L'actualité autour de Snapchat étant particulièrement dense (avec la vente en ligne aux Etats-Unis des Spectacles, les lunettes de Snapchat mais aussi de la nouvelle fonctionnalité WhatsApp, dans la lignée de Snapchat), nous remettons en avant le portrait d'Evan Spiegel, qui retrace le parcours du fondateur.
Souvent qualifié d'immature, de fils à papa ou, moins péjorativement, de Mark Zuckerberg bis, Evan Spiegel provoque la critique ou l'admiration. Le fondateur de Snapchat est rapidement devenu le symbole du modèle « start-up » tel qu'il est imaginé dans la Silicon Valley. La réussite du dirigeant ne laissera personne de marbre. En créant son service, Evan Spiegel est devenu à 24 ans l'un des jeunes milliardaires de la planète.
Le cofondateur et PDG de Snapchat, une application mobile de messagerie photo/vidéo éphémère particulièrement populaire chez les jeunes de 13 à 24 ans, compte ses atouts. Forte de ses 100 millions d'utilisateurs quotidiens, l'entreprise est valorisée à 15 milliards de dollars. Cet enchaînement de beaux chiffres a toutefois un revers, la société ne génère pour le moment aucun bénéfice et publie un chiffre d'affaires plutôt faible. Quant à la fortune du jeune entrepreneur, elle atteindrait les 2,1 milliards de dollars, principalement grâce aux parts qu'il détient dans sa société (à hauteur de 13%).
Le profil type de ce jeune patron ressemble de près à celui d'une personne à qui la fortune a toujours souri. Né le 4 juin 1990 de parents avocats, Evan Thomas Spiegel grandit dans l'abondance. Il vit avec ses parents et ses deux sœurs dans une maison d'une valeur de 4,6 millions de dollars située à Pacific Palisades, l'un des beaux quartiers de Los Angeles. Bon élève, il pratique plusieurs activités extrascolaires et voyage dans de nombreux pays.
Evan Spiegel est aussi très dépensier, il aime les « objets matériels », comme il le dit lui même lorsque, à 18 ans, il tente de convaincre son père de lui acheter une BMW 535i à 75 000 dollars pour remplacer sa Cadillac Escalade.
Après le lycée, il entre à Stanford (l'université américaine la plus proche de la Silicon Valley) et suit des cours de design. Plutôt fêtard, il intègre une confrérie (Kapa Sigma), où il réalise deux rencontres qui vont précipiter la naissance de Snapchat. Bobby Murphy, l'homme à l'origine du code de Snapchat, et Reggie Brown, qui lui donne l'idée de l'application s'associent à Spiegel. L'un des comparses cherche à effacer définitivement une photo partagée sur le Web, une tâche plus ardue qu'il n'y paraît...
Snapchat, une naissance compliquée
À l'origine, Snapchat, d'abord baptisé Picaboo, n'était qu'un projet scolaire pour l'un des cours de design du jeune homme. Le dernier d'une série qui, jusque là, n'avait pas atteint le succès escompté. Le concept surprend mais ne parvient pas à convaincre les élèves.D'après eux, l'application n'intéressera que ceux qui veulent s'envoyer des photos à caractère sexuel. Même si cette critique lui est régulièrement assénée, elle fait rire Evan Spiegel. Lui, préfère voir en son application un moyen de mieux contrôler son identité numérique. Pratique, en ces temps où la vie privée sur Internet et le droit à l'oubli font débat.
Peu avant d'obtenir son diplôme, le jeune homme d'affaires abandonne l'université afin de se concentrer sur son projet. Les trois anciens confrères passent leur été à travailler dans la maison du père d'Evan Spiegel, désormais divorcé. Snapchat est lancé en juillet 2011 et rencontrera le succès les années suivantes.
Malgré ce coup de projecteur, dès août 2011, Reggie Brown est évincé du projet. Du moins, c'est ce qu'il affirme au tribunal. À la fin de l'année 2013, il lance une action en justice qui aboutira à un accord à l'amiable dont le montant n'a pas été divulgué.
Des revenus éphémères ?
Durant les premières années de l'aventure Snapchat, gagner de l'argent n'est pas la priorité d'Evan Spiegel. Il préfère développer son concept et acquérir plus d'utilisateurs. Pour se financer depuis que son père « ne veut plus payer pour les photos qui disparaissent », dit-il, le jeune homme réalise des levées de fonds importantes. L'investisseur en capital-risque Benchmark Capital investit 13,5 millions de dollars en 2013. L'opération permet de valoriser Snapchat à hauteur de 70 millions de dollars. En dépit des levées de fonds et des valorisations optimises, l'entreprise ne génère toujours aucun revenu.Nombreux seront les fonds d'investissements et entreprises à courtiser le jeune homme. Mais Evan Spiegel n'a pas peur de dire non, même quand Facebook met 3 milliards de dollars sur la table pour racheter Snapchat fin 2013. L'entrepreneur pense pouvoir faire monter encore plus la valeur de son bébé. En mars 2015, Alibaba, le e-commerçant chinois, entre au capital de Snapchat contre 200 millions de dollars. L'application mobile vaudrait désormais 15 milliards de dollars...
Face à cette démesure, certains experts crient à la surévaluation. En effet, son absence de modèle économique viable pourrait bien, à terme, faire chuter la valeur de Snapchat. « La bulle existe », reconnaît candidement le patron de Snapchat. Certains disent que sa réponse témoigne de son immaturité.
Mais il reste conscient de la nécessité de rentabiliser son entreprise. Evan Spiegel s'est donc lancé, en octobre 2014, dans une démarche de monétisation de la plate-forme. Pour cela, il a choisi la publicité. Plus récemment, l'entreprise s'est également mise à vendre des filtres photos.
Selon Gawker, Snapchat a généré 3 millions de dollars de revenus publicitaires entre octobre et décembre 2014. Sur l'ensemble de l'année 2014 en revanche, Snapchat a perdu un total de 128 millions de dollars. Malgré tout, l'enfant gâté du numérique semble sur la bonne voie. Désormais rodé aux critiques, l'homme va poursuivre sur sa voie en cherchant à développer sa propre création. Pour le meilleur et pour le pire.
Ce portrait fait partie d'une série portant sur les dirigeants importants de la sphère numérique. Retrouvez d'autres numéros :
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