Anciennement connu sous le nom de BRF pour « Big Falcon Rocket », qui regroupait le combo lanceur/vaisseau, ce projet de SpaceX laisse entrevoir une nouvelle révolution dans le secteur spatial.
Maintenant désigné par l'appellation Super Heavy pour le premier étage (le lanceur) et Starship pour le second (le vaisseau spatial), ce combo en cours de développement sur le nouveau site de SpaceX situé à Boca Chica au Texas envisage de réaliser ses premiers vols habités entre 2023 et 2024 pour ensuite être utilisé pour des voyages touristiques autour de la Lune. Le milliardaire japonais Yusaku Maezawa a par ailleurs déjà commandé ses billets pour un voyage accompagné d'une congrégation de six à huit artistes.
SpaceX : l'acteur incontournable du spatial
Depuis l'arrivée d'Elon Musk et de SpaceX dans le domaine spatial, un sérieux virage a déjà été amorcé par les grands acteurs de ce domaine, notamment des agences historiques que sont la NASA, l'ESA ou encore le Roscosmos. Les nouvelles méthodes portées par SpaceX comme la récupération et la réutilisation de ses lanceurs, ou encore la spatialisation d'équipements qui n'étaient pas destinés initialement au domaine spatial, ont en effet permis de contrôler et réduire les coûts.SpaceX s'est ainsi vu confier d'importants contrats au fil des années, comme ce fut le cas avec le programme COTS (« Commercial Orbital Transportation Services ») de la NASA, ou encore le programme CCDeV (« Commercial Crew Development »),qui permettent à SpaceX de montrer l'étendus de ses capacités avec sa capsule Dragon pour le transport de FRET vers l'ISS et Crew Dragon qui devrait permettre à la NASA d'envoyer des astronautes américains à destination de l'ISS en se passant des services du Roscosmos et de Soyouz. Malgré tout, la récente explosion d'un capsule Crew Dragon lors d'un essai statique pourrait bien retarder le programme et laisser Boeing et son CST-100 Starliner être le premier engin américain à envoyer des Hommes sur l'ISS depuis la navette spatiale Space Shuttle.
Super Heavy Starship : l'imminente révolution
Ainsi, si le trublion californien a déjà permis de dépoussiérer le secteur spatial, son Super Heavy Starship pourrait bien supplanter la NASA dans son programme lunaire en proposant une solution qui sera, si tout se passe comme prévu, rapidement disponible et largement moins coûteuse que le lanceur SLS de la NASA.D'une taille de 118 m (63 m pour le lanceur, 55 pour le vaisseau) et d'un diamètre de 9 m, Super Heavy Starship sera un mastodonte de 4 400 tonnes. Pour propulser cette fusée, SpaceX a prévu pas moins de 37 moteurs Raptor pour l'étage principal, ainsi que 6 pour Starship ! En développement depuis 2012, ce moteur « totalement repensé » est le premier modèle chez SpaceX à utiliser un mélange de méthane et d'oxygène liquide et devrait autoriser une poussée dans le vide de l'ordre de 3 500 kN, soit environ 357 tonnes. Le test de mise à feu statique du moteur Raptor en février est parvenu à fournir une poussée de 172 tonnes, ce qui est déjà près de deux fois plus que les actuels moteurs Merlin utilisés par SpaceX.
Selon les estimations, Super Heavy Starship deviendra le combo spatial le plus puissant de la planète en permettant de lancer en orbite basse des charges utiles atteignant les 150 tonnes. Cette donnée nous montre évidemment que SpaceX ne se cantonnera pas au tourisme spatial avec Starship. A vrai dire, la société californienne entrevoit des usages multiples pour sa fusée BFR et ainsi remplacer complètement les lanceurs actuels (Falcon 9, Falcon Heavy, capsule Dragon).
Starship, le premier vaisseau à atterrir sur Mars ?
Il est peut-être encore un peu tôt pour se prononcer sur un éventuel voyage sur Mars à l'aide de Starship, mais c'est bien entendu dans les plans d'Elon Musk, qui fait d'ailleurs très régulièrement allusion à la planète rouge dans ses interventions publiques.Néanmoins, si une mission à destination de Mars se concrétise, il y a fort à parier que SpaceX et son Super Heavy Starship soient les premiers à être paré à une telle prouesse. Dans les faits, puisque cette nouvelle fusée doit venir remplacer les lanceurs actuels de SpaceX, on peut alors entrevoir une multitude de missions différentes pour Starship.
En effet, selon SpaceX, le coût de lancement de cette fusée sera bien inférieur aux engins actuellement utilisés, notamment grâce à la possibilité de réutiliser la grande majorité des composants de cette dernière. S'il parait donc logique que Starship puisse réaliser aisément des missions de lancement de satellites, de transport de fret et d'astronautes jusqu'à l'ISS, ou encore des missions habitées à destination de la Lune, Elon Musk envisage également sérieusement la conquête de Mars, mais aussi des voyages vers des destinations bien plus lointaines en vue d'explorer le système solaire.
Starhopper, le prototype en avance sur le calendrier
Initialement prévu pour fin 2019, Starhopper a finalement été dévoilé en début d'année, montrant ainsi les ambitions de SpaceX pour tenter de respecter le calendrier initial de Starship, chose assez rare dans le domaine spatial pour être souligné ici.Bien moins haut que Starship, ce prototype mesure 39 m et sera équipé de 1 à 3 moteurs Raptors pour ses « sauts » à basse altitude. Conçu dans un alliage composé d'acier inoxydable, Starhopper et son design ressemblant à la fusée de Tintin, avec une esthétique « rétro », ont d'abord surpris. Starship reprendra en effet les mêmes éléments et matériaux, des fenêtres seront toutefois ajoutées sur la version finale de l'engin.
Construit en plein air sur le site de Boca Chica au Texas, Starhopper a d'abord subi quelques désagréments, heureusement sans gravité, avant de réaliser avec succès ses premiers tests statiques en juin, ainsi que des vols d'essai à basse altitude. Fin août, ce tout premier prototype de Starship a pu être mis à contribution avec un vol à 150 mètres d'altitude suivi d'un atterrissage ; le but de l'opération était ici de tester le fameux moteur Raptor.
Le prototype orbital s'envolera avant la fin de l'année
Si Starhopper n'est qu'un engin de test et sera par la suite utilisé comme banc d'essai pour les moteurs Raptor, les prototypes MK1 et MK2 sont quant à eux de véritables démonstrateurs et se rapprochent plus de ce à quoi devrait ressembler le futur Starship.Fin septembre, Elon Musk a annoncé l'achèvement de l'assemblage du prototype MK1 (Mark 1) que nous pouvons voir ci-dessus, une bien bonne nouvelle pour célébrer le tout premier lancement de satellites de l'entreprise privée, il y de cela déjà 11 ans ! Celui-ci devrait effectuer son premier vol suborbital (à 20 km d'altitude) d'ici décembre 2019 en étant équipé de trois moteurs Raptor.
MK2 est quant à lui toujours en construction sur un autre site en Floride et par une équipe différente, le but de SpaceX étant d'améliorer l'engin avec chaque nouveau prototype. Si le premier essai de MK1 est un succès, MK2 pourrait tenter un vol orbital d'ici 6 mois : si ce n'est pas le cas, SpaceX devrait y parvenir avec les prochains prototypes MK3 et MK4 ! Soulignons qu'il s'agit néanmoins d'un calendrier très optimiste qu'il sera certainement difficile de tenir. Elon Musk va cependant encore plus loin dans ses déclarations puisqu'il affirme que le premier vol habité de Starship pourrait avoir lieu d'ici 1 an, du jamais vu, mais faudrait-il encore que le vaisseau spatial réutilisable fasse ses preuves d'ici là.
Avec cette vitesse de croisière, SpaceX pourrait bien organiser ses voyages lunaires plus tôt que prévu, tout en réduisant de façon drastique le coût d'un vol habité !