Depuis les deux épisodes des aventures de Kate Walker dans Sybéria 1 et 2, c'est toujours avec une attente particulière que les productions de Benoit Sokal sont attendues. Après avoir monté sa société White Birds, il nous a proposé un Paradise quelque peu décevant. White Birds nous dévoile sa nouvelle production, L'Ile Noyée : Une Enquête De Jack Norm, premier épisode d'une série de jeux d'aventure point & click basée sur le principe d'un meurtre et d'une enquête en huis clos.
L'île, y a de l'eau d'ici
Sur l'île de Sagorah, l'excentrique milliardaire Walter Jones a fait bâtir une immense tour de style art déco afin d'en faire un lieu de villégiature pour personnes aisées. Ayant convoqué sa famille proche, en vue de parler de son futur mariage, il est retrouvé mort sur la plage par son avocat. L'enquêteur Jack Norm, que nous incarnons, est dépêché sur les lieux pour déterminer la cause du décès et trouver le coupable en cas de meurtre. Comme il s'avère que c'est bien le cas, il va devoir agir vite car la violente tempête qui menace la région devient de plus en plus violente. Il ne dispose que de trois jours pour démêler les fils de l'intrigue, d'autant plus que l'île s'enfonce peu à peu dans l'océan.Première chose intéressante à noter, l'aventure pourra être vécue au travers de deux approches différentes. Si l'intrigue reste la même dans les deux cas, le temps pour la résoudre n'est pas le même. Ainsi, le mode « Aventure » nous permettra de vivre l'histoire classiquement, sans contrainte d'horaire, en prenant le temps d'explorer les lieux dans leurs moindres recoins et d'interroger tous les protagonistes sur l'ensemble des points suspicieux. Quant au mode « Contre la montre », il nous obligera à répondre aux interrogations de l'enquête, avec des heures butoirs qui pourront conduire à une fin de partie en cas d'échec de résolution dans les temps. Ces deux modes satisferont chaque amateur de jeu d'aventure mais, pour profiter pleinement de l'intrigue, le mode « Contre la montre » est certainement celui le plus adapté et par lequel il faut débuter. Certes il oblige à aller à l'essentiel, mais c'est également celui qui permet de s'immerger complètement dans l'aventure. Pour approfondir l'histoire, on lui préfèrera le mode « Aventure » qui permet de comprendre plus en finesse les tenants et les aboutissants de l'affaire, de parfaire ses connaissances de la psychologie des suspects, de trouver les réponses à toutes les questions accessoires. Commencer par le mode « Aventure » rend anecdotique le second mode de jeu qui pourra être accompli environ en cinq heures sans craindre pour les heures limites.
Jack Norm doit trouver qui est le coupable du meurtre de Walter Jones. Et les suspects potentiels sont nombreux : l'avocat, l'architecte, les trois petits fils et filles ainsi que leurs conjoints et deux habitants de l'île. Au total, dix personnes qui avaient au moins une raison de se débarrasser du milliardaire. Pour dissiper le mystère, il faudra répondre à treize mandats (série de questions et d'interrogations). Le premier consiste tout simplement à déterminer si la mort est accidentelle ou criminelle. Pour nous aider à réunir les preuves, les témoignages et faire toutes les comparaisons nécessaires (empreintes, traces, documents ...), Jack bénéficie de l'aide du PPA (Personal Police Assistant). Cet outil, assez pratique, permet aisément de garder trace de tous les interrogatoires, indices, preuves et autres comparaisons afin de pouvoir choisir lesquelles permettent de résoudre le mandat en cours. A savoir que si ces derniers se solutionnent un par un, vous pourrez en avoir plusieurs simultanément. Et là, nous atteignons un point intéressant du titre de White Birds ; il n'y a pas de linéarité dans les actions que Jack accomplit, mais seulement dans l'ordre de résolution des mandats. En fait toutes les actions et indices potentiellement intéressants sont accessibles immédiatement, pour peu que l'on fouine de partout. Ainsi, lorsqu'un nouveau mandat devient accessible, il n'est pas rare de voir sa barre d'avancée déjà bien remplie. Il est vrai que nous aurons rapidement des dizaines d'informations et qu'il faudra retrouver celles qui permettront de progresser vers l'interrogation suivante. Il est dommage cependant que certains mandats ne puissent se résoudre que d'une seule façon, alors que d'autres éléments de preuves pourraient faire aussi bon office. Parfois la logique des preuves à présenter peut paraître douteuse. En plus du PPA, nous disposons également d'un inventaire beaucoup plus restreint pour stocker les rares objets qui nous seront utiles.
Jack hors normes
Benoit Sokal nous a, depuis longtemps maintenant, habitué à en prendre plein les yeux à chaque nouvelle aventure. Son équipe ne nous déçoit pas grâce à un graphisme de toute beauté avec de nombreuses animations en extérieur, et un rendu art déco du plus bel effet au sein de la gigantesque tour. Les tons et les couleurs choisies permettent de se sentir comme dans un cocon au chaud, alors que la tempête souffle à l'extérieur. Le style froid du bâtiment est harmonieusement contrebalancé par tout un système d'éclairage et de couleurs des plus chaleureuses. Les musiques se font tout juste remarquer mais remplissent pleinement leur fonction d'ambiance. Quant aux bruitages ils sont très corrects et convaincants, finissant de plonger l'aventurier dans cette atmosphère si particulière et contrastée.
Les suspects étant nombreux, la première partie de l'enquête va nous obliger à les rencontrer et les interroger tous, ce qui est assez laborieux et pénible. Ainsi, le deuxième mandat est assez rébarbatif et le joueur devra franchir cette étape pour se retrouver happé par l'intrigue. A partir de ce moment, les interrogations collectives seront moins nombreuses, et nous aurons plus de liberté pour fouiner où bon nous semble (mais attention au chrono selon le mode de jeu choisi). Les interrogatoires permettent d'apprécier la bonne synchronisation labiale et les changements d'attitudes faciales exprimant les sentiments de notre interlocuteur. Par contre, la qualité des voix est inégale et notre héros manque furieusement de conviction, ainsi que certains suspects parfois. De même, si les personnages vivent leur vie et ne restent pas à un seul endroit à nous attendre, ils bénéficient de nombreuses animations mais conservent malheureusement un fort aspect robotique. Vaquant à leurs occupations, il n'est pas rare d'assister à quelques conversations privées ou altercations entre deux personnages, les rivalités, rancoeurs et autres jalousies se révélant au fur et à mesure. Les nombreux dialogues aux expressions parfois crues, ne sont pas superflus, mais là pour servir le scénario, faire avancer l'enquête et nous intéresser à tout ce petit microcosme.
Arrive maintenant un défaut inhérent au style d'enquête voulu par l'auteur : les déplacements allers-retours incessants. Difficile de passer outre et ce n'est pas le premier titre à se heurter à ce problème. Dans un cadre proche, « Devinez Qui ??? » ou bien encore « Le Crime de l'Orient Express » avaient aussi ce délicat problème à surmonter. White Birds n'arrive pas à s'en dépêtrer et, faute de pouvoir disposer d'une carte de déplacement rapide, nous devrons apprendre à connaître en détail la tour afin de faire les trajets les moins longs. Cela est d'autant plus frustrant que globalement le rythme de l'enquête est lent, mais le scénario recèle quelques rebondissements intéressants même si ce sont souvent de grosses ficelles classiques et prévisibles. Amateurs de romans ou films policiers, vous serez en terrain connu. Egalement, aucune énigme technique ou puzzle ne viennent ralentir un tant soit peu la progression. Comptez donc sur une douzaine d'heures pour terminer le titre en mode « Aventure ». L'autre mode vous fera recommencer mais la progression se fera inévitablement plus rapidement.
Quelques problèmes peuvent se rencontrer avec le pointeur de la souris qui ne réagit pas ou garde une forme inappropriée. Certains déplacements trop rapides peuvent bloquer Jack Norm qui refusera d'avancer plus avant dans l'écran, obligeant à reprendre une ancienne sauvegarde (cas rare, mais qui m'est arrivé, je me dois de le signaler). La vidéo exclusive ci-dessous, afin de ne pas gâcher la surprise de l'enquête, vous dévoile le début de l'aventure avec la résolution du premier mandat, le style des dialogues, l'utilisation du PPA, une exploration de l'île et de la tour jusqu'à l'obtention du moyen de relever les empreintes digitales.
Conclusion
L'Ile Noyée : Une Enquête De Jack Norm est très agréable dans son approche de l'enquête proposée. Le huis clos est bien amené, l'espace d'exploration se réduisant avec les journées qui passent. Le scénario très intéressant vous captivera et son ambiance froide et feutrée à la fois vous plongera complètement dans l'histoire. Avec une réalisation soignée mais perfectible tout de même sur certains aspects, ce titre permet sans problème d'oublier la navrante aventure qu'était Paradise, mais ne nous replace pas dans le même état d'esprit que l'œuvre culte de Benoit Sokal.Ce jeu vous intéresse ? Retrouvez-le dans le
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