Mercure, une voisine petite mais costaude

Eric Bottlaender
Par Eric Bottlaender, Spécialiste espace.
Publié le 13 avril 2021 à 17h06
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La petite planète Mercure. © NASA

Même si elle est visible à l'œil nu, la plus petite planète du Système Solaire est particulièrement difficile à déchiffrer... Et pour les visites, c'est encore pire ! Chaude, froide, mystérieuse, avec de gros coups de Soleil ? C'est Mercure bien sûr !

Mercure, en bref

La planète la plus proche du Soleil peut être observée dans de bonnes conditions à l'aube ou au crépuscule, et ce malgré sa faible taille (4 878 km de diamètre), elle est donc connue depuis les premières grandes civilisations. Pourtant, ses caractéristiques précises ont été difficiles à déterminer : Mercure fait le tour de notre étoile en 88 jours et tourne sur elle-même en 58,6 jours terrestres. Les deux sont dit « couplés », puisqu'à chaque rotation, elle fait précisément 1,5 révolutions.

Contrairement aux planètes géantes, il aura fallu attendre la théorie de la relativité générale (en 1915) pour comprendre précisément comment évoluait l'orbite excentrée de Mercure ! Proche du Soleil (seulement 46 millions de kilomètres au périhélie - ou point le plus proche), la « première planète de la liste » est très seule. Elle n'a pas de lune, et aucun astéroïde connu ne croise sa route.

Planète brute

Mercure n'a pas non plus d'atmosphère, ou si fine que l'on évoque plutôt une « exosphère » autour de cette planète rocheuse, soumise aux importants rayonnements solaires. À la surface, les conditions sont difficiles : jusqu'à 427°C au milieu de la journée, et -183°C à la nuit tombée (vous devriez reporter vos vacances). Et sur place ? La géographie est évidemment dominée par des centaines de cratères, témoins de collisions passées, mais on y trouve aussi des cassures qui traversent la surface et montrent que la planète, qui présentait un jour une importante activité volcanique, s'est considérablement refroidie. Sans vouloir généraliser, il vaut mieux aimer les déserts...

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Et pourtant, elle ne ressemble à aucune autre ! © NASA

Voir sur Mercure si j'y suis

Comme la Terre, Mercure a un cœur de métal, mais la comparaison s'arrête là : le sien pèse plus de la moitié de sa masse totale et occupe 40 % de son volume ! Bien comprendre cet élément est au centre des recherches qui concernent la petite planète : non seulement, connaître son cœur aidera à savoir comment Mercure s'est formée, lors des prémices du Système Solaire, mais en plus cela permettra de mieux comprendre sa magnétosphère. Et puis ce métal, est-il solide, ou liquide ? Est-il uniforme ? Est-ce qu'en son centre, il tourne sur lui-même plus vite que Mercure ? Toutefois si cette question, comme celle de la cartographie exacte de la surface, la composition du sol, la tectonique des plaques ou la concentration moléculaire dans son exosphère vous taraudent, il vous faut... De la patience. Et pour cause, aller étudier Mercure, c'est un casse-tête.

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Des dépots brillants mis en valeur lors de mesures radar, près du pôle Nord de Mercure. © NASA/Johns Hopkins University Applied Physics Laboratory/Carnegie Institution of Washington

Des visites limitées

La NASA est pour l'instant la seule agence à avoir rendu visite à Mercure, et la première mission, Mariner 10 (entre 1974 et 1975) n'avait pas assez de carburant pour se freiner et se mettre en orbite de la petite planète : elle l'a donc survolé trois fois. Après cette première phase, il a fallu concevoir une mission capable de rester longtemps autour de Mercure... Un vrai défi, alors pour une première, l'agence américaine a envoyé la petite sonde MESSENGER (1,1 tonnes) en 2004. Cette dernière est entrée en orbite de Mercure le 18 mars 2011, restant active plus de quatre années, pour rapporter d'impressionnantes images et des mesures qui sont encore aujourd'hui totalement uniques. Cartographie, étude des sols, magnétosphère, on lui doit quasiment toutes nos connaissances actuelles sur Mercure... Et beaucoup de questions, pour pouvoir aller plus loin.


La relève est en route !

La prochaine mission qui vise Mercure est en fait déjà en route : il s'agit de BepiColombo, une « triple sonde » conçue par l'agence spatiale européenne (ESA) et son homologue japonaise ( JAXA) qui a décollé en octobre 2018. Impressionnante avec ses 4,1 tonnes, son trajet va durer jusqu'en décembre 2025 avant qu'elle ne se mette en orbite de Mercure.

C'est que pour l'atteindre sans dépenser énormément de carburant, il faut profiter des planètes (Venus, la Terre et Mercure elle-même) pour se freiner et réduire son orbite autour du Soleil. À son arrivée, BepiColombo se scindera en deux parties utiles (plus la propulsion, qui sera éjectée) : le module japonais ira étudier la magnétosphère, l'exosphère et l'interaction de Mercure avec le Soleil, le module européen se concentrera sur la surface, l'étude du cœur et des pôles. Nos connaissances sur Mercure devraient alors en être grandement approfondies.

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Assemblage des trois modules principaux de BepiColombo. Notez l'impressionnant radiateur thermique ! © ESA/CNES/Arianespace/Optique video du CSG - JM Guillon


Fun fact :
Mercure étant la planète la plus proche du Soleil... Elle est aussi la planète la plus proche de toutes les autres planètes du Système Solaire, en moyenne (et oui, on sait, c'est contre-intuitif).


Notes touristiques :
- Voyage : 4/10 : Mercure n'est pas forcément très éloignée, mais elle est extrêmement difficile à atteindre pour s'y mettre en orbite. Et bonjour les radiations et la température sur le trajet.
- Paysages 7/10 : Pour amateurs de films en noir et blanc uniquement.
- Habitabilité 2/10 : Il y aurait de la glace depuis des millions d'années dans certains cratères aux pôles, qui n'ont jamais vu la lumière. Pour le reste, les conditions sont difficiles, et une journée dure 59 jours terrestres, soit pratiquement un lundi. N'espérez pas creuser et trouver un fossile.


Eric Bottlaender
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