La boîte aux lettres fait sa révolution grâce à l'Internet des objets

Paul Le Meur
Publié le 16 février 2016 à 11h49
La boîte aux lettres fait sa révolution grâce à l'Internet des objets. D'Amazon aux constructeurs classiques, des sociétés s'attachent à moderniser cet objet du quotidien.

Présente dans l'Hexagone depuis le XIXe siècle, la boîte aux lettres est un indispensable à tout logement en France. Elle n'a que très peu évolué depuis sa démocratisation et n'est désormais plus adaptée à un trafic postal, où les colis s'accaparent peu à peu la première place, au détriment de la correspondance traditionnelle. C'est pourquoi les acteurs de ce marché, du constructeur comme Renz, à l'exploitant, à savoir La Poste, modernisent et adaptent l'objet en les connectant au réseau. L'occasion pour la boîte aux lettres de se doter de nouveaux services et parfois d'une nouvelle forme.

« Nous ne voulions pas être le Kodak de la boîte aux lettres ». Alain Fisher, directeur général de Renz a fait prendre un chemin assez inattendu à cette société présente en France depuis 1975. En 2011, l'industriel spécialiste des boîtes aux lettres classiques se rapproche de La Poste pour lui proposer des systèmes connectés mutualisés. « Je préfère le terme de e-conciergerie, précise le dirigeant, car c'est toute une offre de services qui s'installe en bas de l'immeuble. »

Grâce à cette innovation, la réception des objets lourds ou encombrants est facilitée. Plus besoin de venir chercher un colis dans un bureau de poste ou dans un point de retrait si ce dernier est trop volumineux. Désormais, ce sont les boîtes aux lettres qui s'adaptent à la taille des colis.

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Depuis octobre 2013, le modèle est en phase de test dans un immeuble du XIXe arrondissement de Paris et les résultats sont plutôt concluants. « En deux ans, le trafic de colis a augmenté de 24 % dans cet immeuble. », explique Alain Fisher, même si cette évolution peut s'expliquer par l'explosion parallèle du e-commerce.

Outre la réception de colis, d'autres services peuvent être développés, notamment l'ouverture aux commerces de proximité. Les exemples sont légion. Un artisan pourrait par exemple récupérer un bien dans une des boîtes à colis. Ce dernier reçoit une clé temporaire sur son smartphone, et vient récupérer le produit, le répare et le replace dans la boîte. Le gain de temps est considérable pour le client, quant au professionnel il s'assure une meilleure visibilité sur la demande. « C'est un produit qui plaît énormément aux élus locaux, notamment parce qu'il fait revivre le commerce de proximité. », ajoute le dirigeant français.

Une boîte aux lettres pour tous ?

La mutualisation s'est imposée comme une évidence pour la société française. « Par souci de coût, mais aussi de place », explique Alain Fisher. L'idée surfe donc sur la tendance des centres de retrait de colis, à l'image des Amazon Lockers développés par la marque d'e-commerce ou encore les Pickup Station rachetés par La Poste en 2009.

Si Alain Fisher ne croit pas au fait que la boîte aux lettres privative va disparaître, il espère néanmoins que l'objet va être modifié, cette fois non pas grâce à l'Internet des objets mais grâce à une réforme de la normalisation du caisson. A l'origine de la création du syndicat national des industriels de boîte aux lettres et de Colis (SIBCO), il milite avec plusieurs acteurs du secteur comme UPS, pour une révision de la norme vieille de 40 ans notamment à cause de la taille des boîtes aux lettres, inadaptées au flux postal.

Domino, le sursaut de La Poste

Avec Domino, La Poste aura réussi à faire parler d'elle. Le petit bouton présenté au CES 2016 permet en une pression de prévenir le facteur qu'un objet a été déposé dans une boîte aux lettres. Ce dernier le récupère, l'emballe et l'expédie. Une innovation simple et qui doit servir de cheval de bataille de La Poste sur le marché de l'IoT.

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Contrairement aux boutons connectés Amazon, ces petits boutons actuellement réservés au marché américain et qui proposent, en une pression, de commander un objet précis sur le site, Domino ne permet pas pour le moment de recevoir des produits. L'objet marque la volonté de La Poste de relancer son activité d'envoi de colis, en baisse ces dernières années. Cette fois-ci pas de mutualisation, on parie sur la proximité et sur un modèle privatif.

Néanmoins, La Poste ne s'oppose pas, dans un futur proche, à l'idée de développer une gamme de services autour de son bouton connecté. « Domino est conçu pour être universel, on peut très facilement imaginer créer plus de services de proximité. Je pense par exemple à la silver economy, avec l'envoi et la livraison de repas aux personnes âgées », explique David de Amorim, directeur innovation de Docapost.

Là encore, l'Internet des objets fait de la boîte aux lettres un espace de service qui dépasse la simple expédition et réception de courrier. Une fois connecté, cet objet dont la pratique est pourtant ancrée dans le temps est vouée à créer de nouvelles fonctionnalités.

Cependant, une interrogation sur Domino subsiste sur le long terme. Comment La Poste va pouvoir gérer les coûts supplémentaires liés aux spécificités du bouton connecté ? En effet, le facteur devant par lui-même affranchir le colis, l'opération représente un coût pour le groupe français.

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Le prix du service n'a toujours pas été communiqué, mais on peut raisonnablement penser qu'il sera faible étant donné la simplicité technologique du produit. Difficile de penser également qu'une hausse de l'envoi de colis amené par Domino, suffirait à rentabiliser l'opération. La seule option viable serait de penser Domino comme un objet permettant de convaincre le consommateur non-technophile d'opter pour le Hub de La Poste.

Domino sera très prochainement en phase de test, même si cette fois, ce ne sera pas en région parisienne contrairement à Renz. « La plupart des boîtes aux lettres de la capitale ne respectent pas la norme par souci de place, explique David de Amorim, même si avec 70 % de boîtes aux lettres au norme en France le champ d'action est tout de même suffisamment large. »

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