unités « toutes puissantes », il est important de préciser que cela s'inscrit dans la volonté « grand spectacle » voulue par Big Huge Games. Rise Of Legends est très riche visuellement parlant et qu'il s'agisse des explosions, des sortilèges ou de la manifestation des différentes compétences tout se fait avec force effets spéciaux. Cela donne au jeu un petit côté film hollywoodien que la campagne solo un petit peu « bourrin » ne vient pas démentir.Ce n'est peut-être qu'une impression, mais après de nombreuses parties, il m'a d'ailleurs semblé que l'intelligence artificielle était en net retrait par rapport à Rise Of Nations. Volonté de rendre le jeu plus facile ? Mauvaise adaptation du moteur de Big Huge Games aux nouvelles factions ? Je n'ai pas la réponse, mais heureusement que le rythme et que la dynamique des missions est toujours au rendez-vous, car sinon cela manquerait un petit peu de challenge. Cela dit, la réputation d'un STR se fait principalement sur le mode escarmouche et si l'IA montre une nouvelle fois ses limites (manque d'organisation dans les mêlées, réactions parfois vraiment lentes...), le jeu prend une nouvelle dimension. Big Huge Games a prévu de nombreuses cartes en solo comme en multi (une quarantaine), mais a laissé de côté les nombreuses possibilités de réglages de Rise Of Nations... dommage. Rise Of Legends se rattrape bien vite avec la complémentarité de ses trois camps.
Pas très spectaculaires sur ces captures, les manifestations des compétences / sorts des unités / héros peuvent être remarquables
Il est encore beaucoup trop tôt pour dire si ces factions sont bien équilibrées, mais faisons sur ce point confiance à Big Huge Games pour nous proposer bien vite une mise à jour si cela ne s'avérait pas être le cas. Les quelques essais que j'ai pu faire ne m'ont pas permis de faire ressortir une faction par rapport aux deux autres. Les Vincis sont évidemment les plus classiques avec leur look et leurs unités « terrans ». Les Alins se maîtrisent assez rapidement, alors que les Cuotls risquent de poser plus de problèmes. La gestion de l'énergie est quelque chose d'assez nouveau, de même que le principe de l'arche (unité capable de booster l'activité d'un bâtiment par exemple) ou que celui des obélisques de défense. Cela dit, et même si un système antirush (paramétrable) a été mis en place par Big Huge Games, les parties de Rise Of Legends sont, de manière générale, plus rapides et plus nerveuses que celles de Rise Of Nations.
Les causes semblent multiples et on peut notamment avancer la puissance globalement supérieure des unités, l'aspect très spectaculaire des affrontements ou bien encore l'existence de super unités aux pouvoirs destructeurs. Les fondements de la série Rise Of Nations (système de frontières, attrition, production limitée des ressources...) sont heureusement là pour apporter un petit peu de finesse à ce monde de brutes et, l'un dans l'autre, on finit par prendre beaucoup de plaisir au cours de ces parties multijoueur de Rise Of Legends. Les moins bien équipés d'entre nous regretteront tout de même que Big Huge Games n'ait pas davantage optimisé les choses. Rise Of Nations n'était déjà pas le plus léger des STR, mais là il vaut carrément mieux prévoir le Pentium 4 2,6 GHz épaulé par 1 Go de mémoire et une Radeon X800 / GeForce 6800 pour être à peu près tranquille !
Conclusion
Reprenant à son compte tous les concepts qui ont fait l'originalité de Rise Of Nations, son ancêtre, Rise Of Legends partait bien évidemment sur de très bonnes bases. En partant sur un trio de factions qui n'est pas sans rappeler celles du génial StarCraft, on pouvait même espérer voir Big Huge Games nous sortir un très grand jeu de stratégie temps réel, mais ce n'est hélas pas le cas, la faute à quelques problèmes récurrents comme l'intelligence artificielle. Trop timorée à bas niveau, elle fait le grand écart en difficulté maximale, mais reste de toute façon très limitée au niveau tactique. On regrettera également la lourdeur graphique de l'ensemble et un relatif manque de lisibilité en particulier sur certaines cartes où le décor (relief, végétation, vents) rend les choses encore plus délicates.Cela dit, ces défauts ne doivent pas vous dégoûter d'un jeu qui mérite que l'on se penche sur son cas. Big Huge Games avait frappé très très fort avec Rise Of Nations et le studio paye un petit peu ce coup de maître. Pour son deuxième titre, l'équipe de Brian Reynolds fait quelques erreurs que l'on retrouve chez de nombreux concurrents, mais nous propose malgré tout un titre à découvrir. Les trois races semblent très équilibrées en dépit de leurs différences bien plus profondes encore que celles des peuples de StarCraft. Mention spéciale pour les Cuotls et leur gestion si particulière de l'énergie. Avec ces factions à découvrir, trois campagnes solos et plus de quarante cartes escarmouches, Rise Of Legends dispose d'une durée de vie tout simplement remarquable. Un bon RTS, simplement pas tout à fait au niveau de Rise Of Nations.
Découvrez les trois factions complètement inédites imaginées par les développeurs avec cette vidéo exclusive réalisée par nos soins : les combats y sont bien sûr largement à l'honneur, mais comment pouvait-il en être autrement ?
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Comme à notre habitude, voici trois captures en mode bi-écran : si la surface de jeu est étendue de manière substancielle, la gourmandise du moteur graphique est hélas beaucoup plus importante !