Le football à l'heure des statistiques
Autour du football s'articule un marché exceptionnel. Les droits TV, les montants des transferts, les sommes investies sont de plus en plus importants, à l'image d'un engouement indéfectible autour des meilleurs championnats ou d'événements planétaires comme la Coupe du Monde. Lors de la finale en 2010, ce sont près de 700 millions de téléspectateurs qui étaient devant leur poste.Ces enjeux d'envergure nécessitent une structuration profonde, particulièrement au niveau des clubs de football, devenus petit à petit de véritables entreprises à part entière, avec des problématiques communes à toute société : rentabilité, compétitivité, rationalisation des coûts. La glorieuse incertitude du sport est, dans cette optique, un aléa dont il faut se prévenir au mieux. Le recours à l'outil statistique est alors l'arme vers laquelle se tournent les clubs, comme le font de milliers d'autres entreprises. De là à faire du sport une activité quasi scientifique...
Ces chiffres n'intéressent d'ailleurs pas que les clubs : à l'heure du « big-data », la collecte et la mise en forme d'une grande quantité d'informations constituent une activité qui trouve d'autres débouchés. Les médias, qui cherchent à apporter une nouvelle expérience à une audience toujours plus exigeante, sont des clients naturels, tout comme le sont les annonceurs. Notamment. L'objectif ici : faire consommer le sport autrement, sous des angles innovants.
Deux entreprises ont bien compris ces enjeux et profitent de ce secteur en pleine croissance. Opta, propriété du groupe Perform, affiche un chiffre d'affaires supérieur à 10 millions d'euros depuis plusieurs années. Son concurrent, Prozone, a uni ses forces avec le groupe Amisco, pionnier dans le domaine de l'analyse de performances. Les résultats de cette entreprise sont comparables à ceux d'Opta.
De la récupération de ces données à leur monétisation, nous allons tenter de vous expliquer comment ces acteurs et les statistiques sont désormais profondément ancrés dans le football.
Le football scruté de la tête au pied
L'intérêt croissant des clubs de sport pour les statistiques remonte aux exploits de Billy Beane, un manager rendu célèbre pour avoir mené l'équipe de base-ball des Oakland Athletics, 24ème budget du championnat, à la 5ème place de ce classement, le tout grâce à des outils statistiques. Le livre « Moneyball » puis le film « Le stratège », avec Brad Pitt dans le rôle principal, racontent d'ailleurs cette histoire.L'arrivée de cette culture du chiffre dans le football a commencé par l'Angleterre dans les années 90. Depuis, cet intérêt n'a cessé de croître.
Quand les statistiques se mettent en 4
On peut actuellement définir quatre types de statistiques dans le football. Le premier d'entre eux concerne les chiffres que n'importe qui peut compiler à partir d'un compte rendu « traditionnel » : scores, nombre de matchs gagnés / perdus, que ce soit à domicile ou à l'extérieur, nombre de buts marqués ou encaissés, nombre de cartons, etc. Un niveau d'information relativement bas, qui n'apporte que peu de pistes de réflexion et de perspectives d'optimisation.Le second nécessite un comptage précis des différents événements d'un match : nombre de passes, nombre d'actions de but, nombre d'arrêts pour un gardien, de déviation de la tête, à quel(s) moment(s) de la partie... Recueillir ces données est, aujourd'hui, le travail de l'œil humain, qui peut s'appuyer sur la vidéo.
Des entreprises sont spécialisées dans cette activité. Chez Opta par exemple, chaque match est scruté par deux analystes qui vont jouer de la souris et du clavier dans une interface qui vient se superposer à la vidéo, afin de décrire chaque événement. Durant les 90 minutes d'une rencontre, ce sont 1 500 données qui sont collectées et vérifiées en temps réel puis a posteriori par une troisième personne. « Les gens avec une bonne coordination œil-main qui ont l'habitude de jouer à FIFA ou PES sont clairement de meilleurs candidats », déclarait ainsi Matt Furniss au Guardian.
L'entraîneur lui-même peut aussi s'acquitter de cette tâche, avec une application comme Performa Sports, qui lui permet de remplir une base simplement, durant les entraînements ou a posteriori.
Le troisième type de statistiques qu'il est actuellement possible d'accumuler concerne les positions et les mouvements sur le terrain des différents acteurs, leur vitesse de déplacement, ainsi que les données sur les frappes (vitesse, trajectoire). Cela demande un traitement logiciel basé sur les images de la rencontre. C'est ainsi que Prozone, l'autre géant du secteur avec Opta, a installé de 8 à 12 caméras dans chacun des stades de Premiere League, afin de capter les moindres faits et gestes des 22 acteurs.
L'utilisation de GPS permet également de recueillir ces informations. Elle n'est pour l'instant pas autorisée en compétition, mais est désormais monnaie courante dans les grands clubs. Dissimulés dans les protège-tibias, les chaussures ou des ceintures, les puces abondent les entraîneurs d'informations à chaque entraînement. Thierry Cotte, préparateur physique de l'AS Saint-Etienne, déclarait ainsi récemment au Monde que plus de 8 millions de chiffres étaient ainsi collectés chaque semaine. L'ASSE, précurseur en France de l'utilisation des statistiques, s'est d'ailleurs récemment associée avec Bewell connect. Le sponsor équipera les joueurs de l'équipe de ses trackers d'activité. Le football et les équipes en vue sont un excellent moyen de communication, et certains acteurs du domaine porteurs des objets connectés l'ont bien compris.
Ils ne sont pas les seuls. Les équipementiers sont évidemment de la partie et fournissent aux équipes des chaussures connectées, dotées de GPS. Adidas fut un pionnier avec ses adizero F50, en 2012. La marque a par la suite innové avec son Smart Ball, un ballon qui, associé à l'application dédiée (MyCoach), va fournir aux analystes la distance, l'angle et la vitesse de frappe au moment de l'impact, ou encore la technique de frappe utilisée. Le Milan AC, notamment, utilise ce dispositif.
Toujours en Italie, la Sampdoria de Gênes a également attiré l'attention sur elle en utilisant des drones afin de filmer, sous un angle différent et à 4 m au-dessus des joueurs, les séances d'entraînement. Ce qui n'a pas empêché l'équipe de terminer 12ème de série A.
Enfin, les technologies actuelles permettent de connaître en temps réel le rythme cardiaque d'un joueur et d'en déduire son niveau de fatigue. Un quatrième type de données également utilisé uniquement à l'entraînement, et qui reste donc l'exclusivité du club. Notez au passage que dans le monde de l'entreprise, le sportif de haut niveau est un salarié à part : quelle autre corporation accepterait que chacun de ses mouvements, que chacune de ses performances soient contrôlés et analysés de la sorte ?
Quoi qu'il en soit, associer ces quatre catégories d'informations crée alors une base extrêmement conséquente dont plusieurs acteurs, clubs de football et médias en tête, tirent parti.
La data pour optimiser
Pour les entreprises que sont devenus les clubs de football, la logique économique nécessite quelques certitudes. L'objectivité du chiffre doit compenser l'affectif, l'émotionnel. Elle est là pour conforter une intuition, ou pour apporter une information qui échappe aux yeux de l'entraîneur ou du directeur sportif.
C'est pourquoi les données apportées par les deux principaux acteurs du marché des statistiques, Opta et Prozone, sont particulièrement prisées. Des clubs comme le FC Barcelone, Arsenal, Chelsea, Dortmund, et plus proches de nous l'Olympique Lyonnais ou l'équipe de France font tous appel à ces entreprises.
Ces dernières sont évidemment capables de fournir des données brutes. Si on est à la recherche d'informations très précises qui ne nécessitent pas de croisement complexe de données, cela peut demeurer intéressant. Par exemple, dans le cas d'un gardien de but qui souhaiterait connaître les habitudes du tireur de penalties de l'équipe adverse.
Mais la plupart du temps, ces données brutes sont difficilement exploitables en tant que telles et nécessitent un raffinement. Quelques clubs, les plus riches, disposent de statisticiens qui vont être à même d'extraire une information intéressante de ces tableaux de données. Les autres, dont les moyens sont plus réduits, utiliseront les rapports créés par les analystes et les équipes éditoriales de Prozone ou Opta, que ces entreprises monnayent évidemment à un prix plus élevé que lorsqu'il s'agit de fournir les simples données brutes.
Améliorer les performances sportives
Ces rapports doivent permettre d'analyser forces et faiblesses de sa propre équipe, mais aussi celles de l'adversaire. Ils sont également utilisés pour juger de l'état de forme d'un joueur, comparer différentes tactiques, parfaire un entraînement, prévenir les blessures...Ils peuvent ainsi être délivrés avant un match, à la fin d'une rencontre (une trentaine de minutes après le coup de sifflet final) et même durant cette dernière. Romain Fabre, responsable chez Opta France, nous a ainsi confié qu'un entraîneur de Ligue 1 (dont nous n'avons pas su le nom), fin tacticien, désirait pouvoir justifier ses choix durant une conférence d'après-match. Pour appuyer ses propos, il a ainsi demandé un rapport précis alors que le match venait juste de se terminer.
Peut-on imaginer que ces rapports en temps réel puissent modifier le cours d'une rencontre ? C'est peut-être le cas dans d'autres sports comme le rugby, notamment. Dans le football, l'entraîneur 2.0 n'est pas encore pour tout de suite. La plupart préfèrent rester fidèles à leur instinct. Mais on peut tout à fait imaginer un entraîneur remplacer un joueur car une tablette aura alerté son adjoint que, depuis 10 minutes, l'un de ses joueurs court moins vite, loupe ses passes et ne sprinte plus. Le changement ainsi réalisé sera-t-il plus pertinent qu'un autre, basé sur l'instinct de l'entraîneur ? Pour le savoir, il faudra probablement faire des statistiques...
Cette réticence à prendre les chiffres au pied de la lettre s'explique simplement. Le fait même de produire un rapport, c'est-à-dire de mettre en avant certains chiffres plus que d'autres, constitue un biais. Et surtout, cette analyse ne peut représenter la réalité d'un match. Que faire si le joueur en question est le capitaine, dont la présence influe fortement ses camarades de jeu ? Les entraîneurs considèrent, à juste titre, ces rapports comme une simple aide à la décision. Le coach a ses raisons que la statistique ignore.
Mais le fonctionnement d'un club de football ne s'arrête pas aux résultats sportifs. Comme toute entreprise, l'objectif d'un PSG, d'un Real Madrid ou d'un Bayern de Munich est d'être financièrement rentable.
La gestion de l'effectif dictée par les statistiques
Le recrutement, dans ce cadre, a une importance capitale. Le traitement statistique qui s'applique aujourd'hui pour dénicher les futures stars est issu du monde de la finance. Le principe est en effet similaire : il faut trouver des valeurs sous-évaluées à fort potentiel et investir dans ces dernières avant de les vendre en réalisant une substantielle plus-value, et au bon moment.Arsène Wenger, précurseur dans l'utilisation des statistiques, a ainsi acheté Mathieu Flamini sur la base des chiffres. A la recherche d'un milieu récupérateur capable de courir sur de longues distances, il avait offert son premier contrat pro à ce joueur à l'Olympique de Marseille en 2004, pour un transfert de « seulement » 480 000 euros.
A ce titre, Opta a développé le logiciel DataScout, qui peut répondre à une demande très précise de la part d'un recruteur. Si ce dernier est à la recherche d'un milieu de terrain récupérateur et relayeur, il pourra trier les joueurs en sélectionnant des critères comme le nombre de ballons pris à l'adversaire, le nombre de duels gagnés, le pourcentage de passes réussies, etc.
Videoscout, du même éditeur, peut également répondre à une interrogation précise d'un recruteur, mais cette fois en vidéo. Vous pouvez par exemple afficher, en une requête, toutes les reprises de volées du pied droit réalisées par Benzema au cours des deux dernières saisons de Liga.
Cette utilisation de critères pour dénicher un joueur aux caractéristiques précises n'est pas étrangère aux aficionados du jeu Football Manager. Cette simulation très réaliste du rôle de manager est devenue une référence en la matière, et pour cause. 1 500 observateurs, qui parcourent tous les terrains de foot de la planète, remplissent une gigantesque base de données compilant 250 caractéristiques et qui concernent environ 400 000 joueurs, et près de 180 000 autres profils qui vont du... recruteur au préparateur physique, en passant par le kiné.
Certains clubs, qui ne disposent pas d'un bataillon de scouts, avouent avoir utilisé cette base dans le cadre de leur recrutement. Everton a même lié un partenariat avec la franchise en 2009. La frontière entre la fiction et la réalité est tellement faible qu'en novembre 2012, le dénommé Vugar Huseynzade, 21 ans, est ainsi devenu l'entraîneur du club azéri FK Bakou, après avoir joué durant 10 ans à Football Manager.
En dehors du recrutement, les statistiques sont également utilisées au moment de discuter des prolongations de contrat ou des revalorisations salariales. Ces investissements nécessitent de savoir si le joueur sera encore performant dans 12, 24 ou 36 mois. Les données chiffrées sur les performances physiques et en match sont à ce titre des indicateurs que les clubs observent attentivement.
C'est donc tout le marché du transfert, qui anime les étés et les hivers des clubs de football, qui est en partie dicté par les statistiques.
Le chiffre, support de communication
En dehors des résultats sportifs et de l'optimisation de l'effectif, les statistiques sont également utilisées dans le cadre de la communication.L'Olympique Lyonnais, partenaire de Prozone, affiche ainsi sur son site Internet les statistiques des matchs de l'équipe dans son match center. Durant une bonne partie de la saison, l'OL était l'équipe en Europe qui a réalisé le plus de matchs (61 au total). Une statistique largement utilisée par son emblématique président Jean-Michel Aulas au moment d'expliquer une défaite, ou au contraire de valoriser davantage une victoire.
Une instance comme la FIFA n'hésite pas à communiquer autour des statistiques lors de grands événements comme l'actuelle Coupe du Monde, ou encore l'élection du Ballon d'Or. Son site Internet est actuellement truffé d'informations chiffrées dans une interface que la fédération a évidemment pris soin de faire sponsoriser. Vous pouvez ainsi consulter en ce moment le Castrol Index.
Les ligues nationales, enfin, sont également friandes de statistiques. L'objectif : trouver l'angle, le chiffre intéressant qui permettra de mettre en avant leurs championnats afin de le vendre au prix le plus intéressant possible aux diffuseurs. Diffuseurs qui sont eux-mêmes de très bons clients pour des sociétés comme Opta et Prozone.
Les données pour divertir
Les clubs de football utilisent les statistiques dans une logique d'optimisation de l'ensemble de l'entreprise. Certains médias sont dans la même problématique. Les données brutes livrées par Opta ou Prozone peuvent ainsi être exploitées dans le cadre de ce que l'on appelle le robot-journalisme. Un simple fichier rempli de cases est une matière dont un algorithme se nourrit aisément, notamment pour produire les résumés d'après match. Un traitement rapide et à moindre coût qu'utilisent déjà certains sites Internet.Ce type d'utilisation des statistiques est toutefois isolé. Ce que tirent les médias des chiffres répond davantage à un besoin de contenter un spectateur toujours plus exigeant.
Télévision et presse : de bons clients pour la statistique
A ce titre, la chaîne Canal+ est montée en puissance d'année en année. À chaque saison sa nouveauté, de la super loupe à la caméra placée au-dessus du stade en passant par la fameuse palette. La statistique a pris ces derniers temps un rôle prépondérant au sein de cet apparent besoin d'innover. Des consultants, comme Philippe Doucet et Geoffroy Garétier, s'en sont d'ailleurs fait une spécialité, ce dernier se qualifiant même de « footballogue ».
La guerre que se livre actuellement la chaîne avec son concurrent beIN SPORTS sur la retransmission des rencontres pousse ces deux protagonistes à fourbir leurs armes et à proposer des expériences toujours plus riches de chiffres, capables d'attirer à eux le téléspectateur.
Le second écran est, de ce point de vue, un support particulièrement intéressant sur lequel les chiffres envoyés par Opta ou Prozone peuvent être utilisés via des applications spécifiques. ESPN, la BBC, Mediaset ou Sky Italia ont mis en place ce genre de dispositifs.
De la même manière, Orange, qui dispose des droits de diffusion mobile de la Ligue 1, est client d'Opta. Tout comme Deutsch Telecom qui peut, grâce à son partenariat, proposer à ses abonnés des vidéos clips mono ou multicaméras des matchs de la Bundesliga.
La presse, qu'elle soit papier ou en ligne, bénéficie également de l'apport de la statistique. Bild, Marca et l'Equipe disposent tous d'un partenariat avec Opta ou Prozone. Le journal français, également présent en ligne, utilise à la fois les données brutes d'Opta et certains dispositifs « clé en main » mis à disposition par l'entreprise. Grâce à la base fournie et à diverses collaborations, l'Equipe a réalisé un très réussi « Mundial Memories ». Le Wall Street Journal propose également une couverture particulièrement poussée de la Coupe du Monde, avec un nombre important de graphiques et d'animations basés sur les statistiques. Le Figaro, enfin, a lancé son Foot Center spécial Coupe du Monde dans lequel s'affiche, de fort jolie manière, un vaste choix de chiffres. Avec, à la clé, un partenariat signé Sony.
Le site de l'Equipe, comme celui d'Eurosport, utilise également les widgets d'Opta, c'est-à-dire de petits modules à insérer simplement sur sa page Web. Une timeline, les faits marquants, des commentaires... Les formats sont nombreux.
Au-delà des médias
La télévision, les sites Internet et la presse papier ne sont pas les seuls à s'intéresser de près à la statistique. Le jeu en ligne Fantasy League, qui comporte près de 2,5 millions d'utilisateurs, est basé sur les données fournies par les spécialistes des chiffres.Les annonceurs spécialisés dans l'univers du football sont également de la partie. L'un de leurs buts : utiliser l'objectivité apparente du chiffre pour convaincre de la supériorité de leurs chaussures ou de leurs équipements. Serge Valentin, organisateur du salon Sport Numericus qui ouvrira ses portes le 26 juin prochain, précise ainsi : « Les principaux sujets cette année tournent autour de la révolution technologique du marketing sportif, ou comment les acteurs du « sport business » utilisent le numérique, et comment ils développent leur retour sur investissement grâce à cela. Il faut s'adresser au fan 2.0, le connaître et adapter sa stratégie marketing. ».
Le marché du pari sportif, en plein essor suite à sa légalisation en France, est enfin un autre client important des entreprises comme Opta ou Prozone. La statistique apporte, dans ce cadre, un moyen de pousser l'utilisateur à parier. Imaginez que vous ayez installé une application dédiée à cette activité. Cette dernière vous envoie une notification en cours de match : « Wayne Rooney marque tous les 10 tirs au but. Il vient d'effectuer sa 9ème frappe. Pariez sur un but de Rooney ! ». Les possibilités sont, dans cette optique, très variées.
Conclusion
Les progrès techniques réalisés à la fois dans le cadre de la récupération des données et dans l'exploitation des bases de données ont permis aux acteurs de la statistique de prospérer.
Les clubs de football, qui cherchent à optimiser toujours plus leurs activités, sont devenus de très bons clients pour Opta ou Prozone. Le chiffre est ici perçu comme outil objectif capable d'affiner le fonctionnement de l'entreprise.
Il nous parait cependant présomptueux d'affirmer, comme le fait Prozone, que la statistique « change le jeu ». Le chiffre est une aide à la décision, certes, mais le football est un sport multifactoriel qui, malgré les impressionnantes bases de données créées, échappe parfois à toute logique. La glorieuse incertitude du sport. Le principal intérêt des statistiques, dans ce cadre, reste peut-être de les faire mentir...
D'autres ressorts nous semblent par ailleurs plus puissants que la statistique : même si de petits clubs utilisent au mieux les possibilités offertes par cette dernière, ils subiront l'écrasante domination de clubs favorisés par les plus hautes instances du football. La politique menée depuis des années par la FIFA et l'UEFA, notamment en matière de redistribution des droits télé, contribue à rendre toujours plus riches les équipes les plus puissantes financièrement, qui peuvent ainsi concentrer les meilleurs joueurs du monde.
En revanche, les statistiques ont réellement transformé la façon de consommer le football. Récupérés par les médias et utilisés pour appuyer un propos, ces chiffres perdent un peu de l'objectivité recherchée par les clubs. Mais c'est probablement là qu'est le principal vecteur de croissance des entreprises de la statistique. Au risque de contribuer à « l'infobésité » qui nous gagne toujours plus.