Avec ses cinq entreprises de sites de commerce en ligne, la capitalisation boursière des actifs que détient Jack Ma représente 2,5% du PIB de la Chine. L'homme d'affaires décrit par certains comme "petit, maigrichon et timide" fascine les Chinois, mais également l'ensemble des professionnels du numérique. Parti de rien, son parcours est aussi surprenant qu'atypique.
Jack Ma commence ses études à l'institut de l'enseignement de Hangzhou, sa ville d'origine. Il en ressort diplômé en 1988 et commence à enseigner l'anglais. Quelques années auparavant, alors qu'il était au collège, une professeur de géographie explique à ses élèves combien il est important pour les Chinois de maîtriser une langue aussi incontournable que l'anglais. En sortant de l'école, le jeune collégien casse sa modeste tirelire pour investir dans une radio. Et c'est en écoutant les ondes anglophones qu'il apprend la langue.
Très vite, ses talents de pédagogue font leurs preuves. Jack Ma enseigne un « crazy english », dialogue qui permet à certains chinois d'appréhender la langue de manière plus ludique. Ses camarades de fac se mettent à lui réclamer des cours particuliers. Le professeur anime ses enseignements à la manière d'un théâtre, un art qui a façonné son enfance.
Une personnalité atypique
Jack Ma est né le 10 septembre 1964 de parents professionnels de ping tan, un art alliant le chant et le théâtre et accompagné d'instruments à cordes. Dès son jeune âge, il a le goût du spectacle. Il aime se raconter des histoires de héros qu'il tire des lectures dans lesquelles il s'évade depuis tout petit.L'enfance de Jack Ma n'a pour autant pas été paisible. Sa famille est poursuivie à cause des positions politiques de l'un des aînés. Le grand-père de Jack Ma était en effet proche des Kuomintang, le parti nationaliste chinois. Malgré ce climat lourd dans sa ville natale, il s'entoure d'une solide équipe d'amis. L'homme affirme déjà une force de persuasion et de courage qui serviront plus tard son ascension professionnelle.
Le début de la réussite
En 1995, finalement devenu traducteur, Jack Ma accompagne une délégation chinoise aux Etats-Unis. Il y découvre Internet. À Seattle, il prend également la mesure des ordinateurs et l'usage du Web. Passionné par cette nouvelle technologie, il décide alors de lancer son premier site d'annonces et dépose le nom « China Pages ». Mais en 1995, personne encore en Chine ne connait le réseau informatique, et l'État chinois semble un obstacle au projet de l'entrepreneur. Le mot « Internet » est même prohibé dans la presse chinoise.Même s'il parvient à convaincre les institutions du Net de collaborer avec lui, plusieurs acteurs internationaux font de l'ombre à l'ambitieux provincial. "A Pékin, j'étais une grenouille provinciale au fond d'un puits, je ne voyais qu'un tout petit bout du ciel. Après cet échec, je suis retourné à Hangzhou et là j'ai pu embrasser la totalité du ciel", a-t-il raconté. C'est à ce moment-là qu'il songe à lancer son prochain projet qui lui vaudra de devenir le Bill Gates de l'Asie.
Le projet Alibaba prend forme
À Hangzhou, il retrouve sa bande d'amis. Tous mettent la main à la poche et investissent 60 000 dollars. Deux ans plus tard, à la surprise générale, le site génère la somme de 830 000 dollars. Selon lui, une partie du succès peut s'expliquer par des raisons culturelles."L'e-commerce asiatique va dans le mur. L'Asie, c'est l'Asie, l'Amérique, c'est l'Amérique. Partout dans le monde, on suit le modèle américain. Mais l'Asie a besoin de son propre modèle", avait-il confié alors. Le site devient le plus grand site d'affaires professionnel. Des millions de PME chinoises font des affaires entre elles via Alibaba. C'est le début de la véritable ascension de Jack Ma.
En 2003, il crée Taobao, une filiale d'Alibaba qui contrôle plus de 80% du commerce en ligne chinois.Toutefois, il reste très peu connu à l'international, 95% de son business restant en Chine. « En réalité, je voudrais qu'on se rappelle de moi comme d'un grand maître de tai-chi », avait-il déclaré à la presse. Un créatif ambitieux et surprenant qui n'a pas fini de bouleverser le monde du business. En 2010, il crée aliexpress.com, un site de vente en gros et au détail aux particuliers et entreprise. En août 2013, il rachète une partie du site américain ShopRunner, afin d'améliorer sa filière de distribution aux États-Unis.
Le siège d'Alibaba
Alibaba entre en bourse
Le 18 septembre 2014, la société Alibaba fait son entrée en Bourse à Wall Street. Avec une levée de plus de 25 milliards de dollars, Jack Ma réalise la plus grande entrée en bourse de l'histoire, détrônant au passage Facebook. Dans une lettre adressée à ses 20 000 employés, Jack Ma prévient : « Après l'introduction en Bourse, nous maintiendrons notre principe de servir d'abord les clients, les employés ensuite et les actionnaires seulement enfin ». En situation de monopole sur le marché de l'e-commerce chinois, Alibaba représente, en 2014, 84% du marché pour 334 millions d'acheteurs.En octobre 2015, Jack Ma poursuit son ascension... Il devient le conseiller économique du Premier ministre britannique David Cameron afin d'apporter ses conseils sur les moyens d'accroître les exportations des petites et moyennes entreprises britanniques. Pas étonnant, quand on sait que Jack Ma est la 22ème fortune mondiale avec 29,8 milliards de dollars, selon le Magazine Forbes.
Ce portrait fait partie d'une série portant sur les dirigeants importants de la sphère numérique. Retrouvez d'autres numéros :
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