En 2019, quatre auteurs démarraient chez Dupuis une série ambitieuse. Le Dernier Atlas, triptyque dont chaque tome fait plus de 200 pages, s'est conclu ce mois-ci avec la sortie du troisième volume. L’occasion de revenir sur cette uchronie aux mille thématiques.
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Nous nous donnons 5 citations et 5 paragraphes pour vous convaincre.
Le Dernier Atlas (2019-2021)
Fabien Vehlmann, Gwen de Bonneval, Hervé Tanquerelle et Fred Blanchard
Nous sommes en 2018 à Nantes. Ismaël est un petit gangster d’origine Algérienne, lieutenant d’un business de machines à sous déguisées en flippers. Sous est airs de gros dur, il n’a jamais oublié l’enfant qu’il était, passionné par les Atlas. Nés en 1938 de l’esprit d’un jeune algérien engagé dans l’armée française, les Atlas sont des robots gigantesques qui, durant des années, ont permis d’ériger des immeubles à toute vitesse, en France. Fonctionnant grâce à l’énergie nucléaire, ils furent cependant à l’origine d’une catastrophe qui leur fit perdre l’affection du public. Aujourd’hui, les Atlas ne sont plus qu’un lointain souvenir…
Rapidement, après une série d’événements malencontreux, Ismaël doit traverser le désert de Tassili. Mais cet endroit sacré est le théâtre de phénomènes surnaturels, et notre protagoniste se retrouve assailli d’étranges vision et d'une drôle de conviction : il doit voyager jusqu’en Inde, pour remettre en marche le dernier Atlas, seul rempart face à une catastrophe d’envergure planétaire.
« Ils dépassaient les immeubles, j’vous jure ! »
Le Dernier Atlas est une uchronie, un récit fictionnel prenant pour point de départ un événement modifié du passé. Ici Fabien Vehlmann et Gwen de Bonneval imaginent les Atlas, une invention aux conséquences majeures, et le soldat qui en est à l'origine, pour nous proposer une aventure de robots « à la française », imprégnée de l’histoire du pays et de ses relations internationales.
« Il se passe à Tassili quelque chose qui devrait être impossible. »
Si le triptyque débute par Ismaël et ses embrouilles dans les quartiers louches de Nantes, on comprend au fil des pages que le récit va prendre une envergure bien plus importante. Dès le premier tome, on voyage d'ailleurs de la France jusqu’en Inde en passant par l’Algérie. Et ce n’est que le début ! Au fil de sa quête, Ismaël va croiser le chemin d’un parrain de la mafia, d’une reporter toujours à la recherche d’un scoop, de djihadistes en quête de matériaux pour fabriquer une bombe, de migrants à la recherche d’une terre plus accueillante…
Il se passe beaucoup de choses dans Le Dernier Atlas, et la galerie de personnages est particulièrement vaste. Ismaël est certes le héros de l’histoire, mais nous suivons également différents protagonistes dont les objectifs sont aussi divers que passionnants. Et si au premier abord on aurait pu croire que cette multiplication de personnages donnerait un récit bancal et difficile à suivre, il n'en est rien. Le projet est mené d’une main de maître par son équipe créative, à tel point qu’on peut dévorer les trois tomes d’affilée sans voir le temps passer.
« Le dernier des Atlas reste le seul moyen connu de s’opposer à l’UMO ! »
On le découvre assez vite, le dernier Atlas doit servir à affronter l’UMO, un gigantesque objet non identifié sorti de terre dans le désert de Tassili, qui, en se déplaçant, apporte tempêtes et autres catastrophes. Avec cet arc narratif, dès le premier tome, les auteurs cultivent donc un mystère passionnant qui ne sera résolu qu’à la fin de la série. Extraterrestre, forme de vie primitive, arme étrangère, manifestation divine… Au fil des pages, les protagonistes échafaudent des hypothèses, et nous avec eux.
« Les crises multiples que nous affrontons sont en train de pousser l’État au bord du gouffre. »
L’UMO est aussi un prétexte dont se servent les auteurs pour questionner les contradictions de l’humanité, en imaginant toutes les répercussions d'une telle apparition dans le désert algérien.
Le mystérieux géant provoque notamment un déplacement massif de population, vague d'immigration rejetée par la France, qui se fait le théâtre d'une montée de l’extrême droite… La diversité des personnages nous permet alors de suivre les événements sous plusieurs angles et d'en appréhender ainsi les différentes facettes.
On découvre les points de vue du gouvernement, de la population française, des réfugiés algériens, des passagers de l’Atlas… la série propose plusieurs niveaux de lecture, tout en restant hyper accessible. Cette lisibilité, Le Dernier Atlas la tient peut-être de son trait de dessin, typique de l'école de la ligne claire, qui risque toutefois de rebuter les lecteurs les moins nostalgiques. Ce dessin a pourtant le mérite d’être très lisible et particulièrement expressif, ce qui permet une réelle immersion dans le récit.
« Quelque chose qui pourrait bien être la fin de tout ce que nous avons connu jusqu’à présent. »
Finalement, Fabien Vehlmann, Gwen de Bonneval, Hervé Tanquerelle et Fred Blanchard nous racontent à leur manière le début de la fin du monde.
Le Dernier Atlas n'est pas le récit d'une apocalypse où tout explose, avec ses héros et ses monstres, plutôt celui d'un déclin de la société accéléré par un événement complètement inattendu. Une œuvre intelligente, et tout à fait fascinante, que je ne peux que vous recommander.
Le dernier Atlas est édité chez Dupuis.
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