En septembre 2023, on attendra impatiemment le retour des échantillons de cet astéroïde, Bennu © NASA
En septembre 2023, on attendra impatiemment le retour des échantillons de cet astéroïde, Bennu © NASA

Le compte à rebours est terminé, et nous voilà en 2023. Une année spatiale, à n'en pas douter ! Cette année sera pleine de découvertes, de nouvelles images du cosmos proche et lointain, de flammes de fusées, de réussites insolentes et d'échecs douloureux. Car oui, c'est de ce bois qu'est faite l'exploration spatiale. Paré au décollage ?

Et pour commencer, bonne année à vous ! Avant de commencer cet article, nous vous faisons le même avertissement que chaque année : les prédictions sont un jeu dangereux, une pente glissante vers un monde qui n'existe qu'en conjectures. En 2023, il y aura des surprises, des missions attendues, des échecs cuisants et des projets « sortis de nulle part ». Et comme chaque année, une partie des prévisions ne se réaliseront pas. Ce n'est donc pas un guide de ce que vous verrez, mais de ce que l'on attend au 1er janvier, en fonction des informations dont on dispose.

De nouvelles vues inédites du Soleil en 2023 ? Ou est-ce qu'on signe ? © ESA
De nouvelles vues inédites du Soleil en 2023 ? Ou est-ce qu'on signe ? © ESA

Autour du Système solaire

Partons une fois de plus autour du Soleil. En 2023, la sonde américaine Parker Solar Probe survolera Vénus le 21 août pour se freiner. De quoi réduire une fois de plus la distance record à laquelle elle passe « dans » l'atmosphère solaire : à 7,9 millions de kilomètres seulement de ce que l'on considère comme la surface du Soleil ! La sonde européenne Solar Orbiter poursuivra de son côté les observations périodiques des pôles solaires, mais sans survol en 2023. L'ESA aura à cœur de réussir le troisième survol de Mercure avec la sonde BepiColombo, toujours en phase d'approche et de préparation avant son dernier freinage pour entrer en orbite en décembre 2025.

En 2023, on attendra impatiemment septembre à la NASA, en particulier les équipes qui gèrent la mission OSIRIS-REx. Cette dernière aura la lourde tâche d'éjecter la capsule remplie des échantillons de l'astéroïde Bennu pour qu'elle traverse l'atmosphère et se pose en sécurité au Nouveau-Mexique. Sa mission cousine, Hayabusa 2, passera de son côté une année en sommeil, tout comme la sonde Lucy qui reviendra vers la Terre en 2024 avant de partir étudier les astéroïdes troyens de Jupiter.

Les astronomes continueront d'observer le duo d'astéroïdes Didymos et Dimorphos après l'impact de DART il y a 4 mois, mais la mission d'inspection de l'ESA qui partira observer les dégâts ne décollera qu'en 2024. En revanche, c'est la mission Psyche qui devrait décoller pour l'astéroïde métallique du même nom en octobre 2023 (il y a aura plusieurs années de trajet), après un délai de plus d'un an qui a causé une véritable cascade de retards au laboratoire JPL et un audit sans concessions…

La sonde Juno, toujours en orbite de Jupiter, survolera pour sa part de très près la lune-volcan Io à la toute fin d'année 2023. De quoi patienter pour voir les autres lunes gelées de la géante ? En effet, la très ambitieuse mission européenne JUICE décollera pour un trajet de 10 ans sur Ariane 5 au mois d'avril prochain. À ne pas rater !

DART, observé par Hubble quelques heures après l'impact. La "queue" de débris est restée depuis, mais dans quel état exact est l'astéroïde ? Il faudra attendre pour le savoir... © NASA / ESA / HST

Mars (et ça repart encore)

Pas de fenêtre de tir ni d'arrivée de nouveau véhicule vers Mars en 2023, mais on peut espérer un maximum d'opérations à la surface. La mission InSight est terminée, mais Curiosity et Perseverance vont poursuivre leurs aventures. Ce dernier en particulier devrait continuer à forer et à prélever ses échantillons dans des tubes dont 10 sont actuellement déposés au sol « au cas où » le rover n'arriverait pas à les ramener au futur véhicule équipé d'une fusée qui atterrira dans le cratère Jezero dans la prochaine décennie.

Contre toute attente le petit hélicoptère Ingenuity devrait poursuivre ses vols (il en a déjà plus de 36 au compteur), et le rover chinois Zhurong devrait reprendre sa route au sud… s'il se réveille après l'hiver martien. Il devait déjà communiquer en décembre, mais le silence de la Chine sur la question laisse supposer qu'il est resté inactif pour l'instant.

Curiosity s'enfoncera toujours un peu plus dans les hautes collines et la vallée Gediz © NASA / JPL-Caltech

On attendra en 2023 plus de précisions de la part de la NASA sur les futures missions, mais aussi du côté de l'ESA pour connaître les détails de la nouvelle version de la mission ExoMars, pour laquelle la coopération avec la Russie est à l'arrêt.

Notre amie la Lune

Après un florilège de missions lunaires en 2022, notre satellite naturel fera une fois de plus l'objet de nombreuses attentions. D'abord, il devrait y avoir la tentative d'atterrissage japonaise de la mission privée Hakuto-R, une plateforme qui transporte notamment sur son dos le rover Rashid des Émirats arabes unis. Les deux start-up américaines Intuitive Machines et Astrobotic continuent de promettre un décollage de leurs atterrisseurs pour le premier semestre, même si le passé nous a appris à rester prudents.

La Russie pourrait de son côté envoyer sa première mission lunaire post-URSS, Luna 25, à l'été prochain (il semble que les problèmes techniques avec son radar d'approche soient résolus). La Chine, elle, n'enverra rien, mais préparera ses futures missions les plus ambitieuses, Chang'E 6 et 7, prévues dans les années suivantes. Le programme Artemis progressera également, mais sur Terre, avec la sélection du premier équipage de mission lunaire et les progrès des matériels pour la capsule Orion, la future station Gateway et l'atterrisseur lunaire Starship.

Le panorama lunaire vu par Chang'E 5. Qui pour lui succéder ? © CNSA / CLEP

Des satellites et des observatoires

En 2023, on attend l'envoi d'au moins un satellite GPS, de nouvelles unités Glonass-K et peut-être de deux satellites Galileo, de quoi conserver un positionnement particulièrement précis pour tous nos objets connectés, qui vont également bénéficier d'un maximum de services par satellite. L'ère de l'Internet of Things profite aux constellations, petites et grandes, et les opérateurs sont là pour répondre à la demande. En 2023, l'opérateur français Kineis devrait d'ailleurs déployer les premières des 25 unités de sa constellation. Les chiffres resteront probablement masqués derrière les milliers de nouveaux satellites Starlink (SpaceX prévoit 100 tirs en 2023, en grande partie au service de ses satellites de connectivité), la centaine de satellites OneWeb et les avancées sur les autres constellations avec l'arrivée en orbite des prototypes de Kuiper, la flotte de satellites d'Amazon.

L'observation de la Terre au service de tous ne sera pas oubliée, avec de nouveaux satellites Radar (Sentinel-1C), mais aussi de météorologie de précision en orbite basse avec le premier Metop-SG (il embarque Sentinel-5). Et les images de l'ensemble de notre Univers continueront d'affluer grâce au télescope James Webb, en service depuis plus de 6 mois et à 100 % de ses capacités. On espère aussi le décollage d'Euclid, la mission de cartographie des galaxies, et du satellite franco-chinois d'observation en bande X SVOM (mais si, vous savez, celui qui a un télescope inspiré des yeux des crustacés).

L'instrument MXT, unique au monde, devrait prendre son envol en 2023 avec SVOM © Éric Bottlaender pour Clubic

Les gens de l'étage du dessus

Et l'astronautique ? Elle a de beaux jours devant elle. D'abord, il devrait y avoir 6 missions « classiques » dédiées aux rotations d'équipage dans la station chinoise CSS et au sein de l'ISS avec les véhicules Shenzhou, Soyouz et Crew Dragon. On devrait aussi assister au tant attendu premier vol habité de la capsule Starliner de Boeing, avec deux astronautes à bord pour une mission de quelques jours. De plus, la deuxième mission touristique consacrée à l'opérateur Axiom (3 touristes et 1 accompagnant) devrait avoir lieu au deuxième semestre, de même que la première mission du programme privé Polaris. Toutes deux se feront avec Crew Dragon. Cela représente un total de 9 missions orbitales habitées, un véritable festival.

Côté tourisme suborbital, pour l'instant c'est le calme plat. Mais Blue Origin souhaite reprendre les vols après l'enquête sur le problème de booster qui affecte sa capsule New Shepard, et Virgin Galactic continue de promettre de nouveaux vols de son avion-fusée. C'est donc à voir. Toutefois, il est sans doute trop tôt pour voir la nouvelle capsule chinoise habitée ou un Starship avec des passagers.

Malgré son retard, le premier décollage orbital de Starship sera à suivre avec attention © SpaceX

Souriez, il y a des fusées

Côté lanceurs enfin, 2023 s'annonce déjà comme une année record, au même titre que 2021 et 2022. En effet, le secteur est en pleine croissance, la Chine croule sous les demandes, et les superconstellations sont à la mode. On peut donc tabler sans frémir sur une année à plus de 200 vols orbitaux (186 en 2022), sauf gros soucis du côté de SpaceX. L'Europe, de son côté, doit garder le cap et surtout progresser pour en finir avec l'interminable transition entre Ariane 5 et 6, même si cette dernière a peu de chances d'être au rendez-vous d'ici la fin de l'année. Il lui faut réussir les essais combinés et démarrer la production industrielle pendant que le plus petit lanceur, Vega-C, est sous le coup d'une enquête et que Soyouz est interdit de vol depuis la Guyane.

La Russie tentera de terminer le site de lancement d'Angara à Vostochny, la Chine utilisera sa flotte publique et privée pour dépasser une nouvelle fois les 60 à 70 décollages, et de nouvelles start-up tenteront d'atteindre l'espace (notamment en Europe) et l'orbite (surtout aux États-Unis, avec notamment ABL Space et Relativity Space). En janvier, l'avion 747 modifié de Virgin Orbit larguera la fusée LauncherOne après un décollage depuis l'Angleterre. Le Japon a prévu de faire décoller sa nouvelle fusée H-3, l'Inde devrait poursuivre son ouverture commerciale avec le lanceur GLSV Mk3 (qui devrait aussi réaliser son premier décollage pour la future capsule habitée Gaganyaan), et de grandes fusées américaines propulsées au méthane devraient viser l'orbite pour la première fois avec Vulcan et Starship/SuperHeavy. New Glenn (Blue Origin) volera-t-elle enfin ? On peut en douter, même si des campagnes d'essais sont attendues.

La singulière fusée H-3 japonaise devrait décoller de Tanegashima © JAXA

L'année sera une fois de plus variée en satellites, en constellations, en décollages, en sorties spatiales… Mais aussi en échecs, en déconvenues, en surprises, en découvertes, et bien sûr en annonces ! De nouveaux équipages pour la Lune, des programmes toujours plus ambitieux du secteur privé, de futurs rendez-vous, le tout sous l'œil attentif de Clubic. Nous tenterons de répondre présent. Et vous ?