La vengeance est un plat qui se mange très froid
Dès le départ, ce Xenoblade Chronicles: Definitive Edition semble conter une histoire assez classique. Habitant de la paisible Colonie 9, Shulk est un garçon (ou Homz) banal qui étudie une étrange épée nommée Monado. Cette dernière possède des pouvoirs étranges et seul le véritable élu peut manier cette lame pas comme les autres. Bien entendu, la quiétude des premières minutes va rapidement céder sa place au chaos lorsque la bourgade est attaquée par les Mékons. Ces machines semblaient pourtant avoir disparu depuis la dernière guerre en date. Sans trop entrer dans les détails, Shulk, aidé de ses amis et de sa mystérieuse épée, parvient à repousser la menace avant de s'engager dans une longue quête initiée par un sentiment de vengeance.Au premier abord, le scénario peut donc paraître banal. Pourtant, l'histoire sait se montrer prenante sur le long terme. Durant cette aventure de plusieurs dizaines d'heures, notre escouade va rencontrer de nouveaux personnages qui viendront gonfler notre groupe de combattants. Si la vengeance est bien la motivation première de Shulk, elle est parfois reléguée au second plan face aux enjeux qui se mettent doucement en place autour du Monado. Enfin, ultime particularité scénaristique, le monde de Xenoblade Chronicles n'est pas une immense étendue de terre et d'eau. En réalité, toute l'épopée se déroule sur le corps de deux titans nommés Bionis et Mekonis. Après un affrontement, ces deux derniers sont restés figés avant d'être colonisés par la faune, la flore et plusieurs civilisations. Ce dernier élément a son importance, car il justifie la présence de décors absolument immenses, tout en verticalité et démesure.
« Malgré ces défauts qui pourraient venir gâcher tout le plaisir de jeu sur n'importe quel titre, Xenoblade Chronicles: Definitive Edition parvient quand même à captiver le joueur »
Propre comme un Monado tout neuf ?
Les fans de la première heure comme les nouveaux venus attendent généralement d'un portage qu'il soit bien meilleur sur le plan technique que le jeu original. Dans ce domaine, les développeurs de Monolith Soft ont plutôt bien travaillé puisque les modèles des personnages ont été entièrement refaits et les graphismes ont été logiquement améliorés. Cette réussite esthétique est également due à la direction artistique parfaitement maîtrisée. Les couleurs sont généralement vives et les décors variés. Les étendues verdoyantes font leur petit effet et la végétation phosphorescente du marais fait pensée à celle du film Avatar. De plus, la partie technique est convaincante puisque le titre n'essuie pratiquement aucun ralentissement.Hélas, tout n'est pas parfait. Parmi les reproches régulièrement adressés à cette Definitive Edition, nous avons tout d'abord la résolution extrêmement basse du titre pour la version dockée (entre 540p et 720p) comme en mode portable (entre 378p et 540p). Ainsi, un effet de flou est presque omniprésent à l'écran et peut parfois venir gâcher des panoramas qui auraient pu être enivrants avec une résolution plus élevée. Même constat du côté de certaines textures qui semblent dater de la version Wii, si bien que des surfaces ont parfois l'allure d'un gros polygone à peine dissimulé. Enfin, les animations n'ont pas du tout été retouchées. Les personnages ont donc régulièrement des gestes robotiques et des positions pas vraiment naturelles.
Malgré ces défauts qui pourraient venir gâcher tout le plaisir de jeu sur n'importe quel titre, Xenoblade Chronicles: Definitive Edition parvient quand même à captiver le joueur. En effet, chaque zone est immense et offre une vue magnifique sur les hauteurs des deux titans. Shulk et ses compagnons sont ridiculement petits dans ce monde où presque tout paraît gigantesque ! La bande originale n'est pas non plus étrangère à cette sensation d'envoûtement. Chaque morceau est un délice pour nos oreilles et le joueur peut choisir d'écouter les musiques dans leur version d'époque ou réorchestrée.
Un beau bordel réorganisé
Maintenant, place aux combats en temps réel qui occupent la majeure partie de l'aventure. Ici, les affrontements sont dynamiques, mais parfois un peu confus. Jusqu'à trois personnages peuvent prendre part aux joutes face aux (très) nombreux ennemis du jeu. Chaque héros possède des capacités uniques qu'il va falloir améliorer en dépensant un certain nombre de points. Quoi qu'il en soit, nous ne contrôlons directement qu'un protagoniste et les deux autres sont gérés par l'IA. L'interface, bien qu'optimisée par rapport à la version Wii, est assez chargée en informations. Il faut bien l'admettre, la prise en main n'est pas franchement instinctive et ce n'est pas pour rien si les didacticiels pleuvent durant les premières heures.Il est nécessaire d'utiliser judicieusement les capacités du héros (qui mettent quelques secondes à se recharger) en les activant via la barre située en bas de l'écran. Certaines attaques sont plus efficaces si elles sont utilisées derrière un ennemi ou sur le flanc de ce dernier. Hélas, entre les icônes à l'écran, les effets spéciaux et pour peu que plus de trois ennemis rejoignent le combat en question, tout peut vite devenir bordélique. Car les combats de Xenoblade Chronicles sont plus techniques qu'ils n'y paraissent. Passer d'une compétence à l'autre ne suffit pas.
Par exemple, pour mettre un ennemi à terre, le joueur doit le déséquilibrer avant qu'un allié n'utilise une autre compétence pour le faire tomber. L'IA n'étant pas toujours très réactive, des batailles peuvent parfois s'éterniser si le bon enchaînement n'est pas déclenché. Pour soulager les novices qui manqueraient de patience, les développeurs ont décidé d'inclure un mode facile et de nombreuses aides pour les épauler dans ces moments difficiles. La pratique est la meilleure solution pour appréhender toutes les spécificités du système de combat.
« Cette sensation de liberté est à son apogée lorsqu'il s'agit de se promener au sein des superbes zones offertes par le jeu »
Une liberté retrouvée
En plus d'une quête principale déjà très consistante, le monde de Xenoblade Chronicles pullule de missions annexes permettant d'empocher de l'argent et de précieux points d'expérience. Si ces activités sont très utiles pour gagner des niveaux, elles sont aussi extrêmement rébarbatives. Généralement, il faut aller d'un point A à un point B pour récupérer un objet ou tuer des monstres. Nous sommes bien loin des quêtes secondaires scénarisées d'un The Witcher 3... Ces missions font clairement dans le remplissage facile. Mais s'il le souhaite, le joueur peut passer outre ces occupations un peu pénibles, quitte à galérer par manque d'expérience.Le jeu de Monolith Soft met aussi l'accent sur la liberté. Ainsi, même s'il est le personnage principal de cette aventure, Shulk n'est pas le seul protagoniste jouable. Une fois encore, c'est au joueur de désigner puis de contrôler le héros de son choix parmi les amis de notre cher porteur du Monado. Cette fonctionnalité peut être salvatrice pour mettre en place de nouvelles stratégies durant les combats. Shulk a beau être le personnage le plus équilibré au niveau de ses statistiques, les autres possèdent également des atouts qu'il ne faut pas négliger. En cas de défaite, il est utile de remanier notre équipe en vue de la prochaine tentative afin de dénicher de nouvelles faiblesses au sein du camp adverse.
Cette sensation de liberté est à son apogée lorsqu'il s'agit de se promener à travers les superbes zones ouvertes du jeu. Les animaux plus ou moins hostiles peuplent ces étendues sauvages et des objets (représentés par des orbes lumineux) peuvent être ramassés pour compléter l'encyclopédie de chaque région. De quoi venir gonfler une fois encore la durée de vie phénoménale du titre... sans oublier l'ajout d'un épilogue long d'une dizaine d'heures.
Xenoblade Chronicles avait marqué les esprits en 2010 et il n'a rien perdu de sa saveur dix ans plus tard. Si des approximations, en particulier sur les parties réservées aux graphismes et aux combats, demeurent, il n'en reste pas moins un monument du RPG. Les amoureux de la première heure retrouveront le jeu qu'ils apprécient tant et les nouveaux venus tomberont sous le charme une fois toutes les mécaniques de gameplay digérées.