Iconique mission de la fin des années 90, l'atterrissage « low cost » de Pathfinder sur Mars et les quelques tours de roues de son petit rover Sojourner resteront dans les mémoires.
Il restera un concept ambitieux mais unique en son genre… Et pavera la voie des missions martiennes du XXIe siècle !
Le sens de la MESUR
Au tournant des années 1990, c'est décidé, la NASA décide de préparer un ambitieux programme robotisé d'exploration martienne. Au premier plan, toute une série de missions pour mieux comprendre la planète rouge, et en ligne de mire, un objectif : aller y poser le pied, rien de moins ! C'est une partie de la politique « Space Exploration Initiative ». Mais la dernière initiative martienne américaine était alors l'impressionnante mission Viking, la première à réussir à se poser sur Mars… presque 15 ans plus tôt.
La NASA conçoit alors MESUR (Mars Environmental SURvey), un ensemble de 16 missions robotisées à envoyer sur l'ensemble des points d'intérêt martiens pour les étudier en détail. Elles décolleraient à partir de 1999, seraient légères, efficaces, produites et lancées en série… L'agence a toutefois besoin d'une mission de démonstration du concept : ce sera Mars Pathfinder.
S'agissant d'une mission de validation technologique, Mars Pathfinder et son petit robot à six roues Sojourner n'obtiennent qu'une petite enveloppe budgétaire : 150 millions de dollars pour le développement, soit moins du dixième du coût des missions Viking avec l'inflation. On entre alors dans l'âge d'or des architectures de mission « Faster, Better, Cheaper » (plus vite, mieux et moins cher) de la NASA sous l'administration Daniel Goldin. Malheureusement, les grandes ambitions de MESUR s'effondrent vite entre un coût qui augmente en flèche et l'échec en 1992 de Mars Observer, qui vient rappeler que les missions martiennes sont risquées malgré les progrès technologiques. Toutefois, si MESUR est annulé, la mission Mars Pathfinder est conservée. Ses éléments clés formeront la base des futures missions martiennes.
Préparer l'avenir
Préparé dans le cadre de MESUR, Mars Pathfinder est un atterrisseur fixe, constitué de trois « pétales » arrangées en pyramide et dont l'ouverture une fois sur Mars doit assurer que l'orientation du véhicule est bonne. Il est équipé de plusieurs caméras, ainsi que d'une véritable station météorologique martienne. Mais son plus grand sujet d'étude, c'est bien sûr le petit rover Sojourner, qui dispose lui aussi de petits capteurs optiques, d'un laser, d'un spectromètre à rayons X pour analyser le sol, d'accéléromètres et de deux petites expériences qui servent à observer l'usure de ses composants à force de rouler sur le sol martien, dont on ne sait presque rien.
En plus de ces instruments scientifiques embarqués (développés en « low cost » mais surtout qui utilisaient une technologie différente de ceux des sondes Viking, datant des années 70), Mars Pathfinder a servi à tester plusieurs nouveautés. Comme une efficace méthode d'atterrissage, à l'aide de parachutes, de freinage par rétrofusées et… D'un ensemble d'airbags arrangé en « grappe de raisin ». Sojourner à lui tout seul est un petit concentré d'idées qui serviront quelques années plus tard : panneaux solaires, système de suspensions, navigation par caméras stéréoscopiques. Si ce n'est pas révolutionnaire en soi, la réussite de cet ensemble sur Mars lève le doute pour des missions bien plus ambitieuses !
Pathfinder se pose avec succès !
Le 4 juillet 1997, pile à l'heure pour la fête nationale américaine, Mars Pathfinder traverse la fine atmosphère martienne, parvient à se freiner puis à se poser exactement comme prévu (ou presque, il est sur le côté mais se redresse grâce au déploiement de ses « pétales ») sur Ares Vallis, que l'on imagine alors comme une grande plaine… sans savoir qu'elle est jonchée de blocs de roches de presque 50 cm de diamètre. Qu'importe, Pathfinder pourra réaliser sa mission. Le site est appelé « Carl Sagan » en l'honneur de l'astrophysicien.
48 heures plus tard, après une vérification des systèmes, le petit rover Sojourner est allumé et descend de sa rampe en roulant. Il ne pèse que 10,5 kg et mesure 65 cm de long pour 30 de haut. Il se déplace logiquement très lentement (moins d'un centimètre par seconde) mais il restera actif durant 83 sols (les jours martiens) et réussira à voyager sur une distance de 100 m environ, explorant les roches les unes après les autres. La plus célèbre restera sans doute « Yogi », bloc rocheux qui domine le petit robot de son mètre de haut. Pour une première expérience, car il s'agit du premier robot à roues sur une autre planète (seule la Lune a eu cet honneur), la NASA pose des bases solides. Sojourner fera également 16 mesures chimiques de la composition du sol.
Pathfinder, qui est le premier atterrisseur à réussir à se poser depuis les missions Viking, va photographier tout le site en haute résolution, servir de relai des données au petit robot, mais aussi réaliser sa propre mission scientifique. Il renverra presque 300 Mo de données vers la Terre, ce qui pour un robot conçu à l'époque des disquettes, représente une quantité significative de données. Notamment, il y aura plusieurs publications sur la nature du sol martien, le sable et la poussière dans l'atmosphère. De premiers indices montrent que la planète a connu un climat différent il y a quelques milliards d'années. Après pratiquement trois mois d'opérations, Pathfinder, qui fut aussi le premier véhicule à recevoir une mise à jour logicielle sur la surface d'une autre planète, s'éteint. Sa mission est une grande réussite pour la NASA.
L'exploration de Mars ne s'arrêtera plus
Depuis l'arrivée de Pathfinder, un peu après Mars Global Surveyor, la NASA a toujours eu un véhicule actif autour de Mars, et même souvent sur Mars. C'est le début de l'âge d'or de l'exploration martienne, avec des missions extraordinaires comme les deux rovers Spirit et Opportunity, bâtis grâce au retour d'expérience du petit Sojourner. Avec d'autres atterrisseurs fixes comme Phoenix et InSight, et bien sûr de véritables laboratoires sur roues. L'héritage de Mars Pathfinder vit encore, notamment au laboratoire JPL à Pasadena en Californie, qui n'oublie pas tout ce qu'elle lui doit… Et aussi à travers un étonnant hommage cinématographique dans le film « The Martian » (adapté d'un roman), où le véhicule, fidèlement montré à l'écran (petit spoiler), tient une place importante.