Le taggage, ou comment le rêve de la bibliothèque musicale idéale tourne au cauchemar des renseignements minutieux (et fastidieux) de milliers de morceaux. Le plus malheureux c'est que le logiciel de taggage parfait n'existe pas ; quoique...
MusicBrainz Picard tient son nom de la base de métadonnées musicales libre MusicBrainz et du Capitaine Jean-Luc Picard héros de la série Star Trek : The Next Generation.
Son but : piloter pour vous le renseignement des tags de vos fichiers audios. Oui, pour vous ; comprenez qu'a priori vous n'aurez donc qu'à vérifier et valider ses hypothèses. On est loin du travail de recherche album par album qu'imposait un Tag&Rename ou The Godfather dans la théorie. Et la pratique ?
Quelques bases... et quelques données
Si le streaming musical (Spotify et consorts) est indéniablement une tendance forte, nombreux sont encore les amateurs de musique qui préfèrent disposer de leur propre bibliothèque musicale. Composée de milliers de morceaux accumulés au cours du temps - rippés, téléchargés légalement ou, ne nous le cachons pas, illégalement - ces MP3, OGG ou FLAC ont un point commun : s'ils sont les conteneurs d'un audio de plus ou moins bonne qualité, ils possèdent également la faculté de transporter des métadonnées.
Ces métadonnées ce sont le titre, l'interprète, le nom de l'album, l'année de parution, les commentaires, le genre (au nombre de 79, étendus à 191 par Winamp) et le numéro de la piste (pour l'ID3 v1.1) ainsi qu'éventuellement la pochette de l'album, l'auteur, le compositeur, les BPM (Beats per minute) de la piste, la langue et quelques 70 autres champs ajoutés avec l'ID v2.3 (ID v2.4 est en cours de détermination).
Si vous faites partie des consciencieux de la première heure, vous devez forcément connaitre CDDB, renommée GraceNote (et rachetée ensuite par Sony) et peut-être la libre freeDB, Discogs ou encore AllMusic. MusicBrainz est une autre de ces bases, elle est libre (sous licence CC0), accessible et, au besoin, téléchargeable gratuitement.
Les spécificités de MusicBrainz
MusicBrainz a été créé en 2000 et n'a pas à rougir des bases commerciales avec ses 16,4 millions de titres (tracks) et 850 000 artistes. À titre de comparaison, le mastodonte GraceNote nous a communiqué un chiffre de 78 millions de titres renseignés. Il faut dire que notre poulain est collaboratif, ce sont les internautes et non des professionnels qui participent au remplissage de la base. Quoi qu'il en soit, nous verrons que ces petits millions sont déjà bien suffisants.
La base de données MusicBrainz utilise un système d'identification complexe pour chaque « entité » (artiste, morceau, enregistrements, labels, etc.) nommé MBID. Résultat : impossible d'envisager une ambiguïté entre deux entrées qu'il s'agisse d'un titre ou d'un artiste. En plus de ce mécanisme, d'autres identifiants sont utilisés tels que le Disc ID (qui se rapporte à l'identifiant du CD numérisé) ou le PUID, système propriétaire d'empreinte audio de MusicIP.
Reste à voir comment LE logiciel officiel MusicBrainz Picard exploite cette richesse mais, aussi, s'il saura répondre à nos exigences de simplicité et d'ergonomie.
En long, en large...
L'interface
Une chose semble évidente dès lors qu'on commence à utiliser Picard ; il n'est pas beaucoup plus simple à utiliser que les autres grands du nom. Reste que ceux qui s'intéressent à la propreté de leur bibliothèque musicale sont rarement de purs novices (sans que ce qualificatif soit péjoratif pour autant). Non. Que ce soit sur Windows, OS X ou Linux, l'interface ne paie pas de mine et les traductions françaises (gare à ceux qui les activeront) sont parfois plus déroutantes qu'engageantes.
Le logiciel se présente sous la forme d'une barre d'outils, de trois sections verticales (si l'affichage des dossiers est activé) ainsi que d'une section horizontale affichant les propriétés des pistes. Notons que cette dernière permet notamment l'édition manuelle des tags. Globalement, le « but du jeu » sera de faire évoluer ses dossiers/albums de gauche à droite, de vérifier que les nouveaux tags sont les bons, d'enregistrer et d'évacuer. Éventuellement quelques options de tri supplémentaire auraient été bienvenues sur la section de taggage.
Côté paramétrage, il y a à redire. La fenêtre d'options a la fâcheuse tendance à s'ouvrir toujours trop petite. Résultat, obligé de tirer dessus, d'étendre également la zone d'arborescence des options. C'est un détail, oui, mais c'est ainsi sur OS X et Windows... et c'est relativement énervant bien que cela n'entrave en rien le fonctionnement du logiciel.
De A à Z
Si cet article n'a pas pour vocation d'être un tutoriel du logiciel, difficile cependant de ne pas évoquer son workflow de traitement. En outre, il est suffisamment simple pour être décrit en quelques étapes si tant est qu'on n'évoque pas de cas particuliers.
S'il manque parfois un titre à un album, un simple glisser-déposer (des fichiers ou d'un autre album s'il y a confusion) viendra résoudre l'affaire. Et, pour finir, au besoin, le logiciel permet bien sûr le taggage à la main (piste par piste ou en groupé) et le taggage à partir des noms de fichiers (via une petite fenêtre déportée).
L'intérêt principal de MusicBrainz Picard par rapport à d'autres logiciels c'est de permettre à l'utilisateur de sélectionner l'intégralité de sa bibliothèque et de lancer le traitement en masse. Il n'aura ainsi qu'à « finir le travail » une fois celui du logiciel fait.
Des options à foison
Le flux de traitement ci-dessus est complété par deux fonctionnalités simples, mais sans lesquelles le traitement ne serait pas complet :
- MusicBrainz Picard vous permettra par exemple, à l'enregistrement, de renommer les fichiers audio en fonction de leurs tags. Reste que si vous vous sentez de mettre le nez dans les paramétrages, vous serez peut-être découragés par le script qu'il vous faudra renseigner... et laisserez celui par défaut « parce qu'il n'est pas si mal en fait » !
- Le logiciel offre également la possibilité de déplacer ces fichiers une fois renseignés dans un dossier défini et dans des dossiers personnalisés (typiquement « artiste\album ». Picard ne permettant pas de sauvegarder sa session de taggage en cours ni même de mettre « pause », c'est déjà ça. C'est a priori la technique la plus simple pour ne pas réanalyser des fichiers déjà tagués.
Dans les paramètres du logiciel, l'utilisateur pourra éventuellement se connecter avec son compte MusicBrainz afin de participer au peuplement de la base. Il pourra procéder de même pour les empreintes audio via une clé d'API dans l'onglet correspondant. Le reste des paramétrages se concentrent sur les métadonnées, l'activation ou non de la récupération des pochettes (ainsi que leurs sources) ou encore les extensions ; la communauté propose en effet nombre d'extensions à télécharger (récupération de données last.fm par exemple).
En main
Dans la vidéo de prise en mains ci-dessous, nous mettons Picard à l'épreuve avec 3 dossiers :
- le premier dont les noms des fichiers ont été falsifiés
- le deuxième dont les tags des fichiers ont été falsifiés
- le troisième dont les noms ET les tags des fichiers audio ont été falsifiés
En définitive ?
MusicBrainz Picard a bien évolué depuis ses premières versions (il s'appelait alors MusicBrain Tagger) à l'instar de la base de MusicBrainz elle-même. Non content de proposer un workflow bien plus cohérent et linéaire que nombre de ses « confrères », il est aussi bourré de petites astuces.
Picard est différent et c'est à la fois une force et une faiblesse. Pas super bien documenté (même pour les anglophones), le logiciel désarçonne un peu au premier usage et c'est à force d'utilisation qu'on découvre ses qualités ; car il n'en manque pas.
Alors, MP3tag, The GodFather, Tag&Rename ou MusicBrainz Picard ? Pour nous ce dernier est vraiment LE logiciel de taggage à découvrir. Libre et collaboratif, s'il risque de vous déstabiliser au départ, il optimisera vite et bien votre bibliothèque audio. A bon entendeur... bonne écoute.
+ Les plus
- Très simple...
- Pratique pour le taggage massif
- Collaboratif, libre et gratuit
- Les moins
- ... une fois le concept bien cerné
- Base moins dense que les ténors commerciaux
- Documentation, interface et traductions perfectibles