Motos électriques © Energica
Motos électriques © Energica

Alors que les États-Unis projettent d’atteindre le zéro émission à l’horizon 2050, l’administration Biden envisage d’approuver des aides colossales en crédits d’impôt.

900 dollars de financements pour l'acquisition d’un vélo électrique, 7 500 pour une moto et 12 500 pour une voiture… Les aides proposées dans le « Build Back Better » ont de quoi faire rêver plus d’un américain. Ce plan à 2 000 milliards de dollars, entériné le 19 novembre, s’annonce ambitieux, et si son objectif est d'aider à la reconstruction de la classe moyenne américaine, les mesures qui le conditionnent ont réveillé la colère des partenaires privilégiés de l’État fédéral. Les affaires sont les affaires.

Se donner les moyens de ses ambitions

Dans les faits, les Américains polluent. Ils sont de loin les plus gros producteurs de plastique par habitant et ont projeté plus de CO2 dans l’histoire qu’aucun autre pays. Aussi, le gouvernement de Joe Biden s'est engagé dans un objectif de neutralité carbone d'ici 2050 ; or pour y parvenir, les propositions doivent casser des lignes… et la tirelire.

Dans ce sens, le « Build Back Better », le pendant social et environnemental du « Build Back Better Plan », propose de nombreuses mesures de soutien à la transition écologique. Profitant d'une enveloppe de 300 milliards de dollars dédiée aux énergies renouvelables, le président américain veut donner une grande impulsion à l'électrique sous forme de crédits d'impôts pouvant aller jusqu’à 12 500 dollars pour l’achat d’un véhicule et jusqu’à 30 % du montant d’une installation solaire :
« [...]le crédit d'impôt pourra atteindre 12 500 $ pour un véhicule électrique fabriqué aux États-Unis dans des usines administrées par les syndicats, pour une famille de la classe moyenne ».

Si cette offre peut faire rêver les consommateurs, ses détracteurs redoutent une hausse de l'inflation et une mauvaise répartition des crédits d'impôt, considérés par certains comme « des subventions pour les riches ».

Voiture électrique en charge
Voiture électrique en charge

Des alliés malmenés et un projet loin d’être validé

La Chambre des Représentants a déjà acté le texte, qui doit dorénavant être étudié au Sénat pour être entériné. Reste que outre-Atlantique, la dépense de l’argent public est un sujet épineux, aussi rien n'est joué.

Du côté du vieux continent, on s’inquiète : après l’affaire des sous-marins français, qui a illustré les capacités de revers de l’administration Biden, les États membres se sont joints au Mexique et au Canada pour faire face au protectionnisme induit par le « Build Back Better », réservé aux véhicules américains.

Nourrissant la crainte de voir l’industrie automobile mondiale déséquilibrée, Valdis Dombrovskis, commissaire européen au commerce, s’est adressé aux législateurs américains en leur demandant d’abroger toutes les parties concernant les véhicules électriques : « Nous sommes d’accord que les crédits d’impôt constituent une incitation importante pour créer de la demande envers les véhicules électriques. Beaucoup de pays membres ont d’ailleurs recours à ce type d’incitation. Pourtant, nous croyons également que ces incitations fiscales doivent être équitables et éviter la discrimination entre constructeurs automobiles ».

Plus encore, Valdis Dombrovskis argue que de conditionner de telles taxes à de l’approvisionnement local et au recours à des emplois syndiqués aux États-Unis, concentre le choix des consommateurs et entrerait directement en conflit avec les accords commerciaux de l’OMC, tout en portant préjudice aux Américains employés par des constructeurs européens.

C’est aussi dans ce sens que le Sénateur démocrate Joe Manchin, proche de la production de charbon en Virginie-Occidentale et détenant un vote clé, a déjà ironisé sur le « Build Back Better » en demandant une aide supplémentaire de 4 500 dollars pour les « mauvais Américains et les étrangers ».

Qu'en pense-t-on chez Clubic ?

Dans ces conditions, le coût des voitures électriques pourrait flirter avec le prix d’une moto d’entrée de gamme, et il est évident que Joe Biden rencontrera bon nombre de détracteurs, des pays d’Europe aux producteurs de pétrole américain, en passant par les Républicains. Il est donc difficile d'imaginer le Sénat valider le texte tel quel. Entre le budget pharaonique requis et les intérêts que le texte bouscule, en l’état le « Build Back Better » a des chances d'être modifié. Toutefois, Joe Biden l’a démontré, il est fin négociateur, on garde donc l'œil ouvert.