Recyclage ou réutilisation : quelle "seconde vie" pour les batteries de voitures électriques ?

Alexis Maniere
Publié le 17 mai 2020 à 18h00
Batterie voiture electrique


Face à l'autonomie ou au prix des voitures électriques, la question du recyclage des batteries semble pour le moins anecdotique. Pourtant, le sujet est central à plus d'un titre, que ce soit pour réduire l'empreinte environnementale des véhicules électriques ou pour limiter le coût de la fin de vie des batteries.

Une fois que leur capacité de stockage n'est plus suffisante pour alimenter les véhicules électriques (VE), que deviennent les batteries usagées ? Peu d'automobilistes s'interrogent sur le sujet, préférant laisser cela aux constructeurs. Oui, mais voilà : le recyclage et la réutilisation des batteries sont une étape incontournable du cycle de vie des VE et, in fine, ont des conséquences sur le développement de la technologie, un impact écologique non négligeable et des répercussions pour le particulier.

Batterie voiture électrique

Les nombreux enjeux du recyclage des batteries

Entre obligations réglementaires, réduction de l'empreinte environnementale et viabilité économique, le recyclage des batteries de voitures électriques est confronté à des exigences de toutes sortes. Pourtant, l'opération semble - pour le moment - difficilement y répondre.

Un levier incontournable pour réduire l'empreinte des VE

Le principal intérêt de la voiture électrique - et qui motive à sa démocratisation à travers le monde - est un impact environnemental plus faible que son homologue thermique, tout du moins à l'usage. En incluant la production d'énergie, un VE rejetterait près de 8 fois moins de CO2 qu'un véhicule thermique équivalent en utilisation, principalement du fait de l'absence d'émissions polluantes(1). Un bilan largement positif qu'il convient pourtant de nuancer, dans la mesure où la voiture électrique pèche à plusieurs autres étapes de son cycle de vie :
  • La production d'électricité, encore majoritairement réalisée via des centrales à charbon ou nucléaires (variable selon les pays) ;
  • La fabrication de la batterie lithium-ion, dont le coût environnemental pour l'extraction des minerais est colossal ;
  • Le recyclage de la batterie, un poste techniquement et réglementairement perfectible.

À en croire différentes études parfois contradictoires, il faudrait parcourir entre 25 000 et 150 000 kilomètres(2) (3) - principalement en fonction du mix énergétique du pays analysé - avant que la voiture électrique devienne moins polluante qu'une diesel ou une essence équivalente. Bien que la vérité se trouve probablement entre ces deux nombres, cela illustre à quel point les VE ne sont pas si « écolos » qu'il y paraît.

Pour réduire l'empreinte écologique globale de la voiture électrique, la première solution pourrait donc consister à intervenir sur la production énergétique, via l'abandon progressif des énergies fossiles et du nucléaire, et ce, au profit des énergies renouvelables (solaire, éolien, etc.). Un projet certes louable, mais qui peine à s'imposer dans la plupart des pays, principalement en raison d'enjeux économiques importants. La seconde possibilité consisterait à rendre l'extraction des matières premières plus vertueuses. Or, à l'heure actuelle, aucun procédé viable ne semble pouvoir remplacer les techniques employées, ces dernières nécessitant d'importantes quantités d'énergie et d'eau, en plus de contaminer les sols.

Face à cette double impasse, seule une voie semble être exploitable dans l'immédiat et concentre de plus en plus l'attention : le recyclage de la batterie.

Voiture électrique pollution

Une réglementation encore trop peu exigeante

Nous aurions cependant tort de penser que les constructeurs s'intéressent au recyclage de la batterie de voiture électrique par simple bonté d'âme. Ils sont en effet tenus par le principe de « Responsabilité élargie du producteur » (REP), les rendant responsables de l'ensemble du cycle de vie des produits qu'ils commercialisent, notamment en ce qui concerne le traitement des déchets. Plus concrètement, la Directive 2006/66/CE prise par le Parlement européen en 2006 dispose que « les producteurs de piles et d'accumulateurs et les producteurs d'autres produits dans lesquels sont incorporés une pile ou un accumulateur sont responsables de la gestion des déchets de piles et d'accumulateurs qu'ils mettent sur le marché ». Dans la pratique, les constructeurs ont donc l'obligation de s'assurer qu'il existe un système de collecte et de recyclage auquel ils peuvent faire appel, notamment pour les batteries, avant de commercialiser un véhicule(4).

Malgré tout, la réglementation semble encore bien légère face aux enjeux en présence. Il faut dire que les constructeurs ne sont tenus de recycler que 50 % du poids moyen « des autres déchets de piles et d'accumulateurs », une catégorie qui englobe notamment les batteries lithium-ion. À titre de comparaison, la réglementation européenne impose un recyclage minimal à hauteur de 65 % pour les batteries plomb-acide - utilisées par les véhicules thermiques - et même 75 % pour les accumulateurs nickel-cadmium, principalement employés à des fins industrielles(4). Une réglementation d'autant plus perfectible que certains matériaux rares ou précieux - comme le lithium par exemple - sont extrêmement légers. L'intérêt de les récupérer, alors qu'il faut avant tout recycler 50 % du poids de la batterie, peut donc paraître limité pour les industriels.

Batterie lithium-ion

Un volume de déchets qui risque d'exploser

À l'heure actuelle, ces faibles quotas de recyclage ont un impact environnemental encore limité, dans la mesure où les volumes à traiter sont relativement peu importants. Lors d'une audition au Sénat à l'été 2019, Christel Bories, alors présidente du Comité Stratégique de Filière Mines et métallurgie, indiquait en effet que le recyclage des batteries des voitures électriques ne représentait, pour le moment, que 15 000 tonnes de déchets par an. Mais face à l'essor attendu des VE, ce volume pourrait être multiplié par 3 d'ici 2027, voire même par près de 50 à l'horizon 2035, et ce, pour atteindre un total de 700 000 tonnes chaque année(1). Certaines études, encore plus confiantes dans le développement de la voiture électrique, avancent même que les batteries à recycler représenteront déjà 2 millions de tonnes par an dès 2030(5). Tout dépendra certainement de l'implication des pouvoirs publics dans le développement de la filière, mais également de l'état du marché de la voiture électrique d'occasion, ce dernier permettant éventuellement de repousser l'échéance du recyclage.

Face à de telles prévisions, l'amélioration du recyclage - tant d'un point de vue technique que réglementaire - semble indispensable, voire même urgent. Pourquoi ? Tout simplement car il est légitime de s'interroger du devenir des déchets qui ne sont pas recyclés, que ce soit en raison de contraintes technologiques ou d'un défaut de volonté de la part des constructeurs. À en croire Frédéric Salin, le directeur marketing commercial de la SNAM - le principal acteur de la collecte et du recyclage en Europe des batteries de voitures électriques -, tout ce qui n'est pas recyclé finit par être détruit, brûlé, puis finalement enfoui pour 2 % du tonnage d'origine(1). Sans refonte du système actuel, cela pourrait donc représenter jusqu'à 14 000 tonnes de déchets enterrés chaque année d'ici 2035.

Batterie voiture électrique

Le recyclage des batteries, une filière perfectible

Plus que jamais, le recyclage apparaît comme une étape indissociable du cycle de vie des batteries de voitures électriques. Mais malgré la réglementation et l'implication de nombreux acteurs, l'opération semble être encore confrontée à de nombreuses limites, tant d'un point de vue technique qu'économique.

À chacun sa méthode de recyclage

Bien que les méthodes de recyclage varient selon la technologie de la batterie et les acteurs, l'opération débute le plus souvent par la décharge de l'énergie résiduelle encore présente - celle-ci pouvant même être utilisée pour alimenter d'autres équipements -, suivi du désassemblage des composants. L'objectif est principalement d'isoler les centaines de cellules lithium-ion qui composent la batterie, notamment des pièces électroniques. Les éléments en plastique et en métal, ainsi que la structure de la batterie sont triés, avant d'être redirigés vers des filières de recyclage spécifiques.

Vient alors l'étape la plus complexe : la séparation des composants chimiques au cœur de la batterie, dont le lithium, le cobalt, le manganèse, le nickel ou encore les terres rares (cérium, lanthane, néodyme, etc.). À l'heure actuelle, deux méthodes différentes permettent de réaliser cette opération.
  • Le recyclage pyrométallurgique : cette technique s'appuie sur des fours à pyrolyse chauffés au gaz, permettant de porter les matières organiques à très haute température afin de les détruire et de capter les éléments polluants contenus au sein des cellules. Les métaux peuvent ainsi être séparés en fonction de leur température de fusion. Ils sont ensuite placés dans une solution spécifique pour dissocier les éléments chimiques (lithium, nickel, terres rares, etc.) et les purifier.
  • Le recyclage mécanique : la méthode consiste à broyer les cellules, avant de récupérer l'électrolyte (liquide permettant la circulation des ions) par évaporation et de le purifier par condensation. Contrairement au procédé thermique, l'électrolyte peut ainsi être réutilisé pour de nouvelles batteries. Une fois séparés de la solution ionique, les métaux qui constituent les électrodes - tels que le lithium, le cobalt ou le manganèse - peuvent ensuite être plus facilement triés. Pour cela, ce sont des procédés tels que la séparation gravimétrique (en fonction de la densité des matériaux) ou magnétique (en fonction du comportement de chaque matériau face à un champ magnétique) qui sont employés.

C'est cette seconde technique qui semble se montrer la plus performante pour le moment, et ce, pour plusieurs raisons : elle permettrait de consommer environ 70 % d'énergie en moins, elle rejetterait moins de CO2 et elle pourrait - en théorie - valoriser jusqu'à 85 % du poids des batteries usagées(6) et jusqu'à 91 % pour les matériaux composant les cellules (contre un peu plus de 30 % pour les procédés pyrométallurgiques)(7). Contrairement au recyclage thermique, particulièrement énergivore et qui rejette beaucoup de CO2 en raison de l'utilisation de gaz, le recyclage mécanique se distinguerait sur un autre point : les métaux et composants ainsi récupérés permettrait à ce que la fabrication de nouvelles batteries génère moins de gaz à effet de serre que lors d'un assemblage avec de nouveaux matériaux.

SNAM

De nombreux acteurs, des résultats qui diffèrent

Les chiffres précédemment avancés sont toutefois à prendre avec des pincettes. En effet, la filière du recyclage des batteries de voiture électrique manque parfois de transparence, tandis que ses acteurs multiplient les annonces pour vanter les mérites de leurs procédés.

Le recyclage par méthode mécanique - dont les résultats apparaissent comme les plus probants - est une technique encore relativement récente. Notamment utilisée par l'entreprise allemande Duesenfeld, elle ne semble pas pour le moment avoir été officiellement adoptée par les constructeurs européens. Ces derniers sont en revanche nombreux à avoir rejoint la filière SNAM (Société Nouvelle d'Affinage des Métaux) - à l'image de Peugeot, Toyota ou encore Honda(8) - dont la technique de recyclage repose principalement sur la méthode thermique. La société tricolore, pour sa part, affirme recycler 70 % du poids des batteries lithium-ion(1).

D'autres acteurs sont également impliqués sur le sujet. Tandis que Renault mise sur l'entreprise Euro Dieuze, Nissan fait confiance à Recupyl. Pour autant, aucun des deux constructeurs ne communique véritablement sur les résultats obtenus. Au contraire de Volkswagen qui gère lui-même le recyclage des batteries de ses véhicules électriques, au sein d'un centre situé à Salzgitter. À en croire le constructeur, le site permettrait de recycler 1 200 tonnes de batterie par an avec, pour le moment, un taux de recyclage de 53 %. Un résultat que l'Allemand entend faire progresser jusqu'à 72 % à moyen terme, puis jusqu'à 97 % en perfectionnant les techniques employées(9).

Ce tour d'horizon des acteurs du recyclage ne pourrait pas être complet sans évoquer le projet ReLieVe (Recycling Li-ion batteries for electric Vehicle), développé par Suez, Eramet et BASF. Démarré en janvier, ce programme subventionné par l'Union européenne affiche un objectif clair : être capable de recycler les batteries lithium-ion à 100 % d'ici 2025(10). Pour cela, l'idée est de travailler en boucle fermée et de recycler les métaux sans modifier leurs qualités physiques et chimiques. L'objectif ? Ne rien perdre lors du procédé et réduire au maximum l'impact carbone du recyclage, celui-ci étant très élevé via la méthode pyrométallurgique. Toutefois, difficile d'avoir davantage d'informations sur la technique employée pour le moment.

Voiture électrique

Une opération loin d'être rentable

Quelle que soit la technique employée ou les acteurs investis sur le sujet, le recyclage des batteries continue à poser un autre problème : il semble difficilement viable d'un point de vue économique. À en croire la SNAM, la filière n'est pas rentable à l'heure actuelle, principalement en raison d'un volume de traitement encore limité en comparaison des investissements nécessaires. Si les entreprises se rémunèrent généralement grâce aux métaux recyclés qu'elles peuvent ensuite revendre, l'équilibre ne semble toujours pas avoir été atteint, notamment car le prix des matériaux est parfois à la baisse. Pour pallier le problème, la SNAM a - à titre d'exemple - prévu avec Honda que le constructeur lui verse une soulte lorsque la valeur des matériaux ne couvre pas le coût de recyclage. Un accord que l'on imagine difficile à tenir sur le long terme.

La situation pourrait cependant rapidement évoluer - à condition que la technologie lithium-ion soit conservée - car la demande semble devoir exploser dans les années à venir. Selon les scénarios jugés les plus optimistes, les véhicules électriques pourraient représenter un tiers du marché automobile mondial dès 2025 et 70 % à l'horizon 2050. Conséquences ? Les besoins des constructeurs, rien qu'en lithium, pourraient être 3 à 7 fois supérieurs à ce qu'ils sont aujourd'hui. Et c'est là que le recyclage montre tout son intérêt(11).

En plus d'être encore rudimentaire, le procédé d'extraction conventionnel ne permettrait à l'heure actuelle de récupérer que 40 à 50 % du lithium contenu dans les saumures (une solution salée contenant notamment cet élément chimique). Alors qu'il ne faut « que » 28 tonnes de batteries lithium-ion pour obtenir 1 tonne de lithium, il faut 750 tonnes de saumure pour avoir la même quantité(11). De quoi renforcer l'intérêt économique du recyclage mais, une fois encore, à condition que le marché automobile mondial s'électrifie rapidement.

Batterie voiture électrique

La seconde vie, une alternative au recyclage

Face aux problématiques rencontrées par la filière du recyclage, les constructeurs commencent à comprendre qu'ils doivent prolonger au maximum la durée de vie des batteries des voitures électriques. Comment ? En les employant pour d'autres usages dès que leur capacité n'est plus suffisante pour les véhicules.

Une solution pour prolonger la durée de vie des batteries de 10 ans

La plupart des constructeurs considèrent que la durée de vie d'une batterie de voiture électrique est comprise entre 1 000 et 1 500 cycles de charge-décharge. Au-delà, la capacité de stockage n'est généralement plus que de 70 à 80 % de ce qu'elle était à l'origine. Le niveau de performance n'étant alors plus jugé suffisant, notamment car il limite considérablement l'autonomie du véhicule, le remplacement de la batterie devient nécessaire.

Mais plutôt que de directement la recycler afin d'en extraire le maximum d'éléments, le choix est de plus en plus souvent fait d'en exploiter tout le potentiel restant par d'autres moyens. À défaut d'être assez performante pour un usage mobile, la batterie usagée - conservant une capacité de stockage de 70 à 80 % - reste tout à fait adaptée à un usage stationnaire. De quoi prolonger leur durée de vie jusqu'à 10 ans de plus pour les utilisations les moins exigeantes et, ainsi, réduire la pollution globale générée par les batteries.

Voiture électrique

Des initiatives encore trop peu nombreuses

Bien que la réutilisation des batteries semble être une solution pertinente pour réduire leur coût environnemental et économique, les projets dits de « seconde vie » sont encore peu nombreux.

Nissan et le stockage stationnaire particulier
Nissan semble être le constructeur le plus avancé sur la question de la seconde vie des batteries. En partenariat avec Eaton, il a développé un équipement baptisé xStorage Home, contrôlable depuis un smartphone. Celui-ci s'appuie sur des batteries usagées afin de créer un dispositif de stockage de l'électricité pour les particuliers. Si le logement produit sa propre énergie renouvelable, notamment au moyen de panneaux solaires, le système va se recharger, permettant ensuite de redistribuer l'électricité ainsi stockée lorsque le logement en a besoin ou de la revendre au réseau. En l'absence de panneaux photovoltaïques, xStorage Home présente malgré tout un intérêt : il permet de stocker de l'électricité pendant les heures creuses, avant de la redistribuer aux heures de pointe.

La seconde vie, un sujet majeur pour Renault
Pour Renault, l'enjeu du recyclage et de la réutilisation des batteries est également central, dans la mesure où 80 % d'entre elles sont louées et que leur remplacement n'est ainsi que rarement aux frais de l'automobiliste. En plus d'une solution similaire à xStorage Home, le constructeur français réemploi les batteries usagées pour les transformer en bornes de recharge, mais également en système de stockage d'urgence - en cas de coupure d'électricité par exemple. Cette seconde solution étant d'ailleurs déjà en place sur le stade de football néerlandais Johan Cruyff Arena, et ce, en attentant la création éventuelle d'une centrale de stockage de l'électricité qui pourrait permettre d'alimenter pas moins de 120 000 foyers, toujours avec des batteries usagées.

Une seconde vie confrontée à des défis de taille
À l'exception de Nissan et de Renault, les initiatives en faveur de la réutilisation des batteries de voitures électriques sont presque inexistantes. Un constat étonnant lorsqu'on sait que le coût de stockage de l'énergie peut être jusqu'à 2 fois moins cher avec des batteries recyclées qu'avec des batteries neuves spécifiques (12). D'ici 2025, l'écart pourrait même être porté à 70 %(13).

Une question se pose donc : pourquoi la réutilisation ne semble pas faire l'unanimité parmi les constructeurs et les fabricants de batteries ? Tout simplement car il y a encore de (trop) nombreuses barrières à lever pour cela.
  • La disparité technologique : pour un même constructeur, les batteries utilisées peuvent varier d'un modèle à l'autre, que ce soit en qui concerne leur taille, leur composition chimique ou encore leur format. Ce manque de standardisation des technologies employées complique la réutilisation des batteries et impose, par conséquent, de très gros volumes de production de VE pour avoir suffisamment de matière en fin de vie pour une réutilisation. Un problème d'autant plus complexe que l'on pourrait compter plus de 15 fabricants différents de batteries de voitures électriques d'ici 2025(13).
  • La diminution du coût de fabrication : si les batteries lithium-ion sont encore relativement chères à fabriquer, leur coût ne cesse pourtant de diminuer. Entre 2010 et 2019, le prix moyen au kWh serait passé de 1 200 dollars à 156 dollars, soit une diminution de près de 90 %. À l'horizon 2024, le prix pourrait même passer à 100 dollars au kWh(14). Cela représenterait « seulement » 10 000 $ (environ 9 200 €) pour une batterie d'une capacité de 100 kWh, soit l'équivalent de ce que propose la Tesla Model S, le modèle en tête du classement des véhicules électriques les plus autonomes. Le problème, c'est que la réutilisation n'est viable que si l'écart de coût entre les batteries neuves et usagées reste important, y compris pour du stockage stationnaire. Or, ce gap que l'on estime pouvoir atteindre 70 % à moyen terme pourrait tomber à seulement 25 % d'ici 2040 si le coût de production des batteries neuves continue de diminuer(13).
  • L'absence de réglementation : si le recyclage ou la réparation des batteries usagées est déjà encadré, c'est moins le cas de la réutilisation. L'absence de normes relatives aux performances de la batterie en seconde vie ne donne ainsi aucune garantie aux consommateurs quant à la qualité du système développé (borne de recharge, stockage particulier, etc.). La question de la responsabilité est également centrale, dans la mesure où le constructeur et le fabricant pourraient se renvoyer la faute en cas de problème.

Voiture électrique

Des leviers pour développer la réutilisation des batteries

Face à ces différents défis, il est plus facile de comprendre le manque d'implication des constructeurs automobiles. Pourtant, ils sont loin d'être insurmontables, à condition d'adopter une politique volontariste en la matière et des actions ciblées.
  • Penser à la seconde vie dès la production : la première nécessité pour les constructeurs, c'est de produire des véhicules électriques en pensant - dès la conception - à une application en seconde vie. L'avantage ? Fabriquer des batteries parfaitement adaptées aux véhicules, mais également au stockage stationnaire, réduisant ainsi le coût de la réutilisation. C'est d'ailleurs ce qu'ont fait Renault et Nissan. Le second avait d'ailleurs officialisé dès 2018 un partenariat avec Sumitomo Corporation afin de réutiliser les batteries des futures Nissan Leaf pour du stockage stationnaire public et particulier.
  • Développer la remise à neuf : cette technique, relativement peu employée pour le moment, consiste à remplacer les cellules usagées de la batterie afin d'augmenter la capacité de cette dernière. L'idée serait donc de développer et d'industrialiser à grande échelle ce procédé de « réparation », et ce, pour maintenir l'écart de valeur entre les batteries neuves et usagées.
  • Créer un organisme référent : de nombreuses agences mondiales et autres alliances de fabricants s'intéressent déjà à la création de normes de sécurité pour les batteries réutilisées. Toutefois, il manque encore un organe de référence capable de certifier la performance des batteries de seconde vie et d'assurer que leur usage est adapté aux besoins des différentes applications de stockage.
  • Être acteur des pratiques de demain : en l'absence de règlement indiquant si le recyclage ou la réutilisation est la voie à suivre, les constructeurs ont la possibilité de faire leurs propres choix et d'identifier des solutions leur permettant d'imaginer de nouveaux débouchés commerciaux. C'est d'ailleurs ce que fait Renault en étant impliqué à la fois dans des programmes de recyclage et de seconde vie des batteries. L'avantage ? L'entreprise française expérimente, tant auprès des particuliers que des institutions publiques, et détermine - forte de son retour d'expérience - quel sera le meilleur chemin à suivre.


(1) Véhicules électriques : 700 000 tonnes de batteries à recycler en 2035 - Le Parisien - 2019
(2) Étude : la voiture électrique 4 fois moins polluante que l'essence et le diesel - Automobile Propre - 2020
(3) From the well to the wheel - Volkswagen - 2019
(4) Directive Européenne 2006/66/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 septembre 2006 - Journal officiel de l'Union européenne - 2006
(5) A Quick Guide to Battery Reuse and Recycling - Union for concerned scientists - 2020
(6) Recyclage des batteries : de plus en plus « vert » - Automobile Propre - 2019
(7) Un recyclage hautement efficient pour un excellent bilan écologique - Duesenfeld - 2020
(8) Partenaires - SNAM - 2020
(9) Volkswagen présente le programme de recyclage des batteries de ses voitures électriques - Caradisiac - 2019
(10) Eramet, Suez et BASF veulent réutiliser les batteries des voitures électriques - Les Echos - 2019
(11) Electrification du parc automobile mondial et criticité du lithium à l'horizon 2050 - Ademe - 2018
(12) Old Electric Car Batteries May Help Cut Costs of Storing Power - Bloomberg - 2020
(13) Second-life EV batteries: The newest value pool in energy storage - McKinsey & Company - 2019
(14) Battery Pack Prices Fall As Market Ramps Up With Market Average At $156/kWh In 2019 - BloombergNEF - 2019
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jkgolconde

Une idée (peut être bête …) : les recycler et les transformer pour les Hybrides dont le besoin d’utilisation est moindre et moins dépendant …

Brichman

il serai pas mal de vendre la voiture, avec une installation batterie de seconde vie recyclée borne de recharge

newseven

Le recyclage pyrométallurgie est une pure supercherie une vrai honte.
Tout brûler pour seulement récupérer les métaux .
Une très grande partie de la batterie est constitué de plastique qui peut-être recyclé facilement et qui est dune qualité supérieure à du plastique traditionnel pour qui résiste à de très haute température qui est partie en fumée dans les fours thermiques.
Bravo
Comme l’air n’etait pas assez pollué .
Pour c’eut qu’ils vont dire que des usines filtre ou qui récupère le monoxyde de carbone sont des escrocs.
Les particules de monoxyde de carbone ne se brûle pas mais ils devient juste encore plus petit.
C’est comme la nouvelle norme pour les foyers aux bois avec les double combustion.

iksarfighter

Quand on parle de voiture électrique propre on pense surtout au milieu urbain dense où on a alors moins de gaz toxiques et de bruit.
Dans cette configuration le bénéfice en terme de santé publique est énorme.

Nmut

Les hybrides ont justement besoin de batteries plus performantes: le nombre de charge/décharge est bien plus important, le rapport puissance instantanée / capacité est aussi bien plus important (la batterie est déchargée en quelques minutes) d’où un stress plus important (même chose pour la charge).
Malheureusement ton idée n’est pas intéressante.

lepirate

Article très intéressant. Il ya beaucoup de problèmes à résoudre. Tout doit être mesuré pour se décider. L’article met en lumière plein de questions intéressantes.
Quelques commentaires:

  • Il y a malheureusement du nuclear-bashing dans cet article. La production d’electricité nucléaire ne produit pas de CO2, et si on prend en compte le cycle de vie complet alors en produit pas plus que l’éolien et moins que le solaire… Et demande aussi beaucoup moins de materiaux (ciment, surfaces, connections electriques, …) pour produire la meme quantité d’electricité (et quand on veut !).
  • Et du même coup les centrales électriques à gaz ne sont pas stigmatisées, alors qu’elles sont de grosses contributrices de CO2. Le gaz est tout aussi fossile que le charbon, le pétrole (dont il partage souvent les puits), et le charbon. Comparé au charbon et au petrole il ne pollue pas l’atmosphère avec de particules sales, mais il fait toujours beaucoup de CO2 en brulant. Donc il est le moins sale des combustibles fossiles. Ca en reste un et donc rejette du CO2 quand on s’en sert.
  • La problématique de la quantité de matière première n’est que partiellement abordée: l’un des avantages du recyclage est effectivement de pouvoir réutiliser les matières premières, donc de réduire les besoins en extraction. Très bien. Cependant il y est cependant écrit que le cout d’extraction des matières premières va diminuer. En est-on bien sur ? Si elle se raréfient le cout d’extraction va très certainement se remettre à remonter - pas nécessairement maintenant mais dans quelques années.
  • On manque de chiffrage: quelle capacité electrique faut-il, en France par exemple, pour alimenter les solutions envisagées ici (usines de recyclage, etc…).
PPano

Très bon article

jkgolconde

Merci pour cette info, ma vision des choses est effectivement erronée

Cleindori

Bravo pour cet article et merci !

xryl

Je vous rejoins pour la première partie, mais pas pour la seconde. En effet, le CO brûle très bien pour faire du CO2 et en plus, fourni de l’énergie. Mais brûler du plastique, c’est brûler du pétrole, quel intérêt alors d’avoir un VE ?

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