Dr Johnny Ryan, du Conseil irlandais des libertés civiles, a décidé de déposer une plainte contre l'IAB Tech Lab, l'accusant d'être à l'origine de la « plus grande fuite de données au monde » à cause de ses activités publicitaires.
À l'origine de cette accusation, le système d'enchères en temps réel (RTB, real-time bidding en anglais) qui ne permettrait pas de contrôler efficacement où et à qui les données personnelles des utilisateurs sont envoyées.
Un combat contre le RTB mené depuis 2018
C'est un combat de longue haleine que mène Johnny Ryan contre le RTB. Début 2018, il avait alerté les autorités de protection des données en Irlande et en Grande-Bretagne, quand il travaillait encore dans l'industrie. Quelques mois plus tard, et après avoir rejoint Brave, c'était auprès de la Commission à la protection des données irlandaise qu'il avait déposé une plainte invoquant le RGPD. Plainte qui avait été suivie de plusieurs autres du même genre partout en Europe, déposées par différentes organisations et personnes.
Ne voyant pas ses alertes suivies d'effets et travaillant désormais au
Conseil irlandais des libertés civiles, Johnny Ryan a décidé de directement faire appel à la justice et de déposer une plainte contre l'IAB Tech Lab à Hambourg. L'IAB Tech Lab est un consortium composé des plus grandes entreprises du domaine de la technologie, dont Google, Facebook et Amazon, et qui s'occupe entre autres de la publicité dans le monde numérique.
Ce dont Johnny Ryan les accuse, c'est de faire fuiter les données personnelles des internautes plusieurs milliards de fois par jour à cause du RTB. Le real-time bidding, ou enchère en temps réel en français, est un système qui permet aux sites de vendre en temps réel et au plus offrant une impression publicitaire donnée. Pour décider quel espace acheter, les annonceurs s'appuient sur une myriade d'informations à propos des visiteurs du site afin de trouver le public qui colle le plus possible à leur cible, et ce, avec l'aide d'intermédiaires.
Des données très personnelles diffusées plusieurs milliards de fois par jour à des entreprises
Ce fonctionnement pose plusieurs problèmes. Déjà, il demande de récupérer énormément d'informations sur les utilisateurs, que ce soit sur leurs goûts, leurs habitudes de vie ou leur localisation, afin de cibler la publicité plus efficacement. Certaines de ces données peuvent être très personnelles, pouvant concerner l'orientation sexuelle, les opinions politiques ou même l'état de santé, facilement déduits à partir des sites visités. Au vu du volume d'informations récupérées à chaque instant, Johnny Ryan ne considère pas qu'elles puissent l'être avec le consentement éclairé de chaque utilisateur.
Ensuite, dans le cadre du RTB, toutes ces données doivent être envoyées très fréquemment à des milliers d'entreprises et organisations afin de pouvoir choisir automatiquement et rapidement quelle publicité ciblée afficher aux internautes sur un site. Si quelques règles ont été mises en place afin de contrôler ce qui peut être utilisé et de quelle façon, pour Johnny Ryan, elles sont trop vagues et impossibles à faire respecter, d'autant plus pour l'individu qui perd tout contrôle sur ses informations personnelles. De plus, ces données peuvent être accompagnées d'un identifiant, permettant de les recouper avec des informations reçues auparavant à propos d'une personne et de créer un profil individuel.
Les noms des entreprises qui diffusent le plus de données dans le cadre du RTB sont loin d'être étonnants : on y retrouve entre autres Google, Facebook, Amazon, Verizon… Après la sanction de l'Autorité de la concurrence, Google va donc se retrouver une nouvelle fois à devoir défendre le fonctionnement de ses services publicitaires, mais à Hambourg cette fois.