C'est un fait : plus les années passent, et plus la taille moyenne des jeux vidéo augmente. A tel point qu'en 2014, Titanfall et Wolfenstein battent tous les records et se permettent de réquisitionner pas loin de 50 Go d'espace disque chacun ! Le moment semble donc opportun pour étudier les raisons qui poussent les jeux vidéo à prendre autant leurs aises sur nos PC, déjà bien encombrés par ailleurs.
Au premier abord, on pourrait penser que le problème de la place occupée par les jeux n'en est pas vraiment un. Après tout, dans la plupart des cas l'opération d'installation n'est effectuée qu'une fois (sa durée importe donc peu) et la taille des disques durs augmente elle aussi régulièrement (que sont 50 Go face à une capacité de 4 To, soit environ 4000 Go ?). Mais ce serait faire fi de deux tendances fortes et durablement installées : la dématérialisation des données et la démocratisation des disques SSD.
L'installation est un processus potentiellement long, mais qui n'a lieu généralement qu'une seule fois.
A moins d'être équipé de la fibre optique, devoir télécharger plusieurs dizaines de gigaoctets n'est jamais une partie de plaisir. Certaines plateformes de téléchargement réduisent partiellement le problème en autorisant un préchargement des jeux avant leur sortie, mais en dehors des précommandes, point de salut. Une fois un jeu déjà sorti ajouté dans votre panier, vous êtes bons pour patienter quelques heures, voire quelques jours, afin que toutes les données soient rapatriées sur votre disque.
Le dématérialisé, c'est parfois pratique. Devoir télécharger les 50 Go de Titanfall, ça l'est beaucoup moins...
De plus, si vous êtes un joueur chevronné, il y a de fortes chances que le disque en question soit un SSD. Dans un cadre ludique, cette technologie permet notamment de réduire drastiquement les temps de chargement ce qui, parties après parties, représente un gain de temps cumulé très important. Seulement voilà, la capacité des disques SSD reste limitée, tandis que le prix au Go, même s'il baisse régulièrement, est loin de pouvoir concurrencer celui des disques durs classiques. Le résultat est sans appel : la plupart des joueurs sont équipés d'un disque principal de 128, 256 ou 512 Go dans le meilleur des cas. Quand certains jeux atteignent les 50 Go, il devient évidemment impossible d'en installer autant que l'on souhaiterait sur le SSD.
Des temps de chargement raccourcis ? Oui, à condition que le SSD possède suffisamment d'espace libre !
Si du côté du consommateur il n'y a pas grand-chose à faire pour enrayer cette tendance à l'embonpoint, il reste intéressant en revanche d'en comprendre les raisons. Histoire de mieux accepter cette réalité inéluctable ou, au contraire, de pouvoir dans certains cas précis blâmer le laisser-aller des développeurs !Année après année, le poids des jeux vidéo n'a de cesse d'augmenter. Mais l'impression tenace que le mouvement s'accélère ces derniers temps est-elle justifiée ? Pour le déterminer, nous avons déterré quelques données historiques concernant des séries plus ou moins fleuves. Les tailles retenues sont celles des jeux "purs" une fois installés, hors extensions, patchs, mods et autres contenus téléchargeables. Il ne s'agit pas non plus de l'espace disque nécessaire que l'on trouve dans les configurations recommandées, car les éditeurs communiquent généralement des valeurs très approximatives, voire totalement fantaisistes, qui tiennent plus de l'ordre de grandeur qu'autre chose.
GTA
Titre | Année | Poids |
Grand Theft Auto | 1997 | 365 Mo |
Grand Theft Auto 2 | 1999 | 384 Mo |
Grand Theft Auto III | 2001 | 1236 Mo |
Grand Theft Auto : Vice City | 2002 | 1501 Mo |
Grand Theft Auto : San Andreas | 2004 | 4788 Mo |
Grand Theft Auto IV | 2009 | 15777 Mo |
A ses débuts, la série GTA nous offrait des graphismes 2D en vue de dessus. Ce n'est que lors du troisième épisode que le jeu est passé à la troisième dimension et à une vue à la troisième personne. Un choix qui a des conséquences en termes de poids, puisque GTA 3 pèse trois fois plus que son précedesseur, alors que les deux premiers épisodes avaient à peu près la même taille. Une fois ce changement de technologie adopté, la prise de poids continue de plus belle jusqu'à aboutir à GTA IV qui, avec ses 16 Go, était clairement l'un des plus gros jeux de 2009, au sens propre du terme. Plus beau, bien plus vaste, et prévu pou la fin d'année sur PC, GTA V battra un nouveau record pour la série et devrait probablement atteindre les 30 Go. Sur les consoles d'ancienne génération le jeu se permet déjà d'occuper 17 Go (dont environ 8 sont installés sur le disque dur).
Tomb Raider
Titre | Année | Poids |
Tomb Raider | 1996 | 303 Mo |
Tomb Raider 2 | 1997 | 333 Mo |
Tomb Raider 3 : Les Aventures de Lara Croft | 1998 | 467 Mo |
Tomb Raider : La Révélation finale | 1999 | 642 Mo |
Tomb Raider : Sur les traces de Lara Croft | 2000 | 552 Mo |
Tomb Raider : L'Ange des ténèbres | 2003 | 1379 Mo |
Tomb Raider : Legend | 2006 | 7332 Mo |
Tomb Raider : Anniversary | 2007 | 3960 Mo |
Tomb Raider : Underworld | 2008 | 7548 Mo |
Tomb Raider | 2013 | 12306 Mo |
Série particulièrement prolifique, et emblématique du jeu vidéo, Tomb Raider a connu une dizaine d'épisodes majeurs jusqu'à aujourd'hui. De 1996 à 2000, la taille des cinq premiers opus reste grosso modo cantonnée à la capacité d'un CD. Par la suite, de 2003 à 2013, on passe carrément de l'ordre du Go à celui de la dizaine de Go. On notera que la progression n'est pas constante, puisque la taille du huitième épisode est nettement inférieure à celle du septième et du neuvième. Cette chute s'explique tout simplement par la nature même du jeu en question, qui est un remake HD du tout premier épisode. La taille et la complexité des niveaux restent donc d'époque.
Elder Scrolls
Titre | Année | Poids |
The Elder Scrolls : Arena | 1994 | 21 Mo |
The Elder Scrolls II : Daggerfall | 1996 | 482 Mo |
The Elder Scrolls III : Morrowind | 2002 | 631 Mo |
The Elder Scrolls IV : Oblivion | 2006 | 4457 Mo |
The Elder Scrolls V : Skyrim | 2011 | 5600 Mo |
Partie de presque rien avec ses 21 Mo, la série des Elder Scrolls a toujours su rester raisonnable en termes de poids, malgré la présence d'un monde ouvert très vaste. Cela peut s'expliquer en partie par la présence d'un univers médiéval-fantastique, plus facilement "copier collable" que l'univers urbain d'un GTA par exemple. Rien ne ressemble plus à un arbre qu'un autre arbre, à une forêt qu'une autre forêt, ou à une grotte qu'une autre grotte. De même, cloner des animaux passe comme une lettre à la Poste, tandis que les joueurs ont tendance à tiquer s'ils aperçoivent trop souvent les mêmes véhicules sur la route.
Gothic/Risen
Titre | Année | Poids |
Gothic | 2001 | 1130 Mo |
Gothic II | 2003 | 2083 Mo |
Gothic 3 | 2006 | 3030 Mo |
Risen | 2009 | 3233 Mo |
Risen 2 : Dark Waters | 2012 | 7829 Mo |
Moins célèbre que les Elder Scrolls mais tout de même très appréciée des amateurs de jeux de rôle, la série Gothic a connu quelques déboires éditoriaux après la sortie du troisième épisode. Au final, Gothic 4 n'a rien à voir avec la saga originale, dont Risen représente en réalité la suite spirituelle (même équipe de développement, même défauts et qualités). Prévu pour le mois d'août, Risen 3 devrait peser sensiblement plus que les 8 Go de Risen 2, puisque la version preview occupe déjà 5468 Mo à elle seule, alors qu'elle ne donne accès qu'à une partie des quêtes et de l'univers du jeu.
Une progression non linéaire
L'étude de ces courbes ne laisse aucun doute : nous n'avons pas affaire à une progression linéaire (qui aboutirait à des lignes droites) mais plutôt à une croissance exponentielle. Le sentiment que les jeux sont de "plus en plus de plus en plus gros" est donc pleinement justifié. Et nous allons voir qu'il y a plusieurs raisons à cela.Puisque les développeurs se doivent de proposer des jeux toujours plus beaux et impressionnants, il n'est guère étonnant que le poids de ces derniers augmente régulièrement. Sur ce point, le passage de la 2D à la 3D a eu son importance, puisqu'il faut dorénavant modéliser et texturer sous toutes les coutures le moindre objet, et non plus se contenter de représenter sa simple projection sur un plan 2D. Cependant, une fois l'ère de la 3D atteinte, la prise de poids a continué, et s'est même accélérée. Si l'ensemble des composants d'un jeu est atteint par cette croissance (plus de polygones, plus de shaders, niveaux plus vastes, etc.), certains points bien précis restent les principaux responsables d'une prise de poids massive.
Supports de stockage
Nous rentrons petit à petit dans l'ère du tout dématérialisé, mais les supports de stockage physique ont eu une influence majeure jusqu'à aujourd'hui sur la taille des logiciels en général, et des jeux vidéo en particulier. Avant tout comme facteur limitant, puisqu'il n'était pas plus envisageable de proposer un jeu de 300 Mo sur plusieurs centaines de disquettes en 1988, que de distribuer 3 To de données sur des centaines de disques DVD ou Blu-ray aujourd'hui.
Mais de manière un peu moins évidente, la taille standard d'un support (720 Ko, 1,44 Mo, 650 Mo, 4,7 Go, etc) agit également comme facteur "d'attraction". Autrement dit, les développeurs ont une tendance naturelle à utiliser tout l'espace dont ils peuvent disposer. Et ce, autant pour de bonnes raisons (par exemple une compression moindre des cinématiques vidéo afin d'augmenter leur qualité) que des mauvaises (redondance de fichiers ou présence de données superflues, comme nous le verrons plus loin). Dans les deux cas, le résultat est identique : chaque nouvelle génération de support de stockage contribue à faire augmenter la taille moyenne des jeux.
Prenons pour exemple la saga King's Quest, qui est une parfaite illustration de ce phénomène. Les quatre premiers épisodes issus de "l'ère disquette" ne pèsent que quelques mégaoctets, tandis que les quatre suivants sortis en mode CD-Rom tournent autour des 500 Mo.
A l'heure actuelle, les plus gros jeux PC (hors MMORPG aux multiples extensions et mises à jour) occupent quant à eux 50 Go d'espace disque, ce qui correspond comme par hasard à la taille standard d'un disque Blu-Ray... alors même que ces jeux sont majoritairement distribués en ligne via Steam, Origin et autres plateformes du même type. Il peut s'agir d'une coïncidence, d'une contrainte de production, ou même d'une barrière psychologique. Dans tous les cas, cette digue est certainement en train de céder ! Mais une fois que la dématérialisation des jeux sera totalement achevée, ce sera le débit moyen des connexions Internet qui prendra le relais des limites physiques et, de manière quelque peu paradoxale, obligera à la fois les développeurs à limiter leur appétit tout en les incitant à se goinfrer au maximum.
Audio
Les vieux de la vieille s'en souviennent : il fut un temps où toute la partie sonore des jeux était générée par l'ordinateur lui-même, avec l'aide d'une carte son le cas échéant. Puis les bruitages se sont mis à être préenregistrés, et donc simplement lus par le PC, tandis que la musique restait dans un format de type MIDI, et donc calculée en temps réel. Au milieu des années 90, l'ère du CD-Rom, quelques jeux se sont mis à stocker leurs pistes musicales directement au format CD audio. Une opération qui avait tendance à faire augmenter la taille absolue des jeux, tout en réduisant finalement l'espace occupé sur le disque dur, puisque la musique était directement lue depuis le CD. Cette tendance hybride n'a pas perduré, car les compressions audio de type MP3 ont rapidement fait leur apparition et se sont totalement imposées au 21ème siècle. D'ailleurs, Microsoft a carrément abandonné le support de l'accélération audio matérielle et de DirectSound 3D dès la sortie de Windows Vista en 2007.
Depuis, quasiment tous les jeux utilisent le principe d'une bande-son entièrement stockée sous forme de fichiers audio numériques, qui sont ensuite simplement lus par le PC. Cette façon de faire occupe naturellement plus d'espace disque que les méthodes ancestrales, mais surtout, elle accompagne diverses tendances qui, toutes, multiplient le nombre de fichiers audio. Ainsi, le jeu vidéo est définitivement devenu multimédia, et il n'est plus envisageable pour un titre majeur de se passer de musique ou de se contenter d'un simple thème diffusé en boucle. Les pistes purement musicales se multiplient donc. Mais il en va de même pour les "bruitages" (un terme qui regroupe ici également les voix des personnages), du fait de la généralisation des doublages, y compris dans des jeux de rôle ou d'aventure riches en dialogues.
Difficile d'imaginer le commandant Shepard muet comme une carpe... même si des dialogues uniquement textuels offriraient une écriture plus riche.
Qu'un petit bonhomme de trois pixels de haut soit muet, cela ne pose aucun problème. En revanche il suffit qu'un personnage proche du photoréalisme soit incapable d'ouvrir la bouche et de s'exprimer pour que l'on se retrouve aussitôt en pleine uncanny valley. Enfin, le jeu vidéo étant mondialisé, il bénéficie souvent de multiples localisations. Dès lors, il n'est pas rare que les fichiers correspondant à plusieurs langues soient présents sur le même disque, voire dans une même version téléchargeable.
La place prise par l'audio peut donc parfois être très importante, comme nous le prouve Skyrim. L'archive contenant les fichiers sons frôle le Go, tandis que celle des voix le dépasse allègrement. Au total, la partie audio pèse 2,25 Go pour un jeu de 5,58 Go... soit plus de 40% des données !
Cinématiques
Les scènes cinématiques peuvent être calculées en temps réel avec le moteur de jeu, ou simplement lues à partir d'un fichier vidéo. Dans le premier cas, la place qu'elles occupent reste très raisonnable, puisqu'en dehors des dialogues éventuels, la plupart des éléments nécessaires à leur élaboration sont piochés dans des fichiers déjà présents et utilisés ailleurs (textures, architectures des décors, personnages, etc). Dans le second cas, en revanche, chaque nouvelle scène occupe de l'espace disque supplémentaire. Et pas qu'un peu ! Le meilleur moyen de s'en convaincre est d'observer le cas des jeux Full Motion Video, dont le gameplay repose essentiellement sur des scènes en vidéo. Ainsi en 1995, un jeu tel que Phantasmagoria était livré sur sept CD alors que l'immense majorité des titres sortis la même année peinaient à en remplir un seul.La série de jeu d'aventures Gabriel Knight illustre également bien l'influence des scènes cinématiques en termes de poids puisque le deuxième épisode de la saga, seul à utiliser de la Full Motion Video, est naturellement plus gros que son prédécesseur, mais également plus gros que son successeur, sorti pourtant quatre années plus tard !
Aujourd'hui la mode du FMV est totalement passée et la compression vidéo a fait de net progrès. Mais dans le même temps, la haute définition est devenue incontournable, et les scènes cinématiques précalculées continuent donc d'occuper beaucoup d'espace disque. Car même si de plus en plus de jeux font l'impasse sur les cinématiques en vidéo, au profit de scènes utilisant le moteur du jeu, d'autres continuent d'utiliser cette méthode. Pour un éditeur comme Blizzard par exemple, offrir au minimum une longue et superbe scène CGI en guise d'introduction est devenu un passage obligé.
Les cinématiques en vidéo prennent de la place, mais permettent d'afficher des scènes extrêmement détaillées.
Si le précalculé permet d'afficher des scènes somptueuses, bien trop complexes pour être calculées en temps réel, il peut également servir d'autres propos. Ainsi, chaque vidéo qui introduit un nouveau niveau de la campagne solo de Battlefield 4 fait en réalité office d'écran de chargement de luxe. D'une manière plus générale, les FPS ont un peu plus tendance à avoir recours aux cinématiques vidéo que la moyenne car, vue subjective oblige, le personnage principal n'est tout simplement pas modélisé dans le jeu. Une scène précalculée permet alors de lui redonner visage humain, plutôt que d'afficher deux bras flottants...
Même s'il s'agit d'un TPS (Third Person Shooter), Max Payne 3 utilise également la technique des cinématiques destinées à dissimuler des temps de chargement. Une bonne idée pour le joueur, mais qui a un coût certain en terme d'espace disque puisque les vidéos occupent 8 Go sur 28, soit plus de 28 % des données.
Textures
Intuitivement, on pourrait penser qu'un jeu en 3D temps réel ne devrait guère prendre de place. Après tout, les demomakers arrivent à créer des séquences de plusieurs minutes avec seulement 4 ko d'espace disque à leur disposition. Mais voilà, dans ces programmes, absolument tout est généré par le PC à partir du code, y compris le son et les textures. Ce qui n'est absolument pas le cas dans un jeu vidéo, qui se doit de représenter un univers étendu, varié, interactif, et crédible. Chaque texture aperçue dans un jeu correspond en réalité à un fichier 2D stocké d'une manière ou d'une autre sur le disque dur. Et ces derniers temps, ces textures ont tendance à augmenter à la fois en nombre et en poids.Un exemple parmi tant d'autres de ce qu'il est possible de faire tenir dans 4 kiloctets...
En nombre, car de plus en plus de jeux prennent la forme de mondes ouverts, particulièrement vastes. Sachant que le moindre objet, le moindre personnage, la moindre surface fait appel à une ou plusieurs textures, ces dernières se comptent au final par milliers. Et leur poids augmente inexorablement au fil des sorties, afin d'accompagner la montée en résolution des écrans. Notamment sur PC, une plateforme qui dépasse depuis longtemps la Full HD et peut déjà faire tourner certains titres en 4K. Les textures doivent donc être de plus en plus détaillées, afin de ne pas paraître pixellisées. Si les cartes graphiques haut de gamme embarquent plusieurs Go de VRAM, c'est bel et bien parce que certains jeux remplissent cet espace. Et lorsqu'un programme se permet de charger 3 ou 4 Go de textures à un instant T, c'est qu'il en stocke encore plus que ça sur le disque dur...
Prenons un cas d'école comme Wolfenstein : The New order, qui pèse, avant patch, 43 Go. Basé sur le moteur id Tech 5, il utilise la technologie MegaTexture (également appelée Virtual Texturing) qui fait appel à des textures pouvant atteindre une résolution de 128000 x 128000 pixels. Dans ce cas précis, il ne s'agit pas d'une texture appliquée à un seul objet, mais d'un ensemble de textures regroupées en une seule et plaquées d'un bloc sur les décors. Toujours est-il qu'un simple passage dans les fichiers du jeu se révèle riche en enseignements : à lui seul, le répertoire Virtualtextures pèse plus de 33 Go !
Le plus gros fichier de ce dossier pèse 2,75 Go, s'intitule c01p2.pages et ne correspond donc qu'à la la seconde partie du premier chapitre. Cette façon de gérer les textures explique également pourquoi le premier patch disponible pour le jeu pesait 5 Go. Une taille conséquente dans l'absolu, mais qui est susceptible de ne concerner concrètement que deux ou trois fichiers.
Perte de place à bon escient
Si les développeurs prennent leurs aises sur nos disques durs, cela peut être pour de bonnes raisons. Notamment pour accélérer le traitement des données ! Cela peut paraître paradoxal au premier abord (des données plus petites devraient être plus rapides à traiter) mais il faut penser "à qualité égale". Par exemple pour qu'un fichier de texture prenne moins de place sur le disque, les développeurs peuvent choisir de le stocker sous forme compressée. Mais il faut alors ajouter au temps de traitement du gros fichier le temps de décompression du petit fichier ! Ce qui peut alors allonger les temps de chargement des niveaux, ou même créer des saccades en plein jeu sur les configurations les plus modestes. Vu sous cet angle, on a tout de suite moins envie de se plaindre de l'espace disque occupé par les jeux.Perte de place à mauvais escient
Hélas, il arrive également que les développeurs travaillent tout simplement comme des sagouins. L'exemple le plus récent concerne Titanfall et ses 50 Go. Sachant que le jeu comporte peu de maps et que sa campagne solo est à la fois courte et bêtement basée sur les maps multi, il y a clairement anguille sous roche. En réalité, Respawn Entertainment a décidé de stocker les fichiers audio sous forme décompressée. Une façon de faire qui rentre dans le cadre du chapitre précédent, et qui est donc plutôt louable a priori.Seulement ce sont les données correspondant à toutes les langues supportées qui sont installées, ce qui représente au final près de 35 Go ! Sachant que les voix ont été localisées en allemand, anglais, espagnol, français, italien, japonais et russe, chaque joueur de Titanfall possède environ 30 Go de données inutiles sur son disque dur. Quand on pense en plus qu'il s'agit d'un jeu multi, où les voix sont couvertes par celles des joueurs...
L'année dernière, c'est XCOM : Enemy Unknown qui commettait une bourde de ce type. Cette fois, la redondance concernait les nombreuses scènes cinématiques, qui étaient stockées à la fois en 720p et en 1080p ! Un procédé totalement inutile puisque tout PC capable de faire tourner le jeu peut upscaler du 720p ou downscaler du 1080p sans aucun problème. La preuve en est que la gaffe a été corrigée depuis. Si vous téléchargez le jeu à l'heure actuelle, vous vous apercevrez que la plupart des vidéos 720p ont disparu (il n'en subsiste que 16, contre 124 en 1080p) ce qui représente un gain de place de près de 4 Go. Quant à l'extension XCOM : Enemy Within, elle ne comportait d'emblée que des fichiers 1080p.
Que ce soit pour de bonnes ou de mauvaises raisons, l'augmentation de la taille des jeux vidéo est un phénomène qui n'est pas près de s'arrêter. Préparez vos disques durs, car l'ère des jeux à 100 Go n'est plus très loin.
On l'a vu, l'évolution du poids des jeux est plutôt de type exponentielle que linéaire. Cette caractéristique étant parfaitement cohérente avec la fameuse Loi de Moore, il n'y a a priori aucune raison pour que la tendance s'inverse ou ralentisse à l'avenir.
Du coup, une projection (hypothétique et approximativement exponentielle) jusqu'en 2024 des courbes étudiées dans le second chapitre nous prédit un futur GTA à environ 100 Go, un Tomb Raider à 50 Go et un Elder Scrolls ou un Gothic à environ 40 Go. Autrement dit, ce qui constitue aujourd'hui l'exception deviendra la norme dans dix ans, tandis que les plus gros jeux dépasseront du coup allègrement les 100 Go et atteindront pour certains les 200 Go.
Il faut dire que d'ici là, la dématérialisation aura certainement remplacé pour de bon les supports de stockage, forcément limités en capacité. Pour le PC, c'est une certitude. Mais tout porte à croire également que les actuelles consoles, dites de nouvelles génération, seront les dernières à proposer un média physique. Dès lors, même les simples portages sur PC de jeux multiplateformes ne seront plus limités arbitrairement par une capacité de stockage qui ne les concerne pas, ce qui peut encore être le cas aujourd'hui.
De plus, le 4K sera certainement devenu la norme, à moins que ce ne soit carrément le 8K qui se soit pleinement démocratisé. Les moteurs 3D se rapprocheront quant à eux toujours plus du photoréalisme, obligeant ainsi les développeurs à travailler avec des textures, modèles, maps et shaders toujours plus détaillés... et donc toujours plus gros !