Final Fantasy XV : rencontre avec Hajime Tabata, le réalisateur du jeu

Audrey Oeillet
Publié le 27 octobre 2016 à 17h38
Après moult rebondissements, Final Fantasy XV sortira enfin sur PS4 et Xbox One le 29 novembre prochain. Hajime Tabata, le réalisateur du jeu, était présent à Paris à l'occasion de la Paris Games Week. Nous avons pu le rencontrer pour lui poser nos questions.

Démarré il y a 10 ans, le développement de Final Fantasy Versus XIII s'est finalement transformé en Final Fantasy XV avec l'arrivée de la génération actuelle de consoles. Hajime Tabata est alors devenu coréalisateur, puis réalisateur exclusif du jeu. Connu pour son travail sur Crisis Core : Final Fantasy VII, The 3rd Birthday ou encore Final Fantasy Type-0, Tabata-san tient, avec Final Fantasy XV, son projet chantier sur la trame principale de la franchise de Square Enix. Un travail qui n'a pas été de tout repos !

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A un mois de la sortie de Final Fantasy XV, où en est le développement ?

Ça y est c'est officiel, j'ai le Gold, le développement du jeu est terminé. La dernière fois que je suis venu à la Paris Games Week il y a deux ans, j'avais promis que le jeu serait terminé lorsque j'y reviendrais, c'était un effet un peu dramatique. Mais au final, je suis heureux d'avoir pu tenir ma promesse.

Comment avez-vous pris les retours de la communauté de fans suite au dernier report du jeu, en août dernier ?

Ça a été assez compliqué émotionnellement. Les fans qui nous disaient « mais je ne vais jamais arriver à attendre deux mois de plus », c'était un crève-cœur. Il fallait absolument leur faire comprendre que ces deux mois étaient très importants, et que ça allait vraiment changer de manière intrinsèque la qualité du jeu.

Je me suis vraiment senti désolé, j'avais envie de dire pardon aux fans, mais le fait de sortir le jeu plus vite pour que les fans puissent y jouer deux mois plus tôt, en jugeant de notre côté que le jeu n'était pas terminé, ça aurait été pour moi une véritable trahison vis-à-vis des joueurs qui attendent Final Fantasy XV depuis longtemps. J'ai donc pris la décision de livrer plus tard quelque chose de satisfaisant.

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Comment a été vécue dans le développement la pression des fans ?

Pour tout vous avouer, j'ai ressenti la pression, mais mes équipes aussi la ressentaient. A chaque fois qu'on tentait de nouvelles approches ou qu'on pensait avoir terminé une partie du jeu, on se demandait si c'était vraiment fini et si on allait bien répondre aux attentes des gens qui sont là depuis autant de temps. C'était une manière de réfléchir tout à fait nouvelle pour nous.

Pour moi il y avait aussi une forme de défi, puisque que c'est mon premier Final Fantasy numéroté, ce n'est pas un spin-off comme Type-0. Je voulais apporter des choses nouvelles, personnelles. Malgré tout, j'ai voulu m'entourer des équipes historiques de la franchise. C'est ce mélange de ces différentes expériences qui fait de Final Fantasy XV ce qu'il est aujourd'hui.

Donc, malgré le fait que vous soyez arrivé à la tête du projet en cours de route, ça ne vous a pas freiné dans vos envies créatrices ?

Pas du tout ! Je suis arrivé à un moment charnière du développement du jeu, c'est-à-dire au moment où on abandonnait Versus XIII et qu'on changeait de consoles pour passer à la génération suivante.

Ma mission a consisté à garder ce qu'il y avait à garder sur Final Fantasy Versus XIII, mais surtout de refaire un Final Fantasy XV quasiment à partir de zéro. Au final, c'est un jeu qui est réellement différent : je ne suis pas arrivé au milieu de quelque chose puisque mon travail a justement été de refaire quelque chose.

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Quelles ont été les principales différences pour vous entre le développement de Final Fantasy Type-0 et Final Fantasy XV ?

La principale différence est liée à la responsabilité à l'intérieur de la société. Avec un Final Fantasy numéroté, vous avez entre les mains le mur porteur de l'année fiscale de Square Enix. Avec un spin-off, c'est beaucoup moins le cas. En interne, la pression est complètement différente : pour un spin-off, on vous demande de finir le développement au moment prévu, tandis qu'avec un épisode numéroté, vous avez le bilan comptable de l'entreprise entre les mains.

Ç'a été ma première expérience de ce type : quand vous développez ce type de jeux, tout le monde vous regarde, les responsables du studio, les fans, mais aussi l'industrie au complet. La franchise Final Fantasy est toujours un exemple pour l'industrie japonaise, et quand c'est le premier que vous faites, vous ressentez encore plus de pression.

Depuis le début du développement de FFXV, énormément de RPG occidentaux sont sortis, il a eu les The Witcher, la trilogie Mass Effect, les Dragon Age... on a aussi vu revenir en force le RPG old-school avec des titres comme Pillars of Eternity, par exemple. Quel est le regard des développeurs de Square sur ce type de jeux ?

On s'en inspire autant qu'on cherche à s'en démarquer. On ne s'interdit pas de regarder ce que font les autres. Sans vouloir les copier, on joue beaucoup à ce que font les autres studios et on est forcément influencé d'une manière ou d'une autre.

Chez Square Enix, on a nos propres recettes et on sait ce qu'on propose, mais on ne va pas s'empêcher d'évoluer parce que les goûts des gens évoluent, les technologies aussi. Le développement de Final Fantasy XV a été différent de ce qu'on faisait avant car il a fallu évoluer avec l'époque actuelle. Personnellement, je voulais que le jeu soit disponible partout en même temps, car bien que ça reste un RPG développé par un studio japonais, Final Fantasy est une franchise mondiale aujourd'hui.

Par ailleurs, on ne s'interdit rien en matière de développement. Pour ce jeu, on a cherché à nous entourer des meilleurs. Au lieu de se dire « on va copier ça parce que c'est bien », on va embaucher la personne qui l'a développé. Parmi nos développeurs, on a l'un des directeurs techniques de The Last of Us. On a aussi embauché un développeur de Dragon Age... on cherche à se mettre au goût jour en nous entourant de talents. Pour l'anecdote, le chef de notre équipe technologique est français !

Une mécanique de jeu comme celle des dialogues à choix multiples qui influencent l'histoire, c'est quelque chose qui aurait sa place dans un Final Fantasy ?

Nous pensons un Final Fantasy comme une histoire qui a un début et une fin, on s'est concentré sur une seule et unique fin qu'on a tâché de rendre très émouvante, et on espère qu'elle touchera un maximum de joueurs.

Moi j'aime bien cette possibilité de dialogues à choix multiples, donc on en a intégré un peu dans Final Fantasy XV pour que le joueur puisse exprimer son opinion, mais ça n'a pas d'influence sur la manière dont se déroule le scénario.

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En tout, le projet Final Fantasy aura été en développement pendant 10 ans. Et forcément on se pose des questions quant à la viabilité du développement et de la rentabilité d'un jeu développé durant autant de temps. Est-ce qu'on ne doit pas craindre d'être arrivé aux limites de ce type de projets très exigeants ? Verra-t-on des Final Fantasy XVI, XVII... ?

Je comprends ce que vous voulez dire. Mais même si Final Fantasy XV est un gros jeu, si vous le comparez à d'autres jeux AAA occidentaux, ce n'est pas un projet aussi énorme que ça. Je pense que de nombreux jeux AAA coûtent bien plus cher à développer que FFXV.

L'équipe de développement a été d'environ 200 personnes pendant toute la durée du travail, ce qui n'est pas particulièrement exceptionnel. On était également environ 200 pour les précédents Final Fantasy.

Effectivement, vous parlez de 10 ans de développement mais ça englobe le développement de Final Fantasy Versus XIII, qui a donc été annulé et quasiment entièrement repris de zéro pour Final Fantasy XV. Ce qui fait que, concrètement, FFXV n'a été en développement que pendant 4 ans. Ça n'a pas été un jeu si cher au final !
Vous vous faites du souci pour nous ?

Je m'en fais un peu pour vous, pour l'industrie, et pour les fans de Final Fantasy !

Vous avez peur que le marché se rétrécisse ?

Je constate surtout que depuis une dizaine d'années, beaucoup de remake et adaptations de vieux Final Fantasy sont sortis chez Square Enix. Je m'inquiète surtout de voir de moins en moins de réelles nouveautés arriver avec des projets qui restent en développement durant autant de temps. Et pour les fans, c'est difficile de comprendre qu'en réalité FFXV n'est pas en développement depuis dix ans.

Je comprends bien. La réalité c'est que Versus XIII était trop ambitieux et qu'on a décidé de revenir sur nos projets. On a conscience d'avoir fait des erreurs, mais ça ne fait pas 10 ans qu'on ne fait rien, on a rectifié le tir, on a rafraîchi nos idées, développé de nouvelles choses... Vous allez jouer à FFXV ?

Bien sûr, depuis le temps que j'attends de voir le résultat !

Je pense que vous allez finir le jeu, vous allez vous dire « j'ai bien fait d'attendre ! »

Merci Tabata-san !

Audrey Oeillet
Par Audrey Oeillet

Journaliste mais geekette avant tout, je m'intéresse aussi bien à la dernière tablette innovante qu'aux réseaux sociaux, aux offres mobiles, aux périphériques gamers ou encore aux livres électroniques, sans oublier les gadgets et autres actualités insolites liées à l'univers du hi-tech. Et comme il n'y a pas que les z'Internets dans la vie, j'aime aussi les jeux vidéo, les comics, la littérature SF, les séries télé et les chats. Et les poneys, évidemment.

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