GameHub Linux

Il y a quelques semaines, nous abordions le gaming sur Linux avec Steam Play et démontrions tests à l’appui que les linuxiens n’ont plus grand-chose à envier aux windowsiens en matière de jeux vidéo. Fortement enthousiasmés par nos découvertes, nous avons décidé de remettre le couvert pour un second dossier.

Cette fois-ci, nous nous penchons sur Lutris et GameHub, deux projets d’envergure aux potentiels énormes pour le gaming version Linux. 

Lors de mon retour en fanfare sur Ubuntu, je me suis principalement intéressé à Steam. Il faut dire que comme la plupart des joueurs, 99% de mes jeux sont stockés sur la célèbre plateforme de Valve. Cette dernière est d’ailleurs le point d’entrée idéal quand on désire jouer sur GNU/Linux sans se prendre la tête : il suffit de cocher une case dans les paramètres pour rendre la plupart des jeux Windows jouables sur n’importe quelle distribution Linux

Mais si on possède des titres sur GOG, Epic Games Store, Blizzard ou encore Itch.Io ? Pas de panique, il y a moyen d’en profiter aussi. Deux logiciels se démarquent dans ce domaine : Lutris et GameHub.

C’est d’eux dont je vais vous parler aujourd’hui. Oh, et au passage, j’ai déjà changé de distribution... 

Steam Linux POP OS

Pour ce dossier, j’ai utilisé PoP!_OS, la petite distro qui fait fureur ces derniers temps. Basée sur Ubuntu, elle a pour avantage d’intégrer nativement les pilotes Nvidia et de proposer des mises à jour dès qu’ils sont disponibles. De plus, le magasin PoP!_Shop met à disposition des joueurs les plateformes citées ci-dessus ainsi que d’autres pour une installation rapide. Je n’irais pas jusqu’à dire que c’est une distribution orientée gaming, mais elle s’en rapproche pas mal. 

Ceci étant dit, il est temps de décortiquer nos deux logiciels de jeu. Installez-vous confortablement et préparez une clé USB, il y a de fortes chances que vous ayez une grosse envie d’installer GNU/Linux chez vous après ce dossier ! 

Juste avant qu’on commence, je vous rappelle ma configuration de test : Lenovo Legion Y520 avec Intel Core i5-7300HQ, GeForce GTX1050, 8 Go de RAM et PoP!_OS.

Lutris : un lanceur pour les gouverner tous (anneau unique vendu séparément) 

Je vais être honnête avec vous : mon premier avis sur Lutris était loin d’être le brillant. Mais c'est uniquement de ma faute. Rappelez-vous, lors de mon premier dossier, je vous révélais mon incapacité à faire fonctionner le lanceur Epic via Lutris. Je suis le seul à blâmer pour cette erreur... 

En effet, EGS fonctionne parfaitement sur GNU/Linux. Mais mes vieux réflexes windowsiens ont pris le dessus lors de mes essais, menant à une impasse lors de l’installation. Bête et méchant, je me suis contenté d'installer Lutris puis de télécharger l’exécutable Windows depuis le site officiel Epic. Comme d’habitude quoi... 

Sauf que non, ça ne fonctionne pas comme ça avec Lutris. Il suffit juste de se rendre sur le site officiel, de chercher le nom du jeu ou du lanceur qu’on veut installer et d’appuyer sur le bouton Install. C’est tout. Le reste est automatisé grâce à des scripts créés par la communauté. Tout comme avec ProtonDB, des codes couleur indiquent le niveau de fiabilité du programme et les astuces à mettre en place si besoin pour le faire tourner au mieux.  

Je me suis donc bien fait plaisir, installant à tour de bras les lanceurs suivants : 

  • Epic Games Store 

  • UPlay 

  • Origin 

  • GOG Galaxy 

  • Blizzard Battle.Net 

Pour faire bonne mesure, j’ai aussi ressorti du placard mes MMO préférés, à savoir la saga des Guild Wars. J’avais donc de quoi m’occuper un bon moment ! 

Sachez qu’au besoin Lutris peut aussi se synchroniser avec votre compte Steam. Tous vos jeux sont ainsi visibles dans l’interface. Malheureusement, l’intégration n’est pas au top et requiert d’ajouter manuellement l’ID de chaque jeu pour toute nouvelle installation. Au final, il faut mieux passer par Steam directement si c’est votre plateforme privilégiée.

EGS, Blizzard et UPlay au top...

Si vous n’êtes pas adepte du service de Valve, alors Lutris peut faire pas mal de choses sympathiques pour vous, à commencer par regrouper tous vos lanceurs préférés en un seul endroit. Ce logiciel libre s’appuie sur Wine en y apportant ses propres modifications, ce qui assure au final une excellente stabilité. 

Comme je le disais plus haut, l’installation est enfantine : on se rend sur le site officiel, on cherche le jeu qu’on veut et on clique sur un bouton. Le script s’occupe du reste. Le plus long, c’est finalement d’attendre que les jeux se téléchargent (et avec ma connexion ADSL, c’est vraiment trèèèèèès long) ! 

J’ai commencé par utiliser EGS avec Journey, A Short HikeAztez et Subnautica : Below Zero. Dans tous les cas, je n’ai eu aucun souci à déplorer. Étonnamment, Journey tournait même mieux que sur Windows. Au final, j’ai pu jouer aux titres de ma bibliothèque Epic aussi bien que sur Windows. C’est plutôt une chouette nouvelle, même si j'imagine que certains jeux vidéo peuvent ne pas fonctionner avec Lutris. 

Confiant dans les capacités de ce très sympathique lanceur, je me suis ensuite lancé à l’aventure avec les lanceurs Blizzard et UPlay. Là aussi, rien à redire : ça tourne au poil ! 

De Diablo III à Assassin’s Creed en passant par World of Warcraft et FarCry 3 : Blood Dragon, je n’ai rencontré aucun souci. Les deux lanceurs sont admirablement pris en charge par Lutris. Bien entendu, il faut là aussi prendre des pincettes avec mes affirmations : ce n’est pas parce que ça tourne bien sur mon PC que ça le fera aussi bien sur le vôtre (bien qu'à priori il n'y a pas de raison majeure pour que cela fonctionne moins bien via le même outil). 

Pour résumer, voici la liste des titres testés - et approuvés - par mes soins, avec pour chacun son lanceur d’origine : 

  • World of Warcraft Classic - Blizzard 

  • Overwatch - Blizzard 

  • Diablo III - Blizzard 

  • FarCry 3 : Blood Dragon - UPlay 

  • Assassin’s Creed III – UPlay 

  • Assassin’s Creed Unity – UPlay 

  • Assassin’s Creed Origins – UPlay 

  • A Short Hike – Epice Games Store 

  • Subnautica : Below Zero – Epic Games Store 

  • Journey – Epic Games Store 

  • ABZU – Epic Games Store 

  • Ape Out – Epic Games Store 

  • Lifeless Planet – Epic Games Store 

Tous ces jeux ont donné le meilleur d’eux-mêmes sur ma modeste configuration. J’ai ainsi pu sortir à ma plus grande joie des sentiers battus de Steam ! 

… Origin et GOG Galaxy au flop ! 

Bon, il fallait bien que ça arrive à un moment, mais vous vous doutez forcément que tout n’est pas rose. Après plusieurs heures de joie sur EGS et compagnie, j’ai décidé d’aller dépoussiérer les deux services que j’utilise le moins : Origin et GOG Galaxy. Oui, ça commence à faire un paquet de lanceurs... 

Aucun problème pour l’installation, il faut juste faire attention pour GOG Galaxy à suivre les instructions qui se résument à décocher une croix en fin de parcours. Tout fébrile, je lance Origin et là, c’est le drame... Le programme est très lent, se gelant toutes les deux ou trois secondes. Tant bien que mal, j’installe Dead Space 2 et Theme Hospital. Le premier se lance mais rame autant que le lanceur d’Electronic Arts. Le second plante lamentablement. J’opère un dernier essai plein d’espoir avec Dragon Age Inquisition. Hélas, ce très bon jeu souffre lui aussi des mêmes lags que le lanceur.  

Classé argent, Origin semble être le programme qui donne le plus de fil à retordre à la communauté lutrisienne. Je ne doute pas qu’un jour il fonctionnera aussi bien que sur Windows. Mais de mon côté, il va rester au tiroir encore un moment, attendant la mise à jour miraculeuse qui viendra tout résoudre ! 

Légèrement déçu, je passe à GOG Galaxy, histoire d’avoir un lanceur de lanceurs dans le lanceur. Bon sang, c’est vrai que ça fait vraiment beaucoup là... Je démarre donc le logiciel et tombe sur un comportement proche de celui d’Origin. Ça rame, c’est intenable plus de cinq minutes. J’essaie d’installer Project Warlock, mais au final ça ne fonctionne pas. Ayant là aussi très peu de jeux sur cette plateforme, j’ai vite abandonné mes essais. Il semble toutefois que GOG Galaxy soit classé Or sur Lutris, son fonctionnement erratique est donc probablement dû à ma configuration. Affaire à suivre (et vos retours à ce sujet sont les bienvenus)! 

Et les autres ? 

Après avoir poncé les principaux lanceurs de jeux du marché, j’ai tenté l’aventure avec deux titres qui me tiennent particulièrement à cœur, à savoir Guild Wars et sa suite, avec tous les add-ons qui vont avec bien évidemment ! 

À part une petite modification du chemin d’installation pour GW, je n’ai eu aucun problème à déplorer. Lutris fait tourner comme un charme ces deux vénérables MMORPG. C’est stable, c’est beau : la magie est toujours présente. 

Allez, histoire de vraiment aller au fond des choses, je me suis fait un petit retour en enfance en essayant quelques jeux Nintendo 64 et Game Gear. Plusieurs émulateurs sont installables depuis l’interface de Lutris. Il ne reste qu’à dégoter les ROM, les scripts faisant une fois de plus tout le reste. Tout tourne nickel, au besoin vous pourrez transformer votre fidèle PC en console old-school !

Conclusion

Actuellement, Lutris est certainement la meilleure solution pour faire tourner des jeux Windows sur GNU/Linux sans passer par Steam. Ce lanceur libre et gratuit est un formidable couteau suisse, facile à prendre en main mais très complet sur le fond comme sur la forme. Si vous utilisez EGS, Blizzard ou UPlay, c’est clairement LE logiciel qu’il vous faut.

GameHub : le lanceur pour les anti-DRM

Vous n’en avez pas assez avec EGS, Blizzard et compagnie ? Vous en voulez encore ? Ça tombe bien, moi aussi. Et pour ça, il y a GameHub. 

GameHub Linux

Disponible sur le PoP!_Shop ou téléchargeable depuis GitHub, GameHub est un autre lanceur de jeux dédié aux utilisateurs de GNU/Linux. Il a cependant l’énorme avantage de mettre en avant les plateformes sans DRM comme Humble BundleGOG ou encore Itch.Io. Et si jamais vous en avez besoin, il gère aussi les jeux Steam. Il le fait d’ailleurs un peu mieux que Lutris, mais là encore il reste plus simple de passer directement par le lanceur de Valve si vous n’utilisez que lui. 

GOG au meilleur de sa forme

Pour mes essais avec GameHub, je me suis donc concentré sur les titres GOG qui ne fonctionnent pas en passant par Lutris. Les résultats sont bien meilleurs même s'il faut mettre – un peu – les mains dans le cambouis pour en tirer de bons résultats. La plupart du temps, il s’agit de changer le chemin de l’exécutable ou de modifier la couche de compatibilité. Ça demande ainsi quelques essais préalables, mais au final ça fonctionne ! 

J’ai ainsi pu faire tourner sans aucun problème les jeux suivants, provenant tous de ma bibliothèque GOG : 

  • Project Warlock 

  • Unreal Tournament 

  • Unreal 2 : The Awakening 

  • Amnesia : The Dark Descent 

  • Alien versus Predator Classic 

Par contre, pas moyen de jouer à Shadow Warrior 2 qui refuse soit de se lancer, soit qui plante lamentablement après le premier chargement. Tout n’est pas encore parfait, mais GameHub reste le top pour les jeux GOG. 

Humble et Itch.Io : encore quelques progrès à faire 

Je ne me suis pas trop attardé sur la partie Humble Bundle. Le seul titre que j’ai essayé - à savoir Beats Buddy – a tourné sans problème. Si vous êtes membre Humble Choice, vous aurez même accès au catalogue Humble Trove. Dans l’absolu, vous n’aurez pas besoin de trop de bidouilles puisque la plupart des jeux vidéo provenant du célèbre site de bundles sont nativement compatibles avec GNU/Linux. Et ça, c’est vraiment chouette ! 

Pour terminer, je me suis lancé sur Itchi.Io. C’est la dernière intégration de GameHub et la moins fonctionnelle actuellement. Si les jeux se téléchargent bien, il faut passer par le terminal pour les lancer avec Wine. Rien de bien méchant, mais on sent qu’il y a encore du travail à réaliser sur cette partie. Privilégiez donc les titres natifs Linux. Sinon, vous pouvez directement passer par le lanceur Itch.Io, disponible sur le site officiel.

Conclusion 

Même si je n'ai passé que peu de temps sur GameHub, j'ai apprécié l'expérience. L'interface simple d'emploi et les intégrations de comptes orientés DRM-free sont les gros atouts de ce lanceur GNU/Linux. Il a encore un peu de chemin à parcourir, mais nul doute qu’il est déjà incontournable pour tous les joueurs linuxiens ! 

Tant de jeux, si peu de temps... 

Voilà que nous arrivons déjà au terme de ce second dossier consacré au gaming sur Linux. Après seulement un mois à n’utiliser qu’Ubuntu et PoP!_OS, je ne me vois clairement plus retourner sous Windows. Si Linux a toujours eu ma préférence pour le travail, ce système a maintenant su emporter mon cœur pour les loisirs.  

Jouer sur une distribution GNU/Linux n’est plus un doux rêve de geek. C’est possible et, mieux, c’est même diablement simple. La communauté est plus active que jamais. Grâce à Wine et Proton, la stabilité est aussi bonne que sur Windows. Certes, ce n'est pas encore à 100% au point et certains jeux sont toujours injouables. Mais ils sont en très faible minorité. Chaque jour, de nouveaux progrès sont amorcés. 

Alors soyons fous et imaginons un jour pas si lointain où on trouvera sur les étalages de nos revendeurs préférés des PC gaming Linux aux côtés de leurs homologues Windows. Plus le temps passe, plus j’y crois. Et cette fois-ci, je suis sûr que ça ne restera pas un simple rêve de geek qui veut juste tester "autre chose"...