Google+ : prêt à renverser Facebook ?

Michel Beck
Publié le 05 août 2011 à 13h21
Incapable de percer jusqu'ici dans les réseaux sociaux, Google tente le tout pour le tout avec une nouvelle approche, plus simple et qui tente de capitaliser sur les défauts de ses concurrents. Suffisant pour faire trembler les Facebook & co ?

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Un système de partage plus proche de la vraie vie ? L'idée est ambitieuse.


Le caillou contre la montagne

Un vent de panique souffle-t-il à Mountain View ? Impossible de l'ignorer quand on assiste à la troisième tentative de percer en trois ans ! C'est qu'en face, la concurrence n'a pas trop attendu que le géant se réveille. Fort de ses 750 millions de comptes actifs, l'archi dominant Facebook, en partie soutenu par Microsoft, ne laisse pratiquement pas un millimètre d'espace pour co-exister. Le rouleau compresseur de Palo Alto est devenu en quelques années le deuxième site le plus visité au monde. Pire, de manière sporadique, Facebook passe régulièrement devant Google, particulièrement aux Etats-Unis.

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Le défi pourrait presque paraître insurmontable


Pour les équipes de Larry Page, il était plus que temps de réagir en proposant une alternative crédible à un concurrent devenu bien trop puissant à leur goût. D'autant plus quand l'adversaire s'implante sur des dizaines de milliers de sites à travers ses boutons "Like" ou le "Facebook Connect" permettant de s'inscrire sur des sites tiers en quelques secondes. Peu à peu, Facebook tisse sa propre toile et l'internaute, cœur du modèle économique des deux entreprises, commence à échapper à Google. En ouvrant un navigateur, on ne lance plus systématiquement le moteur de recherche mais sa page Facebook, on utilise moins l'e-mail (et donc Gmail) car la boîte à message du réseau social s'avère plus rapide et pratique.

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Sur son profil, Larry page se permet un petit troll.


Bref, pour beaucoup, Facebook est devenu le point de départ de la navigation et le centre névralgique de “leur” Internet.

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On ne compte plus les infographies comparant Google+ et Facebook


Une concurrence de caractère

Et comme si déboulonner un tel mastodonte ne s'annonçait pas assez compliqué, d'autres acteurs d'importance sont venus s'insérer dans la bataille en captant du temps de navigation disponible. En premier lieu, l'étonnant Twitter qui du haut de ses cinq ans d'âge continue sa croissance avec 200 millions d'utilisateurs actifs, 600 000 nouveaux inscrits par jour et 2250 tweets à la seconde, excusez du peu ! Des chiffres amusants quand on les met en parallèle avec les propos d'un certain Eric Schmidt (alors PDG de Google) qui déclarait en 2009 que Twitter était “la messagerie du pauvre”. Pour se raviser quelques mois plus tard en signant un accord permettant d'indexer en temps réel le contenu du site sur Google. Un retournement de veste trahissant un sérieux manque de vision.

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Le bouton “+1” n'a vraiment rien d'original. En panne d'idées, monsieur Google ?


Troisième acteur du social, LinkedIn vise de son côté les professionnels et continue de croître. Le site est devenu en quelques mois le deuxième réseau social des Etats-Unis, juste derrière Facebook. Tout récemment, la société a lancé son service d'actualités LinkedIn Today, mettant en avant les informations les plus consultées et partagées par ses membres. Une innovation qui se paie le luxe de venir empiéter sur les plates-bandes... de Google Actualités.

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L'enjeu ? Garder l'internaute “à domicile”
Il serait injuste, pour ne pas dire malhonnête, de prétendre que Google n'avait pas saisi très tôt l'importance des réseaux sociaux. Dès janvier 2004 - soit un mois avant Facebook ! - Orkut est lancé sans grand enthousiasme. Pas de chance, en dehors d'un gros succès au Brésil et en Inde, le service ne parviendra jamais à convaincre le reste du monde. Deux ans plus tard ce sera au tour de Jaiku, un site de micro-blogging équivalent de Twitter (sorti à la même période, l'histoire se répète !) et là encore l'échec sera au rendez-vous peut-être en raison d'un nouveau manque flagrant de soutien d'une maison mère décidément bien hésitante.

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Sept ans plus tard, Orkut est toujours en beta, une mauvaise habitude chez Google.


Un léger manque de cohérence

Ensuite viendra Lively, sorte d'ersatz du très populaire Second Life. Six mois après sa mise en service, rebelote, Google ne peut que constater l'échec et enterre le projet. Pour mieux se lancer dans l'élaboration de Wave, un puissant outil de travail collaboratif présenté en fanfare comme une réinvention de l'e-mail. Aujourd'hui, l'e-mail est toujours là et Google Wave a été remis aux mains de la Fondation Apache, Mountain View ne s'en souciant plus. Malgré tout, l'entreprise n'abandonne pas ses efforts pour percer dans le social et présente dès février 2010 sa nouvelle tentative, Google Buzz. Moins complexe que Wave, Buzz souffrira de son intégration au chausse-pied dans Gmail. Le service paraîtra beaucoup trop intrusif aux yeux de beaucoup et soulèvera d'innombrables problèmes concernant la confidentialité des données. Les multiples efforts pour corriger le tir n'y feront rien, Buzz disparaît des écrans radars quelques mois seulement après sa mise en route.

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La promesse était belle, le résultat... un peu moins


A ce stade, on aurait bien vu Google abandonner et s'en aller bouder dans son coin. L'ennui, c'est que l'entreprise n'a pas le choix, tant la pression des concurrents la pousse systématiquement dans les cordes. Alors quelle solution, un énième nouveau produit ? Ce n'est pas le manque d'initiative qui fait défaut à Google. La firme peut elle enfin apprendre de ses erreurs et proposer un vrai produit séduisant ?Plutôt que de tenter de réinventer la roue les ingénieurs de Google ont bien regardé la concurrence et en proposent cette fois une copie quasi conforme, du moins en apparence. On y retrouve bien un “mur” d'activités, comme sur Facebook, un agencement des fonctions similaire et donc... une ergonomie proche. Néanmoins la complexité du site de Mark Zuckerberg étant souvent pointée du doigt, Google en a tenu compte pour mieux affiner sa propre plateforme.

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A première vue, un simple compte Google suffit pour découvrir le service...


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...encore quelques secondes et on y est ! Et en fait non. Google nous a bien eus


On y danse tous en rond

Au premier coup d'oeil, ce qui frappe lorsque l'on débarque sur Google+ c'est bien la gestion des contacts. Ceux-ci se présentent sous formes de cercles d'amis (ou non, chacun fait ce qu'il veut après tout) dans lesquels il suffit d'effectuer des glisser/déposer à partir des contacts que l'on souhaite ajouter. L'idée est bonne, savoir à quels contacts se destineront nos futures publications est réellement utile mais le tri peut vite se révéler lourdingue quand on a de nombreux contacts à dissocier dans un grand nombre de cercles. En supposant que l'on ait bien géré cet aspect vite fatigant il suffira ensuite d'écrire un statut et de choisir à quel cercle il se destine. Une idée bien pensée qui évitera probablement aux plus maladroits de publier des statuts un peu trop compromettants. Histoire de pimenter un peu la chose, le nom de chaque cercle est à la discrétion de l'utilisateur et ne sera jamais dévoilé à ses contacts. Tous les délires sont ainsi permis, des plus convenus aux plus osés. Si on était mesquins on ajouterait : jusqu'au jour où un bug viendra dévoiler tout cela aux yeux du monder entier.

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Ranger ses contacts n'a jamais été aussi simple - La rubrique “à l'extérieur” permet de voir les statuts de gens qui nous ont ajouté quand ce n'est pas réciproque.


Les aléas du direct

Vu qu'une gestion performante des contacts ne suffit pas Google a ajouté quelques petits trucs en plus. A ce titre, les “bulles”, sont plutôt bien vues et permettent de créer un chat vidéo à plusieurs en quelques clics. L'initiative est sympathique même si pour l'instant la qualité est un peu en retrait à cause d'agaçantes latences. Pour le chat normal en mode texte c'est évidemment Gtalk qui a été choisi. Rien à dire, la technologie fonctionne et sachant que tout nouvel utilisateur de Google+ obtient automatiquement un accès à Gtalk, si le succès est au rendez-vous cela permettra peut-être de l'imposer. Pas vraiment inutile vu la part du lion que se taillent Windows Live Messenger ou le chat intégré à Facebook.

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La promesse de faire de belles rencontres


Réagir vite... et bien

Et si on sent bien que Google a placé Palo Alto au centre de son viseur, c'est en regardant la barre de services de son compte que l'on s'aperçoit de la prise en compte du trublion Twitter. Ici, on a droit à une bien pratique liste de notifications (un peu à la manière de ce que l'on trouve sous Android) permettant de voir l'activité récente qui nous concerne. Un commentaire posté en réaction à un statut ou un contact qui nous ajoute à l'un de ses cercles sont directement visibles à partir de l'interface, que l'on soit sur Gmail, dans Google Reader ou simplement sur le moteur de recherche. Pratique ! D'autant qu'il est également possible de publier un statut Google+ directement à partir de la même barre, sans se voir obligé de rejoindre notre mur d'activité. L'instantanéité, véritable force de Twitter, se voit ainsi intégrée afin de séduire les plus grands adeptes du service de micro-blogging.

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La barre de partage rapide permet de poster à partir de n'importe quel service Google
Ceux qui pensaient que Google+ balayerait tous les défauts des concurrents en seront pour leurs frais. Ce n'est pas le cas. Tout d'abord, côté confidentialité des données, Google+ ouvre par défaut les profils aux quatre vents. Il est donc vital de farfouiller dans les options pour empêcher n'importe qui d'avoir accès à n'importe quoi via une simple recherche. Par chance, il est possible de taper le nom d'un profil pour vérifier à quoi il peut bien avoir accès sur le nôtre, une idée empruntée... à Facebook. De plus, l'utilisation des pseudonymes n'est pas autorisée par les conditions d'utilisation du service et le profil peut même être suspendu en cas d'infraction. Pire encore, depuis le 31 juillet il est impossible de disposer d'un profil Google entièrement privé, les noms et prénoms devenant obligatoirement publics. Ceux qui refuseront de s'exécuter dans le délai imparti verront leur page purement et simplement supprimée.

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Même le compte de l'actrice Alyssa Milano est parti en fumée l'espace de quelques heures. Une bourde heureusement vite réparée


Bye bye anonymat

D'ailleurs le nettoyage haute-pression a déjà bien commencé et on relève le cas d'un ancien employé de Google, fervent défenseur de l'anonymat sur Internet, qui a vu son compte suspendu sans savoir pourquoi. Son histoire se lit (ici) (en anglais) et le bonhomme a aussi monté une page afin de répertorier tous les comptes (désactivés). Pas sûr qu'une attitude consistant à se montrer excessivement agressif en coupant des comptes d'utilisateurs de la première heure soit la meilleure manière de se faire une bonne image, mais soit.

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Une messagerie privée façon service minimum


L'usine à gaz

Et la messagerie privée ? De ce côté là, le choix paraît aussi un peu étrange. S'il n'y en a pas à proprement parler, elle existe tout de même au travers de Gmail. En dessous de la page de profil d'un utilisateur se trouve une boîte d'envoi rapide permettant de lui envoyer un message sur sa boîte mail assez facilement. Le procédé paraît toutefois un peu bancal face à un véritable service de messagerie intégré plus rapide et pratique que l'e-mail. Le manque d'harmonisation des services semble d'ailleurs être l'un des plus gros défauts de Google+. Là où Facebook intègre tout un tas de possibilités au sein d'une seule interface, Google en propose de multiples et oblige à maîtriser différents agencements de fonctions. Impossible par exemple de créer un évènement (apéro, soirée, etc) sans passer par Google Calendar alors que le concurrent dispose d'un service très simple d'utilisation, pour ce genre d'activités.

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Certes, mais pour combien de temps encore ?


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Le 1er août, les équipes de Google annonçaient déjà une nouvelle manière d'organiser les cercles -Très sommaires, les applications pour iOS et Android sont encore trop limitées pour être vraiment intéressantes


Et là, on n'a pas encore parlé du manque d'applications, de pages professionnelles ou des nécessaires célébrités (même si c'est (prévu) pour faire venir un large public sur un réseau social. On s'étonne même de voir apparaître une application Android suivie d'une pour iOS et absolument rien du côté des tablettes équipées d'Honeycomb qui manquent pourtant cruellement d'applications dédiées. A se demander si tout cela est vraiment réfléchi... Certes, Google+ n'en est qu'à ses balbutiements et il y a fort à parier que de nombreuses améliorations apparaîtront dans le futur. Ce que l'on peut d'ores et déjà constater en voyant que Google a racheté le réseau social (Fridge) ainsi qu'une société spécialisée dans la reconnaissance faciale (pour mieux nous reconnaître sur les photos même après une cuite de légende dont tous les trottoirs de la ville se souviennent ?) tout en prévoyant le déploiement d'une grosse plateforme de jeux en ligne. Reste que le temps presse et qu'en dépit d'une progression assez impressionnante - près de 25 millions de membres à l'heure à laquelle ces lignes sont écrites - le pari est loin d'être gagné. A cela s'ajoute la question de l'utilité réelle d'un nouveau réseau social. Dans le genre, Jeff Weiner, le PDG de LinkedIn met les pieds dans le plat en se (demandant) si l'internaute moyen a réellement du temps à consacrer à un énième site du genre. La prise de position a beau être partisane, on peut difficilement s'empêcher de penser la même chose !

Conclusion

Il ne suffira probablement pas d'enrichir Google+ de toutes les fonctionnalités de Facebook pour en faire un concurrent crédible (à quoi bon quitter le premier si l'autre propose la même chose avec plusieurs années de retard ?). Un peu d'harmonisation ne serait pas non plus du luxe, tant l'empilage de services finit par transformer l'écosystème Google en véritable usine à gaz plus rebutante qu'autre chose.

Plus compliqué encore, il faudra parvenir à sortir de la sphère “geek” traditionnellement adepte des produits Google et parvenir à toucher le très grand public, ce qui n'est pas non plus une mince affaire. Pour cela, Larry Page et ses équipes devront prouver leur capacité à soutenir le service sur de longs mois voire plusieurs années. Et ce n'est pas la plus grande force de l'entreprise, les précédents échecs sont là pour en attester.

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Destination Palo Alto, et sans crash, cette fois !
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