Plusieurs neurologues demandent la mise en place de lois et régulations pour protéger notre cerveau de manipulations technologiques.
Les avancées dans la neurotechnologie sont nombreuses et bénéfiques d'un point de vue médical. Mais des neurologues craignent des utilisations commerciales qui n'auraient pas été encadrées à temps.
Des « neuro-droits » à ajouter à la Déclaration universelle des droits de l'homme
Rafael Yuste, un professeur de neurosciences à l'université de Columbia, a déclaré que la Déclaration universelle des droits de l'homme devrait être étendue et contenir des droits pour nos cerveaux, afin d'empêcher l'abus des nouvelles technologies. Il définit cinq droits essentiels : le droit à l'identité, le droit au libre arbitre, le droit à l'intimité mentale ainsi qu'un accès égal pour tous aux avancées en matière d'augmentation du cerveau et une protection contre les préjugés algorithmiques.
Son choix s'est porté sur la Déclaration universelle des droits de l'homme puisque selon lui, la neurotechnologie a le potentiel de modifier ce qui fait de nous des humains. L'exemple qu'il donne est celui de l'enregistrement et de la modification de neurones, ce qui a déjà été réussi sur des animaux en laboratoire. Il s'alarme d'une utilisation sur les humains qui pourrait permettre de « lire et écrire dans l'esprit des gens ».
La crainte d'utilisations commerciales peu encadrées
Si tout cela semble relever du domaine de la science-fiction ou concerner un futur lointain, ce n'est pas le cas. Les neurosciences ont connu plusieurs avancées importantes dans le domaine médical, dont des applications concrètes approuvées par l'Agence américaine des médicaments pour traiter la maladie de Parkinson et l'épilepsie à l'aide d'électrodes implantées dans le cerveau. D'autres servent à aider à contrôler des prothèses ou permettent à des patients de communiquer après des dommages au cerveau.
Mais l'on voit aussi arriver sur le marché plusieurs objets commerciaux déclarés capables suivre les humeurs et les émotions en surveillant l'activité cérébrale. John Krakauer, un professeur de l'université Johns Hopkins, prévient que d'autres technologies du genre vont finir par être disponibles commercialement, à la demande des consommateurs. Et comme les réseaux sociaux et la publicité de masse, elles pourront être utilisées pour influencer nos préférences, à la différence que « la technologie peut aller sous le crâne et accéder à nos neurones », ce qui nécessite des lois claires pour encadrer leur utilisation.
Des pays commencent déjà à réfléchir au sujet, notamment le Chili qui a proposé une loi octroyant des « neuro-droits » à ses citoyens ou encore l'Espagne qui a proposé de nouvelles règles pour réguler l'intelligence artificielle dont une partie concernait les neurosciences. Reste à voir si d'autres pays ou des organisations internationales vont s'emparer du sujet dans un futur proche.
Source : Reuters