Si sur le plan financier, l'accord n'aura sans doute qu'une portée limitée - les livres concernés n'étant plus distribués, cette annonce signe tout de même la fin du front uni qu'offrait jusqu'ici l'édition française face aux ambitions de Google : Hachette va même jusqu'à appeler les autres éditeurs français à reprendre à leur compte les dispositions de l'accord en question, qui doit aboutir sur un contrat définitif dans les six mois. Entre 40 et 50 000 ouvrages sont concernés.
Hachette Google, partenaires inattendus
L'éditeur assure toutefois ne pas avoir vendu son âme au diable. Selon le protocole établi par les deux partenaires du jour, c'est lui qui sélectionnera la liste des ouvrages pouvant être à nouveau distribués - et non Google. En échange de l'effort de numérisation, Google pourra les exploiter sur sa plateforme Google Livres, ainsi que sur sa future plateforme de distribution payante, Google Edition, mais Hachette recevra une copie de l'ouvrage concerné et sera également en mesure de l'exploiter pour son compte.
« Ce n'est pas un quitus donné à Google pour son comportement passé, mais un cadre permettant de repartir sur de nouvelles bases, équitables, équilibrées et respectueuses de nos droits et de ceux de nos auteurs », a commenté Arnaud Nourry, président de Hachette Livre.
Les négociations n'étaient pourtant pas gagnées d'avance : depuis 2004 et l'ouverture du programme Google Livres (initialement appelé Google Print), les maisons d'édition, françaises comme américaines, reprochent à Google d'avoir pioché sans les consulter dans les grandes bibliothèques américaines des livres tombés dans le domaine public... ou encore sous droits. Suite à plusieurs procès, dont l'un soldé par un accord à 125 millions d'euros, Google avait alors fini par mettre en place une procédure permettant aux éditeurs de signaler les ouvrages numérisés apparaissant sur sa plateforme sans leur accord. Une procédure de type opt-out qui n'a pas franchement fait le bonheur de la profession.
Google ? Méfiance, répond l'édition
Egalement porté sur le terrain des bibliothèques nationales - au premier rang desquels la BnF, cette bataille avait fait naître la crainte que Google parvienne à s'arroger le pan littéraire des cultures nationales au détriment des acteurs de ces dernières. Aujourd'hui, le moteur de recherche se félicite avec Hachette d'avoir pu sortir de ce conflit « par le haut ». « Les auteurs français auront de nouveaux débouchés commerciaux pour leurs livres ; et les lecteurs à travers le monde auront le plaisir de voir réapparaître des livres en langue française qu'ils ne parvenaient plus à trouver », se réjouit ainsi David Drummond, vice président en charge du développement et des affaires juridiques chez Google. Les plus virulents des éditeurs partisans d'une plateforme servant mieux les intérêts français risquent pourtant de ne pas partager cet enthousiasme.