Premier épisode d'une trilogie imaginée par GSC Game World, Heroes Of Annihilated Empires fait évidemment penser au fameux Heroes Of Might And Magic. Conçu dans les années 90 par New World Computing / 3DO, ce dernier faisait lui aussi la part belle à l'heroic fantasy, mais en s'appuyant sur un mode de jeu au tour par tour. En spécialistes de stratégie temps réel, les Ukrainiens se sont orientés différemment et la comparaison s'arrêtera donc aux noms des deux jeux. En mélangeant les mécanismes qui ont fait le succès de leur précédente production (Cossacks) et des éléments de jeu de rôle / action, GSC Game World s'est en revanche rapproché d'un autre titre, plus récent celui-là, le Spellforce de Phenomic.
Elhant : un « Heroes » de mauvaise compagnie ?
Situé dans le monde d'Aaaaaaaaquador, le scénario d'Heroes Of Annihilated Empires met encore une fois en scène des Elfes et des Humains, des Orcs et des Gobelins. Mais alors que ces quatre peuples se mettent joyeusement sur la tronche depuis des décennies, une autre menace pointe le bout de son nez. Le ciel est sombre, le soleil noir et les morts sortent tout simplement de leurs tombes. Une terrifiante armée faite de chair putride et de cadavres en décomposition est en marche... Il va bien sûr falloir s'y opposer et c'est comme de bien entendu au joueur que cette tâche échoit. Dans ce premier chapitre de la trilogie Heroes Of Annihilated Empires, les développeurs se limitent à la seule patrie des Elfes, l'île d'Atlans, mais autant le dire tout de suite, d'autres régions et d'autres factions composent le monde d'Aquador. De manière assez schématique, les développeurs ont imaginé quatre clans : les Elfes et les Mort-Vivant, mais aussi les Cryo et les Mécaniciens.La séquence d'introduction, plutôt jolie, n'est pas du tout dans le style des planches BD de la campagne
Ces deux dernières factions sont jouables en mode escarmouche et en multijoueur, mais indisponibles dans la campagne solo de ce premier chapitre qui se focalise sur la lutte opposant Elfes et Mort-vivants. Durant cette campagne, le joueur organise les forces des « grandes oreilles » et dirige plus particulièrement un personnage du nom d'Elhant. Rôdeur elfe, ce type est aussi adroit qu'il est arrogant, mais, il faut bien le reconnaître, il est surtout absolument insupportable. C'est pourtant en sa compagnie que l'on fera toute cette campagne solo qui brille par sa longueur et sa difficulté, mais se trouve également être assez lassante du fait du manque de variété des objectifs. Pourtant les développeurs ont, comme nous l'avons dit, combiné deux styles de jeu pour se démarquer. Selon les missions, ils nous proposent effectivement de remplir des objectifs typiquement stratégie temps réel ou au contraire plus proches du jeu de rôle.
Dans certains cas, ces deux types de gameplay peuvent même être regroupés en une seule mission alors découpée en plusieurs phases, mais détaillons s'il vous plaît les choses. Côté stratégique, les habitués de la série Cossacks retrouveront assez vite leurs petits. GSC Game World s'est effectivement inspiré de son précédent titre pour élaborer Heroes Of Annihilated Empires et on en retrouve certains des concepts essentiels : gestion de six ressources avec ouvriers « récolteurs », construction de bâtiments variés, achat d'unités et production très rapide de ces dernières. Ce dernier élément constitue plus ou moins la marque de fabrique de Cossacks avec son inévitable corollaire : des unités nombreuses pour des armées de grande envergure. Hélas, mettons tout de suite un bémol à cette gestion des armées : la stratégie est on ne peut plus limitée puisqu'il n'est par exemple même pas possible d'organiser la moindre formation !
Ils ont annihilé le multijoueur...
Ce défaut majeur pour un jeu de stratégie où les unités peuvent se compter par centaines, n'est toutefois pas le seul d'Heroes Of Annihilated Empires qui regorge de petits « bugs » étonnant lorsqu'on pense à l'expérience de ses développeurs. S'il est possible de connaître le nombre de « paysans » occupés à récolter telle ou telle ressource, je cherche toujours un bouton pour appeler directement tous les inactifs. De la même manière, il n'est pas possible d'envoyer directement sur une ressource les nouveaux « récolteurs ». Enfin et cela rejoint cette fois l'absence de formation : les combat sont globalement assez brouillons. Le graphisme est plutôt mignon, mais les unités sont si petites (même en mode zoom) qu'il est difficile de distinguer quoi que ce soit. Pour ne rien arranger, les troupes ont un peu tendance à se perdre en chemin et, du coup, les combats manquent vraiment de rigueur : trop souvent, cela se résume à envoyer le plus de troupes possible dans la mêlée.L'inventaire (au centre) : élément indispensable aux phases jeu de rôle
Le second concept mis en place par les développeurs prend donc la forme d'un jeu de rôle / action façon Diablo. GSC n'avait bien sûr pas pour objectif de concurrencer le titre de Blizzard, mais on retrouve l'essentiel des caractéristiques d'un hack & slash. Notre antipathique héros dispose donc d'une feuille de personnage, de caractéristiques et d'un inventaire. Il peut récupérer potions, objets et argent afin d'être plus efficace et d'acheter quelques équipements dans les bâtiments parfois présents sur la carte. Ce mode de jeu étant assez difficile et Elhant étant particulièrement faiblard, de nombreuses missions nécessitent d'appliquer la technique du hit and run pour ne pas voir les trois vies du héros disparaître trop vite : en gros, on tire puis on se planque, on tire et on se planque... On a déjà vu plus excitant ! Avec le temps et l'expérience acquise, Elhant ressemble un peu moins à un gros nul, mais n'espérez pas le changer en Conan, c'est un rôdeur elfe.
Si le jeu de rôle m'a semblé plus abouti, aucun des deux aspects du jeu ne m'a vraiment convaincu. C'est d'autant plus dommage que les développeurs s'étaient attachés les services d'Ilya Novak pour rédiger le scénario de cette campagne solo. Sur le fond et même s'il n'y a rien de bien original, cette histoire est plutôt convaincante, hélas, et là c'est un avis on ne peut plus personnel, la forme est catastrophique : le style faussement cartoon des séquences cinématiques très moches ne colle pas du tout avec le graphisme des phases de jeu, les doubleurs français semblent complètement à côté de leur sujet et les transitions entre certaines séquences sont un peu abruptes. L'un dans l'autre, on se retrouve avec une campagne de 17 missions souvent très longues et assez délicates même en « normal » (l'un des deux modes de difficulté), mais on ne se laisse jamais vraiment emporté par le scénario. Le mélange des deux genres ne s'opère pas toujours très bien et les combats sont par trop basiques pour entraîner le joueur.
À côté de cela, les développeurs nous proposent un mode de jeu de type escarmouche dans lequel il faut en fait choisir entre les deux styles de gameplay (RTS ou JDR). Pas question ici de mélanger les genres et de toute façon, on voyait mal comment un tel mix était envisageable. Les combats déjà brouillons durant la campagne deviennent ici presque catastrophiques. Leur intérêt est proche du zéro absolu et la seule stratégie est d'envoyer plus d'unités que son adversaire... Pour ne rien arranger, seules trois cartes sont disponibles et la blague se poursuit avec le mode multijoueur. Les trois mêmes cartes sont de la partie et il est important de préciser qu'une seule d'entre elles permet d'atteindre le maximum de sept joueurs simultanés. La réalisation générale reste aussi sympathique qu'en mode solo avec des unités certes petites, mais joliment dessinées, des décors réussis et des musiques de qualité, mais cela ne suffit pas à relancer l'intérêt d'un jeu qui ne s'adresse, dans le meilleur des cas, qu'aux joueurs solos.
La mise en scène ainsi que le doublage français sont assez catastrophiques
Conclusion
Si le reste de la trilogie est de la trempe de ce premier volet, GSC Game World ne se prépare pas des lendemains qui chantent. Certes, il est possible de trouver des qualités à ce Heroes Of Annihilated Empires, en particulier au niveau de la campagne solo, mais dans l'ensemble le produit distribué en France par Focus est tout de même très moyen. Alors que le développeur ukrainien s'est toujours posé en spécialiste de la stratégie temps réel, il manque ici son coup avec des combats peu lisibles dans lesquels il n'est pas vraiment la peine de se creuser la tête : de toute façon cela se résume bien vite à l'envoi de troupes toujours plus nombreuses dans la mêlée !Plus convaincant, l'aspect jeu de rôle reste cependant très limité et ne peut à lui seul sauver du naufrage un jeu qui par ailleurs fait presque l'impasse sur le multijoueur. Nous verrons si les prochains opus permettent de redresser la barre, mais les combats contre d'autres humains ne sont pour le moment intéressants que le temps de quelques parties. Les développeurs ne devaient d'ailleurs pas avoir bien confiance en eux puisqu'ils n'ont prévu que trois cartes à jouer en réseau ou en escarmouche... et seulement une d'entre elles permet d'atteindre le nombre maximum de sept opposants ! Autant dire que dans le genre de l'heroic fantasy, Blizzard peut dormir sur ses deux oreilles : ce n'est pas aujourd'hui que son WarCraft III sera détrôné, même si la campagne d'Heroes Of Annihilated Empires pourrait intéresser les joueurs solitaires.
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